Mélandrie Tome 2 : Le plan dé...

By sirfalas

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/!\ Attention, ceci est le tome 2 de l'histoire de Mélandrie. Il est fortement conseillé d'avoir lu le tome 1... More

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25

Chapitre 9

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By sirfalas

 Pendant toute la matinée, Mélandrie avait passé le plus clair de son temps à consoler Kimiri. Si les démons étaient réputés chez les humains pour être des créatures sans cœur et cruel, celui-ci était la preuve qu'ils se trompaient au faisait au moins preuve d'exception. La perte de sa cabane l'avait dévasté. Le peu qu'il possédait avait été réduit en un tas de ruines et, même si le prince avait ordonné la reconstruction de son habitation à ceux qui l'avait détruite, il savait que ça ne serait pas comme avant.

À présent il savait que n'importe qui, pour n'importe quel motif, pouvait lui détruire cet endroit qu'il aimait tant. La jeune démone se sentait d'ailleurs en partie coupable. Parce qu'il était tombé sur elle et qu'il avait voulu la soigner, Kimiri avait emprunté de l'argent pour acheter les potions et n'avait pas pu rembourser à temps.

Étonnamment, ce fut une aide autre que Mélandrie qui réussit à lui remonter légèrement le moral. Après avoir fait son tour à l'extérieur, Wisha était venu gratter à la porte de la chambre pour entrer. En voyant celui à qui son maître l'avait confié dans cet état, le chien démoniaque était allé poser sa tête sur ses genoux en signe d'affection.

Depuis qu'elle les connaissait tous les deux, la jeune démone avait souvent vu Wisha tenter de s'en prendre à lui et le mordre. Sa mâchoire se refermait toujours sur du vide et faisait paniquer le petit démon, à tel point qu'elle s'était dit qu'il ne faisait que le tolérer. Les dires du prince allaient aussi dans ce sens. Mis à part elle, il n'écoutait et n'appréciait que ses deux maîtres.

Le voir se soucier ainsi de lui et tenter de le consoler la menait malgré tout à une autre version de l'histoire. Au fond de lui, Wisha appréciait Kimiri et toutes ses tentatives de le mordre n'était qu'un jeu pour lui qui s'amusait à le voir sursauter et paniquer.

Une autre supposition vint compléter cette théorie. Pendant sa convalescence dans la cabane, Wisha avait été très présent et ne s'y absentait que rarement, sans doute pour retourner au palais. Vu le temps qu'il y avait passé, il devait, lui aussi, être attaché à cet endroit. Après tout, les chiens démoniaques étaient bien plus intelligents que de simples animaux et pouvaient peut-être ressentir des sentiments tels que l'attachement pour un lieu. Kimiri avait perdu sa cabane, mais Wisha avait perdu le refuge où il pouvait être tranquille.

Grâce à la compagnie du chien démoniaque et de Mélandrie, le petit démon avait peu à peu réussi à remonter la pente et à sécher ses larmes. Pour lui changer les idée, la jeune démone lui proposa alors de faire ce qu'ils avaient initialement prévu. Après tout, ils avaient la bénédiction du prince pour utiliser le laboratoire d'alchimie du palais.

Elle réunit donc les ingrédients qu'ils avaient laissés sur la table et suivit Kimiri qui, contrairement à elle qui n'y était allé qu'une seule fois, connaissait bien le chemin. Arrivée devant le laboratoire, elle constata qu'il y avait beaucoup moins de personnes à l'intérieur. Seul un démon d'environ sa taille était voûté sur des fioles et concentré sur sa préparation. Celui-ci interrompit cependant son travail lorsqu'il vit qu'il avait de la visite.

— Kimiri, mademoiselle, salua-t-il. En quoi puis-je vous aider ?

— Bonjour, salua-t-elle. Excusez-nous de vous déranger, mais nous aimerions rester ici un moment.

— Comme vous voulez, mais ne touchez à rien.

— Eh bien en fait... hésita la jeune démone, embarrassée par cette réponse. Nous voulions préparer une potion. Nous avons les ingrédients, mais il nous manque les instruments.

— Kimiri, qu'a dit le maître à ce propos ? gronda gentiment l'alchimiste.

— Moi droit regarder, mais pas toucher, répondit-il en baissant les yeux.

— Pas le droit d'y toucher ? répéta Mélandrie.

— Lorsqu'il a voulu se mettre à l'alchimie, le maître lui a accordé le droit d'utiliser le laboratoire. Cependant, sa maladresse nous a causé bien des soucis. Il n'a pas fait que raté ses préparations.. Il a fait échouer celles des autres.

— Moi pas fait exprès !

— Tu ne l'a pas fait consciemment, mais c'est ta maladresse et ton manque d'attention qui ont produit cette catastrophe. Depuis, le maître ne veut pas qu'il touche à ce qui se trouve ici.

— C'est le prince Amyr qui nous a justement autorisés à utiliser le laboratoire. Ne vous en faites pas, je surveillerais Kimiri pour qu'il ne fasse pas de bêtise et nous n'allons pas tenter de folie, juste suivre une recette que nous avons trouvé dans un livre.

— Et vous vous y connaissez en alchimie ?

— Juste un peu. J'ai une plus grande connaissance des réactifs en eux-mêmes.

— Et vous êtes prête à prendre sur vous s'il arrive quelque chose ?

— J'en porterai la responsabilité, affirma la jeune démone.

— Dans ce cas, d'accord. Installez-vous à une table de travail si vous le souhaitez. Faites juste attention à ce que rien ne soit en préparation dessus.

— Merci. Nous ferons en sorte de ne pas vous déranger.

Après avoir embrassé la salle du regard, Mélandrie trouva un poste où les fioles et autres instruments étaient vides et propres et s'y installa avec Kimiri. Le livre ouvert à la bonne page et les ingrédients disposés sur la page, tout deux commencèrent leur préparation.

Si l'alchimiste les ignora au début, il se mit, au bout d'un moment, à s'intéresser à ce qu'ils faisaient. Kimiri faisait son maximum pour s'appliquer et ne pas avoir de geste maladroit. Il écoutait à la fois Mélandrie qui lui disait quoi faire ainsi que les conseils et les explications de l'alchimiste. Celui-ci, en plus d'astuces pour faire un travail efficace, tenter d'inculquer son savoir, car créer une potion à partir d'une recette était facile, mais savoir pourquoi un mélange de tels ou tels ingrédients donnait une réaction et un effet bien précis était autre chose et permettait, à terme, de réfléchir par soit même à ses propres créations.

Ayant terminé sa partie et en attendant que Kimiri ait assimilé tout ce que disait l'alchimiste, la jeune démone arpenta le laboratoire et jeta un œil aux préparations qui chauffaient. Dans l'un des petits chaudrons qui pouvaient tenir dans une main, un liquide épais et visqueux faisait de grosses bulles à intervalle régulier. À chaque fois que l'une d'elle explosait, une odeur fétide s'en dégageait. La mère de Mélandrie avait préparé de nombreuses potions chez elle, mais jamais elle n'avait senti une odeur comme ça.

— Excusez-moi, est-ce que c'est normal que cette potion ait cet aspect ?

— C'est le travail d'un autre alchimiste, alors je ne sais pas, répondit le démon sans prêter attention à la préparation qu'elle pointait du doigt. Il doit travailler sur quelque chose de nouveau, ne vous en faites pas.

Juste après ces paroles qui se voulaient rassurantes, les bulles se firent plus petites et beaucoup plus nombreuses. Le liquide visqueux jaillit alors entièrement de la marmite et tomba par terre. Là, au lieu de s'étaler, celui-ci garda une forme bombée et ovale qui commença à se déplacer en laissant dans son sillage un sol légèrement creusé.

— Heu... Je ne veux pas vous inquiéter, mais la préparation de votre acolyte a pris vie, annonça la jeune démone en reculant avec prudence.

Intrigué par ce que venait de dire Mélandrie, Kimiri s'approcha, puis la dépassa pour se rendre jusqu'au blob qui continuait à avancer.

— Lui mignon, s'en amusa-t-il.

Tendant la main pour le toucher, le petit démon fut immédiatement retenu et tiré en arrière par son amie. Il n'avait sans doute pas remarqué que la substance qui composait cette chose était corrosive.

— Mais qu'est-ce... Encore ?! s'exclama l'alchimiste.

Sans perdre un instant, le démon se rendit jusqu'à une armoire, y récupéra un pot en terre cuite et lança son contenu, une fine poudre blanche, sur la créature visqueuse. En réponse à cela, la chose se mit à se tortiller dans une forme de plus en plus instable jusqu'à finalement éclater et s'étaler sur le sol. La flaque, à présent inerte, avait perdu son côté corrosif.

— Qu'est-ce que c'était ? Questionna la jeune démone

— Certains appellent ça un limon, d'autres un blob. Le fait de rater une préparation avec certains ingrédients bien précis peut les créer. Ils ont l'air vivants, mais ce ne sont que des masses gluantes qui se déplacent au hasard, en rien un être vivant à part entière.

— Et vous avez dit encore. c'est déjà arrivé ?

— C'est la quatrième fois, souffla l'alchimiste, exaspéré. Nous avions demandé à celui qui travaille sur cette potion de toujours être présent lorsqu'il faisait une nouvelle tentative. Heureusement que vous êtes là. Si vous ne m'aviez pas prévenu ou si vous n'étiez pas venus, j'aurai été trop absorbé par mon travail et cette chose aurait pu faire des ravages avant que je n'intervienne.

— Vous voyez que la présence de Kimiri n'est pas catastrophique, bien au contraire, rit Mélandrie.

— C'est vrai, et en plus, sa potion est en bonne voie, cela me ferait presque changer d'avis sur son interdiction de toucher à quoi que ce soit.

— En parlant de la potion. Où en étions-nous ?

— Eh bien, toutes les préparations intermédiaires sont prêtes, il ne reste plus qu'à les mettre ensemble dans la marmite et à mélanger le tout pendant une dizaine de minutes.

— Moi qui fait ! s'exclama le petit démon avec entrain.

Observant son ami se saisir des différentes fioles qu'ils avaient préparées, Mélandrie s'amusa de le voir se concentrer pour ne pas faire de faux pas. Il ne voulait pas gâcher une seule goutte et l'attention particulière qu'il y mettait se trahissait de par sa langue qu'il tirait.

Une fois tous les produits ajoutés à la marmite sur le feu, Kimiri se mit à mélanger avec énergie et, contrairement à précédemment, se mit à en renverser partout. Heureusement, l'alchimiste le stoppa immédiatement et, plutôt que de le réprimander, lui enseigna le coup de poignet qu'il fallait faire pour obtenir une préparation homogène sans qu'une goutte ne ressorte.

Pendant cette dizaine de minutes où Mélandrie n'avait pas grand-chose à faire, la jeune démone s'intéressa aux armoires et étagères remplies d'ingrédients. Il n'y avait pas à dire, ceux-ci étaient bien plus fournis que ce qu'ils avaient trouvé au marché et d'une toute autre qualité.

Il y avait tout ce qu'elle avait pu approcher dans sa vie lorsqu'elle récupérait les livraisons de sa mère et bien plus encore. Si Tamaa aurait fait beaucoup pour avoir de l'eau pure, elle aurait pu tuer pour certaines choses qui se trouvaient dans ces armoires. Et pourtant, ici, malgré leur valeur, ils n'étaient ni surveillés ni spécialement protégés.

D'un autre côté, personne n'était assez stupide pour tenter de voler le laboratoire d'un prince démon. Elle fit ainsi le tour de leur réserve jusqu'à tomber sur quelque chose qui lui fit froncer les sourcils. Au milieu de tous ces ingrédients, l'un d'entre eux ne semblait pas avoir sa place, ou du moins, ne devait pas la garder pour très longtemps.

— Il va falloir trouver une utilité à ces branches de roncier de soufre, les épines commencent à noircir, commenta-t-elle.

Intrigué, l'alchimiste quitta un instant Kimiri et se rendit auprès d'elle. Il prit la branche qu'elle lui montra et l'examina un instant.

— Vous avez l'œil, constata-t-il.

— Simple question d'habitude. Ma mère était alchimiste et j'allais chercher ses ingrédients. Il n'y avait pas d'argent là où j'étais, mais contre ce genre d'ingrédient, elle devait préparer de nombreuses potions en échange, alors elle m'a appris très jeune à discerner ce genre de chose.

— Malheureusement, nous n'avons pas un tel discernement. Nous jetons très souvent des ingrédients car nous ne faisons pas attention à cela et ces branches n'auraient pas fait exception. Dans le pire des cas, ils se retrouvent dans des préparations et le résultat est bien souvent catastrophique.

— S'il y a tant de gâchis et de problèmes, cela ne me dérange pas de passer régulièrement pour faire un inventaire et pointer ce qui doit être utilisé rapidement, proposa-t-elle.

— Si venir dans un laboratoire d'alchimie ne vous dérange pas, alors ce sera avec plaisir, sourit l'alchimiste.

— Pour beaucoup, les odeurs qui règnent ici son dérangeantes, mais pour moi, cela me ravive des souvenirs. Même si je n'y connais presque rien à l'alchimie, je m'y sens à ma place.

— Ça bientôt fini ? Moi mal au bras ! se plaignit le petit démon qui continuait à remuer sa mixture.

Revenant jusqu'à lui, l'alchimiste déposa la branche de roncier sur la table et saisit une cuillère. Il la plongea dans la mixture et la releva et faisant lentement couler le liquide, puis réitéra l'opération plusieurs fois avec attention.

— tout ça m'a l'air bon. Il ne reste plus qu'à la mettre en bouteille et à laisser reposer une journée entière.

— Moi réussi ! s'exclama Kimiri en sautant sur place, les bras en l'air.

— Bravo ! applaudit Mélandrie. J'étais certaine que tu réussirais. Mais le plus important n'est pas la potion. Le plus important, c'est ce que tu as appris, rappelle-toi bien de tous les conseils que tu as eu.

— Moi tout retenir !

Le voir ainsi, avec un large sourire qui fendait son visage, rassurait Mélandrie. Le matin même, elle avait vu son ami au plus mal et là, il rayonnait comme avant. Elle avait bien fait de lui proposer de venir ici. Cela lui permettait, au moins un temps, de mettre ses soucis et sa tristesse de côté.

— Vu que vous semblez bien partis, pourquoi ne pas en tenter une nouvelle ? Proposa l'alchimiste.

— Nous aurions bien aimé, mais nous avons utilisé tous les ingrédients que nous avons achetés, souffla la jeune démone.

— Ça n'est pas un problème ! contredit-il. J'ai justement en tête une potion abordable pour des débutants qui nécessite des branches de roncier de soufre avec quelques autres ingrédients minimes que nous avons à foison ici.

— Qu'en dis-tu ? On continu ? questionna la jeune démone à son ami.

Alors qu'elle se tournait vers lui, Mélandrie n'eut nul besoin d'avoir sa réponse. Le petit démon était déjà en train de préparer son plan de travail avec des ustensiles propres. Il y avait même, devant lui, certains outils alchimiques dont elle était presque certaine qu'il n'allait pas en avoir l'utilité.

— Alors ? Qu'avons-nous besoin et que devons-nous faire ? Finit-elle par demander à l'alchimiste en se tournant vers lui avec un large sourire.

Pendant tout le reste de la journée, Mélandrie et Kimiri continuèrent à jouer les apprentis alchimistes. Pour la première fois, la jeune démone comprenait l'intérêt que sa mère avait pour cette profession. Les potions en elles-mêmes étaient grandement utile, mais le fait de les préparer et de voir son travail se concrétiser dans une fiole avait ce côté satisfaisant.

Elle se laissa tellement prendre au jeu qu'à partir d'un moment, plutôt que de jouer les assistantes, Mélandrie se mit à préparer les potions dans leur entièreté au même rythme que son ami qui fabriquait la même.

Au final, en plus de la première potion, Mélandrie en confectionna trois de plus, de même que Kimiri, sous la supervision de l'alchimiste qui, lui, avait visiblement prix goût à l'enseignement. En sortant du laboratoire, alors que la nuit venait de tomber, tous deux promirent de repasser pour en apprendre d'avantage ou bien lui rendre la pareille en lui servant d'assistants.

Une fois de retour dans la chambre, Mélandrie constata quelque chose qui la dérangea quelque peu. Elle était imprégnée des odeurs du laboratoire. Si cela ne lui avait pas posé de problème particulier pendant l'après-midi, à présent qu'elle était sortie, cela la dérangeait.

— Je vais prendre un bain, annonça-t-elle.

— Oui. Moi laver ici, répondit le petit démon en pointant la vasque dans le renfoncement.

Des habits de nuit propres en main, la jeune démone quitta la chambre et arpenta les couloirs en quête de la vaste salle de bain que lui avait montré Amyr le jour précédent. Elle avait beau voir parfaitement dans la nuit, tout semblait tout de même différent, si bien qu'elle eût du mal à retrouver son chemin, mais arriva malgré tout, au bout de quelques détours, à trouver ce qu'elle cherchait.

Éclairée à la torche, les reflets dansaient sur l'eau couleur perle. Cette danse avait quelque chose de relaxant, presque hypnotisant et invitait à plonger dans cette eau sans doute plus chaude en apparence qu'en réalité.

Tandis qu'elle posait ses affaires propres sur l'un des meubles prévus à cet effet, un bruit dans l'eau la fit presque sursauter. En se retournant, la jeune démone vit qu'elle n'était pas seule, mais qu'Anidanya se trouvait déjà dans le bassin.

— Oh, excusez-moi, je ne pensais pas trouver quelqu'un à cet instant, je repasserai plus tard, s'excusa-t-elle en reprenant ses affaires.

— Ne partez pas, le bassin est bien assez grand pour deux. J'ai l'habitude de le partager, ne vous en faites pas.

Avec l'approbation de la maîtresse des lieux, Mélandrie reposa ses affaires et se dévêtit avant d'entrer dans cette eau qui, d'après les dires du prince, adoucissait la peau dès le premier bain. Pendant plusieurs minutes, un long silence s'installa. La jeune démone et Anidanya se trouvaient chacune à l'opposé et ne prêtaient pas vraiment attention à l'autre.

Au moins, les odeurs du laboratoire disparaissaient, se réjouit-elle. De plus, si elles étaient remplacées par les effluves qui s'échappaient de cette eau, ça n'en était que mieux. Chez les humains, en plus de plonger dans l'eau, ceux-ci utilisaient du savon pour se nettoyer le corps. Ici, elle avait l'impression que l'effet nettoyant se trouvait directement dans l'étrange liquide semblable, en apparence, à du lait.

— En vérité, vous tombez bien, annonça la maîtresse des lieux, brisant ainsi le silence. J'avais quelques questions à vous poser et je voulais attendre que nous soyons seules pour en discuter.

Si cette introduction ne lui disait rien qui vaille, Mélandrie la laissa tout de même approcher sans montrer la moindre opposition. Après tout, si elle avait paru froide à leur première rencontre, elle s'était légèrement adoucie lors du repas. Peut-être voulait-elle continuer à la connaître.

— Je vous écoute, l'invita-t-elle.

— Je voulais savoir... laissa-t-elle traîner jusqu'à se trouver juste en face d'elle. Qui est ton maître et quel est ta mission ?

— Pardon ?

— Tu peux duper les serviteurs, les alchimistes, les démons à l'extérieur. Tu peux même duper mon époux, mais pas moi. Quel est ton dieu et pourquoi t'a-t-il envoyée ici, ange ?

— Mais je ne suis pas un...

Avant qu'elle n'ait pu formuler sa réponse ainsi que son incompréhension, Anidanya lui saisit le poignet d'une main, la nuque de l'autre et lui plongea la tête sous l'eau. Totalement stupéfaite par la violence de cet enchaînement, Mélandrie ne commença à se débattre que lorsqu'elle sentit qu'il lui était impossible de respirer.

Sa prise était forte et il lui était impossible de s'en dégager. Au bout de quelques secondes, son agresseur lui laissa un répit et lui releva la tête hors de l'eau.

— Quel est ton dieu et pourquoi es-tu ici ?

— Je ne suis pas... commença-t-elle avec une respiration accélérée.

Ce début de réponse ne sembla pas plaire à la femme d'Amyr qui la replongea immédiatement dans l'eau pendant trente secondes avant de la relever de nouveau.

— Réponds !

— Si j'étais un ange, j'aurais des ailes, non ? tenta-t-elle de la convaincre.

— Les ailes ne sortent qu'à l'adolescence, les tiennes doivent juste tarder à venir, rétorqua-t-elle immédiatement. Maintenant réponds !

— Je vous l'ai dit, je ne sers personne ! pleura-t-elle, certaine d'être noyée de nouveau. Kimiri m'a trouvée agonisante dans le désert, vous croyez réellement qu'un dieu aurait envoyé l'un de ses serviteurs se faire mordre par une plante toxique pour pouvoir vous infiltrer ?

Avec une certaine violence qui fit perdre l'équilibre à Mélandrie, Anidanya la lâcha et la repoussa. Étourdie, elle mit un instant avant de retrouver le haut du bas et se relever. Heureusement que le bassin était assez profond et que l'eau lui arrivait au nombril. Si ça n'avait pas été le cas, elle se serait heurté la tête contre le fond, se dit-elle.

Pendant le temps qu'elle avait pris pour se lever, Anidanya en avait profité pour sortir de l'eau et enfilait à présent un peignoir.

— Pour rester ici, il te faut l'approbation de deux personnes. Celle d'Amyr et la mienne, annonça-t-elle. Pour l'instant tu n'as qu'une des deux. Rejoins-moi dans le jardin où nous nous sommes rencontrées et je reverrais peut-être mon jugement. Et, avant que tu ne penses qu'il te suffit de partir, sache que sans la potion que tu dois prendre régulièrement, le poison se réveillera et te mettra dans le même état que celui dans lequel Kimiri t'a trouvée. Le choix t'appartient. Prends ton temps ici, je t'attendrais.

À ces mots, Anidanya sortit de la salle de bain. Mélandrie, sous le choc face à cette brutalité inattendue, alla s'installer sur un rebord qui permettait de s'asseoir dans l'eau. Elle ramena ses jambes à elle et les entoura de ses bras, puis se mit à pleurer, espérant au plus profond d'elle que son père la cherchait et qu'il ne tarderait pas à la trouver.

Cependant, en plus de cela, une image ne cessait de revenir dans l'esprit de la jeune démone. Avant qu'Anidanya n'ait remonté son peignoir sur ses épaules, elle avait pu apercevoir quelque chose d'étonnant. Elle avait pu voir, très distinctement, deux larges cicatrices qui partaient du milieu de ses omoplates et descendaient jusqu'au milieu de son dos.

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