Il y eut un silence. Nous nous regardâmes tous. Sept paires d'yeux se dévisagèrent les uns les autres. Ces quelques minutes de battement laissèrent planer sur la pièce une atmosphère lourde de sens, un mélange étrange et hétérogène de pensées plus ou moins bruyantes. Une petite assemblée d'adolescents perdus et remplis d'amour.
Lui était assis par terre, adossé contre le mur. L'autre, juché sur l'accoudoir du gros fauteuil où une des trois filles était avachie, se tenant la tête dans une main. Sur le canapé, un enchevêtrement de corps indiscernables. Encore un autre, allongé sur le tapis, au centre. Et enfin, moi, en tailleur dans le coin le plus sombre du petit salon.
Les respirations désynchronisées formaient un fond sonore apaisant quoiqu'un peu inhabituel. Les grands éclats de voix qui résonnaient tous les vendredis soirs entre ces quatre murs s'étaient tus. Le temps les avait rattrapés. Soudain, ils devaient choisir. Les obligations et les responsabilités s'étaient abattues sur ces sept enfants comme un joug, à présent trop lourd et omniprésent pour être ignoré.
Ces sept regards, intenses, tantôt en suspens, louchant entre la nourriture et les visages des amis avec qui ils avaient tout partagé, tantôt fixés sur les chaussures. Certains yeux étaient embués de larmes mais cachés derrière un genoux, un coude ou une capuche, par pur altruisme, pour éviter de déclencher une averse générale.
Personne n'osait reprendre la parole. L'alarme du micro-ondes brisa alors le silence. Je me levai, me plaçai au centre du cercle et ouvris grands les bras. Tour à tour, tous vinrent se serrer les uns contre les autres autour de moi en un amas de fraternité d'une densité innommable.
"Peut-être qu'on se retrouvera tous ensemble dans vingt ans..."
أنت تقرأ
Bored, words & inspiration
القصة القصيرةQuand tu t'ennuies, choisis des mots au hasard et fais-en un histoire. Ou invente la vie de tes profs. Dans tous les cas : écris.
