May
Paris - appartement de Ken
— ma dernière date c'est soir ce, me dit Ken.
On est le premier décembre et ça fait officieusement deux semaines que Ken et moi sortons ensemble. On n'en pas encore parlé mais on se comporte comme un couple. Enfin surtout à l'abris des regards. On passe le plus clair de notre temps ensemble, on s'embrasse, on dort ensemble. Pour l'instant ça me convient mais j'ai envie qu'on ait « la » conversation qui dira ce qu'il veut réellement de nous. D'ailleurs, c'est bizarre de dire « nous » maintenant.
Enfin bref, allongée dans le lit du grecque, je le regarde enfiler un bas de jogging. On vient de se réveiller y'a 2 heures. Le temps d'émerger, on s'est fait des câlins et des bisous. Ensuite, il a décidé que c'était l'heure de prendre le petit-déjeuner. J'aurai pu passer toute la journée au lit avec lui, à l'embrasser. Mais bon monsieur la rock star doit performé ce soir.
— t'es stressée de faire Bercy ? Demandai je.
— j'te cache ap que ouais un peu.
— tu vas tout déchirer comme d'hab !
— c'est ma fan numéro un qui parle ? Me taquine-t-il.
Je roule des yeux. Il se jette sur moi et m'embrasse.
— Ken ? Je l'appelle quand il se décolle de moi.
— ouais ?
— on en a jamais parlé de « nous », commençai je. Est-ce que c'est comme avant ou là y'a vraiment un truc ?
J'appréhende sa réponse. Malgré tout ce que l'on s'est dit auparavant et son comportement, j'ai la crainte qu'il soit passé à autre chose et ne ressente plus la même chose que moi. Imaginez il me dit qu'il veut juste passer du bon temps sans se poser sérieusement ?
— si c'était comme avant, tu ne serais pas dans mon lit. Enfin sauf si on avait couché ensemble, il se relève et tire sur ma main pour que je finisse assise. Maintenant que tu es libre comme l'air et qu'on s'aspire la bouche comme si nos vies en dépendaient, j'pense que t'es à moi. Non enfaîte c'est une certitude.
Wow quelle romantisme !
— tu sais que je ne suis pas une poupée hein ? Riai je.
— bien sûr. T'es ma petite amie.
Mon cœur rate un bond. Ça y est il l'a dit.
— donc t'es mon mec, je rougis.
— ouuuh madame est possessive !
Je rigole. Il amplifie mon rire en me chatouillant.
- arrêteeee ! Keeeen !
Quand il arrête enfin, il me regarde en souriant. Je passe ma main dans ses cheveux.
— t'es trop douce, souffle-t-il.
Il embrasse mon nez et m'invite à sortir du lit. Vêtue de son t-shirt, je suis ses pas jusqu'à la cuisine.
[...]
Bercy
Le concert commence à dix-neuf heures. Ken fait les balances et marche le long de la scène. Il s'approprie là où il va rapper ce soir. Assise dans les gradins depuis une demi-heure, je le rejoins.
— j'arrive pas à croire que je vais faire Bercy ce soir, dit-il pensif.
— bientôt le stade de France.
— si Dieu veut, il sourit.
Il se rapproche de moi et se place derrière moi. Il attrape mes hanches et pose sa tête dans le creux de mon cou.
— j'ai envie d'un grec, dis je soudainement.
— dis le clairement si t'as envie de moi...
Je me retourne pour le regarder. J'ai pas compris.
— quoi ? Mais non je- ah ! T'es bête !
Je lui mets un coup de poing dans l'épaule alors que mes joues surchauffent. C'est bon j'ai compris sa vieille blague. Il me rend mon coup en rigolant.
— aïeuuu ! J'exagère.
Pour me venger je tire ses cheveux.
— t'es morte !
Il m'attrape et me met la tête à l'envers. Il secoue mon corps comme un pommier.
— Ken repose-moi ! Je vais vomir !
Je n'arrête pas de crier dans tous les sens alors qu'il rie. Heureusement Moh arrive à ma rescousse. Le grecque fini par me reposer à terre. Je m'assis sur le sol pour remettre mon sang à l'endroit. J'ai encore le tournis a cause de lui.
— miskina elle est toute rouge, se moque Moh.
— je me sens pas bien. Ken j'te parle plus !
— enfin ! Bon débarras.
Je le toise alors qu'il se marre avec son pote. Alors là s'il croit que je rigole. Je ne lui parlerai plus jusqu'à la fin de la journée. Et ça commence dès maintenant. Je me relève et pars en direction des coulisses.
— vasy May je rigolais ! Crie Ken. Petit cœur ?
Je souris mais ne me retourne pas. J'aime trop quand il m'appelle comme ça.
— j'crois elle te boude vraiment, entendis-je.
Je retrouve tous les amis de Ken dans sa loge en train de manger. Ils sont tous là ce soir pour Ken. Le fait qu'il performe à Bercy est vraiment quelque chose d'extraordinaire. Ça marque l'accomplissement de pleins d'années de travail et de sacrifices. Je suis trop fière de mon mec !
Les gars ont acheté toute sorte de nourriture pour tout le monde. Il y a Macdo, KFC et des grecs. Deen m'interpelle.
— les gars ont prit domac, t'veux quoi la mioche ?
— des nuggets.
— un vrai bébé, rit Fram.
C'est moi ou ils sont tous sur mon dos aujourd'hui ?
Je prends mes nuggets, mes frites et une canette de Coca cherry puis je m'assois à côté de Mekra.
— salut ! Commençai je.
Il roule des yeux et continue de manger son grec. Trop aimable ce mec !
— bon app Hakim !
— merchi May, dit-il finalement la bouche pleine. Toi auchi.
Je souris et le remercie. Je sens un bras encercler mes épaules. Pas la peine de bouger, je sais que c'est Ken.
— t'es sah à me faire la tête ? Demande-t-il.
Je ne réponds pas, il souffle. Il me pique une nugget.
— mais t'as demandé à qui wesh ?! M'écriai je.
Mekra, à mes côtés, se marre.
— déjà tu m'wesh pas, dit-il en souriant.
Je ne réponds pas. Ça me soûle qu'il m'ait volé une nugget. J'aime pas qu'on me vole ma nourriture. Il part se servir un grec et se rassoit à côté de moi. Je regarde sa viande de kebab qui a l'air succulente. Je compte bien lui en piquer un bout.
— t'en veux ? Me demande-t-il.
— tu me dois bien ça étant donné que tu m'as piqué une nugget.
— ok mais juste un cro hein.
Je souris malicieusement. Il me plante son sandwich sous le nez. Je le saisis avec mes mains et croque un gros morceau.
— wesh c'est pas un cro ça ! Ça vaut même pas ton vieux poulet pané.
Je m'essuie la bouche et rigole.
Le reste du repas se termine dans le calme. J'ai recommencé à bouder et à ignorer Ken. N'étant pas d'accord, il a tout fait pour que j'arrête.
— Mekra tu veux bien dire à Nekfeu d'arrêter de me faire chier ?
Le frère d'Idriss sourit.
— Ken arrête d'embêter la ptite.
— en plus tu rentres dans son jeu ?!
— Merci Hakim.
Je suis à deux doigts de rigoler quand j'entends Ken souffler, mais je me retiens. Qui aurait cru que je me liguerai contre Ken avec Hakim en plus ? Quand j'ai fini de manger, je jette mes emballages et quitte la loge. Je vais jusqu'aux toilettes. Je fais pipi, puis je me lave les mains. Lorsque j'ouvre la porte pour ressortir, on me saisit par les hanches et on me plaque contre celle-ci.
— tu m'as fais la tête pendant plus d'une heure, maintenant j'en ai marre, souffle-t-il.
Je souris. Il prend ma mâchoire dans sa main et m'embrasse. Puis ses deux mains portent mes cuisses que je place autour de son bassin. Ken mordille ma lèvre inférieure.
Être aussi proche de lui m'avait manqué. En plus de lui faire la tête, en temps normal on ne s'affiche pas devant les autres. On préfère toujours s'embrasser à l'abri des regards. Les autres se doutent bien qu'il y a quelque chose mais on ne leur a pas encore dit. Sachant qu'en plus c'est seulement depuis ce matin que tout est clair entre nous.
Je finis par redescendre par terre. Il me colle un dernier smack et se recule.
— tu me boudes plus ?
— non.
Il sourit et me prend la main. Quand on arrive près des autres, il me la lâche. Un mec l'interpelle pour lui accrocher son micro et tous les trucs nécessaires. Au même moment, je reçois un message de Lola et Louise. Elles viennent d'arriver. Je pars les chercher devant le vigile. Après s'être fait la bise, je leur donne leur pass VIP.
— on va enfin voir ce que ton mec vaut, Lola joue avec ses sourcils.
Je souris.
Avec les filles, nous comptons nous assoir dans le carré or. Au début on voulait se mettre en fosse mais Ken nous l'a déconseillé. Il ne veut pas que l'on finisse mal : écrasé, en sueur ou dans un malaise. Avant de rejoindre nos places, on reste un peu en coulisses pour parler avec les autres. Puis nous partons pour ne pas rater le début du concert.
Quelques heures plus tard...
C'est pratiquement la fin du concert. A force de crier, je n'ai presque plus de voix.
— ok l'équipe. J'ai un cadeau pour vous ce soir.
Comme le public, nous nous mettons à crier. Je me demande de quoi il parle. Soudain les lumières s'éteignent et un compte à rebours commence. Sur les écrans s'affiche la phrase :« nouvel album Cyborg », avec la pochette de l'album au milieu. Je regarde les filles, choquée. Comme tout le monde, on se met à crier de joie.
— mon album surprise Cyborg ! Dés minuit, vous pourrez l'écouter. Est-ce que vous êtes contents Bercy ?!
Je m'y attendais pas du tout. Il a bien caché sa surprise. Il nous sort un petit discours pour remercier ses fan et son équipe, puis il rappe une exclu de Cyborg. En tout cas ça annonce bien la couleur, j'aime beaucoup.
Lorsqu'il conclue, les filles et moi nous dirigeons vers les coulisses. On arrive au milieu de ses amis qui le félicitent. Doums, qui sort de nul part, ouvre une bouteille de champagne. Il n'y a pas de coupes mais les gobelets feront l'affaire. J'abandonne les filles quand je me rends compte qu'il manque la star de ce soir. Il doit sûrement être dans sa loge. Je toc et entre.
— alors t'as kiffé ?
Torse-nu, il vient en ma direction.
— c'était incroyable ! J'ai trop hâte d'écouter Cyborg ! Je sautille de joie.
— tu vas kiffer...
Il sourit malicieusement. Mais je n'y fais pas attention. Le mec est devant moi torse nu. Je ne peux pas me concentrer sur deux choses à la fois.
— attention bébé tu baves.
Il m'essuie une fausse trace de bave au coin de la bouche. J'ai super chaud d'un coup. J'enlève l'élastique à mon poignet et attache mes cheveux dans une queue de cheval. Le brun passe sa main dans le bas de mon dos et me colle à lui. Oh mon dieu. Toujours avec la même main, il la glisse sous mon top alors que son autre main saisisse une de mes fesses. Il me fixe dans les yeux.
— tu sais que les autres nous attendent ? Lui demandai je à bout de souffle.
— alors pourquoi tu bouges pas ?
Pour seule réponse, je me mord la lèvre. Il passe son pouce sur la morsure. Mon bas ventre s'agite dans tous les sens. Je me rapproche de lui. Ken s'attaque soudainement à mon cou. Il me fait pleins de petits bisous de ma mâchoire à mon épaule dénudée. Je penche ma tête en arrière pour qu'il ait un meilleur accès. Je gémis son prénom. Je dois être toute rouge. Entre notre proximité et toutes les sensations qu'il me procure, je ne sais plus où donner de la tête.
Il se jette enfin sur mes lèvres. J'enlève sa casquette et passe mes doigts dans ses cheveux. J'accroche mes jambes à son bassin. En tirant sur des mèches de cheveux derrière sa nuque, j'accentue le baiser. A bout de souffle, il se décolle de moi. Il en profite pour s'assoir dans le petit canapé, moi sur lui. Nos bouches se reconnectent passionnément. Je cogne accidentellement mon bassin au sien, ce qui lui vaut un grognement.
Je sens les mains du brun caresser mon ventre, quand son téléphone sonne. Mais aucun de nous deux ne bouge. Lorsqu'il commence à les monter, ça sonne une deuxième fois. Alors je me recule pour qu'il puisse répondre. Ken souffle et grogne des injures dans sa barbe.
C'est un +33 qui s'affiche.
— tu connais ? Demandai je.
— non, répond-il.
Pourtant il affiche une grimace toute sauf ordinaire. Sa mâchoire s'est contractée et ses sourcils se froncent. J'espère que je me fais des idées mais j'ai l'impression qu'il cache quelque chose. Si ce n'était pas le cas, il aurait juste vu le numéro, refusé l'appel et verrouillé son téléphone. Là, il parait énervé ou soulé.
— viens on bouge, souffle-t-il sans émotions.
Toute la tension qu'il y avait entre nous s'est évaporée. Maintenant, il ne reste plus qu'une atmosphère tendue. Perdu dans ses pensées, il ne fait plus attention à moi. Il enfile un t-shirt propre, prend ses affaires et se tourne en ma direction. J'ai très envie de lui demander de qui provenait l'appel pour qu'il soit dans cet état mais je ne pense pas que maintenant soit approprié.
Ça doit sans doute être une vieille connaissance qu'il n'apprécie pas.