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By Maarsat

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By Maarsat

A travers la salle, une marée d'exclamations se soulève, amenant l'agitation avec elle, et les invités s'affolent tout à coup. 
Près de lui, Eijiro recule d'un pas, le front plissé et la bouche grande ouverte sans qu'aucun son n'en sorte pour autant et, se sentant prêt à suffoquer, Katsuki s'échappe du bâtiment trop exigu pour rejoindre l'extérieur. 
Brisant la masse en ébullition, se frayant un chemin entre les membres médusés et en colère de sa belle famille, il suit du regard ses propres pieds pour ne pas avoir à affronter le dégout sur leurs visages. 

Dehors, le vent tiède frappe enfin sa peau moite d'anxiété et, sans avoir de but particulier, il avance de quelques pas malhabiles sur le parking remplis de voitures venues fêter son mariage annulé. 
Ses tympans vibrent si fort qu'il peut en ressentir la douleur jusque dans ses tempes, son souffle se brise et, malgré lui, une nouvelle larme sauvage perchée sur sa paupières s'élance sur sa pommette, dévalant la courbe de sa mâchoire pour venir s'échouer sous son menton. 

Katsuki ne pleure pas son mariage avorté, il pleure ces cinq années perdues pour rien. 

- Katsuki ! 

Dans son dos, il reconnait la voix brisée d'Eijiro et, les mains tremblantes, il se retourne lentement pour lui faire face. 
Sur son visage, il perçoit plusieurs sillons humides marquant ses joues, mais il souffre trop pour avoir de l'empathie aujourd'hui, son seuil de douleur supportable déjà bien largement dépassé.  

S'avançant de quelques pas vers lui, retenant des larmes bruyantes au fond de sa gorge, Eijiro se poste à moins d'un mètre de lui, rivant ses yeux dans les siens malgré la déception. 

- Je comprends pas. Pourquoi tu .. Je croyais que .. 

Ses mots s'emmêlant sans parvenir à s'aligner les uns avec les autres, Eijiro balbutie sans jamais assembler une phrase complète. 
Son souffle bruyant de pleurs mal contrôlés oblige Katsuki à détourner le regard, fuyant lâchement ses erreurs et ses responsabilités.  

Il comprend, à quel point il vient de le briser, de le ridiculiser, mais il ne parvient pas à se sentir réellement désolé, déjà bien trop rempli de remords pour ces cinq années de gâchées. 
Il voudrait pourtant, être désolé, présenter des excuses sincères à Eijiro, mais rien ne lui vient, si ce n'est un mensonge qu'il n'a pas envie de lui servir. 

Alors, reculant d'un pas pour s'éloigner de lui, il s'immobilise à nouveau en voyant sa mère arriver près de lui, les yeux remplis de fureur et le visage crispé à son maximum. 

- Katsuki, je te jure que si tu pars pour tenter de rejoindre Izuku, tu ne mettras plus jamais les pieds chez moi. Si tu détruis encore tout ce que tu as pour aller le chercher, je ne te le pardonnerai pas, j'ai déjà laissé passer trop de choses avec vos conneries. Tu as bientôt vingt-six ans, c'est pas le moment de replonger là dedans bordel ! 

Légèrement en retrait, un hoquet incertain résonne à la gorge de son ex futur mari, qui fronce les sourcils en frottant les larmes de son visage contre son poignet. 

- Izuku ? 

Semblant chercher dans ses souvenirs entre deux tressautements de ses épaules, il enfoui ses deux mains dans ses cheveux en levant la tête vers le ciel, avant de planter à nouveau ses yeux dans les siens. 

- Izuku .. C'est le gars que je t'ai demandé de plus voir, c'est ça ? Au tout début ? 

Incapable de faire face à sa propre impuissance, Katsuki reste silencieux, les bras crispés contre son corps alors que le nœud de sa cravate étouffe sa gorge. 
La mâchoire contractée, l'eau fuyant ses yeux malgré ses efforts pour la retenir, il finit par baisser la tête, trahissant sa honte quand Eijiro renchérit. 

- Je comprends pas. C'était y'a .. cinq ans putain. Et .. est-ce que t'as continué à le voir pendant tout ce temps ? 

Secouant négativement la tête, sans pour autant répondre avec des mots qu'il ne trouverait pas de toute manière, Katsuki renifle sans discrétion alors qu'un sentiment d'urgence s'éveille à l'arrière de son crâne. 

- Non ? Alors .. pourquoi maintenant ? 

S'il pouvait parler, si sa voix lui faisait l'honneur de lui obéir, il oserait enfin lui dire la vérité, celle qu'il s'est caché à lui même cinq ans plus tôt. 
Il avouerait qu'il l'aime, et qu'il va le chercher. 

Mais, puisqu'il demeure muet, le dos courbé et le regard vissé sur le sol, Mitsuki intervient à nouveau, s'approchant d'Eijiro pour tenter de le consoler comme elle peut en passant sa main dans son dos, fusillant en même temps son fils du regard. 

- Katsuki, je suis très sérieuse. Si tu cherche à le retrouver maintenant, que t'y parviennes ou non, je ne te pardonnerai pas. Je me fiche de savoir ce que tu ressens pour lui, vous avez passé la moitié de vos vies à pourrir les nôtres, et je refuse de revivre ça. T'es plus un gamin maintenant, prend conscience de ce que t'es en train de faire une minute. Tu sais même pas où il est. 

Il le trouvera, peu importe ce que ça lui coutera, et les menaces de sa mère ne l'atteignent pas, bien trop obsédé par l'idée d'aller le chercher pour se rendre compte de ce qu'il s'apprête à perdre. 

- Et n'espère même pas aller déranger Inko chez elle, elle te le dira pas. Ca fait cinq ans qu'on s'évertue à ce que vous ne puissiez plus vous croiser, je t'assure qu'on vous aidera pas aujourd'hui. 

Une décharge soudaine vient secouer ses côtes, compressant son cœur alors que sa poitrine se disloque brutalement quand il redresse brutalement le cou pour faire face à sa mère. 
Sans parler pour autant, espérant que ses yeux transmettent suffisamment sa rancœur, il tente de respirer malgré la douleur sous son sternum, prenant conscience de l'implication de son entourage dans ces cinq années de silence. 

Se sentant victime d'une trahison dont il ignorait l'existence trente secondes plus tôt, il jette un regard par dessus l'épaule de sa mère, apercevant ses beaux parents un peu plus loin. 
Son ventre lui fait mal, lourd de regrets et d'angoisse, et l'amertume sur les visages au loin le pousse à se reculer d'un pas de plus. 

Puis, après un ultime échange silencieux avec sa mère, froissant sa bouche d'une grimace douloureuse alors qu'il s'efforce de ne pas pleurer plus qu'il ne le fait déjà, il fait finalement volte face. 
Laissant derrière lui une foule médusée, un homme blessé et des parents déçus de leur propre fils, il s'enfuit pour la deuxième fois de sa vie. 

Avançant à pied le long du trottoir, faute d'être venu avec sa voiture, il arpente quelques rues sans vraiment prêter attention à sa trajectoire, desserrant le nœud de sa cravate d'une main avant de la retirer complètement pour l'abandonner sur le bitume. 
L'urgence qui pulse à son crâne augmente à mesure qu'il s'éloigne de tout ce qui représente ces cinq dernières années et, le sang pulsant plus fort dans ses veines, il accélère le pas jusqu'à trouver un arrêt de bus. 

L'adrénaline, le stress et la chaleur se mélangent sous sa peau, créant un cocktail explosif, et sentant la transpiration imprégner sa chemise, il ouvre brutalement la moitié des boutons en forçant dessus, abimant les coutures, avant de se débarrasser de sa veste de costume hors de prix, la laissant à son sort sur un banc au moment de monter dans le grand véhicule. 

Il ne sait même pas où il va, ni même où mène cette ligne, mais il doit s'éloigner de là, et trouver Deku. 
Et il n'a pas besoin d'Inko pour ça, il se souvient encore de son numéro de portable, il lui faut juste espérer qu'il n'en ait pas changé depuis. 
Alors, tapant les chiffres dans la barre du destinataire tout en descendant au troisième arrêt, il transmet ses coordonnées GPS dans un message vide. 
Si le numéro appartient toujours à Deku, alors il n'a pas besoin d'ajouter de précisions. 

 Ignorant les appels répétitifs de sa mère sur son portable, effaçant au fur et à mesure tous les message qu'elle lui envoie, il vient s'échouer sur le premier perron de porte croisant son chemin. 
Dans une ville qu'il ne connait que de nom, assis entre un cinéma mal en point et un restaurant en travaux de rénovation, il laisse son corps s'affaisser contre la porte en bois derrière lui. 

Ses yeux ne coulent presque plus, mais sa gorge reste nouée, brûlante de tous ses regrets et de sa honte, et ses joues demeurent marquées par le passage récent de ses larmes. 
Attirant les regards curieux sur sa personne, pitoyable et à moitié déshabillé, il enfoui misérablement son front dans les paumes de ses mains, appuyant ses coudes sur ses genoux. 

Katsuki vient officiellement de balayer tout ce qu'il possédait, d'anéantir cinq ans de sa vie au nom d'une ancienne relation perdue, et il se tient là, tout seul sur un perron inconnu, à attendre l'hypothétique arrivée de Deku, sans même savoir s'il s'est adressé au bon numéro de téléphone. 
Et quand bien même il s'agirait effectivement toujours de celui d'Izuku, rien ne lui garantit qu'il viendra pour autant. 
Si ça se trouve, il va simplement le planter comme un con, lui dire d'aller se faire foutre ou même ne pas répondre du tout. 

Mais Katsuki ne compte pas perdre espoir, aussi longtemps qu'il pourra, il attendra ici quitte à crever de faim et de soif sur ce perron. 
Il ne bougera pas d'ici, jusqu'à la fin de l'année s'il le faut. 
De toute manière, il n'a plus rien à perdre, Eijiro ne le laissera pas rentrer chez lui à part pour récupérer quelques affaires, sa mère non plus et, à moins d'un hôtel, il n'a nul part où aller. 
Ses papiers et sa carte bleue sont restés dans la voiture qui l'a conduit à la mairie alors, à part attendre ici, il ne lui reste plus grand chose à faire. 

Les températures malgré tout élevées du début de l'été font doucement transpirer son front, asséchant sa gorge et sa bouche à mesure que les minutes s'égrainent et, sans qu'aucune nouvelle d'Izuku n'apparaisse sur l'écran de son téléphone, Katsuki affaisse complètement son dos contre la porte derrière lui. 
Essuyant la sueur sur ses tempes d'un revers de manche, bousillant sa chemise plus qu'elle ne l'est déjà, il ferme les yeux en cognant son crâne contre le bois. 

Sous ses paupières, des souvenirs se dessinent malgré lui, renvoyant des images enfouis mais jamais vraiment oubliées. 
Le sourire presque trop lumineux d'Izuku quand il s'apprêtait à faire une connerie, l'éclat de son rire juste après, et les reflets dansant dans ses iris lorsque ses yeux croisaient les siens. 
Le parfum dans son cou, quand Katsuki s'y penchait pour murmurer des provocations, et les frissons remontant son dos au contact de sa peau. 

Le soleil dans ses cheveux, à travers la vitre du café ce jour où il est venu foutre en l'air son rendez vous avec Hitoshi, la courbe accentuée de sa pommette contre sa main qui écrasait sa joue, et les tâches de rousseur de son visage qui renvoyaient la lumière comme des éclats de miroir. 
Sa façon de lui tenir tête, sans rancune pour autant, de jouer avec ses nerfs et sa patience, de ne jamais abandonner un jeu stupide et dangereux malgré tout ce que ça leur a couté pendant des années.
Le son de sa voix aussi, quand il chuchotait des avances sournoises, entre deux rayons d'une épicerie de quartier, juste avant de lui faire perdre son travail en simulant la panique. 

Il ressent les résidus d'adrénaline sous sa peau, quand la police retournait sa piaule un samedi matin, quand il faisait exploser la salle de chimie de son lycée juste avant de devoir le quitter. 
L'euphorie dans ses veines quand il préparait un plan vicieux, et la fierté dans son rire quand il parvenait à ses fins. 
L'impatience de retrouver Izuku à la première occasion pour se mener la guerre. 

Finalement, c'était ça qui comptait réellement, être avec lui, et l'entendre rire. 
Le provoquer toujours plus pour être certain qu'il riposterait, qu'il reviendrait, qu'il resterait. 
Sans s'en rendre compte, le jeu s'est transformé à la longue, le but n'étant plus principalement de s'humilier, mais bien d'être ensemble quoi qu'il en coûte. 
Quitte à se faire haïr de son entourage, de générer la colère de leurs parents et des adultes qui les encadraient. 

Malgré les menaces, les sermons et les punitions à n'en plus finir, rien ne pouvait sincèrement les arrêter. 

Jusqu'à ce que Katsuki enfreigne les règles de sa propre partie, en choisissant de s'enfermer auprès d'Eijiro pour voiler ses sentiments. 
Pour se faire croire à lui même que tout ça n'avait pas tant d'importance que ça, il s'est enfuit comme un lâche, sans prévenir et sans donner de nouvelles.
Pendant cinq ans ... 

Il sait que Deku a certainement construit sa propre vie de son côté entre temps, peut-être persuadé que Katsuki l'a oublié depuis, il ne s'attend pas à pouvoir recoller les morceaux en un claquement de doigts. 
Mais il ne peut pas ne pas essayer, c'est au-dessus de ses forces aujourd'hui. 
Il a besoin de le voir, de lui parler, de lui demander pardon pour sa fuite sans préavis, de lui crier ce qu'il ressent, de s'excuser encore et encore. 

Et puis surtout de le prendre dans ses bras. 
De sentir son odeur et la chaleur de sa peau, comme la fois où il a embrassé son cou dans le petit café, où quand il l'a abandonné à son sort aux griffes d'un vieux dégueulasse devant la gare. 

Il veut revoir ses yeux, l'éclat de ses iris et les mèches mal arrangées de ses cheveux hystériques. 
Les constellations sur ses joues, son sourire qui ravageait tout sur son passage, à commencer par son cœur, et la cambrure légère au dessus de son coccyx. 
Il doit tout tenter pour rattraper le temps perdu, retrouver sa vie là où il l'a laissée, il y a cinq ans, quitte à perdre tout le reste. 

Alors, gardant espoir des heures durant, il voit le temps défiler à travers la course du soleil au dessus de sa tête, jusqu'à le regarder se coucher, puis disparaitre derrière la ligne de l'horizon. 
Il crèvera sûrement de soif d'ici demain matin, tant pis. 

Posé près de lui, son téléphone demeure muet depuis des heures et, quand l'éclairage publique s'enclenche, illuminant la route et les trottoirs désertés par les passants d'une lumière jaune peu esthétique, il ferme les yeux contre ses mains.
Une angoisse sourde vient lui secouer l'estomac quand il se retrouve presque seul dans la rue quasiment vide, seulement animé par deux ou trois promeneurs nocturnes venus sortir leurs clébards pour profiter de la fraicheur. 

La chute des températures rafraichit son front transpirant, mais sa gorge reste sèche, quémandant de l'eau qu'il n'a pas, et son ventre gronde progressivement, réclamant un repas qu'il ne peut pas s'offrir. 
Misérable et pathétique sur son bout de perron, attendant une venue presque chimérique à travers la nuit silencieuse d'un village presque inconnu, il se sent trembler de l'intérieur, la poitrine secouée par ses erreurs et ses remords. 

Autour de lui, les quelques promeneurs changent de trottoir en arrivant à sa hauteur, quelques âmes curieuses et indiscrètes font peser leurs regards sur ses épaules crispées, et quelques conversations mal dissimulée à son égard traversent le vent pour atteindre ses tympans. 

Il sait qu'il a l'air d'un con, il n'a pas besoin de l'entendre de la bouche des autres. 

- Katchan ? 

Peut-être que la déshydratation déforme sa perception de la réalité mais, convaincu de l'avoir réellement entendu, il retire subitement ses mains de son visage, cherchant du regard une silhouette parmi les quelques corps autour de lui. 
Le souffle coupé par l'incertitude et une vibration violente entre ses côtes, il agite ses pupilles dans plusieurs directions avant de s'arrêter sur le trottoir d'en face. 
Ouvrant bêtement la bouche sans rien dire, les bras en semi flexion sur ses genoux, il doit cligner deux fois des yeux pour s'assurer qu'il ne s'agit pas d'une hallucination. 

De l'autre côté de la route, éclairé par la lumière blafarde d'un lampadaire, recouvert de quelques reflets de nuit claire, un regard qu'il connait si bien semble transcender l'obscurité, traverser la pénombre, pour venir enflammer sa peau à son simple contact. 
Sans sourire, l'expression plus sérieuse que jamais, Izuku le dévisage en silence, immobile. 

Près de ses tempes, les mèches mal arrangées de ses cheveux indomptés chatouillent son front au gré du vent qui s'engouffre aléatoirement dedans et, alors que le temps semble s'être interrompu, Katsuki se redresse lentement comme s'il tentait d'approcher un animal sauvage. 
Depuis son bout de perron, il s'efforce de reprendre un peu de souffle pour ne pas manquer complètement d'oxygène et, le corps raidi par une angoisse soudaine, il descend de la petite marche pour remettre les pieds sur le trottoir. 

La brise tiède de la nuit d'été se fraie un chemin entre les boutons ouverts de sa chemise, secouant le tissu fin sur sa peau et, s'avançant prudemment, craignant peut-être que Deku disparaisse subitement s'il se précipite de trop, il traverse la route qui le sépare de lui. 
Le rejoignant de l'autre côté de la chaussée, se postant à un mètre de lui pour ne pas brusquer l'échange, il se retient sincèrement de pleurer comme un enfant en plongeant son regard dans le sien. 

Deku n'a presque pas changé, en cinq ans. 
Sa carrure reste quasiment la même, et la ligne de sa mâchoire conserve ses courbes d'autrefois, comme celles de ses lèvres, identiques à ses souvenirs.
Le simple fait de le revoir, avant même de s'être parlé, déclenche une implosion d'émotions incertaines, contradictoires, autant douloureuses que réconfortantes, et sa trachée se referme sur elle-même.  

Près d'eux, une voiture vient perturber le silence religieux de l'instant, jetant ses phares sur leurs visages statiques et, plissant les paupières pour protéger ses pupilles de la lumière agressive, Izuku détourne le regard en premier, reculant en même temps d'un pas pour s'éloigner de lui. 

- Qu'est-ce que tu fabriques Katchan ? 

Dans sa bouche, la voix de Katsuki peine à se faire un chemin, remontant péniblement la pente de sa gorge asséchées pour finalement se manifester comme un écho maladroit. 

- Je .. De quoi ? 

En face de lui, Izuku pince ses lèvres et ferme un instant les yeux, soupirant discrètement dans le vide avant d'affronter à nouveau son regard. 

- Qu'est-ce qu'on fait là au juste ? Ca fait cinq ans que j'ai pas de nouvelles de toi, et tu m'envoie des coordonnées GPS tout à coup, pour que je trouve là, à moitié débraillé dans un bled que je connais pas, à deux cent bornes de chez moi. 

Un pétillement étrange crépite à son estomac l'espace de quelques secondes à la révélation peut-être involontaire de Deku. 
Rien ne l'obligeait à venir, pourtant, il se tient là, à plus de deux heures de route de chez lui. 
Et Katsuki, la bouche complètement pâteuse, autant par la soif que par les émotions qui compriment sa gorge, peine à rassembler des mots pour s'exprimer correctement. 

- J'avais besoin de te parler. 

- Maintenant ? T'as mis cinq ans pour avoir un truc à me dire ? 

- Non .. Mais je .. 

Dans sa poitrine, une vague secoue violemment son diaphragme, comprimant ses poumons dans sa cage thoracique.
Un flot de sentiments trop longtemps refoulés de déverse sous sa peau, érodant ses os et rongeant ses muscles.
Il a tant de choses à lui dire qu'il ne sait pas par où commencer.

- Je devais me marier aujourd'hui Deku. Avec Eijiro. Mais je .. je viens de dire non, je me suis tiré juste avant de signer.

- Pourquoi tu me racontes ça ? Je suis censé te répondre quoi ?

Tout à coup très inconfortable dans son propre corps, il baisse la tête vers le sol, fixant son regard sur ses chaussures, et soupire lentement pour se donner le temps de chercher les mots piégés derrière sa langue.
Izuku semble ne pas vouloir lui faire de cadeau ce soir et, même s'il le comprend, il peine à accuser le coup. 

- Parce que je me suis planté, quand j'ai choisi Eijiro, il y a cinq ans. Il m'a demandé de faire un choix entre lui et toi. Et je regrette Deku, d'être parti comme un lâche.

- D'accord. Autre chose ? Ou tu m'as fait venir juste pour me servir des excuses bateaux sans me regarder ?

La nuque lourde de culpabilité, la conscience martelée par l'attitude fermée d'Izuku, il redresse péniblement son cou, le visage tordu par une grimace de douleur.
Les lèvres pincées et les sourcils froncés de malaise, il inspire par le nez, les épaules tremblantes, en affrontant son regard.

Face à lui, Izuku demeure droit et calme, mais ses yeux, humides, trahissent ses réactions internes.
Une pellicule d'eau semble recouvrir ses iris, et Katsuki jure voir sa mâchoire se contracter pour retenir la chute d'une larme.

- C'était trop long, cinq ans sans toi. 

- Tu m'appelles parce que tu t'ennuies ?

Jamais de sa vie il ne s'est senti si impuissant, et à ce point ridicule.
La conversation lui échappe à chaque fois qu'il tente de la rattraper, ses mots ne lui obéissent pas, il voudrait dire tellement plus de choses, mais sa confusion l'empêche de mettre de l'ordre dans ses phrases.

Son rythme cardiaque devient chaotique, et sa respiration se dérobe.
Il voudrait seulement pleurer comme un gosse, lui tomber dans les bras, et que Deku le pardonne.

- Non. Parce que .. j'ai besoin de toi. Je veux pas me marier avec Eijiro, je veux .. Je voudrais revenir en arrière et-

- Ça n'existe pas ça Katchan, personne ne peut juste revenir en arrière.

Il sait ça ...
Mais ça ne l'empêche pas de vouloir annuler certaines de ses actions.
Non, une seule en fait.
Avoir choisi la mauvaise personne quand il a fallu prendre une décision.

- Je sais. Mais-

- T'es parti sans rien me dire Kacchan. T'as disparu, et tu m'as laissé tout seul pendant cinq ans. Tu crois qu'il suffit de revenir après tout ce temps et de me dire que tu veux revenir en arrière ? Je m'en fous de savoir ce que t'as fait pendant ce temps là, ou que t'aies planté Eijiro devant la mairie. T'aurais pu m'écrire au moins, me dire où t'allais, et pourquoi ...

La voix d'Izuku semblant se briser au fur et à mesure, il s'interrompt un instant pour reprendre son souffle et passer nerveusement sa main sur son visage.
Frottant ses yeux puis ses joues, il pivote finalement sur lui même, tournant le dos à Katsuki avant de reprendre.

- Je comprends que t'aies pu l'aimer, et choisir de privilégier ta relation avec lui. Je sais- J'ai pris conscience d'à quel point on s'envahissait l'un et l'autre, mais j'aurais quand même voulu que tu me dise quelque chose, que tu partes pas comme ça.

D'abord silencieux pendant quelque secondes, analysant ses mots en les repassant en boucle dans sa tête, Katsuki se décide maladroitement à s'avancer de deux pas, se rapprochant de sa silhouette de dos.
Se postant à moins d'un mètre, sans chercher à le toucher pour autant, il perd lentement le contrôle sur l'eau qui cherche à sortir de ses yeux.

Sans bruit, plusieurs larmes trop longtemps ravalées franchissent la barrière de ses cils, glissant sur ses joues pour venir mouiller la commissure de ses lèvres.
Sa poitrine se resserre sur elle même, insinuant une brûlure jusque dans sa gorge et, en inspirant aussi discrètement qu'il le peut malgré le sanglot qui menace sa voix, il fixe son regard sur l'épaule d'Izuku, espérant peut être y ramasser ses mots.

- J'ai jamais pensé que tu m'envahissais. J'avais besoin de toi, et encore aujourd'hui- 

- Moi aussi Katchan. J'avais besoin de toi. Et tu t'es barré, tu penses qu'il suffit de m'envoyer un message vide, de me faire venir jusqu'ici pour me dire ça, et que je vais oublié ? J'ai passé des mois et des années entières à me dire que t'allais peut-être me rappeler, réapparaitre, faire un truc. Je t'ai attendu pour de vrai. 

Le sentiment de culpabilité qui s'insinue sous sa peau comme une substance toxique brûle sa trachée et humidifie davantage ses yeux. 
Les cils trempés et collés par l'eau, la langue couverte d'excuses et de honte qu'il ne saura jamais verbaliser à leur juste valeur, il plonge ses deux mains dans ses cheveux, tentant de contrôler les spasmes de ses bras. 

Il ne peut pas le perdre une seconde fois, ça le tuerait. 
Alors, réunissant chaque particule d'honneur et de courage qu'il reste à sa dignité bien écorchée, il inspire maladroitement, trois sanglots dans la gorge, et laisse couler une dernière larme avant de murmurer dans son dos. 

- Je voulais pas admette ce que je ressentais pour toi, à l'époque, mais aujourd'hui .. 

- Pourquoi ? C'était si impensable d'avoir ce genre de sentiments pour moi ? Est-ce que t'avais honte ou quelque chose comme ça ? 

Lentement, son corps semblant peser quatre fois son poids, Izuku se retourne enfin pour lui faire de nouveau face, révélant son visage noyé dans l'eau salé, ses lèvres pincées pour les empêcher de trembler, et l'éclat éteint de ses iris. 
Jamais Katsuki ne l'avait vu ainsi, les pleurs dans la voix et les cris de douleur dans les yeux, et cette image le brise, déchire ses os et fend ses muscles. 

Sans oser s'approcher davantage, de peur de le voir émettre un mouvement de recul, il cherche son regard pour entrer dedans, capter toute son attention pour transmettre autant de sentiments qu'il le peut. 
Quand bien même la puissance de ce qu'il ressent pour lui ne logera jamais dans un seul regard. 

- Non, c'est pas ça Deku. Je crois .. Je crois que j'étais aveuglé par .. 

Sans terminer sa phrase, il passe la paume de sa main sur sa bouche et ses joues pour éponger les larmes qui y stagnent. 
Prenant conscience de tout ce qu'il a loupé, au nom de ce jeu dont il ne pouvait pourtant pas se passer, il tente un pas discret en direction d'Izuku. 

- Je me souviens de ce que tu m'as dit, dans le magasin où j'travaillais. Tu te rappelles ? Quand tu m'as fait passer pour un malade. 

Un sourire involontaire semble friser les lèvres d'Izuku, l'espace d'une demi seconde, juste avant qu'il hoche la tête. 

- Oui, je me rappelle. 

- Tu disais qu'on avait rien à se cacher, qu'on pouvait se dire la vérité, qu'on passait beaucoup de temps ensemble, et je t'ai dit que je comprenais pas ce que tu voulais. 

Marquant une petite pause, alors qu'Izuku le laisse s'avancer d'un pas de plus, il ferme les yeux un instant quand le vent transporte son parfum jusqu'à lui. 

- Je savais plus ce qui était réel ou .. ou dans le jeu. J'arrivais pas à savoir si c'était vrai ou juste .. On avait pas de frontière entre les deux Deku, j'ai pas su si t'étais sincère ou pas, et-

- Je l'étais. 

La bouche encore ouverte, le feu dans la gorge et l'eau dans les yeux, il presse ses doigts sur ses paupières brûlantes, avant de plonger à nouveau dans son regard. 
Lisant des regrets là aussi, peut-être également une lueur de désespoir, il s'approche encore un peu plus, jusqu'à pouvoir prendre ses deux épaules entre ses mains sans brutalité. 

Le ventre secoué et la poitrine martyrisée de trop pleurer depuis trop longtemps, il humecte ses lèvres sèches sur sa langue alors qu'Izuku s'adresse à nouveau à lui. 

- Je l'étais vraiment. Mais .. Moi non plus je savais plus où se trouvait notre frontière. J'essayais de trouver une ouverture pour te parler, mais faut croire que j'ai pas su m'y prendre correctement. 

- Et Hitoshi alors ? 

Fronçant les sourcils, Deku parait rester pantois un instant, battant des cils entre deux larmes, avant qu'un rire soudain et nerveux ne traverse sa gorge. 

- Tu te souviens de son nom ? Même moi je l'avais oublié. 

- Bien sûr que je m'en souviens, il avait l'air d'un toxico et j'étais carrément fier de l'avoir fait fuir. 

Un sourire étonnement large vient couvrir le visage d'Izuku en même temps qu'il roule des yeux et, sentant son cœur s'adoucir légèrement au son de son rire discret, Katsuki retient un petit éclat moqueur entre ses dents. 
Puis, reprenant son sérieux, il fait glisser ses mains le long de ses bras, atteignant ses coudes, alors qu'Izuku cherche dans ses souvenirs pour lui répondre. 

- C'était pas un toxico, il bossait trop c'est tout. Et il était sympa, je l'aimais bien. J'étais pas amoureux de lui, mais je l'appréciais vraiment, et je me disais que je pourrais essayer de construire quelque chose avec quelqu'un d'autre que toi en me forçant un peu. Ce jour là, quand t'as .. quand tu .. quand t'as fait ce que t'as fait, il l'a vraiment très mal pris je dois dire, et il m'a demandé qui t'étais pour moi. 

- T'as dit quoi ? 

Inspirant longuement, comme s'il s'apprêtait à dire des mots dangereux, Izuku se mord la lèvre inférieure avant de répondre en détournant le regard. 

- J'ai juste dit que j'étais désolé pour ça, parce que je savais pas quoi lui dire Katchan. Je savais pas ce que t'étais pour moi. Ou en tout cas, je savais pas l'expliquer. Il est parti juste après, en me disant qu'on était pas clairs toi et moi. 

Et il avait raison sur ce point, ils n'étaient pas clairs dans leur relation. 

Hochant vaguement la tête, Katsuki glisse à nouveau ses mains le long de ses avant bras, atteignant ses poignets puis, en effleurant ses mains, il abandonne ses yeux pour suivre du regard ses propres gestes. 
Touchant sa peau, passant ses doigts près des siens, il s'interrompt en même temps que son souffle se bloque définitivement, brûlant ses côtes et déchirant son diaphragme quand, la mâchoire soudain crispée et les paupières de nouveau noyées, il avise, en se mordant la langue, l'alliance de son annulaire. 

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"Take a swan dive off a building, you might have a quirk in your next life." Katsuki laughed maliciously. Izuku had finally had it, that was the last...
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แ€•แ€ผแ€”แ€บแ€žแ€ฐแ€™แ€›แ€พแ€ญแ€แ€ฑแ€ฌแ€ทแ€˜แ€ฐแ€ธแ€†แ€ญแ€ฏแ€œแ€ญแ€ฏแ€ท แ€šแ€ฐแ€•แ€ผแ€”แ€บแ€œแ€ญแ€ฏแ€€แ€บแ€•แ€ผแ€ฎ แ€Ÿแ€ฎแ€ธแ€Ÿแ€ฎแ€ธ แ€–แ€แ€บแ€•แ€ฑแ€ธแ€€แ€ผแ€•แ€ซแ€ฅแ€ฎแ€ธ
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Stephen James is a model, but he has a deeper past that he has been running away from. Karla Rezy is a beautiful innocent girl that has never been in...