LES OFFICIERS DE SA MAJESTE

Depuis le début
                                    

Certains même, heureusement pas nombreux, traficotaient dans la vente de haschich avec leurs propres soldats. Il y avait plusieurs filières de haschisch et je me souviens d'autant mieux du démantèlement de l'une d'entre elles qu'elle était dirigée par un officier supérieur, le lieutenant-colonel B... qui s'en est sorti indemne car il était protégé par Bennani. Eu égard à sa famille, je n'en dirai pas plus sur cet officier qui est mort quelques années plus tard dans un accident d'hélicoptère.

Avec les divers services de renseignement, la police et surtout la gendarmerie prévôtale présente sur place, un tel état de choses ne pouvait échapper au commandement, mais il semble que tout ce beau monde s'était tacitement entendu pour s'enrichir sur le dos des soldats et de la Nation. Ces honteuses dérives alimentaient les discussions des jeunes officiers dans les popotes.

Vers la fin des années soixante dix, en décembre 1979, précisément, toute la zone sud attendit avec impatience l'arrivée de OUHOUD (++ NOTE Du nom d'une des grandes batailles menées par le prophète Mohammed. Cette unité avait été mise en place par Dlimi en 1979 et en 1980 il l'avait installée à Zag, sous l'appellation « 7 ème brigade », en la confiant au colonel el Haïk arrêté en même temps que moi en 1983) .

Depuis cette époque, cette localité, qui avait beaucoup souffert, est devenue une sorte de club Med avec réceptions, orchestres, les vicissitudes du passé ayant miraculeusement disparu...), imposante unité de douze mille hommes très bien armée et équipée de matériels sophistiqués. Certains, comme les appareils de vision nocturne, les gilets pare-balles ou les combinaisons ignifugées, venaient directement d'Israël, pays avec lequel Dlimi entretenait les meilleures relations. Pour les appareils de vision, la hiérarchie marocaine ne prenait même pas la peine de faire disparaître les références en caractères hébraïques. En revanche, sur les combinaisons ignifugées, Israël figurait en lettres latines.

Des hélicoptères assuraient en permanence le ravitaillement de cette clique de ripoux ou d'incapables à partir d'Agadir. Beaucoup d'officiers ont reconnu devant moi n'avoir jamais manqué de glaçons !

C'est aussi la première fois que l'armée marocaine va utiliser du personnel féminin directement dans des unités de combat : une cinquantaine, dont un certain nombre ont vite servi à dissiper l'ennui et à assurer le repos de nos ''valeureux guerriers''.

Cependant, malgré tout le tapage qui l'accompagnait, Ouhoud ne fera en tout et pour tout qu'une balade le long de la côte atlantique jusqu'à Dakhla à l'extrême sud de la province. Mouvement que ne justifiait aucune nécessité tactique, les combats véritables se déroulant plus au Nord et à l'est où se trouvaient les bases avancées du Polisario, notamment du côté de Toukat, à l'est de Smara. Etrangement, toutes les grandes opérations menées par nos troupes à la demande de Hassan II n'ont jamais concerné ces régions. A cette époque, le roi pouvait encore suivre les opérations à la radio. Exaspéré par ce qu'il entendait, il poussait l'état-major à monter de grandes opérations aussi vaines qu'inutiles car elles revenaient à lancer un troupeau de pachydermes contre une bande de macaques. Alors, selon l'humeur du moment, on leur donnait des noms comme « essuie-glace », une allusion à ceux qui cherchaient à se débarrasser des mouches avec leurs essuie-glaces, c'est-à-dire une opération totalement vaine !

A propos de « l'opération essuie glace », le témoignage de ses hommes est accablant pour le colonel major Ben Driss. Certains de ses soldats sont morts de soif alors que lui se douchait avec de l'eau minérale. Cette tragédie n'a, bien sûr, eu aucune suite comme la quasi-totalité des scandales en zone sud.

Durant le passage de Ouhoud à El-Ayoune, la garnison de Bir Inzar, au nord-est de Dakhla, a subi une grande défaite, l'ennemi ayant pénétré dans les lieux en faisant plus de quatre vingt prisonniers et en récupérant autant d'armes et de matériel qu'il pouvait en transporter. Pourtant, cet événement a été présenté par les organes d'information marocains comme une grande victoire. Plusieurs villes et places du royaume portent d'ailleurs le nom de cette localité, glorifiant ainsi cette « bataille ».

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 01, 2010 ⏰

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