Ce matin-là, à mon réveil, dans ses bras, mon bonheur était presque proportionnel à la douleur que je ressentais dans tout mon corps.
Néanmoins, je m'assurai de ne rien laisser paraitre pour ne pas gâcher ce moment.
J'accueillis avec joie son doux sourire et tout cet amour qui transparaissait malgré lui de son regard doux et inquiet.
Je lui caressai alors la joue pour le rassurer, sans un mot, puis déposai un léger baiser sur ses lèvres.
Je me blottis à nouveau tout contre lui, profitant de ce que je savais être nos derniers instants... même si je n'imaginais pas à cet instant à quel point ils seraient rapides et douloureux.
Au bout de longues minutes, il me sortit de ses bras, déposa tendrement ses lèvres sur ma joue, tel le baiser de Judas, puis sortit du lit aussi nu qu'Adam.
Je l'admirai, gravant chaque grain de beauté, chaque parcelle de ma mémoire.
Aujourd'hui encore... je me rappelle ce petit grain de beauté sur sa fesse droite... en forme de petit trèfle. C'était sûrement un peu pervers mais j'avais gardé profondément tous ces petits détails pour moi.
Je l'avais regardé s'habiller à la hâte comme s'il avait le diable aux trousses, avec une grande déception, le cœur serré, et pourtant, lorsqu'il se retourna vers moi, c'est avec un large et doux sourire rempli d'amour que je le gratifiai.
Je vis que cela l'affectait mais ce n'était que justice.
« Je... commença-t-il. Habille-toi. On n'a pas beaucoup de temps.
- De temps pour quoi ?! On doit partir ?
- Jin je-
- On s'enfuit où ? le coupai-je, ne voulant que ce moment ne s'arrête.
- Tu sais bien que je ne peux pas faire cela.
- Et pourquoi pas ? On s'aime.
- Tu sais bien que ! tu sais bien que c'est impossible ! Habille-toi.
- Donc, tu avoues m'aimer quand même, malgré ce que tu m'as dit hier.
- Ne me fais pas répéter et te faire souffrir plus. Tu sais bien que cet amour... ce que tu penses être de l'amour n'est qu'une façade. J'ai tenu ma promesse. Tu as eu ce que tu voulais, à toi de tenir la tienne. Reprends ta place.
- Elle est à tes côtés, ma place Namjoon. Pourquoi ne le comprends-tu pas ?
- Votre Majesté, reprit Namjoon avec un visage impassible et un sérieux qui friserait le ridicule. Mon pays est important et vous êtes... il marqua une légère pause, cherchant ses mots ; vous représentez désormais ce pays et tout son peuple. Il n'est pas temps de faire des caprices et d'être égoïste.
- Egoïste !? des caprices !? me levai-je avec colère.
- Oui, dit-il en me regardant droit dans les yeux, sans broncher.
- Tu n'es qu'un imbécile !", grinçais-je en me levant brusquement et m'habillant aussi vite que me le permettaient mes royales mains. Il n'avait pas détourné un instant son regard alors que je me mettais mes vêtements, ce qui me fit légèrement rougir. Mais, digne, je ne montrai pas mon embarras et me dirigeai vers la porte de la chambre sans croiser ses yeux froids et sans âme.
Lorsque j'atteignis le salon, au rez-de chaussée, je fus surpris de découvrir un visage peu accueillant qui me regardait comme un pestiféré.
« Qu'est-ce que tu fais là ? demandai-je.
- Sa Majesté est enfin réveillée à ce que je vois, railla-t-il.
- Il se passe quoi Namjoon ? lui demandai-je en me tourant vers lui. Pourquoi est-il là ?
- Il me doit une faveur... et toi aussi mon très cher Prince Kim Seokjin, répondit Yoongi avec un sourire sournois. Grâce à moi, vous avez pu passer une nuit torride à ce que je constate.
- Espèce de !
- Fais attention à tes mots ! Je peux te livrer aux anarchistes et c'en est terminé de toute cette ridicule monarchie !
- Yoon ! intervint alors Namjoon.
- Tu sais que je fais tout cela pour toi... répliqua Yoongi. Je trahis les miens en t'aidant.
- Je sais.
- Bien. On doit se dépêcher. Ils seront là d'un moment à l'autre.
- Qui ça !? il se passe quoi !? cessez de m'exclure de tout ceci !
- Tsss... toujours à donner des ordres... maugréa Yoongi. Tiens, signe-moi ça ! me dit-il en me tendant un document.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Le seul moyen de sauver ton cher Namjoon... et moi aussi par la même occasion. A cause de toi et de ton idiotie, on est recherché comme tes kidnappeurs.
- Quoi !?
- C'est qu'il est plutôt efficace ton nouveau majordome. Cet idiot de Jung Hoseok. Toujours à transpirer la perfection.
- Tu... vous le connaissez !?
- C'est une longue histoire. On a besoin de ta signature afin de sortir du pays, annonça-t-il en désignant divers documents sur la table du salon. On a encore une chance car ils nous recherchent que dans cette province. On peut encore nous enfuir dans une autre région et avec le tampon royal, ce sera du gâteau.
- Vous partez... tu pars ? répétai-je en regardant à nouveau Namjoon.
- Je n'ai pas le choix.
- Tu fuis encore... murmurai-je.
- Je veux juste protéger ce pays... et toi aussi... à ma façon.
- Alors, amène-moi avec toi ! insistai-je.
- Jin... soupira Namjoon. les déposer sur les documents. Bien. Faites vos adieux, dépêchez- vous ! reprit-il en prenant les documents avant de se diriger vers la sortie. Je t'attends dans la voiture, fit-il plus doucement sans se retourner, puis il sortit de la
- Pour toi... me dit Namjoon en séchant mes larmes de son pouce. Pour nous.
- Je ne veux pas... dis-je en secouant la tête, ne me trahis pas. Je t'aime Namjoon. Je t'aime malgré tout ! Laisse-moi partir avec toi.
- Je ne peux pas, il sera bientôt là et c'estbien trop dangere-
La porte s'ouvrit à cet instant avec fracas et le sbire de mon père entra, une arme à la main, prêt à tirer. Effrayé, je m'interposai entre Namjoon et lui.
« Stop !!! Ne tirez pas !
- Votre Majesté ! Vous allez bien !? éloignez-vous de lui !
- Non ! Pas tant que vous pointez cette arme !
- Mais-
- Hoseok !!! hurlai-je.
- B-bien... abdiqua-t-il à contre-cœur. Mais je ne le laisserai pas s'en sortir si facilement, même s'il nous a indiqué votre position.
- Hein ! quoi !? Tu leur as dit où nous étions ?!", demandai-je à Namjoon avec douleur.
Il me regarda, désolé, sans rien dire avant de me pousser brusquement et de toutes ses forces vers Hoseok qui eut juste le temps de me rattraper avant que je ne heurte le sol tandis que Namjoon s'enfuyait sans autre forme de procès.
Après s'être assuré que je n'étais pas blessé, Hoseok s'apprêtait à poursuivre le fuyard mais je l'attrapai par la jambe de toutes mes forces, l'empêchant de bouger.
« Non !!
- C'est un traitre de la nation ! s'écria-t-il durement.
- Non !! repris-je en resserrant mon étreinte.
- Je ne suis pas venu seul vous savez. On le retrouvera et ce sera pire que s'il se rend.
- Non... repris-je plus faiblement, ne pouvant empêcher mes larmes de couler.
- Vous le pleurer malgré ce qu'il vous a fait !? Il vous a trahi ! Il s'est servi de vous !
- Il ne-
- Majesté ! me gronda-t-il. Il a aussi dérobé un objet précieux qui vaut une fortune ! Vous ne pouvez encore le protéger !
- Il a... dérober quelque chose ? répétai-je, abasourdi.
- Oui. Et nous ferons tout pour le retrouver.
- Qu'a... qu'a-t-il pris ?
- Vous le verrez par vous-même. En attendant, sortons d'ici avant que les autres n'arrivent. Vous êtes une personnalité importante et on ne devrait pas vous voir ainsi... débraillé. Nous ne pourrons souffrir d'un autre scandale.
- Je... hm...", hochai-je la tête, fatigué, endolori et le cœur en miettes.
Aidé de mon nouveau bras droit, je me relevai et le suivis dans une voiture aux vitres teintées, sans un mot, sans plus aucune larme, juste un corps vide, vidé de toute son essence... un simple réceptacle qui s'en allait vers un avenir vide... vide... Vide, c'était bien le mot qui exprimait à cet instant mon état d'esprit.
Mon corps n'était plus qu'une coquille vide, transportée à nouveau vers ce château, cette prison dorée, tandis que mon regard, vide lui aussi, fixait un point, un néant, qui s'enfuyait, transportant avec lui mes biens les plus précieux.
Oui, Namjoon avait bien volé quelque chose d'inestimable.
Il était parti avec mon âme... et lui avec.
Il m'avait trahi, de la pire des façons.
Pourtant, je ne souhaitai qu'une chose tandis que la voiture m'emmenait très loin de lui...
Je ne souhaitai que ses bras autour de moi, et qu'il ne me lâche jamais.
J'étais peut-être un idiot... mais j'étais un idiot éperdu d'amour.
Un prince qui se mourrait pour un simple manant qu'il considérait comme son roi.
...