~ Chapitre 4 partie I ~

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Quittant sa sieste, ce sommeil qui l'avait emportée malgré elle, Agnès marchait calmement dans les couloirs étroits et sans fin du château. Néanmoins, des bruits l'interpellèrent. Des rires et des exclamations féminines l'interrogèrent... Elle se dirigea avec curiosité vers l'une des fenêtres. Il y avait un groupe de personnes à l'entrée principale du château. A première vue, il s'agissait de personnes d'un rang élevé. Agnès ne pouvait être conviée à de tels évènements. Elle réprima un soupir lorsqu'elle aperçut Isabeau de Bavière, entourée de duchesses aussi extravagantes. Elles étaient vêtues de jupes bouffantes, dont la superposition de nombreuses couches amusait Agnès. Elle pouvait imaginer sous le soleil chaleureux, la chemise, une cotte et un corset... Le tout façonné de différents velours. Quant à leur coiffure, la plupart portait un escoffion enveloppé d'un bonnet-chaperons à perles. Elles présentaient aussi une collerette à leur cou.

Agnès connaissait ce corps rigide sous le corset, mais elle ne s'adonnait pas entièrement à la mode française. Elle préférait un habit de soie à un habit de velours, des couleurs pâles plutôt que des couleurs sombres, une coiffe tressée plutôt qu'une coiffe en tissu... L'unique jalousie qu'elle pouvait porter à ces dames était le scintillement de leurs bijoux. Ils représentaient une richesse incommensurable et Agnès avait l'air ridicule, avec ses fins joyaux.

Finalement, elle se mit à observer le reste du troupeau. Ducs, Marquis, quelques Comtes et le Cardinal de Lorraine vêtu tout de rouge... Elle n'apercevait pas Alexandre de Savoie. Mais elle ne désespérait pas. Elle osa ouvrir la fenêtre d'un geste brusque, un vent frais lui parvint aux joues. Cela lui dégageait la vue ! Au même moment, elle vit arriver un personnage. Il semblait avoir attendu que l'ensemble de la cour se déplace au château de Blois, avant d'entrer dans la demeure de pierre. Elle retînt son souffle tandis que les joies et l'émerveillement s'emparaient des spectateurs.

Une main posée sur le pommeau de son épée, l'autre tenant les rênes de son cheval, les flèches jaillissant du carquois maintenu sur son dos... Il déclinait la mode espagnole dans un accoutrement splendide. Les femmes ne cachèrent pas leur éclats d'enchantement. Il était bel homme. Il était même plus que bel homme s'avoua Agnès.

Pendant que le Cardinal de Lorraine le recevait, elle détaillait l'envergure de sa beauté. Sous les vêtements aux parures somptueuses se dessinait un corps de guerrier... Les muscles saillants, les veines gonflées de bravoure, la poigne à ses armes comme le ferait un suzerain auquel n'importe quel homme offrirait sa vie. Elle sut qu'il s'agissait du cher Duc de Vendôme.

Le Cardinal invita le groupe de riches nobles ainsi que le Duc à se rendre dans la cour du château. Dans cette soif de le découvrir encore un peu plus, et dans les battements violents de son cœur, Agnès s'élança vers ses appartements pour les rejoindre. Elle se perdait dans ses pas avant de parvenir à sa chambre et de s'y engouffrer. Le bruit assourdissant du dehors lui indiquait qu'ils avaient franchi la façade. Elle approcha calmement de son balcon tandis que l'air pur la réveillait quelque peu de ses étourdissements. Elle posa ses mains sur la pierre humide, et laissa son regard divaguer vers le Duc. Elle allait l'apercevoir une seconde fois, comprendre que l'attraction n'était qu'illusion. Il ne pouvait être l'homme qu'elle désirerait... Le Marquis était suffisant, elle l'avait assuré à son amie Jeanne. Et les deux hommes paraissaient si différents. Le Duc devait être arrogant, aimant glorifier sa richesse et ses conquêtes de chevalier vaillant.

Alors il lui suffirait de le fixer, seulement quelques instants ... Et elle se rendrait compte que toutes ses pensées n'appartenaient qu'au Marquis. Mais il était si superbe. On ne voyait que lui, cette prestance à en couper le souffle, cette nature guerrière qui exprimait une virilité attrayante. Elle ne pouvait le quitter des yeux. Elle ne pouvait le comprendre. Pourquoi les musiciens de tambours, frappaient-ils si fort dans sa poitrine ? Devenant de plus en plus intenses, accélérant la cadence, à mesure qu'elle le trouvait majestueux... Jusqu'à ce que son regard rencontre le sien.

Tout son être se figea. Elle ne respirait plus, ne pensait plus, n'entendait plus... Seule sa vision persistait à survivre. Les yeux caramel, une fine bouche, une barbe légèrement dessinée et des yeux profonds... Un regard de prédateur qui la saisissait toute entière. Ses pupilles scintillantes de courage s'ancraient avec violence, la déshabillaient, la déstabilisaient. Elle suppliait qu'il détourne le regard et en même temps, elle quémandait à ce qu'ils se perdent l'un dans l'autre. Son cœur dansait en elle, et son rythme haletant lui valait un épuisant vertige.

Mais que lui arrivait-il ? Était-ce cela, la passion foudroyante, l'envoûtement d'une femme par un homme ? C'était différent de ce qu'elle avait pu ressentir pour le Marquis de Savoie. Ce n'était pas comparable. Il avait suffit d'un simple regard partagé avec cet homme pour en avoir l'esprit confus, la fâcheuse impression de voler. Ce Duc séduisant et à la beauté agressive... Elle ne pouvait s'empêcher de croire que ses pensées étaient coupables.  

  

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L'AgnèsWhere stories live. Discover now