Chapitre 2: Une enclume

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Comme une enclume il m'est tombé dessus, au sens littéral du terme.
Il était vêtu comme d'habitude si ce n'est que sa petite queue de cheval était un peu défaite. Il était 17h je crois.
Lorsqu'il m'est rentré dedans, il avait l'air gêné et confus. Moi je souriais, il ne montrait jamais ce côté de sa personnalité, restait derrière un masque comme les profs savent si bien le faire normalement. Mais justement, là c'était pas normal. Il ne me regardait plus pareil, il y avait comme un voile dans ces yeux. Il avait pris dix ans en 5 secondes. Je découvrais ses cernes assez profond et un relâchement dans sa posture. Il n'était pas dans un bon état.
Peu après, il repris un air plus confiant et me demanda si je vous pouvais le suivre dans sa salle pour discuter. «Comme avant» disait-il. Avant quoi je ne sais pas.
J'ai accepté, compréhensive (la compassion étant pourtant une qualité qui ne m'a jamais été accordée), et je me suis assise sur le bout de son bureau en entrant.
Il y avait toujours cette même odeur dans sa salle. De ces odeurs qui vous bouscule tout à coup dans le passé. Elle m'était devenu familière et me rappelait l'an passé.
Lui, semblait sérieux, et préoccupé.

«Si c'est pour l'altercation tout à l'heure... c'est rien vous savez»
Mais il ne semblait pas m'entendre.
«Vous êtes sûr que ça va? Vous semblez pas très bien...»

Il se tourne vers moi et baisse la tête
«Je suis désolée Louison [oui, parce qu'il faut savoir qu'on ne m'appelle Lou que depuis un certain temps et justement, la fin de mon récit vous éclairera à ce sujet] mais je dois vous parler de quelque chose».

Je me replaça sur le bureau maladroitement, tout à coup plus vraiment à mon aise.

«Je sais que cela va vous paraître absurde et insensé mais je vous apprécie plus que comme une simple élève.»

Je me leva doucement et souris innocemment. Je ne voulait pas comprendre ce qui se passait mais je parvint à formuler une réponse : «Moi non plus . »

C'est vrai, cela faisait un moment que je le voyait comme d'avantage qu'un professeur. Il avait été pour moi comme un père et je le considérait comme un ami.
I

l fronça les sourcils. Je sentais que quelque chose n'allait pas mais je ne voulais pas l'admettre. Il s'approcha de moi et m'embrassa. J'étais sous le choc, figée, je regardais le cadran au-dessus de son épaule en me demandant si ma meilleure amie m'avait attendu. J'avais besoin de pleurer.

Et puis il s'est décalé, m'a jaugé du regard et a baissé la tête. Mon cœur explosait dans ma poitrine. Le goût de sa salive était encore dans ma bouche et je pouvais la sentir qui descendait dans ma gorge. C'était la première que j'embrassais avec la langue. Mon copain de l'époque n'osait pas le faire.
Et puis je me suis levée en oscillant et je suis sorti doucement. J'avais l'impression de vivre dans un autre monde. Je n'avais pas détesté, je n'avais pas apprécié, c'était comme ce que je faisais avec mon copain. Je ne ressentais rien.
Lorsque je suis rentrée chez moi j'étais dans un état minable, et mon amie ne m'avais pas attendu. Je ne me souviens pas le lui avoir rapproché le lendemain. C'est comme si toute la semaine qui a suivit n'était qu'un énorme trou noir. Je n'arrivais même plus à tenir un stylo.

Et puis à la fin de la semaine, il a voulu recommencer. Mais cette fois-ci je me suis dépêchée de sortir rejoindre mon amie. Je ne voulais plus penser à lui, le voir, l'entendre. Plus jamais de ma vie.
J'ai pris les vacances de noël comme un échappatoire, la fin du match. Mais ce n'étais que le premier quart temps, et pas le plus compliqué à jouer.

Je voulais juste que vous me regardiezWhere stories live. Discover now