Éclaircie - J'ai mal

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13/09/2022


Mon cœur me fait mal à force de battre.
Il bat trop, trop fort, trop vite. Sans aucune raison.

Ma tête me fait mal à force de penser.
Elle pense trop, trop fort, trop vite. Pour plein de raisons.

Mon esprit me fait mal à force de se déchirer.
Il se casse trop, trop fort, trop vite. Pour une seule raison.

Mes jambes me font mal à force de courir. Elles ne courent pas assez, pas assez fort, pas assez vite.

Comme une télévision coincée sur une seule chaîne, je ressasse en boucle les mêmes questions, les mêmes idées, les mêmes mots, et chaque journée n'est qu'un copier-coller de la précédente, sans vie, sans goût, sans couleur, sans valeur, sans intérêt.

Tout cela a tellement peu d'intérêt qu'hier, quand j'ai posé la lame sur ma gorge, je n'ai rien ressenti. Pas d'envie d'en finir, pas d'envie de continuer non plus, seule une indifférence totale face à l'objet froid et coupant. J'aurais pu appuyer et me trancher la gorge d'un seul coup.

La seule chose qui me fait peur quand j'y pense, ce n'est pas l'idée que j'aurais pu mourir si j'avais appuyé.
C'est le fait que j'aurais pu appuyer. Sans avoir envie, ni de le faire, ni d'y résister.

J'ai l'impression que mon cerveau est complètement vide. Comme une dissociation permanente. Même quand je dors. Ça fait des semaines que je n'ai pas rêvé. Je ne dessine plus. Je n'écris presque plus. Mes histoires sont au point mort, même parler me demande un effort de concentration intense.

Rien que pour faire une phrase et aligner trois mots, il faut que je me colle la migraine. C'est tellement dur. Si je le pouvais, je passerais une semaine sans rien dire.

Et quand ce n'est pas l'indifférence, c'est la colère. Une colère monstrueuse, énorme, qui enfle et qui rampe, qui enserre mon esprit, et pas moyen de m'en débarrasser. Parfois elle se calme, mais c'est instable, et la moindre minuscule contrariété me fait basculer dans tout ce qui m'a indigné ces dernières années. Comme si dix ans de colère me tombaient d'un seul coup sur le coin de la gueule.

C'est tellement d'émotions d'un coup que je n'arrive même pas à pleurer. Je ne peux que bégayer en essayant de parler.

Même quand je souris sincèrement, j'ai le sentiment que c'est faux. Tout est factice. Je suis complètement extérieur à ce qui m'entoure.
Si je mourrais maintenant, je ne ressentirai que la douleur physique. Je n'ai pas spécialement envie de mourir, rassurez vous...
Mais je n'ai pas spécialement envie de vivre non plus...
Et ça, ça peut se régler très facilement, et très rapidement. D'un seul coup...
Je peux me donner la mort quand je veux, où je veux. Et c'est ça qui est effrayant, non ?

Je vis trop. Et ça m'embête.

- INSOMNIES - Sombres joursWhere stories live. Discover now