– Natalie ? Natalie ?
Cette voix me paraît familière... je l'ai déjà entendue quelque part.
– Natalie ? Natalie ? Répond moi s'il te plaît. Ne me laisse pas seul... j'ai besoin de toi.
C'est alors que je le rends compte que cette voix, n'est autre que celle d'Andrew...
J'ouvre les yeux.
Andrew se trouve à mon chevet, et me tient la main.
– J'ai cru que tu n'allais pas te réveiller... me dit-il, les larmes aux yeux. J'ai cru que je t'avais perdue...
– Ce n'est pas aujourd'hui que tu me perdra, je dis à Andrew pour le réconforter. J'en ai vécu des choses, si tu savais... le nombre de fois où j'ai cru que j'allais mourrir... Où suis-je ? je demande, en regardant tout autour de moi.
– Tu es en sécurité, chez des voisins des Eaton.
– Mais comment... ?
– Et bien, figures-toi que la voisine des Eaton n'est autre que Stacy.
– Stacy ? Je ne savais pas...
– Il se trouve qu'elle possède un double des clefs. Quand tu étais chez les Eaton, elle a apporté à manger, comme elle le fait tous les soirs, depuis qu'Evelyne n'est plus là.
– C'est Stacy qui prépare les repas de Marcus ? Alors qu'elle a déjà pas mal de trucs à faire... avec tous ses frères et sœurs...
– Tu sais, on est chez les Altruistes ici ...
– C'est vrai... si seulement tous les gens pouvaient être comme ça...
– Donc, comme tous les soirs, Stacy est venue apporter le repas qu'elle avait préparé pour Marcus. Lorsqu'elle a entendu un bébé qui pleurait, elle a cru que c'était Evelyne qui était rentrée. Elle est montée, afin de voir comment allait Evelyne, mais au lieu de cela, elle t'a trouvée inconsciente, allongée par terre. Elle t'a aussitôt reconnue et c'est arrangé pour me prévenir. Pendant que je me dépêchais de venir te rejoindre, elle s'est occupé du bébé. Je t'ai ensuite portée vers la maison de Stacy. Celle-ci nous a rejoint quelques minutes plus tard, avec le bébé. Elle a fait le ménage derrière toi pour ne laisser aucunes traces. Marcus ne se doute de rien...
– Où est le bébé ? je demande.
– Ne t'inquiète pas. Il est en bonne santé. Stacy s'occupe de lui.
Il me regarde tendrement.
– Je ne voulais pas que cela se déroule comme ça... je n'avais pas prévu qu'il naisse aujourd'hui. Normalement, c'était dans deux semaines...
– Tu avais calculé ? je m'exclame, surprise.
– Bien sûr ! Je m'étais arrangé pour pouvoir être présent... mais bon, c'est un peu trop tard...
– Ne t'inquiète pas. Je ne t'en veux pas de ne pas avoir été présent... ce n'est pas ta faute.
– Quand j'ai appris que je devais venir chez les Eaton, que c'était très urgent, que tu avais accouché seule, et que tu étais inconsciente, j'ai crus que j'allais devenir fou... Tu as été tellement courageuse... je suis fier de toi
Andrew enveloppe ma main entre les siennes.
– Tu te sens bien ?
– Je ne peux pas dire que je sois au meilleur de ma forme...
– C'est normal, tu dois être exténuée...
– Un peu... en tout cas, je me sens mieux que lorsque j'étais allongée par terre, dans la chambre de Marcus et Evely...
C'est alors que la porte s'ouvre, et que Stacy entre, un paquet dans les bras.
– Ah bah tu es réveillée ! s'exclame-t-elle. Je suis contente que tu ailles mieux. Quand je t'ai trouvée hier, il y avait une marre de sang autour de toi, et un bébé qui criait. Je l'ai lavé et habillé.
Je prends dans mes bras le paquet que me tend Stacy, dans lequel un bébé tout joufflu me regarde. J'ai du mal à réaliser que je tiens mon fils dans mes bras...
Le bébé se met soudain à pleurer. Je lui donne alors à manger.
– Je vais vous laisser en famille, déclare Stacy. Appelez-moi si vous avez besoin d'aide. Et ne nous inquiétez pas, je garde ça pour moi, ajoute-t-elle avec un clin d'œil.
– Merci pour tout, je dis à Stacy. Je ne te remercierai jamais assez.
– Ne t'inquiète pas. Chez les Altruistes, on s'entraide. Reposes-toi surtout, d'accord ?
Elle s'apprête à sortir de la pièce, quand elle s'arrête et se retourne.
– Ah oui, aussi... cela ne vous dérangerai pas de partir dans une demie-heure ? Non pas que je veuille vous mettre à la porte, mais avec mes frères et sœurs qui vont rentrer...
– Ne t'inquiète pas. Tu ne nous mets pas à la porte, la rassure Andrew. C'est plutôt nous qui usons de ton hospitalité. Promis dans moins de trente minutes, nous partirons et c'est comme si rien ne c'était passé. Encore merci !
Stacy nous sourit, puis sort de la pièce et referme la porte.
Une demie-heure plus tard, je suis installée chez nous, dans notre lit.
Andrew est aux petits soins pour moi. Il me demande toutes les dix minutes si je n'ai besoin de rien. Il a prévenu son travail que j'étais malade, et que par conséquent, il devrait rester quelques jours pour s'occuper de moi. Je m'en veux de le voir s'activer à faire le ménage et la cuisine, tandis que je suis allongée. Mais Andrew dit que cela ne le dérange pas du tout. Il est content et heureux que nous allions bien, le bébé et moi, et il ne veut pas que je fasse quoi que se soit.
– Tu dois te reposer, après tout ce que tu as vécu... déclare-t-il à chaque fois que je proteste.
Pour me divertir, et passer le temps, Andrew va me chercher des livres à la bibliothèque de la ville. Stacy vient souvent me rendre visite, ainsi que Judith, qui en profitent pour me raconter les potins, et autre.
Pendant que je suis alliée, j'ai réfléchi au Bureau du Bien-Être génétique. Faut-il que je les prévienne ? Et pareil pour Béatrice et Nadine ? Après avoir longuement réfléchi, j'ai décidé que je ne dirai rien au Bureau. Tout d'abord, si quelqu'un intercepte le message, je suis bonne pour la prison car je communique avec l'extérieur et que je suis une étrangère aux yeux du gouvernement, ensuite, je ne suis pas censés avoir déjà un enfant, étant mariée depuis cinq mois. J'annoncerai la naissance quand nous aurons recensé l'enfant à la mairie, pour limiter les risques.
Alors que nous étions en train de déjeuner, quelqu'un frappe à la porte. Andrew me jette un coup d'œil. Nous n'attendons personne... c'est peut-être Elisabeth, ou pire... un médecin qui voudrait vérifier comment je vais. Inquiet, Andrew se lève et part ouvrir la porte.
Je l'entend discuter avec quelqu'un, mais je ne vois pas la personne. Andrew revient après quelques minutes et me dit que c'était une fille Audacieuse. Je lui ai dit que tu étais malade et que tu dormais.
– Une fille audacieuse ? Tori ?
– Tu la connais ?
– C'était ma meilleure amie quand j'étais chez les Altruistes. C'est même grâce à elle que j'ai appris que j'étais enceinte.
– Ah bon ? Je ne savais pas, dit Andrew. Je vais la rattraper. Elle doit être encore dans les escaliers.
Andrew part en courant, et une minute plus tard, Tori se précipite pour me serrer dans ses bras.
– Comment tu vas ? Ça faisait longtemps... alors je suis venue prendre de tes nouvelles. Andrew, enfin, ton mari, est parti. Il en a profité pour aller chercher des papiers au travail. Il va bientôt revenir. Alors comme ça, tu es malade ?
– Non. Enfin, pas exactement...
– Comment... commence Tori, et son regard se pose sur mon ventre.
Elle pousse un petit cri, et me serre de nouveau contre elle.
– Le bébé est né ? Je suis trop contente pour toi !
– Tu n'étais pas au courant ? je demande.
– Non.
– Judith ne t'a rien dit ? Je lui avais demandé de te prévenir.
– Tu sais, je ne vais jamais dans le quartier des sans-factions, j'ai été mutée pour garder la Clôture.
– C'est vrai ! Félicitations !
– Merci beaucoup. Félicitations à toi aussi ! Alors, fais voir le petit ange...
Je lui montre mon fils, qui dort paisiblement sur le lit, et pendant ce temps.
– Il est trop chou ! On est d'accord que c'est un garçon ? me demande-elle.
– Oui, c'est un garçon. Il est très glouton.
– Ça ne m'étonne pas... ils sont toujours pareils les hommes... mais dis-moi, comment tu as fait pour accoucher... tu n'es quand même pas allée à l'hôpital ?
– Non... si j'allais à l'hôpital, je serais morte à l'heure qu'il est...
– Plutôt en prison...
– Oui, mais, comme je suis une étrangère...
– D'ailleurs, je me demandais... Andrew est au courant ? Le Bureau et tout ... ?
– Non, pas encore. J'attends le moment opportun pour lui dire. Après, j'ai peur qu'il ne me voit plus de la même façon.
– C'est Andrew... il est fou amoureux de toi ! Jamais il ne ferait ça.
– Tu as sans doutes raisons...
– Regarde, il t'a bien épousé.
– C'est vrai, j'avoue en repensant au plus beau jour de ma vie.
– Je veux tout savoir ! Le mariage, le bébé...
– Eh bien écoutes, c'est une longue histoire...
Je raconte à Tori les invités du mariage, et la naissance. Je me suis gardé de parler d'Evelyne. Elle a déjà pas mal de soucis, pas la peine de mêler Tori à cette histoire. Cette dernière serait capable d'aller rendre visite aux Eaton et de donner une bonne correction à Marcus.
– Comment s'appelle-t-il ? demande Tori, après qu'elle m'ait écouté.
– Nous n'avons pas encore décidé, dit une voix.
Andrew vient tout juste de revenir, des papiers dans les mains.
– Je me suis permis d'aller chercher deux, trois trucs à faire. Comme ça, je ne prendrai pas de retard, m'explique-t-il.
– Excusez-moi, dit Tori en regardant sa montre, mais il faut que j'y aille. Je ne voudrai pas avoir de pompes à faire en rentrant. Repose-toi bien surtout, ajoute-t-elle à mon intention. Je vous laisse discuter à propos du prénom.
Après nous avoir salué, elle repart en refermant la porte derrière elle;
– Tori a raison. Comment va-t-on appeler ce petit bout de chou ? demande Andrew en regardant tendrement le bébé dormir.
– Je t'avoue que je n'ai pas réfléchi. J'avais déjà un prénom si c'était une fille. Je voulais l'appeler Béatrice comme...
– Ta mère... termine Andrew.
J'hoche la tête.
Cela fait quelques temps que je réfléchissais à des prénoms. Un m'avait aussitôt paru évident. Béatrice ! Le prénom de celle que je considérais comme ma mère, qui m'a beaucoup aidé et qui m'a accueillie comme si j'étais sa fille.
– Ça tombe bien car moi j'ai un prénom pour un garçon, dit Andrew. J'avoue que ça fait longtemps que je l'ai trouvé. Tu te souviens de la fois où tu m'a annoncé que tu étais enceinte ?
– Oh oui je m'en souviens... j'avais passé du temps à écrire cette lettre ...
–Eh bien juste après, je me suis rendu à la mairie, afin de demander au plus vite la permission de t'épouser. L'homme qui m'a aidé s'appelait Caleb. J'aime beaucoup le prénom, et c'est grâce cet homme que nous sommes mariés. Alors je me disais...
– Caleb ? J'aime bien ! Bienvenu dans la famille mon petit Caleb, je dis en regardant mon fils.