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     Assis au chevet du lit d'Adel, je ne peu arrêter de le regarder, de le fixer. Je n'y croyais pas, je ne veux pas y croire. Adel, mon meilleur ami, mon frère, celui qui devait dire un discours à mon enterrement, à mon mariage...

Seul dans la sale de réanimation, les autres sont restés dehors ne voulant pas m'interrompre dans mes pensées les plus enfouies.

C'est fou de se dire que ce genre de choses peuvent nous arriver. On avait tout imaginé, tous les scénarios de vie possible lui et moi, mais jamais envisagé que l'un de nous parte en laissant l'autre continuer son chemin, seul. Trois heures à le regarder et à réfléchir sans dire un mot, et à me répéter encore et encore dans ma tete qu'il n'est pas mort, que dans quelques minutes il va sursauter comme si de rien n'était. Je me suis rappelé ce passage dans un film, ou le mari, dévasté, parle à sa chère épouse dans le coma en essayant de communiquer avec son subconscient et de la réveiller en évoquant certains souvenirs. Je me rapproche de lui, lui tiens la main et choisi mes mots. Je ne suis pas triste de le voir dans cet état car à ce moment précis je suis convaincu de son réveil, de son grand retour parmi nous. Je le regarde et souris et entame mon discours car au fond je sais qu'une partie de lui m'écoutera.

" Tu sais à quel point je ne suis pas fort pour les longs textes... Mais je suis là, à te regarder sur ce lit. J'ai passé toute ma vie à essayer de te protéger, de tout faire pour que tu sois heureux. Est-ce que j'ai échoué ? On dirait bien. Je voulais tellement te retrouver ton père, celui qui t'as tant fait souffrir, jusqu'à en oublier qu'au fond c'était de moi dont t'avais besoin. Je n'ai pas su être là aujourd'hui, le jour ou tu as le plus besoin d'un ami.

Tu te rappelles, - un sourire vient combler l'expression de mon visage- , de ce jour ou on s'est vengé de cette brute à l'école ? Cet abruti te volait ton goûter le matin et on s'en est occupé, tous les deux. Le jour ou ta mère nous a quitté, tu es directement venu chez moi et tu t'es enfermé dans ma chambre, car j'étais ta deuxième maison. De cet été là quand on est partis camper avec Seyf, et que chaque matin je devais me réveiller avant toi et pêcher du poisson en cachette car tu avais horreur de ça. Je devais aussi rester là à t'écouter jouer de ta guitare alors que ce son me cassait mes oreilles. Tu étais tellement nul à cette époque... Mais je restais là à t'applaudir car je croyais en toi et je vois mal ma vie sans toi. Je connais toutes tes habitudes, toutes tes peurs et tous tes rêves. Je sais que les mardi tu n'avais pas guitare et que tu partais au cimetière mais que tu ne me le disais pas juste parce que je te t'avais interdit d'être triste .

- Le regardant droit dans ses yeux fermés avec l'une de mes tetes les plus malheureuses- Réveille toi, dit quelque chose, cligne des yeux, je ne sais pas mais fais quelque chose ! Donne moi un signe, dit moi que tu es là ... S"il te plait...

On s'est dit amis pour la vie, tu ne dois pas partir. Pas maintenant. Il reste tellement de choses à découvrir, tellement de choses que ce monde a à nous offrir. Je me vois mal faire face à la vie sans une épaule sur laquelle me reposer quand les nuits commencent à peser. Cette épaule c'est toi. Je t'ordonne de vivre... "

Isaac: Younes ? - en rentrant subitement dans la pièce-

Younes: - je me retourne et le regarde-

Isaac: Je voulais te dire que j'étais désolé. C'était un super gars.

Younes: Il l'est toujours...

Isaac: - me tend la lettre - J'ai trouvé ça sur la route, je pense que ça lui était destiné.

Younes: - Je reconnais directement l'inscription- " MÊME SI TU NIES, TU SOURIS CAR TU L'AIMES "

Hall Of Fame.Where stories live. Discover now