L'un et l'autre

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Ils étaient là, l'un face à l'autre, le regard de roc du jeune homme plongé dans celui océanique de la jeune fille, comme la vague s'écrasant doucement sur la falaise.


Lui, il était grand et brun comme l'écorce d'un grand chêne, le genre d'énorme arbre que l'on trouvait dans les forêts épaisses et fertiles.

Elle, était petite et blonde comme les blés, tout le contraire de lui, d'ailleurs, mais ils s'aimaient, en secret, certes, mais à ce moment là, il n'y avait que ça qui comptait.



Ils auraient pu rester là, à quelques centimètres l'un de l'autre, des heures entières, toute une année, toute une vie, mais le temps filait entre leurs doigts et ils voulaient profiter de chaque grains qui s'écoulait dans le sablier de verre qu'étaient leurs vies.



-Je t'aime, finit-il par annoncer, trouant le néant.


C'était deux mots, quelques lettres seulement, mais chacune d'entre elles avaient été pesées des centaines de fois par le jeune homme, à chaque fois qu'il posait ses yeux sur son visage angélique dans ses rêves, mais aussi ses cauchemars. 


Elle aussi, elle l'aimait, mais elle avait peur. Non, pas peur de lui, mais d'eux. La jeune fille savait ce qu'il adviendrait de ce «nous» qu'ils auraient créé. 

Seulement des mots, qui ne deviendraient rien d'autre que des maux. 

Elle l'aimait, oh que oui. 

Mais lui? Certes, à cet instant, tandis qu'il l'observait, les sourcils légèrement froncés, les yeux brillants d'inquiétude, attendant certainement une réponse, il l'aimait. Mais dans quelques jours, quelques mois ou quelques années, ce sentiment serait-il toujours présent?


Non.

Elle le savait.

Par expérience.

Dans quelques temps, il l'oublierait, il lui briserait le cœur, il la laisserait seule au bord de la falaise, un torrent noirâtre de remord grouillant à ses pieds. Le jeune homme perdra son amour pour elle mais le sien sera marqué au fer rouge.

Tout était déjà écrit, pour elle

Ses pensées s'arrêtèrent alors de lui envahir l'esprit et elle leva vers lui des yeux embués de larmes brûlantes. D'une voix tremblante et à peine audible, elle lui dit :

«Lui aussi, il m'aimait.»

Puis, elle s'en alla doucement, le pas lent, dans le brouillard épais et matinal, laissant le jeune homme au bord du gouffre, dont elle même était terrifiée.

-


Voilà donc le premier écrit de " Prosodie".

J'espère de tout cœur qu'il vous plait, n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez car ça m'aide beaucoup à progresser, surtout que je débute ce recueil. 

Suite mercredi 13 janvier. 





ProsodieWhere stories live. Discover now