Tanaka et Nishinoya étaient entrés dans les vestiaires, les visages inquiets. Ils s'étaient tous les deux accroupi avant de me prendre dans leurs bras.
Tanaka – Excuses-nous... Lança-t-il.
Nishinoya – Je me sens si ridicule de n'avoir rien vu...
Avec Sugawara, ils avaient tenté de trouver les bons mots... Mais, après cette expérience traumatisante, aucuns mots de pouvaient m'aider à aller mieux. Des traces de doigts violettes apparaissaient tout doucement sur mon cou et la trace de la main de Jeanne sur ma joue était toujours bien voyante.
Clémence s'était éclipsé un court instant afin de dialoguer avec Louis qui, étonnement, n'avait pas suivi Jeanne.
Sugawara – Merde, Soupira-t-il, Le match.
Tanaka – C'est fini... C'est pas grave...
Moi – C'est fini ?
Nishinoya – Un abandon. Mais ce n'est rien.
Je me redressa d'un bond. Les garçons avaient pris peur.
Moi – Il est hors de question que vous perdiez le match à cause de moi ! Dis-je toute tremblante, l'une de mes mains sur mon cou.
Nishinoya – Que nous perdions. Reprit-il.
Au même moment, Clémence revint en compagnie de Louis.
Moi – Il faut retourner sur le terrain, pour procéder à l'échange de joueurs.
Clémence – Tu es sûre ? Demanda-t-elle inquiète. Tu es marquée au visage...
Moi – Je ne veux pas qu'ils... Qu'on perde, à cause de moi !
Tanaka – A cause d'elle. Reprit-il.
Clémence soupira.
Nous sommes tous parti en direction du terrain, où les équipes devaient sans doute attendre. Je n'ose même pas imaginer les têtes énervées des coachs, de Sawamura...
Clémence fut la première à rentrer dans le gymnase, suivi de près par Sugawara qui s'empressa de courir en direction de l'équipe. Nishinoya me serrait la main. Tanaka, lui, dévisageait la moindre personne qui osait s'attarder sur mon lamentable état.
Sawamura – Erine...
Le capitaine fut le premier à s'approcher de moi. Son visage s'était décomposé à la vue de ses terribles marques violettes autour de mon cou. Mes lèvres tremblaient, je n'osais pas le regarder dans les yeux, ni les autres d'ailleurs.
L'arbitre de notre match s'était lui-même approché jusqu'à moi, essayant de dissiper mes camarades autour de moi qui n'avaient pas l'intention de bouger.
Arbitre – Qu'est-ce qui vous est arrivée ?! Demanda-t-il fort inquiet.
Clémence – Clémence Hado, journaliste de la préfecture de Miyagi et maman d'Erine. Dit-elle en montrant son badge. Procédez à l'échange de joueurs pour que les équipes puissent disputer leur dernier set, je me charge d'emmener Erine pour les premiers soins nécessaires.
Arbitre – Bien. Je ferais venir un membre du comité des sports à vous si nécessaire.
Clémence – Ce sera nécessaire. Lança-t-elle froide.
Je m'étais placé sur le terrain, le regard vide. L'arbitre avait soufflé dans son sifflet pour permettre au match de débuter. Le changement de joueur s'effectua : Hinata prenait ma place.
Hinata – On gagnera, pour toi. Me murmura-t-il avant d'entrer sur le terrain.
Une larmichette coula à l'entente de ces mots.
Après être sortie du terrain, Clémence me prit sous son aile desuite. Le coach s'est redressé avec monsieur Takeda –
Ukai – Qu'est-ce qui s'est passé ? Demanda-t-il inquiet.
Takeda – Des marques de strangulations... Murmura-t-il apeuré.
Clémence – Messieurs, si ça ne vous dérange pas, j'emmène Erine dans un coin plus tranquille...
Takeda – Bien. Entendu.
Yachi avait tendu mon sac à dos à Clémence ; elle l'attrapa, et m'embarqua hors du gymnase.
Clémence m'avait emmené dans une salle coupée du monde. Il y avait une petite poignée d'hommes et de femmes, en train de travailler. C'était des journalistes, des collègues de Clémence, des gens gentils.
Rachel – Mais ?! Qu'est-ce qu'elle a ?!
Cette journaliste d'une quarantaine d'années avait attiré les regards des autres vers ma petite personne.
Georges – Erine Togata...
Charles – Je vais chercher un gant avec de l'eau.
Georges – Tenez mademoiselle.
Il m'avait tendu une petite veste. Clémence l'avait elle-même saisie et la déposa autour de mes épaules.
Clémence – Ma puce, plus jamais elle ne t'approchera.
Rachel et Georges me regardaient, inquiet.
Rachel – Ca c'est passé... Ici... ? Lança-t-elle inquiète.
Georges – Il faudrait prévenir un représentant du comité...
Clémence – Ce n'est pas la peine, un confrère s'en occupe.
Je releva ma tête, perturbée.
Clémence – Louis Payne.
Je me mis à pleurer, encore.
Clémence – Il va falloir que tu me racontes tout, ma chérie... Est-ce que tu es capable de tout me raconter ? Dit-elle en dégageant quelques mèches de mon visage.
Moi – Je... Je la déteste...
Clémence avait fait un signe de tête à ses collègues pour qu'ils se retirent.
Rachel – Je vais chercher des chocolats chauds. Georges, tu viens m'aider ?
Georges – Oui.
Les deux journalistes étaient partis.
Je soupira.
Clémence – Ca ne date pas d'aujourd'hui, je me trompe ?
Moi – Non...
Clémence – Je vais t'aider, on va t'aider. Me dit-elle rassurante. Je te promets que plus jamais tu auras à faire à cette méchante femme, tu entends ?! Plus jamais.
Moi – Clémence... Dis-je le souffle couper.
Je m'étais jeté dans ses bras, en pleurant à chaudes larmes. La pression redescendait. Je commençais à prendre conscience que, si Clémence n'était pas venu... Mon dieu... Jeanne allait commettre l'irréparable. Il n'aurait fallu que quelques secondes de plus...
Je suis resté plusieurs minutes dans les bras de Clémence qui tentait désespérément de me calmer. Après dix bonnes minutes, mes larmes s'étaient calmées, comme mon esprit qui était redevenu un peu plus clair.
Entre-temps, les collègues de Clémence étaient revenus. Rachel me tendit un gobelet avec du chocolat chaud, tandis que Charles donna un petit seau d'eau à Clémence avec un gant.
Nous nous étions installés sur les fauteuils qui se trouvaient dans la salle, à l'écart des journalistes. Clémence m'avait donné le gant avec l'eau tiède.
Clémence – Passes-toi de l'eau sur le visage, ça te fera du bien... Et sur le cou, aussi.
Je me frottais le visage, tout doucement. En refermant les yeux, le visage de Jeanne revenait. Je rouvris les yeux, la colère me montait. C'est souvent comme ça, d'abord la tristesse, le fait de cogiter, et la colère... C'est toujours comme ça... Toujours...
Moi – Aux éliminatoires d'octobre. Commençai-je à voix basse.
Clémence m'écoutait, sans rien dire.
Moi – C'était la première fois que je revoyais ma mère, 10 ans plus tard. C'était avant le match face à Aoba Johsai. J'étais contente.
Clémence – Oui, ça peut se comprendre. Comment ça s'est passé ?
Moi – Elle était avec Louis. Elle avait l'air gênée, ou trop pressée par son travail. Au départ, c'est ce que je pensais.
J'avais baissé mon regard. Cela me faisait du mal de repenser à tout ça, à me remémorer tous ces détails...
Moi – Je me suis blessée lors du match face à Shiratorizawa, tu sais, ma cheville. Elle est venue me rendre visite... Et c'est là que ça a commencé.
Clémence fronça légèrement les sourcils.
Moi – Elle voulait m'emmener à part, parce qu'il y avait Tsukishima dans la chambre de l'infirmerie avec moi...
Clémence - Tsukishima... Kei ?
Moi - Oui... Elle allait me forcer à marcher, alors que j'étais blessé. Tsukishima est finalement parti, avec Shimizu, pour le match... Et, à ce moment-là...
Les larmes remontaient.
Clémence m'attrapa les mains.
Clémence – Tu n'as plus rien à craindre, je suis là, moi.
Moi – Elle... Elle m'a frappé au visage, deux fois. Le tout premier contact que j'ai eu avec ma mère, ce fut deux gifles, deux monstrueuses gifles... Sans compter toute cette violence psychologique...
Clémence – Qu'est-ce qu'elle t'a dit ?
Moi – Qu'elle me haïssait depuis qu'elle avait appris mon existence. Je n'ai jamais été désirée. C'était à cause de moi que mes parents se sont séparés... Elle me déteste. Elle ne me considère pas comme sa fille, je ne suis pas sa fille, je la dégoûte...
Clémence – Et ça, c'était lors de la final...
Moi – Et ça a recommencé.
Je lui avais expliqué que, durant le stage à Nekoma, je m'étais retrouvée plusieurs fois face à Jeanne. J'avais reçu de chantage, des coups au visage dont ma lèvre inférieure touchée, par exemple. J'avais aussi eu le droit à des mots blessants comme « ne te loupe pas le prochain coup si tu veux te noyer » ... Sans oublier les gourdes vidées sur ma tête... Toute cette pression de cette femme, tout cet acharnement, je lui avais tout dit. Tout. Sans exception.
Moi – Et j'ai appris récemment qu'elle faisait partie du groupe Radconte.
Clémence – Les fameux... Soupira-t-elle.
Moi – C'est elle qui a annoncé l'accident de papa à ses collègues, c'est elle qui a divulgué l'adresse de la maison avant le harcèlement que ses pions m'ont fait...
Clémence – Elle avait l'adresse ?
Moi – Papa et elle se sont vu dans les semaines qui ont suivi notre emménagement. Il avait parlé de notre nouvelle vie, de notre nouvelle maison. Elle avait posé ce genre de question, au lieu de demander des nouvelles de moi... Je comprend mieux pourquoi maintenant, elle me déteste tant...
Clémence soupira.
Clémence – Je suis désolée d'avoir agi trop tard.
Moi – Personne n'était au courant, personne ne pouvait savoir... Il y en a qui sont au courant, mais pour me protéger ils n'ont rien dit... Je suppose...
Je pensais fortement à Iwaizumi et Tsukishima à ce moment-là. Mina et Samuel aussi. Ces quatre personnes voulaient m'aider, d'une manière ou d'une autre, mais pour ma propre protection personne n'avait rien dit. Je suis sûr que c'est ça pour chacun d'entre eux, même Tsukishima.
Après avoir raconté cette histoire que je cachais depuis des mois maintenant, Louis, le fidèle de Jeanne, était entré en compagnie d'une personne qui ne m'était pas inconnue. Negan Fly, organisateur des événements sportif et ex-volleyeur, et accessoirement l'un des membres du jury qui m'avait évalué lors de mes tests sportifs à la commission sportive.
Negan – Mademoiselle Togata...
Moi – Bonjour...
Negan – J'aurais préféré vous revoir dans d'autres circonstances... Dit-il à la vue de mes marques au visage.
Je baissa les yeux.
Clémence – Clémence Hado, journa...
Negan – Je sais qui vous êtes madame. Votre article sur la commission a eu du succès chez nous. Lança-t-il charmant. Bon, on parlera d'articles plus tard. Votre confrère, monsieur Payne, est venu me chercher... Et m'a appris de terribles nouvelles. Erine ?
Clémence – Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais parler à sa place. Je doute qu'Erine veuille raconter une nouvelle fois tout ce qu'elle a subi depuis ces derniers mois.
Negan – « Tout » ?
Clémence – Vous avez de quoi prendre des notes, j'espère.