4. Les roches bleues

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Jason et Séraphine partirent dans la direction indiquée par le vieillard aveugle, le laissant savourer pour la première fois depuis des lustres, un met qui n'aurait pas été souillé par les harpies. Comme il le leur avait dit, ils rencontrèrent après un moment de marche une immense falaise qui, de sa hauteur, leur barrait la route.

Tandis qu'ils avaient tourné dans un désert de sable jaune et de pierres marron les jours précédents, cet escarpement leur présenta une tout autre nature. La palette de couleurs affichée allait du blanc au rouge en passant par le beige et l'orange. Elle se heurtait au vert de la végétation, et à son passé. Véritable musée géologique grandeur nature, dix strates de différents sédiments apparaissaient sur les falaises, chacune possédant sa teinte et son histoire.

Jason s'arrêta bouche bée, émerveillé par ce spectacle grandiose. À côté de lui, Séraphine d'ordinaire peu sensible aux attraits des paysages qu'ils rencontraient en fit de même. Elle leva la tête. Au pied de cette falaise, la lutine se sentit encore plus petite.

« Pourquoi elles s'appellent les montagnes bleues ? questionna Jason le nez dressé vers le ciel. Il y a bien toutes les couleurs, mais sûrement pas de bleu !

— C'est peut-être ça le truc, répondit simplement Séraphine.

— C'est n'importe quoi, t'appelles pas un machin bleu s'il est rouge !

— Je ne sais pas moi. Celui qui les a nommées était peut-être daltonien.

— Ah ça non, il n'était pas draconien ! Mais il ne devait pas y voir très clair.

— En même temps qu'est-ce que ça peut faire ? T'as qu'à les rebaptiser les roches rouges et on n'en parle plus !

— C'est qu'il s'agirait d'être un peu précis ! »

Ils reprirent leur marche sans quitter cet ouvrage de la nature qui montait droit vers le ciel. Sur le côté, le soleil déclinait de plus en plus. Il ne tarderait pas à disparaître complètement derrière les montagnes.

Lorsqu'ils stoppèrent le soir pour bivouaquer ils n'avaient toujours pas trouvé trace du passage qui devait leur permettre de traverser cette muraille et rejoindre la partie ouest d'Evéapia.

La nuit fut claire. Pas un seul nuage ne vint masquer la lune. La magicienne profita de l'astre lumineux pour se plonger dans ses grimoires. Même si, à force de pratique, elle avait fini par maîtriser les fondamentaux, il lui restait encore beaucoup de chemin à parcourir pour atteindre le niveau supérieur. Surtout que, d'un jour sur l'autre, elle oubliait les formules potassées la veille. Chaque jour, elle s'astreignait donc à la relecture de ses notes, se demandant si elle n'aurait pas eu mieux fait d'embrasser la profession de voleur comme bon nombre de ses congénères.

De son côté, Jason tira parti du calme de la soirée pour améliorer son armement. Il sortit de son sac la petite fiole de poudre explosive acquise au marché et en observa le contenu, un large sourire sur les lèvres.

***

Le lendemain, ils repartirent, toujours longeant la falaise en direction du nord. Le soleil levant leur tapait dans l'œil et ils durent marcher en se protégeant de leur bras tant celui-ci les gênait.

Enfin à midi, alors que l'astre s'était positionné pour leur cogner sur le crâne, ils aperçurent la faille. Elle mesurait tout juste trois mètres de large et ouvrait l'escarpement en deux, perpendiculairement. Elle serpentait sur la largeur des montagnes ; on pouvait apercevoir l'autre côté. En empruntant cette route, les deux aventuriers devaient gagner de précieuses semaines, leur évitant un grand contournement. Pourtant, malgré cet avantage indéniable, ce raccourci était rarement utilisé, car jugé trop périlleux par les voyageurs avisés.

Jason et la toison d'orحيث تعيش القصص. اكتشف الآن