Chroniques du Roi-Sorcier - Balkar - la voie du magicien

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— Rendez-vous, Seigneur Terrence Longjoyaux, et il ne vous sera fait aucun mal. Votre femme et vos enfants garderont la vie sauve, je vous en fais la promesse ! Mais si vous persistez, vous mourrez.

Le Duc Terrence haletait, une lueur de haine tapie au fond des yeux. Mais sa force commençait à le trahir, et il ne tenait plus la garde de son épée que grâce à l'énergie du désespoir. Il avait dû se débarrasser de son bouclier, brisé en deux d'un coup de hache par son adversaire. Le choc lui avait brisé tous les os du bras, le laissant sans défense face au Général Verswoort. Il n'avait plus aucune chance, il le savait, mais il persistait à vouloir se battre. Il songea à Gunderhilde et à ses enfants, qui devaient l'attendre, terrés dans une pièce secrète du château Mounahir, quelques mètres plus loin, à peine. Il devait les rejoindre et s'enfuir avec eux. Les protéger coûte que coûte !

Bon sang, fulmina Terrence. Si cet homme ne m'avait pas rattrapé ici, dans la salle du trône, je serais déjà loin et en sécurité avec ma famille !

— Comment pourrais-je vous faire confiance, s'exclama alors le Duc, espérant gagner suffisamment de temps pour que sa tête cesse de lui tourner. Balkar n'a pas la réputation de tenir ses promesses, insista-t-il.

— Qu'avez-vous à perdre ? répondit Verswoort. À la prochaine passe, je vous tuerai. D'un autre côté, vous avez encore une chance de sauver votre famille, en prenant une décision sage et réfléchie.

Tout en disant cela, Verswoort fit mine de s'approcher de Terrence. Il n'est même pas essoufflé ! réalisa le Duc avec effroi, tandis que son adversaire levait sa hache, une lueur de détermination dans son regard gris acier.

— Verswoort, vous êtes un homme de bien, reprit Terrence. Je vous connais. Votre père et moi-même fûmes proches amis. Nous avons lutté côte à côte lors de la guerre contre les Sunaks, puis encore lors de l'assaut de la passe de Naldrid. Il était noble, et droit, et je sais que vous êtes son digne fils. Comment pouvez-vous prêter allégeance au Roi-Sorcier Balkar ? C'est un despote, un tyran sanguinaire qui ne rêve que de massacres et de pillages ! Réveillez-vous, il est temps ! Joignez-vous à moi !

Tout en parlant, le Duc reculait pas à pas. Il se rapprochait insensiblement de l'imposante cheminée qui réchauffait la salle du trône. Il buta tout à coup contre le corps de Martha, la vieille servante. Un instant, Terrence se revit, enfant, dans les bras de cette nourrice au cœur d'or. Des larmes roulèrent sur ses joues couvertes de la boue et du sang des combats.

En cette funeste journée, il avait tout perdu, ou presque. Les catapultes et les artifices thaumaturgiques du Roi-Sorcier avaient méthodiquement rasé les murailles de Mounahir, la forteresse millénaire des Longjoyaux. Les sapeurs de Balkar n'avaient pas usurpé leur réputation.

Le reste n'avait été qu'un jeu de massacre, qui avait vu périr la fine fleur des troupes rassemblées par Terrence deux ans auparavant. Deux ans d'espoirs réduits à néant, se résumant au cadavre d'une vieille femme et à une place forte aux tours éventrées, calcinées.

Le Duc Terrence secoua la tête. Il sentait la chaleur du brasier lui caresser le dos. Il laissa tomber son épée, qui s'abattit sur le sol dans un grand fracas métallique. Dans le même instant, il posa sa main droite sur le linteau de la cheminée et appuya sur une brique au mortier disjoint. Un pan de mur commença à tourner sur lui-même avec un sinistre raclement, révélant l'entrée d'un étroit tunnel. Avant que Verswoort ait pu réagir, Terrence s'était engagé dans le boyau, et l'épaisse muraille commença à reprendre sa place.

Un cri terrible s'éleva alors, en provenance de la chambre secrète, pour s'interrompre avec brutalité. Le sang de Terrence se glaça dans ses veines lorsqu'il comprit que c'était sa femme qui hurlait ainsi.

Les Terres Sombres - Arc des Rois-SorciersDär berättelser lever. Upptäck nu