«Start all over again».

By Preety__

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En effet, où que l'on aille, quoique l'on fasse ; le passé finit toujours par nous rattraper. More

umue.
babidi.
isatu.
binayi.
itanu.
isambombo.
bantu.
mutekete.
muanda mukulu.
tshitema.
dikumi.
dikumi ne umue.
dikumi ne babidi.
dikumi ne isatu.
dikumi ne binayi.
dikumi ne itanu.
dikumi ne isambombo.
dikumi ne muteke.
dikumi ne muanda mukulu.
dikumi ne tshitema.
makumi abidi.
makumi abidi ne umue.
makumi abidi ne abidi.
makumi abidi ne isatu.
makumi abidi ne binayi.
makumi abidi ne itanu.
makumi abidi ne isambombo.
makumi abidi ne mutekete.
makumi abidi ne muanda mukulu.
makumi abidi ne tshitema.
makumi asatu.
makumi asatu ne umue.
makumi asatu ne abidi.
makumi asatu ne asatu.
makumi asatu ne binayi.
makumi asatu ne itanu.
makumi asatu ne isambombo.
makumi asatu ne mutekete.
makumi asatu ne muanda mukulu.
makumi asatu ne tshitema.
makumi anayi.
makumi anayi ne umue.
talk.
makumi anayi ne asatu.
makumi anayi ne binayi.
makumi anayi ne itanu.
makumi anayi ne isambombo.
makumi anayi ne mutekete

makumi anayi ne abidi.

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By Preety__

@Preety__ 🧚🏾‍♀️

42

«Trouble coeur»
__



J'insère les clés de l'appartement dans la serrure, avant de tourner celle-ci puis ouvrir la porte.

L'avion a atterri en France à 5 heures 40. Le trajet de l'aéroport jusqu'ici m'a pris environ 40 minutes.

Il doit être 6 heures 30. Tout le monde dort. Surtout lui ce gros dormeur.

C'est l'occasion de lui faire une surprise ! Il ne s'y attendra pas c'est certain.

J'ouvre donc doucement la porte d'entrée, avant de glisser ma valise à l'intérieur puis refermer la porte.

Je laisse ma valise à l'entrée de l'appartement. Je dépose aussi les clés dans le récipient creux en bois de l'entrée, dédié aux clés. Puis j'emprunte le chemin en direction des chambres.

J'ouvre doucement celle du petit pour y jeter un coup d'œil. Qu'est-ce qu'il m'a manqué ce petit coeur.

Je ferme ensuite la porte, puis je me dirige vers celle de sa chambre. La fameuse...

J'étais sur le point de l'ouvrir quand je me rends compte que quelque chose cloche.

Il n'y a que deux chambres, dans cet appartement. Le salon est vide, il n'y a personne. La chambre du petit aussi est vide. Alors, il ne reste plus qu'une seule chambre où elle pourrait dormir.

Dans sa chambre, à lui.

Je fronce les sourcils.

Non, ce n'est pas possible. Il ne me ferait pas une chose pareille. Elle doit sûrement dormir dans le lit et lui sur un matelas au sol, étant gentleman.

Je ravale ma salive, l'appréhension tordant mon estomac dans tous les sens.

Je devrais ouvrir cette porte, je peux, je dois et je vais ouvrir cette porte. Toutefois, quelque chose me dit que dès lors que j'ouvrirai cette porte... tout ce que j'essayais de rebâtir s'effondra, à nouveau.

Tout ce que j'avais reconstruit depuis mon divorce, absolument tout, s'effondrera, dès lors que cette porte sera ouverte.

Ce sera la deuxième fois que mon édifice s'effondre, que mes efforts sont vains...

Ce sera la deuxième fois que je tomberai du haut de la tour. Mais ce que je redoute le plus, c'est que je ne survive pas à la chute, que mon coeur n'y survive pas.

Et si cet échec m'anéantissait ? Et si cet échec me brisait tellement que je ne pourrais plus jamais me reconstruire, pour le simple et unique fait que j'aie ouvert cette porte ?

Ai-je la force d'ouvrir cette porte ? Ou plutôt, ai-je la force d'affronter ce qu'il se trouvera derrière cette porte ?

C'est beaucoup trop dangereux, Bethany.

Mais... que serait une vie sans danger ? J'en ai besoin. J'ai besoin de savoir. Je dois savoir. Ou le reste de ma vie ne sera qu'un leurre, un mensonge, un mirage.

Je dois absolument découvrir ce qu'il se trouve derrière cette porte.

Je ravale donc ma salive, le coeur au bord des lèvres, battant à toute allure, si fort que je l'entends dans mes tympans.

La main ferme, contrastant avec mon corps tremblant, je la pose sur la poignée de la porte, que je baisse ensuite.

La porte s'ouvre doucement, dans un silence presque suspect. Mais ce silence n'était que le cadet de mes soucis quand mon regard s'est posé sur le lit, sur eux.

Ma poitrine s'est gonflée d'espoir, d'espoir jusqu'au dernier moment. D'espoir que tout ceci ne soit qu'une farce, d'espoir que tout ceci ne soit qu'un rêve, que je me réveillerai, que tout est faux.

Pourtant, quand j'aperçois sa main glisser le long de son torse nu, jusque sous le drap, en dessous de son bassin, je ne peux que voir la réalité en face.

Dès l'instant où il réagit par un grognement, je sens mon coeur se briser en milles morceaux.

Je sens littéralement mon coeur tomber au sol et se briser sous l'impact de la chute. J'entends ses morceaux s'entrechoquer et cogner le sol.

Je la sens, cette douleur vive dans ma poitrine, rugissant comme un lion, me brûlant comme un brasier. Je la sens, cette douleur qui me consume de toute part.

J'ai la sensation que mon être tout entier se déchire de part en part tant la douleur est insupportable. J'ai l'impression que mon âme vient de se faire couper comme on découpe en morceau une feuille de papier avec un ciseau.

Ce n'est pas seulement mon coeur qui est tiraillé, c'est ma personne toute entière. Mon esprit, mon âme, mon corps, tout mon être n'aspire qu'à une seule chose :

hurler de douleur.

Je tentais tant bien que mal de garder le contrôle sur moi-même, mais plus j'essayais et plus la douleur s'intensifiait.

Alors, j'ai décidé de céder, j'ai décidé de m'abandonner à la douleur,

j'ai décidé d'hurler.

Un hurlement assez fort pour réveiller les deux amants en sursaut. Tous deux semblent ne pas comprendre ce qu'il se passe, puis la femme dessine un sourire narquois et satisfait sur ses lèvres, tandis que l'homme reste dans une totale incompréhension, comme si mon hurlement n'avait pas lieu d'être.

Soudain, mon regard se cogne au sien, tout mon être martèle à ce contact visuel. Une part de moi souhaite le prendre dans mes bras et l'autre souhaite s'effondrer.

Car oui, comme je le redoutais, tout venait de s'effondrer.

Absolument tout ce que j'avais rebâti, venait de s'effondrer.

Absolument

tout.

__

Une journée plus tôt

















Je vérifie que j'ai absolument tout mis dans ma valise avant de la boucler. Je la redresse, je prends mon sac de cadeau pour ma famille ainsi que mon sac à bandoulière que je passe sur mon épaule.

Daiana apparaît dans l'encadrement de la chambre.

Daiana - Masta t'as fini ?

— Yes.

Je prends le temps d'appliquer du baume sur mes lèvres, je le range à sa place dans mon sac puis je tire ma valise en dehors de la chambre.

Daiana - Elle va me manquer cette chambre.

— Argh, t'es trop sentimentale on sait même pas pourquoi.

Daiana - Mais c'était trop bien ! Faudrait qu'on aille en Grèce avec les gars ce serait encore mieux !

— J'ai des vacances familiales à Montpellier perso donc je pense pas que ce sera possible. M'enfin bref, je suppose que tu veux une photo de souvenir ?

Elle sourit puis tape des mains.

Daiana - T'as tout compriiiis !

Daiana - Ornella mwasi salité yaka awa ! (Ornella, sale fille, viens ici !)

Ornella - On va se péta Daiana continue de m'appeler comme ça !

Daiana - J'arrêterai pas wesh. Ma chérie t'avais tes règles tu t'étais même pas lavée.

Ornella apparaît au bout du couloir après avoir monté les escaliers.

Ornella - C'est parce que c'était trop douloureux idiote.

Daiana - Ah mbaaaan ? Et quand tu courais pour manger la première t'avais pas mal ?

Ornella sourit nerveusement, lève son poing puis déroule son majeur comme un rouleau.

Ornella - Va te faire foutre.

Daiana - Je vais dire à tes enfants leur maman c'est une sale fille. Elle se lave même pas, beeeerk ! Tu changes même pas de caleçon, en période de règle en plus ! Harcheum !

Ornella - Eh règles ou pas je te saute dessus on va se régler c'est bon ?

Elle se met en position de combat, point devant le visage.

Ornella - Ton visage on dirait la pair de couille de Shrek.

J'éclate de rire.

Complètement barge celle-là, mais ça va pas ?!

À quelle heure on dit des trucs comme ça ?!

Daiana - Je suppose que tu les as bien léchées pour savoir à quoi elles ressemblent ses couilles.

Je ris davantage. Non mais n'importe quoi.

Ornella - Vu comme tu leur ressembles j'en viens même à me demander si ce serait pas Shrek ton father. (Père)

Daiana - Va te faire enculer.

Ornella - Et toi encore plus profond.

— C'est bon wesh. On t'a fait monter parce que comme Daiana c'est un bébé cadum elle veut faire une photo avec la chambre en guise de souvenir.

Ornella - Sia, bébé moins cher boye. Un bébé carrément je te trouve sur Wish.

Daiana - Ornella toi là, mh.

Je souris. Pire que chien et chat celles-ci c'est trop.

Ornella finit par s'approcher pendant que Daiana sort son téléphone de sa poche. Elle lève sa main, nous entrons tous dans le cadre et nous sourions.

Daiana - Kanga photo ! (Prends la photo)

— Buka kingo. (~ Fais la pose)

Ornella - To seka muke. (Rions un mpé)

Elle simule des rires.

Nous - Kanga selfie. (Prends le selfie)

Clic.

Daiana - Ekoti te.

Elle se met à danser tout en regardant la photo, en souriant.

— Bon allez fin de nostalgie. Rentrons chez-nous.

__

Nous avons fait quelques activités avant d'aller à l'aéroport. Pour ma part j'étais en train de discuter avec Luckaël (son collègue avocat que vous avez sûrement oublié 😭), Kelvyn et maman en même temps.

C'est pas fréquent que j'aie plusieurs conversations en même temps avec les gens.

Je suis une nana qui parle pas souvent en message. Genre je peux parler en message pour un truc t'as vu, mais les longues conversations qui durent des heures sans aucune raison là ? C'est mon délire pourtant mais je suis pas dans ça. Va savoir pourquoi.

Sauf avec Kelvyn, sinon mes conversations durent au maximum 1h et dans ce cas là c'est que je suis en train d'édifier quelqu'un, ou que la conversation est super passionnante.

En plus je prends pas l'initiative d'aller vers les gens en message. Tu peux être mon amie que je kiffe de ouf hein, mais si la distance nous sépare, je prendrais pas l'initiative de t'envoyer des messages, à moins que tu comptes énormément pour moi.

Je prendrais de tes nouvelles de temps à autre mais genre commencer des conversations comme ça, sans but précis ? J'y arrive pas.

Si t'es vraiment mon amie de tout coeur et tout, genre le sang, limite ma soeur, dans ce cas là je vais faire ce genre de conversation avec toi.

Sinon non. J'y arrive pas. En fait je m'en souviens pas. J'ai pas le réflexe de venir parler aux gens juste pour parler. Je sais pas pourquoi.

En mode j'ai pas un réveil dans la tête pour aller dans la conv et lancer des « Salut ça va ? » ou j'sais pas quoi. À moins que je veuille te dire quelque chose en particulier.

Et c'est tout le contraire de Daiana et Ornella. Elles vont t'envoyer des messages juste pour t'embêter. Quand Daiana envoie les taquineries, Ornella envoie les vannes. Et vice versa.

Ce qui fait qu'elles sont plus complices entre elles qu'avec moi. On s'aime beaucoup mais leur complicité est meilleure que la mienne avec chacune d'elles. Mais au moins avec elles le groupe n'est jamais silencieux.

Surtout avec Ethan dans le groupe qui s'amuse à envoyer des vidéos de lui où il danse. Il prend le téléphone de son père pendant qu'il est sous la douche et se met à se filmer en faisant des challenges, des balolas, danses de TikTok à la congolaise quoi.

Et il dead hein. Il a ça dans les reins le p'tit.

M'enfin bref. Je me lève du banc en ajustant mon cycliste.

Ornella - Tu vas où toi ?

Daiana - Mais poukoi tout temps t'es agressive oh ? Mais poukoi poukoi ?

Dit-elle avec la gestuelle. Je souris.

— Je reviens. Je vais m'acheter une bouteille d'eau fraîche.

Je les laisse se chamailler après ça puis je me dirige vers la petite boulangerie dans l'aéroport que j'avais repéré à notre arrivée ici.

J'étais tellement concentrée sur mon téléphone que je n'ai pas vu que je fonçais sur quelqu'un. Brutalement, je le bouscule et ma tête se cogne contre son torse.

Prise de surprise, je lâche mon téléphone d'entre mes mains et lâchant un «Aïe !».

L'homme en question sourit, légèrement gêné, puis s'abaisse pour récupérer mon téléphone.

Je l'observe tout le long. Il doit faire presque 30 degré Celsius et il porte un gilet, avec la capuche qui plus est ?

Il se relève puis me tend mon téléphone.

... - Désolé j'vous avais pas vu.

Je le remercie en le saisissant.

— Non, c'est de ma faute.

Je l'observe encore un peu, dubitative. Je vois à peine son visage. Il a mis sa casquette et a un peu trop baissé sa visière, de quoi camoufler ses yeux et une partie de son nez. Sans compter que la capuche fait encore plus d'ombre sur son visage. Je ne vois que ses lèvres bouger.

Il doit avoir quoi ? Une tête de plus que moi ?

Je le jauge du regard. À la façon dont il est baraqué on croirait qu'il vient de sortir de prison. Vous voyez les mecs qui se musclent en prison là ? Son gabarit est similaire au leur, voire semblable.

Alors que je le jaugeais, je remarque une chevalière à son annulaire.

Marié ?

Non. Ce n'est pas une bague de mariage. C'est plutôt une bague en genre d'argent vieilli, avec la lettre «𝕸» inscrite dessus. Elle ressemble à un héritage.

Il se racle la gorge, de quoi me sortir de mes pensées.

J'esquisse donc un faible sourire en le remerciant pour mon téléphone, puis je le contourne.

Je lui jète un dernier coup d'œil. Il est bizarre.

__

Nous venons tout juste d'atterrir. Je retire le truc que je mets sur mes yeux pour le ranger dans mes affaires.

J'ai à peine pu me reposer. Ma nausée était atroce et je ne faisais que vomir à chaque heure. Mawa trop pour la dame qui donne de la nourriture, je faisais que de lui demander des salades de fruits, des fraises bien garnies de chantilly et j'en passe.

Même moi je suis choquée du nombre de fruit que j'ai mangé.

J'étais en compagnie de Daiana quand nous sommes allés récupérer nos bagages.

Ornella - C'est ici qu'on se sépare les girls...

Je souris puis la prends dans mes bras.

— Pleure pas. C'est à croire qu'on se reverra jamais.

Ornella - Pourquoi pleurer ? Je verrais plus la meuf au visage qui ressemble aux couilles de Shrek chaque matin.

Daiana - Si tu penses que je vais te laisser. Rien que pour ça je viendrai sonner chez-toi tous les matins pour que tu vois ma face, connasse.

Ornella lui montre son majeur.

Ornella - Suck my ass, bitch.

Daiana lui adresse un long tchipe en roulant des yeux.

Daiana - Impolie de naissance.

Ornella - Gneugneu. Moi au moins je suis belle.

Daiana - Va dire ça aux bébés qui pleurent en voyant ta gueule.

Je ris. Elles vont me manquer ces deux-là.

— Vous ne vous arrêtez donc jamais ?

Ornella - C'est elle qui cherche là.

Daiana - Pardon ?! T'as commencé en disant que je ressemblais aux couilles de Shrek.

Ornella - Bah j'ai pas menti, c'est la vérité. Donc en l'occurrence je n'ai fait que dire la vérité alors c'est toi qui as commencé.

Daiana - Je vais t'encastrer dans un mur, la fille qui se lave pas quand elle a ses règles. Eh je vais dire à tata Miche, elle va bieeeeen te botter ! On verra si t'oublieras encore de te laver.

Ornella - Ose et je vais dire à ton frère que tu fantasmes sur Nathanaël.

Daiana - Déjà je fantasme pas sur lui ! Et si tu fais ça je te ferai manger mon caca idiote.

Je ris. Pire qu'elles franchement y'a pas.

Ornella - Tu vas boire ma pisse. Sia.

Daiana - Je vais tellement te- mhhhh !

Je viens de poser ma main sur sa bouche.

— Daiana tokeyi pardon ! Ornella appelle quand t'arrives ! (On y va !)

Ornella - Oui 'man.

Je parviens à nous éloigner d'elle même si Daiana luttait un peu.

Ornella - Au revoir couilles de Shrek !

La flic mord mes doigts. Je retire aussitôt ma main.

— T'es folle ?!

Daiana - Va avaler tes règles, sale fille !

Dit-elle en lui faisant un majeur.

Je la tchipe longuement puis saisis ses cheveux pour la tirer à ma traîne.

Une fois en dehors de l'aéroport, je lâche ses cheveux.

— Espèce de tarée. On crie pas comme ça en publique t'es folle ?! Et puis tu m'as mordu poufiasse.

Daiana - Tu veux un bisou magique bébé Rico ?

— Va te faire.

__

Le frère de Daiana est venu nous chercher. Je lui ai demandé de me déposer en bas de chez Kelvyn. Personne ne m'attend chez-moi et honnêtement, j'ai trop envie de le voir.

Maman et les autres ont déjà pris le train vers Montpellier. Ils doivent être arrivés d'ailleurs.

M'enfin bref.

Je fais passer le badge puis j'entre dans le bâtiment. Je me retrouve rapidement à l'étage de Kelvyn.

J'insère les clés de l'appartement dans la serrure, avant de tourner celle-ci puis ouvrir la porte.

L'avion a atterri en France à 5 heures 40. Le trajet de l'aéroport jusqu'ici m'a pris environ 40 minutes.

Il doit être 6 heures 30. Tout le monde dort. Surtout lui ce gros dormeur.

C'est l'occasion de lui faire une surprise ! Il ne s'y attendra pas c'est certain.

J'ouvre donc doucement la porte d'entrée, avant de glisser ma valise à l'intérieur puis refermer la porte.

Je laisse ma valise à l'entrée de l'appartement. Je dépose aussi les clés dans le récipient creux en bois de l'entrée, dédié aux clés. Puis j'emprunte le chemin en direction des chambres.

J'ouvre doucement celle du petit pour y jeter un coup d'œil. Qu'est-ce qu'il m'a manqué ce petit coeur.

Je ferme ensuite la porte, puis je me dirige vers celle de sa chambre. La fameuse...

J'étais sur le point de l'ouvrir quand je me rend compte que quelque chose cloche.

Il n'y a que deux chambres, dans cet appartement. Le salon est vide, il n'y a personne. La chambre du petit aussi est vide. Alors, il ne reste plus qu'une seule chambre où elle pourrait dormir.

Dans sa chambre, à lui.

Je fronce les sourcils.

Non, ce n'est pas possible. Il ne me ferait pas une chose pareille. Elle doit sûrement dormir dans le lit et lui sur un matelas au sol, étant gentleman.

Je ravale ma salive, l'appréhension tordant mon estomac dans tous les sens.

Je devrais ouvrir cette porte, je peux, je dois et je vais ouvrir cette porte. Toutefois, quelque chose me dit que dès lors que j'ouvrirai cette porte... tout ce que j'essayais de rebâtir s'effondra, à nouveau.

Tout ce que j'avais reconstruit depuis mon divorce, absolument tout, s'effondrera, dès lors que cette porte sera ouverte.

Ce sera la deuxième fois que mon édifice s'effondre, que mes efforts sont vains...

Ce sera la deuxième fois que je tomberai du haut de la tour. Mais ce que je redoute le plus, c'est que je ne survive pas à la chute, que mon coeur n'y survive pas.

Et si cet échec m'anéantissait ? Et si cet échec me brisait tellement que je ne pourrais plus jamais me reconstruire, pour le simple et unique fait que j'aie ouvert cette porte ?

Ai-je la force d'ouvrir cette porte ? Ou plutôt, ai-je la force d'affronter ce qu'il se trouvera derrière cette porte ?

C'est beaucoup trop dangereux, Bethany.

Mais... que serait une vie sans danger ? J'en ai besoin. J'ai besoin de savoir. Je dois savoir. Ou le reste de ma vie ne sera qu'un leurre, un mensonge, un mirage.

Je dois absolument découvrir ce qu'il se trouve derrière cette porte.

Je ravale donc ma salive, le coeur au bord des lèvres, battant à toute allure, si fort que je l'entends dans mes tympans.

La main ferme, contrastant avec mon corps tremblant, je la pose sur la poignée de la porte, que je baisse ensuite.

La porte s'ouvre doucement, dans un silence presque suspect. Mais ce silence n'était que le cadet de mes soucis quand mon regard s'est posé sur le lit, sur eux.

Ma poitrine s'est gonflée d'espoir, d'espoir jusqu'au dernier moment. D'espoir que tout ceci ne soit qu'une farce, d'espoir que tout ceci ne soit qu'un rêve, que je me réveillerai, que tout est faux.

Pourtant, quand j'aperçois sa main glisser le long de son torse nu, jusque sous le drap, en dessous de son bassin, je ne peux que voir la réalité en face.

Dès l'instant où il réagit par un grognement, je sens mon coeur se briser en milles morceaux.

Je sens littéralement mon coeur tomber au sol et se briser sous l'impact de la chute. J'entends ses morceaux s'entrechoquer et cogner le sol.

Je la sens, cette douleur vive dans ma poitrine, rugissant comme un lion, me brûlant comme un brasier. Je la sens, cette douleur qui me consume de toute part.

J'ai la sensation que mon être tout entier se déchire de part en part tant la douleur est insupportable. J'ai l'impression que mon âme vient de se faire couper comme on découpe en morceau une feuille de papier avec un ciseau.

Ce n'est pas seulement mon coeur qui est tiraillé, c'est ma personne toute entière. Mon esprit, mon âme, mon corps, tout mon être n'aspire qu'à une seule chose :

hurler de douleur.

Je tentais tant bien que mal de garder le contrôle sur moi-même, mais plus j'essayais et plus la douleur s'intensifiait.

Alors, j'ai décidé de céder, j'ai décidé de m'abandonner à la douleur,

j'ai décidé d'hurler.

Un hurlement assez fort pour réveiller les deux amants en sursaut. Tous deux semblent ne pas comprendre ce qu'il se passe, puis la femme dessine un sourire narquois et satisfait sur ses lèvres, tandis que l'homme reste dans une totale incompréhension, comme si mon hurlement n'avait pas lieu d'être.

Soudain, mon regard se cogne au sien, tout mon être martèle à ce contact visuel. Une part souhaite le prendre dans mes bras et l'autre souhaite s'effondrer.

Car oui, comme je le redoutais, tout venait de s'effondrer.

Absolument tout ce que j'avais rebâti, venait de s'effondrer.

Absolument

tout.

Kelvyn se lève de son lit, laissant tomber le drap au sol. Il était en boxer, assez moulant d'ailleurs, et il ne semblait même pas s' en rendre compte.

Qu'est-ce qu'il foutait en boxer dans son lit avec cette femme ?

L'inquiétude déchirait son visage.

Il ouvre la bouche. Je vois ses lèvres bouger mais n'entends rien de ce qu'il dit. C'est comme si je me noyais sous l'eau et que sa voix venait de la surface.

Ce n'est que quand sa main s'est déposée sur ma joue que j'ai eu un déclic. Je l'ai violemment poussé, si fort qu'il a fait quelques pas en arrière. Lui qui, normalement, n'aurait pas bougé d'un pouce.

Kelvyn - Qu'est-ce qui t'arrives putain ?!

Je hausse les sourcils de surprise. Il me pose sérieusement la question ?

Je sens littéralement cette douleur perspicace se transformer en rage, en colère. Une colère telle que je n'en ai jamais ressentie.

— Qu'est-ce qu'il m'arrive ? Qu'est-ce qu'il m'arrive ?! Non mais tu te fous de moi ?! Je te trouve en pleine nuit à moitié nu dans le lit avec cette grosse allumeuse et tu me demandes vraiment ce qu'il m'arrive ?! La nana te caresse sous ton sommeil, t'es bien heureux et tu me demandes ce qu'il m'arrive Kelvyn ?! Vraiment ?! Tu veux que je t'en colle une ou quoi ?!

Il fronce ses sourcils, comme s'il était en train de réaliser dans quelle position il était.

Kelvyn - ...c'est pas ce que-

Je lève ma main pour l'interrompre.

— Ô que si c'est ce que je crois ! Et tu ne vas me dire le contraire ! Je sais ce que j'ai vu, je sais ce que j'ai entendu ! Ce que j'ai vu c'est l'homme que- que j'aime en train de se faire tripoter par une putain qui s'fait passer pour une assistante sociale ! Je sais pertinemment ce que j'ai vu Kelvyn ! J'ai vu tout ce que j'essayais de construire avec toi s'effondrer. Tout l'espoir, l'amour et la confiance que j'ai mis en toi s'effondrer. Pour quoi ? La paire de cul d'une salope qui n'sait même pas se respecter !

Je grince des dents, puis je me mets à applaudir en riant nerveusement.

— Franchement vous vous êtes bien trouvés. Niveau dignité vous faites la pair. Tu sais quoi ? Retourne lui péter le cul comme tu le faisais, ça devrait vous faire du bien à tous les deux.

... - ...pour le coup, ouais que ça fait du bien.

— Pardon ?

... - La meuf qui ne se respecte pas vient de te dire que ça fait du bien. Il en a une bien longue ton... ton quoi ? Ton mari ? Oh, non, ni toi ni lui n'avez la bague au doigt. Alors quoi ? Ton fiancé ? Non plus. Ton copain ? *rire* J'suppose que c'est plutôt ton exe après la nuit qu'on vient de passer.

J'hallucine...

Je suis en train d'halluciner...

Ce qui me pique c'est qu'elle a raison. Et le fait qu'elle ait raison me pique encore plus.

J'ai juste envie de l'encastrer dans un mur et la noyer dans du béton cette aguicheuse. Mais j'ai un minimum de respect pour moi-même. Je ne me bats pas et encore moins pour un homme qui ne me considère pas.

Je ravale difficilement ma salive, refoulant mes larmes.

— T'as raison. C'est mon ex-copain. On n'est plus en couple. Faites ce que bon vous semble tous les deux. Les chacals sont faits pour être ensemble.

Je dévie le regard en sentant celui de Kelvyn insister sur moi. Je ne sais même pas pourquoi il me regarde comme ça. Après tout c'est lui qui a fauté. C'est lui qui a tord. Alors pourquoi ce serait à moi de baisser les yeux ?

Je finis par tourner les talons en sentant que ma présence était de trop, ou plutôt en sentant que mon coeur allait bientôt me lâcher.

J'étais sur le point de franchir la porte quand la voix de Kelvyn sonne comme une accusation sanglante.

Kelvyn - Tu vas vraiment la croire, elle ? Vraiment ?

Je m'arrête devant la porte, ne lui offrant que mon dos pour vue.

Kelvyn - Tu ne prends même pas la peine de m'écouter, même pas la peine de prendre ma version en compte. Je pensais que j'avais plus d'importance à tes yeux qu'ça.

— À quoi bon ?

Crache-je.

— La scène que j'ai vu parle à ta place Kelvyn. Tu auras beau parler tout ce que tu diras sonnera comme un mensonge. Non pas parce que tu n'as pas d'importance à mes yeux, mais parce que mes yeux savent ce qu'ils ont vu. Peu importe ce que tu diras ne pourra pas les contredire.

Kelvyn - Qui a dit que je te contredirai ?

Oh mon Dieu. Mon cœur.

Pas ça. Pas ça, pas encore.

Et s'il s'apprêtait tout simplement à confirmer ce que sa salope venait de dire ? Et s'il s'apprêtait à me cracher au visage qu'il a pris du plaisir à la soulever, qu'il a aimé et qu'il recommencera dès que je franchirai cette porte ?

Je sens ses pas s'approcher de moi. Plus ils s'approchent, plus mon coeur martèle. Plus ils s'approchent, plus mes jambes flageolent.

J'ai la sensation que je peux m'effondrer d'un instant à l'autre.

Kelvyn - Je ne contredis en rien ce que tes yeux ont vu Bethany...

C'est bizarre. J'ai la sensation que mon coeur va exploser de chagrin, de colère, de frustration, d'amertume, mais entendre sa voix prononcer mon prénom sonne toujours comme une mélodieuse harmonie.

Beaucoup trop paradoxal, contradictoire.

Kelvyn - Ce que je contredis, c'est ce que tu imagines, ce que tu conclus de cette image. Tu l'sais, j'ai toujours la tête sur mes épaules.

— ...où veux-tu en venir ?

Kelvyn - Si j'avais couché avec cette meuf j'm'en souviendrai.

Coup de marteau dans le ventre.

J'ai l'impression que je vais vomir.

Kelvyn - Je me souviens de chaque instant de la nuit qu'on a passé ensemble. Ta voix, tes caresses, tes supplications, ton regard, le contact de ta peau sur la mienne, ton souffle sur le mien... Je me souviens d'absolument de tout et je n'oublierai jamais.

Je m'en souviens, moi aussi. De tout.

Kelvyn - Alors comment veux-tu que je n'ai pas le moindre souvenir d'une nuit passée avec cette femme ? Pas le moindre Esther. Nous n'avons rien fait. Je te mets mes couilles à couper qu'elle et moi on n'a rien fait.

J'entends la femme ricaner. Je fronce les sourcils. Elle était sur le point de parler mais je réplique avant elle.

— Qu'est-ce qu'elle faisait dans ton lit alors ? Qu'est-ce que tu faisais en caleçon ? Tu dors toujours avec un short de sport, pourquoi t'es en caleçon ? Pourquoi elle est à moitié nue, elle aussi ? Et qu'est-ce que sa main foutait sur ton intimité ? Je t'ai entendu, t'as grogné. Je ne suis pas folle.

Kelvyn - J'pensais que c'était toi. J'ai pas le sommeil léger. J'ai simplement senti une main et j'ai aussitôt cru que c'était toi.

— C'est ça ouais. Ne me prends pas pour une cruche Kelvyn.

Kelvyn - J't'ai déjà pris pour une cruche moi ? Regarde-moi.

Je n'en fais rien.

Kelvyn - Regarde-moi Bethany.

Plus jamais de ma vie.

Je sors en trombe de sa chambre. Vaut mieux pour moi que je sorte d'ici avant que je ne perde le contrôle. Je refuse de m'effondrer devant lui, devant elle. Devant eux. Je refuse. Je n'ai pas le droit de pleurer.

Tu n'as pas le droit de pleurer Bethany. Tu n'as pas le droit de pleurer. Redresse-toi. Lève la tête. Sois digne. Ne pleure pas.

Ne pleure pas. Ne pleure pas. Ne pleure pas. Ne pleure pas.

Je traverse le couloir en me répétant cette phrase dans la tête. J'entendais clairement les pas de Kelvyn à ma suite, j'entends sa voix m'ordonner de le regarder mais je refuse.

Je ne veux plus jamais voir sa face.

Les hommes sont tous pareils. Tous des menteurs, des manipulateurs. Tous des escrocs.

Je le lui avais dit. Je lui avais dit au départ que s'il savait déjà qu'on n'allait pas aller loin, construire quelque chose de solide, qu'il me laisse avant que je ne m'attache trop à lui. S'il comptait me blesser, qu'il trouve une autre proie car j'étais déjà trop blessé intérieurement.

Il m'a assuré qu'il n'avait pas de mauvaises intentions envers moi. Qu'est-ce qui a changé entre-temps ?

Daniel, puis Kelvyn. Qui sera le prochain ? C'est moi qui suis maudite et qui ne sais pas gérer un homme ?

Quoi, je les satisfais pas ou quoi ? Je cuisine mal ? Je suis trop gentille ? Trop naïve ? Pas assez drôle ? Pas assez divertissante ?

Qu'est-ce que je n'ai pas qui les pousse tous à fuir ? Qu'est-ce que je n'ai pas qui les pousse tous à aller voir à ailleurs ?

Qu'est-ce que je n'ai pas pour qu'un homme reste à mes côtés ? Pourquoi ? Je suis si ratée que ça ?

Je suis un échec, c'est ça ?

Je vais finir par croire que c'est le cas. J'échoue dans tout ce que j'entreprends, absolument tout.

Même construire une vie de famille sur le roc je n'y arrive pas.

(Le roc c'est Jésus mgl)

Je lève les yeux au plafond en sentant mon coeur davantage se déchirer. Le problème c'est moi, pas eux.

Au lieu d'être un aimant à stabilité je suis un aimant à problème, à catastrophe, à échecs.

Échec.

Échec.

Échec.

Échec.

Kelvyn - Bethany bordel !

Je sens une main sèchement s'enrouler autour de mon poignet. Il me tire comme une vieille chaussette en sa direction, puis s'empare de mes bras pour ensuite me plaquer contre le mur.

Kelvyn - Pourquoi tu réponds pas quand je t'appelle ?! Tu comptes aller où là ?! On n'a pas fini de parler !

Je dévie le regard.

Il me dégoûte.

Je me dégoûte.

Cet homme est mon œuvre. Je comptais bâtir un empire avec lui, un vrai château, une vie de rois.

Mais voilà que j'ai échoué.

Le regarder dans les yeux serait comme regarder mon échec dans les yeux, réaliser mon échec en pleine face.

Kelvyn - Regarde-moi !

Je sens ma gorge se nouer.

Kelvyn - Regarde-moi putain !

Dit-il en tapant le mur, le poing près de mon visage.

Je ne sursaute même pas. J'ai beau être déçue, je le connais. Du moins je pense le connaître. Et je sais qu'il ne me ferait pas de mal. Ni à moi ni à aucune femme.

Du moins, pas physiquement.

Sa respiration s'accélère, il semble être frustré que je ne le regarde pas. Sa respiration devient hachée, irrégulière.

Il grogne de frustration, puis s'empare sèchement de ma mâchoire pour la diriger vers son visage.

J'essayais de me libérer de son emprise mais il serrait trop fort.

J'ai donc fini par croiser mon regard avec le sien. Dès l'instant où mes yeux se cognent aux siens, je m'effondre. Je sens mes larmes rouler sur mes joues sans la moindre retenue, mes jambes flageoler à tel point que je pourrais tomber à n'importe quel instant.

Mes lèvres se sont mises à trembler. Ma gorge se nouait beaucoup trop fortement, je n'arrivais même pas à parler. Tout ce que je faisais était sangloter. Sangloter, renifler, pleurer de douleur.

Je décelais de la compassion de son regard, du regret. Mais je n'en faisais rien.

Il n'était qu'un menteur, un manipulateur. Ses rêves d'avoir un enfant avec moi étaient un leurre.

...et pourtant c'est le cas.

Soudain, il rapproche son visage du mien jusqu'à coller son front contre le mien.

Ses deux mains s'emparent de mes joues pour chasser mes larmes, mais elles reviennent en rigueur, avec violence.

Je sentais ses lèvres s'approcher des miennes mais j'étais incapable de réagir. La douleur me paralysait.

Il finit donc par les coller sur les miennes, inactives. Il les scelle le temps de quelques secondes, comme s'il cherchait à partager ma douleur avec la sienne, à récupérer ma douleur pour qu'elle soit plus légère à porter.

Mais ça ne changeait rien. C'était toujours aussi douloureux, toujours aussi pesant.

Il les sépare puis ancre son regard dans le mien, embué. Et du bout du souffle, il susurre.

Kelvyn - ...pardonne-moi...

Je n'arrive même pas à parler. Cette douleur qui me déchire le coeur de part en part ne fait que s'intensifier. Comme si quelqu'un s'amusait à crever mon coeur, encore et encore.

Est-ce une douleur éphémère ? Ou bien je la sentirai pour l'éternité ?

Ange - Jésus peut te restaurer.

Kelvyn - Pardonne-moi Esther... Pardonne-moi de t'avoir blessé. Je te demande pardon.

J'esquisse un sourire crispé.

...si seulement. Si seulement je le pouvais.

Il sèche à nouveau mes larmes qui continuent de couler à flot.

Kelvyn - Je te l'assure, je n'ai aucun souvenir d'une nuit passée avec elle. Je te l'assure. J'aurai jamais pu t'faire ça. Pas à toi... pas à nous.

Kelvyn - Il faut que tu me crois princesse...

Ses yeux semblent briller eux aussi. Il va pleurer ? Improbable.

Il esquisse un faible sourire au coin, tout en passant une main sur mon visage dans une légère caresse, si légère que je pourrais ne pas la sentir.

Il semble m'observer comme si j'étais le joyau de son cœur. Le joyau qu'il vient de briser, de casser.

Je ne savais pas qu'un joyau était si fragile...

Kelvyn - Si tu savais... *rictus* Tu occupes toutes mes pensées, absolument toutes. Le vide que tu as laissé derrière toi quand t'es partie était trop grand pour être réel. Jamais personne ne m'a autant manqué que toi, si ce n'est Ethan. Je comptais les jours en espérant te revoir plus tôt que prévu. Le décalage horaire nous empêchait de nous appeler quand bon nous semblait, alors j'écoutais tes vocaux pour ne pas oublier ta voix.

Kelvyn - C'était dix jours assez banals pour toi peut-être, mais pour moi ils semblaient interminables. Jamais je n'aurai pu coucher avec une autre femme que celle que j'aime putain. Il faut que tu le comprennes.

— Comprendre quoi exactement ?

Crache-je du fond de ma gorge. Cette question s'était frayé un chemin dans le noeud de ma gorge jusqu'à s'en échapper.

Kelvyn semble troubler. Il recule légèrement, me détaille du regard, avant d'à nouveau se lover contre moi.

Si la douleur n'était pas si intense peut-être aurais-je remarqué que la notion d'espace vital n'existe plus en cet instant.

Il enfuie doucement son nez dans mon cou. Je le sens humer mon parfum. Son torse se colle à ma poitrine comme s'il avait peur que je ne lui échappe, comme s'il voulait être le plus proche de moi que possible.

Dans un réflexe corporel, je dépose ma main sur sa nuque. Mon corps réagit au sien sans demander l'avis à mon esprit.

J'étais sur le point de retirer ma main quand elle a touché sa nuque, mais il la re-déposée dessus.

Mon corps frissonne quand son souffle effleure mon cou, quand son nez effleure ma clavicule, quand ses lèvres s'y dépose.

Mon cœur bat tellement fort. Je veux qu'il s'éloigne. Je veux qu'il parte le plus loin possible de moi ! Je veux qu'il s'en aille !

Mais mon corps ne réagit pas à mes ordres. Mon corps se love contre le sien.

Ses baisers sont comme une caresse pour mon corps, et comme une brûlure pour mon coeur.

Pourquoi est-ce que je suis autant partagée ? Mitigée ?

Pourquoi mon corps ne réagit pas ?

Kelvyn retire doucement sa tête de mon cou. Son regard descend doucement vers mes lèvres. Puis sans que je m'y attende, il s'y happe avec rigueur.

Mon corps réagit aussitôt. Corps de merde !

Mes bras s'agrippent à ses épaules avec violence, mes lèvres se happent aux siennes comme si elles avaient peur qu'elles s'en aillent.

Quand son torse se colle si fort au mien que je pourrais manquer de souffle, et que ses mains se dépose sur ma taille, je sens un brasier s'allumer en moi.

J'ai la sensation que le mot « passion » lui-même traverse chacune de mes veines, chacune de mes globules rouges jusque mes cellules les plus microscopiques.

Je sens un feu d'artifice retourner mon ventre. Mon cœur martèle de rage, de tristesse. Il me vibre de le pousser le plus loin possible, mais mon corps s'agrippe à lui comme à une bouée de sauvetage.

Ma main glisse à l'arrière de sa tête pour appuyer dessus et intensifier le baiser. J'ouvre mes lèvres après que sa langue ait demandé l'accès à ma bouche. Je sens nos langues s'entrelacer, se caresser, s'emmêler, et ce contact ne fait qu'accentuer ce brasier en moi.

Ma seconde main descend sur son torse et le caresse tandis que mon dos se cambre, et ma poitrine se colle à lui.

Repousse-le ! Repousse-le Bethany ! Repousse-le !

J'avais beau me hurler cette phrase, je ne faisais que davantage me coller à lui.

À chaque contact fougueux de nos langues, une émotion se transmettait.

La peine, la joie.

La douleur, la passion.

La rancoeur, la douceur.

La colère, l'amour.

Nos respirations s'accéléraient, nos cœurs martelaient au même rythme, nos corps se comblaient, s'assemblaient comme s'ils avaient été façonné pour être ensemble.

Ce baiser semblait tout aussi fougueux que destructeur, tout aussi passionnant que blessant.

Aucun de nous ne souhaitait se détacher de l'autre. Nos corps s'appelaient l'un l'autre, s'attiraient l'un l'autre.

Mais, il finit par rompre le baiser, dans une lenteur tellement exagérée qu'on croirait qu'il le faisait à contrecœur.

Mon regard s'ancre dans le sien, et mon esprit me répète de le repousser.

J'étais sur le point de le faire quand son murmure atteint mes oreilles dans un foudroiement cinglant.

Kelvyn - ...tu... tu dois comprendre que je t'aime...

J'écarquille mes yeux.

Il m'aime ? Kelvyn ?

Non, encore un mensonge. C'est un mensonge.

Vois la réalité en face Bethany, il t'aime...

pas.

C'est un mensonge. C'est faux.

Regarde-le. Repense à tout. Quelqu'un qui ne t'aimerait pas agirait comme ça envers toi ?

C'est un manipulateur. Il ment. Il ment. Il ment !

Personne ne peut m'aimer. Personne ne m'aime. Qui peut m'aimer ? C'est littéralement impossible de m'aimer. Je suis l'échec en personne, sa représentation, sa définition. 

Quand on veut parler d'un échec on dit « Bethany ».

Impossible qu'il m'aime.

Je secoue négativement.

— ...tu mens.

Vue son expression faciale, il semble peiné.

— Tu mens.

Kelvyn - C'est la vérité. Je t'aime Esther. C'est dit. Je t'aime. Je t'aime quand tu pleures. Je t'aime quand tu t'énerves. Je t'aime quand tu hurles. Je t'aime quand tu ris. Je t'aime que m'embrasses. Je t'aime quand tu me touches. Je t'aime quand je te vois. Je t'aime quand je te fais l'amour. Je t'aime quand tu me regardes. Je t'aime quand tu me souris. Je t'aime quand tu respires. Chaque cellule de mon être t'aime. J'sais pas comment mieux te le dire que ça... Je t'aime.

Je devrai être soulagée... ?

Mais cette chose dans mon coeur... cette voix dans ma tête...

Kelvyn - ...réponds-moi. Dis quelque chose. N'importe quoi mais ne te tais pas.

J'esquisse un sourire, un très faible sourire.

J'ai senti l'espoir naître en moi, le sien par la même occasion dans. son regard, ne fut-ce qu'une seconde, quand l'image de leur corps dans le lit revient comme un rappel dans ma mémoire. Un rappel qui me dit « Tu ne peux pas lui faire confiance ! Tu ne peux pas le croire ! Il t'a blessé ! Il t'a menti ! Il t'a trahis ! ».

Mon sourire a donc fini par s'effacer.

J'ai pris un air impassible. Un air neutre. Il fronce légèrement ses sourcils d'incompréhension.

Je dépose mes mains sur son torse, ancre mon regard dans le sien, puis avec une légère pression, je le repousse.

Il fait un pas, puis deux, puis trois en arrière, le regard plein d'incompréhension.

Je ravale ma salive. Mon cœur martèle si fort que je l'entends dans mes tympans. Mes mains tremblent et ma gorge me fait mal.

— Je...

Je prends une bouffée d'air. Vas-y, dis-le Esther.

— ...pour ma part, je ne t'aime plus.

La lueur dans ses yeux s'éteint aussitôt. Lui qui était plein d'espoir, d'incompréhension, il pend un air tout aussi impassible que le mien. Il met lui aussi un masque sur son visage.

Kelvyn - Répète.

— Je ne t'aime plus Kelvyn. Je ne t'aime plus.

Kelvyn - Encore.

À quoi il joue ?

— ...je-

Kelvyn - Dis-le encore Esther. Dis-le fond de ta pensée. Allez.

À quoi est-ce qu'il joue ?

Kelvyn - Dis-le !

Comme si mon coeur cherchait à le blesser autant qu'il l'était, il finit par cracher cette phrase cinglante qui marque la fin de tout.

La fin de nous.

— Je ne t'ai jamais aimé.

Il esquisse un faible sourire, puis rit nerveusement en hochant la tête.

Il se met à gratter sa barbe en riant nerveusement, puis il fait un pas en arrière.

Je ne l'ai jamais vu dans cet état. Il est comme... je ne sais pas.

Kelvyn - Va-t-en.

Je n'en fais rien.

Kelvyn - Sors d'ici. Dégage. Dehors. Dehors !

Il est blessé.

C'est ce que mon coeur voulait. Pourquoi est-ce qu'il ne s'en réjouit pas ? Pourquoi est-ce qu'il n'est pas heureux ?

Je voulais le blesser autant qu'il m'a blessé. Alors pour ne suis-je pas satisfaite ?

Il s'empare violemment de mon poignet puis me tire à l'entrée de son appartement.

Kelvyn - Putain prends tes affaires et casse-toi !! Casse-toi d'là ! Dégage et ne reviens plus jamais !

Dégage... dégage de chez-lui, ou de sa vie ?

Kelvyn - SORS !!

Je sursaute légèrement. Je m'empare de mes affaires en sentant mes larmes couler sur mes joues. Même énervé il ne m'a jamais parlé ainsi.

Il est pire qu'énervé. Il est blessé. Profondément blessé.

Je finis donc par récupérer mes affaires et par sortir de chez-lui. J'étais en train de me tourner pour le regarder une dernière fois mais il me claque sa porte au visage.

Le son de la porte se claquant résonne en moi comme une insulte. Toute cette scène, tout ce qui vient de se passer résonne en moi, ne fait que tourner en boucle dans ma tête.

C'est en trans que je monte dans l'ascenseur. Puis, dès que les portes se ferment, je me glisse jusqu'au long de la paroi, le dos de ma main tremblante collée contre ma bouche.

J'ai le coeur au bord des lèvres. Je vais vomir.

Mais cette sensation n'est rien comparé à ce que je ressens. Comparé à ce que je viens de faire.

Quand je réalise enfin ce que je viens de faire, j'éclate en sanglot. Rien ne pourrait soulager cette douleur que je ressens. Je ne fais que pleurer.

La main contre ma bouche pour retenir mes sanglots, je cède la place de la colère au chagrin.

Qu'est-ce que j'ai fait ?

Qu'est-ce que j'ai fait... ?

__

Mes larmes avaient cessé de noyer mes joues depuis une dizaine de minutes, mais mon coeur était toujours dans le même état.

Depuis que j'ai quitté son appartement, je ne cesse de me demander ce qu'il m'a pris de lui cracher ça au visage.

J'étais blessé. Alors j'ai voulue le blesser en retour, qu'il ressente ce que je ressente, ou plutôt un sentiment similaire au mien. Mais au lieu de ça... j'ai tout détruit, absolument tout.

J'aurai pu essayer de re-rebâtir quelque chose sur nos débris, mais à la place, j'ai brûlé ces débris pour qu'il n'en reste que poussière.

Comme on ne peut bâtir un empire sur ses débris, on ne peut encore moins en bâtir un sur de la poussière.

Tout est fini.

Tout est fini.

Il n'y a plus de « Tout recommencer », « Repartir à zéro », « Ouvrir une nouvelle porte » ou alors « Tourner la page », puisque tout est fini.

C'est le coeur lourd que j'insère mes clés dans la serrure. Je tourne celle-ci, mais elle se bloque.

Je fronce les sourcils. Comment... ? La serrure devrait tourner deux fois avant de bloquer et que la porte ne s'ouvre. Je suis pourtant certaine d'avoir fermée la porte à double tour.

Alors qui est venu chez-moi ? Les seuls qui ont les clés de chez-moi n'y sont pas venus. Et si jamais... Kelvyn était venu, vu comme il est minutieux, il aurait fermé la porte à double tour et vérifié trois fois si elle est bien fermée.

Donc, qui s'est introduit chez-moi ?

Je soupire. Je devrais peut-être appeler la police, mais c'est sûrement rien de grave. Peut-être que c'est le gardien de l'immeuble. Et puis, ma curiosité vient de monter en flèche.

Je finis donc par ouvrir la porte. Personne.

Je retiens ma respiration, comme si j'essayais d'être la plus silencieuse possible, puis je franchis la porte d'entrée.

Je traverse le couloir en veillant à rester la plus silencieuse possible. Je fais en fait le tour de l'appartement, et je ne trouve personne. Je soupire puis me dirige donc vers ma salle de bain pour me laver les mains. Je viens de l'extérieur après tout.

J'entre dans la pièce tout en me ressassant cette scène avec Kelvyn. J'ouvre le robinet quand j'entends un objet rouler au sol. Je fronce les sourcils puis je baisse les yeux vers l'objet.

Qu'est-ce que mon rouge à lèvre fait ici alors qu'il est sensé être au fin fond de mon armoire ?

J'arque un sourcil. Il se passe vraiment des choses bizarre ici.

Je me baisse donc pour ramasser le rouge à lèvre, puis quand je me relève, mes yeux se posent accidentellement sur le miroir de la salle de bain.

Je retiens brusquement ma respiration en le voyant.

Mon Dieu, mais qu'est-ce que...

C'est quoi ce délire ? Je lis la phrase, encore et encore, toujours plus choquée et apeurée que la fois précédente.

C'est une mauvaise blague des voisins j'espère ? Qui pourrait faire une chose pareille ?

Qui s'amuserait à écrire des « I See You » partout sur mon miroir, avec mon rouge à lèvre ?

Le coeur tout aussi serré d'appréhension, je dévie le regard vers le reflet d'une chose qui se trouvait derrière moi et que je n'avais pas encore remarqué.

Quand mes yeux se posent sur cette chose en question, je pousse un puissant cri d'effroi devant cette atrocité.

C'est quoi tout ce sang ?!

__

Bethany K

7868 mots quand même. Alors mon retard est entièrement justifié. La partie la plus longue de toute la chronique pour l'instant. J'ai l'impression de pas avoir assez insister sur leurs émotions et leur douleur aux deux amoureux mais m'bon, bref. Dites-moi ce que vous en avez pensé et bisous les filles !!

Bon carême aux chrétien(ne)s d'ailleurs !

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