- Laisse-la, Castiel.

Lysandre avait rarement pris un ton aussi dur avec lui, ce qui surprit le rouquin. Un instant seulement. Il se reprit aussitôt, crachant son venin comme une vipère :

- Te mêle pas de ça, Lysandre. C'est entre moi et ma « meilleure amie », dit-il avec froideur en appuyant sur ces mots.

Le victorien s'approcha, s'interposant entre les deux.

- C'est aussi ma petite amie, désormais, annonça-t-il, aussi froid que son ami. Cela me regarde donc autant que vous.

Rassurée au début par sa présence, Shannon se mit rapidement à craindre pour sa santé. Castiel était instable, et si Lysandre le provoquait, elle ne pouvait prédire ce qui arriverait... Soudain, à l'image du couteau dans la main de Castiel se superposa une autre image semblable, à un détail près : les cheveux du propriétaire de l'arme n'étaient plus rouges, mais blonds. Elle sentit la morsure de la lame sous sa gorge et soudain, tout se brouilla autour d'elle tandis qu'elle luttait pour respirer. Elle sentit le choc de son corps sur le sol, entendit le sifflement de sa pénible respiration, puis, au loin, une voix affolée, un bruit de pas. Elle se sentit soulevée, serrée contre une poitrine à la douce odeur de parchemin, dont elle entendait le cœur battre à un rythme effréné. Rassurée par l'étreinte de ces bras puissants, elle parvint à se calmer : sa vision s'éclaircit et son souffle se calma.

Le regard alarmé de Lysandre valait tous les discours du monde. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais s'aperçut vite qu'elle en était encore incapable. Au lieu de ça, elle lui fit un sourire qu'elle espérait rassurant. Son expression s'adoucit, mais avant qu'il ait pu dire quoi que ce soit – si telle était son intention – ils arrivèrent à l'infirmerie. La jeune femme qui s'en occupait les regarda arriver avec des yeux ronds comme des soucoupes, jusqu'à ce qu'elle reconnaisse Shannon.

- Qu'est-ce qui t'est arrivé, ma belle ? s'inquiéta-t-elle aussitôt. Tu nous fais une rechute ?

Elle avait été mise au courant par le Dr Fernandez de la cure que la jeune fille avait subie, et avait passé beaucoup de temps au téléphone avec elle pour lui apporter un soutien psychologique différent de celui que ses amis ou sa famille pouvaient lui procurer.

Lysandre la déposa sur un lit, et ce fut à ce moment-là que Shannon se rendit compte que non seulement Mr Faraize, le prof d'histoire, était présent, mais aussi Rosalya, Leigh, Iris et Violette. Pas de trace de Castiel ; elle pensa confusément qu'il allait falloir qu'elle en parle avec le victorien. Voire avec tous ses amis. Voire avec son père. Nan, mauvaise idée. Il allait en parler au père de Castiel et ça lui apporterait plus d'ennuis qu'autre chose. Non, ce qu'il faudrait, c'était en parler à...

Elle se saisit la tête à deux mains, soudain saisie d'une migraine atroce. Inquiet, Lysandre voulut s'approcher, mais l'infirmière, remise de sa surprise, lui barra la route.

- Il faut lui laisser de l'air ! Allez, ouste ! les poussa-t-elle dehors.

Shannon allait protester, mais encore une fois sa voix ne lui obéit pas. La jeune femme lui apporta un verre d'eau avec un doliprane, qu'elle accepta avec reconnaissance. Une fois le médicament pris, elle se sentit un peu mieux, même si c'était sans doute plus dû à la fraîcheur de l'eau qu'au paracétamol. L'infirmière la jugea suffisamment en forme pour s'asseoir et elle s'installa à côté d'elle en lui prenant la main.

- Est-ce que ça va ? Y a-t-il quelque chose dont tu aimerais parler ? s'enquit-elle avec douceur.

L'ex-rouquine ouvrit la bouche puis la referma, indécise.

- Prends ton temps, la conseilla la jeune femme. Ne te force pas si tu n'en as pas envie : tu peux venir me voir quand tu veux, et de toute façon tu as mon numéro si besoin.

Amour adolescentWhere stories live. Discover now