GRIFFIN

By AdrienCmrn

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Eido est un jeune homme marqué par la vie. Un passé chaotique tapis au fond de lui, prêt à resurgir. Il s'est... More

PROLOGUE
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21

Chapitre 13

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By AdrienCmrn

_ Eido ? Réveille-toi c'est l'heure.

J'ouvre les yeux et vois Ethan au pied du lit. Il est à peine trois heures du mat'. Ça fait quelques semaines que tous les trois on fait le mur pour aller traîner dans la rue. On escalade des immeubles, on tabasse des petites frappes et sauve des innocents. Quand on développe des capacités, il faut les utiliser. Justice et protection ce sont les deux mots que l'on défend avec notre art.

Le centre est vide. Les surveillants sont en train de dormir. Seul un vieux gardien se balade avec une torche. Sauf qu'il sait ce qu'on fait et il nous a à la bonne.

L'air est frais et la plupart de ceux qu'on croise sont emmitouflés dans des polaires ou des manteaux. L'adrénaline est notre seule source de chaleur. Il faut qu'on soit léger pour être efficace. En attendant de trouver nos cibles, on escalade un immeuble désaffecté et on regarde le vaste ciel étoilé.

_ Seize ans qu'on est dans ce foutu monde... commence Ethan. Les pires années de ma vie.

_ Arrête la dernière est plutôt pas mal par rapport aux autres, répond Tyler.

_ Pour la première fois, j'ai passé une année entière sans me faire torturer. Je ne me sens pas fatigué par les coups ou les supplices. Mes blessures ont totalement guéri. Donc pour moi, c'est la meilleure année de ma vie.

_ Tu as dû vraiment souffrir ici Eido...

_ Mais maintenant, on est avec toi. Même si Tyler est un peu éclaté du cerveau.

_ Va te faire un cuire un œuf.

_ On est frère Eido. On se protégera toujours, OK ?

On tape nos poings. Soudain un cri perçant retentit dans la nuit. Première intervention. C'est parti.

***

Naomi me fixe avec ses deux billes vertes.

_ Tu n'arrêtais pas de sursauter dans ton sommeil. Encore des souvenirs ?

_ Toujours. Je revis le passé chaque nuit.

_ Quel épisode ?

_ Mes seize ans.

_ Avec Ethan et Tyler ?

_ Oui.

_ Le trio des demeurés.

Elle se lève, secoue sa chevelure blonde et s'habille plus chaudement. Elle fait chauffer le café et retourne sur son écran. Quand elle a quelque-chose en tête, elle ne s'arrête pas. Une vraie dingue du boulot.

J'attends de retrouver complètement mon esprit pour mettre pied à terre. J'ai pas vraiment de but précis à accomplir. Plus de travail, plus d'université, plus d'April, plus rien en fait... Juste Naomi et son inutile croisade.

Je me lève, bois une tasse de carburant et me prépare pour partir.

_ Tu fais quoi aujourd'hui ?

_ Je vais aller courir, puis sûrement m'entraîner. Je n'ai plus grand chose à faire tant que l'université reste fermée.

_ Aide-moi alors.

_ Non.

Soudain une idée me vient à l'esprit. Je lui lance mon portable qu'elle attrape instinctivement.

_ J'ai reçu des messages d'un numéro bizarre avant chaque explosion. Fouille et dis-moi ce que tu trouves. 

_ Je peux TOUT fouiller ?

_ Tu sais bien que je n'ai pas de secret pour toi.

Je sors et commence mon footing à travers la vaste forêt. Il ne fait pas très beau, une tempête pointe le bout de son nez. Courir sous la pluie ce n'est pas un problème, c'est même assez satisfaisant.

***

_ C'est quoi ces blessures que vous avez ? S'écrie M. Wan.

_ Rien. On s'entraîne tous les trois, explique Ethan.

_ Et on tabasse des criminels aussi, se vante Tyler.

Je lui mets un coup de poing dans le ventre. Pourquoi il balance toujours ce qu'il faut pas !

_ Vous faites quoi ?

_ Rien, il plaisante.

_ Tu es sûr Eido ? Si je regarde les infos je ne vais pas tomber sur des nouvelles parlant de justicier qui se baladent dans la rue ces temps-ci ?

_ Il faut bien qu'on se serve de ce qu'on apprend pour les autres, reprend Tyler.

Nouveau coup de poing. 

_ Tu vas arrêter de me frapper !

_ T'es débile.

_ Donc vous vous servez des valeurs que je vous ai inculquées pour frapper des voleurs, des agresseurs et je ne sais pas quoi d'autre la nuit.

_ Oui.

M.Wan prend un bâton et nous frappe violemment en guise de punition.

_ Je ne vais pas vous faire la morale ou essayer de vous faire changer d'avis. Vous défendez les valeurs que je vous ai enseignées. Seulement, soyez prudents... Il y a des forces dans ce monde qui n'aiment pas la révolte.

_ Hé ! Mais pourquoi vous nous avez frappés si vous êtes d'accord ? s'écrie Tyler.

_ J'avais besoin de me défouler, se moque M.Wan.  On va faire quelque-chose : chaque blessure que vous ramenez je vous infligerai le double.

_ Quoi ? Mais vous êtes horrible ! Râle Tyler.

_ Au moins, vous serez plus prudents. Allez vous mettre en tenue, on continue l'entraînement.

***

J'arrête ma course près de la falaise et scrute le vide. Le souvenir de ma première discussion avec April me revient à l'esprit. On était sur le toit de la fac et elle fixait un peu trop le sol.

Je me rends compte alors qu'un petit sourire nostalgique prend forme sur mes lèvres. Une terrible sensation prend possession de mon corps... Sa voix me manque et sa présence aussi. J'aimerais bien la revoir mais je crois que j'ai très peu de chances...
Je m'asseois contre un arbre et laisse mes pensées dériver vers une autre réalité...

***

Une petite semaine se passe tranquillement. Je suis resté dans la cabane avec Naomi, obligé d'écouter ses divagations sur la pourriture de ce système. Depuis l'annonce du maire concernant le couvre-feu et la mise en place de sa milice, plus rien ne va dans cette ville. Tous les soirs à 19 heures, des groupes armés sillonnent les rues pour débusquer le moindre petit délinquant. La loi martiale a été établie et les mercenaires ne réfléchissent pas avant de tirer... Il y a eu beaucoup d'arrestations et beaucoup d'exécutions... La sauvagerie et la barbarie ne se cachent plus. Les hommes laissent libre cours à leur rage et leur colère.

Ben ferme le bar a 18 heures maintenant pour ne pas avoir de problème. Il a tout décalé pour pouvoir accueillir des clients et leur proposer des menus adaptés. Il a toujours de très bonnes idées et arrive toujours à s'en sortir.

Mon téléphone sonne, et je descends de mon arbre.

_ Eido ? Tu peux venir au bar à 17 heures ? J'aurais besoin d'un coup de main pour un truc.

Je réponds par l'affirmative et me dirige vers la cabane. Il doit y avoir une affluence particulière.

Je n'ai pas revu April ni eu de ses nouvelles. Malgré tout, elle est toujours dans un coin de ma tête. Il y a des gens qui entrent dans votre vie en coup de vent et qui vous marquent à jamais. Ils ont une personnalité inoubliable. April en fait partie.
J'ai retrouvé complètement mon instinct de combattant et mes réflexes sont plus aiguisés que jamais. J'ai revu Cyn et sa bande à la salle d'entraînement. Ils ont essayé de me convaincre de les aider mais j'ai refusé. Je ne peux pas...

Je rentre dans la planque et vois Naomi sur le canapé. Elle regarde dans ma direction et rit.

_ Où tu as traîné encore ? Tu es plein de feuilles et d'écorces.

_ J'ai grimpé sur des arbres. Tu comptes rester longtemps ici ? Francis n'est plus là, tu es en sécurité maintenant.

_ Tu veux que j'aille où ? Le campus est encore en construction. Et j'ai nulle part où dormir sauf ici. Et toi ? Pourquoi tu dors ici ? Tu peux aller chez Ben non ?

_ J'aime bien être avec toi. Ça me rappelle quand on vivait ensemble. Tu te rappelles ?

_ Comment oublier ? C'était une sacrée époque. Sans toi, je ne m'en serais pas sortie...

_ Pareil pour moi. Heureusement qu'on s'est rencontré alors et que tu arrives à me supporter.

Elle lève sa main et je la tape avec la mienne.

_ Je n'ai pas encore réussi à déchiffrer le code des messages que tu as reçus. Mais j'y suis presque. Je vais découvrir qui est derrière tout ça.

Je hoche la tête machinalement. Je vais à la douche et me prépare pour aller rejoindre Ben. Sur la route, l'état des rues me surprend beaucoup. On dirait qu'on est en pleine guerre civile... C'est presque ça finalement. On n'a rien le droit de faire. On peut tout juste se déplacer librement. Cette ambiance est vraiment irrespirable... On se sent comprimé et enclavé dans une prison invisible.

J'arrive à 17 heures pile. Ben est derrière le comptoir et il y a peu de clients. Pourquoi m'a-t-il fait venir s'il n'a pas besoin d'aide ? À peine rentré, la salle s'éteint. Sur la scène se dresse une ombre que je connais très bien. Elle commence à chanter et dès les premières notes je sens que quelque-chose ne va pas. Elle n'a plus la même intensité, comme si elle chantait automatiquement un texte qu'elle avait appris par cœur. Je m'approche de Ben et il me lance un regard amusé. 

_ Eido, pile à l'heure c'est rare.

_ Pourquoi tu m'as fais venir ?

_ Tu entends ?

_ Oui.

_ C'est pour ça que je t'ai fait venir. Ça fait une semaine qu'elle est comme ça. À ton avis c'est à cause de qui ?

_ Et ? Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Je ne peux rien pour elle. Elle doit être loin de moi.

_ Je suis d'accord avec toi. Mais ne la laisse pas dans l'ignorance. Tu dois lui dire pourquoi tu as fait ça et tu dois te confier à elle.

_ Pourquoi je devrais faire ça ? Pour qu'elle me repousse encore plus ?

_ Fais-le Eido. Va lui parler.

Je le fixe pour savoir où est son intérêt là-dedans. Ma concentration bascule sur la voix d'April et sa fragile tonalité. Elle finit son morceau et descend de scène. Allez, c'est le moment. Je m'approche d'elle et lui sourit timidement. Je ne sais pas du tout quel comportement adopter...

_ Salut.

_ Salut Eido.

Elle continue sa route vers les coulisses. Je ne dois pas la laisser filer cette fois.

_ Je te paye un verre ?

_ Non ça ira.

_ Je te paye un verre.

Je fais signe à Ben de nous ramener deux bières. Je prends sa main et l'oblige à venir s'asseoir à une table. Dans un premier temps, elle me dévisage furieusement mais devant mon insistance, elle finit par céder.

_ Qu'est-ce que tu veux Eido ?

_ Savoir comment tu vas.

_ ça va. C'est bon t'es content ?

_ Arrête de jouer à ça April. Tu fais la dure mais au fond tu as besoin d'entendre ce que j'ai à te dire.

_ Tu te prends pour qui ? Je n'ai besoin de rien qui vienne de toi.

_ Mais moi oui. J'ai besoin de te parler et de te raconter mon passé. Je veux que tu saches tout sur moi. Après tu pourras te faire l'idée que tu veux. Je l'accepterai entièrement et je disparaîtrai de ta vie.

Notre commande arrive apportée par un Ben un peu trop enjoué à mon goût.

_ J'ai grandi dans un genre de centre d'éducation. Je me suis fait battre et torturer pendant toute mon enfance jusqu'à ce que je rencontre un gars qui m'a appris à me défendre. Le souci c'est que j'ai trop aimé le goût du combat et j'ai fait des tas de trucs que je regrette maintenant. À 17 ans, je suis allé dans une prison pour mineur et c'est là que j'ai rencontré Naomi. Elle m'a aidé à retrouver mon équilibre. On a appris à se connaître et j'ai su ce qu'elle vivait chez elle. En fait, elle passait tout son temps à aider les autres parce que l'enfer l'attendait à son retour. Elle a été abandonnée par ses parents et son tuteur légal se régalait à la rabaisser et à la battre. Elle a fini à l'hôpital beaucoup trop de fois. Elle a côtoyé la mort bien trop souvent...

Un air compatissant a pris possession des traits d'April. Elle me fixe longuement et m'encourage à continuer mon monologue. Je n'avais jamais parlé de ça avec quelqu'un. J'avoue que ça fait du bien, comme si je retirais une écharde de mon talon.

_  Quand on a eu 18 ans tous les deux, on a décidé d’emménager ensemble chez Ben. Il connaissait bien Naomi et sa situation. Elle a tout fait pour éviter son tuteur mais ce n'était pas suffisant. Il la suivait, la harcelait et continuait à la battre dès qu'il pouvait. On a alors décidé de se battre ensemble, légalement. Pendant des années, on a collecté des preuves sur sa violence et les tas de magouilles qu'il faisait. On voulait être sûr qu'il ne ressorte jamais de prison.

_ Qu'est-ce qui s'est passé ?

_ Il y a six mois, on a remis toutes nos recherches et preuves à la police. On était sûr que ça allait marcher. J'ai mis de côté toute ma rage pour faire selon les lois. Et tout ça n'a servi à rien. Les poursuites sont tombées à l'eau. Et il est revenu me narguer... Juste après la mort de Chips et tout ce qui s'est passé...

_ Je suis désolée Eido...

_ Naomi avait disparu et il t'a menacé... J'ai complètement perdu pied et c'est pour ça que j'ai essayé de le tuer.

_ Je peux comprendre toute la haine que tu as ressenti. Mais Eido... Tu as essayé de tuer un homme. Tu as voulu prendre une vie ! Tu te rends compte ? J'ai vu cette expression sur ton visage, une monstruosité t'animait...

_ Je te demande pardon.

Une émotion intense me prend la gorge et je sens que des larmes montent. Je déteste me rappeler de ce passé, je déteste tout ce qui compose mon être et tout ce qui se passe dans mon esprit. J'aimerais tellement disparaître ! J'ai envie de hurler et de tout saccager autour de moi. La colère dévore mes veines, le désespoir brûle mes pensées... Puis un nuage de douceur vient remplacer ce tableau lugubre. Je sens alors un contact sur ma main qui me fait oublier la moindre blessure. April essaye de me ramener à la réalité.

_ Eido ?

J'essuie les perles salées aux coins de mes yeux et me concentre sur elle.

_ Je ne peux pas imaginer tout ce que tu as vécu et tout ce que tu ressens. Je comprends un peu mieux. Mais...

Le mot que je redoutais tant...

_ Je suis d'accord April. Tu dois rester loin de moi. Je crois aussi que c'est mieux. J'espérais naïvement une autre fin mais te parler de tout ça m'a rappelé la noirceur qui m'accompagne. Je ne veux pas que tu souffres...

_ Je suis contente que tu m'aies fait confiance. Je ne veux pas qu'on coupe totalement les ponts. On peut simplement rester de bons copains non ?

_ Si tu veux.

Cette bière a un goût amer ou alors c'est le goût de la déception. Je contemple son apaisant sourire et comprends alors que c'est la dernière fois que je le verrai. Je finis ma bière et me lève pour partir. Le couvre-feu va bientôt retentir et une profonde envie de faire saigner les phalanges me prend.

_ Tu as de quoi rentrer en sécurité ?

_ Oui, je suis venue en voiture. Et toi ?

_ Oui. À plus April.

Ben me rejoint pour que je lui parle mais je m'enferme dans ma carapace et sors de cet endroit devenu trop lourd d'émotions.

Je monte sur le toit d'en face et attends qu'April monte dans sa voiture. Je ne peux pas la raccompagner officiellement mais je peux quand-même veiller sur elle.

Elle rentre dans son petit véhicule et commence à rouler. Je la suis alors en sautant de toit en toit ou en grimpant des escaliers de service. Elle arrive finalement chez elle et je peux récupérer mon souffle.

Le vibreur de mon portable m'annonce un sms. Naomi doit s'inquiéter, ou Ben. Je me rends compte alors que je n'ai plus qu'eux...

_ « On a besoin de toi ! T'es partant ? »

Je m'étais promis de ne pas replonger. Mais les promesses que l'on se fait à soi-même ne servent à rien. Ce sont juste des bouées de plomb que l'on jette à la mer. Plus on s'attache à les honorer plus on s'engouffre dans les abysses. Il est temps de me libérer des entraves que je me suis mis. Plus rien ne me rattache à la raison, la lutte est terminée : j'ai perdu. 

🎱🎱

Hey 🤟 un peu de retard pour ce chapitre désolé !

J'espère qu'il vous plaira 🤟

N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez 😄

À bientôt

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