Piégé

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Mercredi 24 Août.

Nous venons d'entrer dans la maison. Comme convenu, le journal de bord de la mission ne sera rédigé qu'à l'intérieur de l'édifice.

La maison a l'air abandonnée depuis des lustres, alors que le dernier propriétaire est parti seulement 4 jours avant l'épidémie. Nous restons sur nos gardes, elle est peut-être déjà parmi nous, mais comme nous l'avions dit, nous devons trouver un lieu où se reposer avant de la trouver. On ne peut pas partir d'ici avant d'en avoir fini.

Nous avons inspecté la maison, qui n'est remplie que de moisissure et de poussière. Il y a même une cave, elle est remplie de vieilles boîtes de conserves vides et de vêtements. Est-ce que le dernier propriétaire vivait là avant de partir ? Se cachait-il d'elle ? Rien n'est moins sûr.

En remontant au rez-de-chaussée, nous avons remarqué que les escaliers était encore assez solides. Nous avons donc décidé d'y faire un tour, mais encore une fois rien n'est concret, juste des étages meublés et sales, poussiéreux et moisis, une maison à l'abandon comme il y en a des milliers en ces temps rudes. Nous avons trouvé des couvertures assez épargnées par la pourriture que nous pouvons utiliser pour se chauffer.

Les autres étages ne sont pas plus d'intérêt que celui-ci nous allons chercher un endroit où établir notre campement.

Jeudi 25 Août.

La nuit a été longue. Nous avons trouvé une petite cabane non loin de l'habitation dans le jardin, elle semblait ne jamais avoir connu l'abandon. Le petit ou la petite qui y jouait devait être bien content de l'avoir avec tout ces jouets. Je n'ai presque pas su fermer l'œil et avec cette pluie, j'avais peur qu'elle s'approche et que nous soyons pris pour cibles.

Bien que tout cela soit fini, nous avons passé la journée à la chercher et à trouver des indices sur elle. Le plus dur est de savoir où est-ce que nous sommes à l'abris et où nous ne le sommes pas. Mais encore une fois, comme hier, aucun signe d'elle. Soit elle joue avec nous, soit elle n'est pas encore là.

Nous avons également trouvé une radio, le signal est mort, la capitale est peut-être tombée... Rien n'est sûr.

Nous allons essayer de dormir encore une fois dans cette cabane, mais sans les jouets, peut-être qu'elle décidera de se montrer si elle voit que nous aussi, nous jouons avec elle.

Le pire serait qu'elle nous trouve et que nous ne voyions rien; elle aurait alors l'avantage de tout savoir de nous alors que nous, nous ne serions même pas au courant de son apparence. Mais tout compte fait, c'est peut-être mieux. La peur doit être un élément dont elle raffole, donc si nous voulons espérer la voir et en finir, il faut que nous ayons peur, ou du moins, que nous ne soyons pas à l'aise dans ce qu'elle peut déjà appeler son chez soi.

Vendredi 26 Août.

Comme la nuit dernière j'ai eu le sommeil difficile, pour la première fois depuis que nous sommes ici, j'ai rêvé d'elle. Elle avait une forme inimaginable; je ne saurais la décrire, mais ce dont je suis sûr, c'est qu'elle m'a vu. Je ne sais pas si je rêvais ou si c'était réel mais elle m'a vu. Cela voudrait-il dire qu'elle sait où je suis ? Rien n'est moins sûr, je vais essayer d'être encore plus vigilant. Mon équipe, elle, n'a rien rêvé, elle ne ressent rien. Dois-je m'inquiéter ? Je ne sais pas, dois-je paniquer ? Certainement pas.

Nous allons continuer sur la même base en essayant, pour ma part, de garder mon calme, sans mettre en danger mon équipe, sans mettre en danger notre mission, car après tout, nous ne savons rien d'elle, mais nous sommes aussi peut-être le dernier espoir pour arrêter tout ce qu'il se passe dans le monde.

Malgré cela, nous avons trouvé des indices sur le propriétaire de cette maison. Sa carte de visite était posée sur une table comme si elle attendait que son propriétaire vienne la prendre avant une journée au boulot; aucune trace de moisissure, aucune griffure, même pas une marque de clé. A-t-elle déjà servi ? Où est-ce un de ces objets indestructibles qui sont sur le commerce depuis un certain temps ? Ce n'est pas le moment, me suis-je dit, la mission est plus importante.

Mais le meilleur reste à venir; lorsque nous avons inspecté le reste de la maison, tout était retourné à sa place, sans aucune explication, sans aucun sens. La maison était rangée alors que dehors tout était comme d'habitude.

Suis-je en train de devenir fou ? Je préfère ne pas le savoir.

Samedi 27 Août.

Je n'ai pas fermé l'œil, et comme si cela ne suffisait pas, la maison est de nouveau en état de pourriture, la carte de visite déchiquetée et les étages ravagés comme le premier jour.

Cette fois-ci c'est clair je deviens fou. Malgré le fait que nous ne trouvions rien, je la sens, elle est là mais je ne sais pas où. À chaque pas, je la sens, un peu plus proche de moi, un peu plus proche de nous... Sa forme, j'arrive presque à la voir dans la pénombre, mais je n'ose pas croire qu'elle se cache dans l'ombre, prête à nous sauter dessus, comme ça si facilement, alors que nous sommes là depuis quatre jours et trois nuits. Je suis presque sûr qu'elle joue avec nous, ou même rien qu'avec moi, car je suis le seul à la sentir. Peut-être bien que l'autre jour, dans mon rêve, elle m'a bien vu, et peut-être bien que ce n'était pas un rêve.

Nous sommes là, à chercher quelque chose que je suis le seul à sentir, dans un endroit que je n'arrive pas à comprendre sans penser que je deviens fou. Je commence presque à croire que cette mission n'a pas de sens et que nous sommes ici comme un dernier rempart à quelque chose d'insurmontable, d'invincible.

Nous ne trouvons rien, mais peut-être que demain nous allons trouver quelque chose et que nous pourrons enfin nous délivrer de ce calvaire sans nom et essayer de retrouver une vie à peu près normale.

Dimanche 28 Août.

Je suis seul.

Ils ont disparu.

Je ne sais pas comment expliquer, mes mains tremblent de peur, je tremble de peur, face à un ennemi invisible, qui a pris mes équipiers.

Je suis seul dans une cabane qui était censé nous protéger alors qu'ils étaient avec moi à l'intérieur, que me veut-elle ? Pourquoi suis-je toujours là, pourquoi suis-je le seul à être vivant ? En vérité, je ne sais même pas s'ils sont morts, mais je n'ose même pas imaginer les autres éventualités.

Mais elle est là, je la sens. Elle est proche de moi. Plus le choix si je ne veux pas avoir le même sort que mes équipiers. Je dois fuir, je traverse tout le jardin vers ce qu'il semble être la maison mais au moment d'y entrer, je trébuche sur quelque chose qui n'était pas là avant. J'essaye de voir mais impossible, je ne vois rien.

Soudain elle est là et je ne sais pas bouger. Paralysé par la peur, je ne peux que fermer les yeux en attendant le même funeste sort que celui de mes équipiers. Je me prépare à la mort pour la première fois de ma vie.

Mais en rouvrant les yeux pour lui faire face, je ne vois que des murs blancs, vides, comme si la maison s'était à nouveau transformée. Cette fois-ci les murs sont recouverts d'une sorte de linge, d'une extrême blancheur.

Je me tourne et retourne et ne vois rien, je ne vois même plus la porte par laquelle je suis entré.

Comment se fait-il ?

Comment suis-je entré dans cette pièce ?

C'est à ce moment-là que je remarque que je ne sais toujours pas bouger.

Je suis allongé sur le sol, attaché avec une camisole de force.

Elle m'a trouvé.

FIN.

PiégéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant