Prologue

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(Vingt et un an avant l'Ere de l'Hommage)

Une pluie battante inondait les rues et les chemins. La terre était devenue gadoue. L'orage réveilla la petite chose dans les bras d'une femme, qui tentait d'étouffer ses cris contre elle.

-Shhh.. shh... nous sommes bientôt arrivées à destination..., murmura-t-elle

Son cœur battait la chamade : ce qu'elle faisait, pouvait lui coûter la vie, mais c'était les cloches de sa conscience qui avaient sonné en elle. Ce serait peut-être son dernier acte avant de mourir pour avoir laissé échapper un tel spécimen. Une si petite chose qui pouvait connaître un destin funeste et houleux. Subir les seringues et autres expériences passaient, mais en faire un sujet de reproduction, non, non, non... il en était hors de question...

Le nourrisson réussit à se calmer, calé contre la jeune femme aux cheveux auburn. La chaleur l'endormit et elle poussa un soupir de soulagement. Elle, était gelée et trempée jusqu'aux os. C'était le prix à payer... mais elle voulait accomplir une bonne action... alors qu'elle remit en place la longue cape qui couvrait son corps, elle ne put réprimer un soudain frisson et sentir malgré la capuche l'eau passer au travers du tissu pour coller ses cheveux contre son front et le faire dégouliner. Ses pieds mouillés dans ses chaussures émirent un bruit spongieux et désagréable pour elle.

Cela ne l'arrêta pas : elle était bientôt au point de rendez-vous... dans les petites rues de Junon, où les vieilles maisons de bois se dressaient comme de vieux vestiges d'un autre temps avant la Shinra, elle s'approcha d'une maison en particulier et ouvrit le petit portail en bois arrivant à moitié de sa taille. Quand elle le franchit, elle traversa une petite allée, ignorant les petites fleurs qui poussaient ça et là et qui allait bientôt fleurir. Ce n'était que le début de printemps, les giboulées étaient là et à son grand dam, la pluie se métamorphosa en une effroyable grêle ; les morceaux de glaçons gros comme des petites billes tombèrent et firent des bruits comme des cailloux qui tombaient en trombe dans un seau d'eau. Elle se dépêcha et se mit à l'abri de cette intempérie sous la petite toiture d'accueil de la maison. Elle sonna à la porte, avec des doigts tremblants. Elle claquait des dents aussi... « Faites qu'elles soient là... s'il vous plaît... » se dit-elle, alors que le bébé pleura soudainement, capable d'attirer l'attention. Des fantassins passaient par-là, mais ne semblaient pas prêter attention aux cris incessant du nourrisson, préférant pester contre ce sale temps. Elle eu un petit sourire, rassurée : les laboratoires n'avaient pas encore donné l'alerte...

Elle se tourna vivement vers la porte qui s'ouvrit. Une femme plus âgée qu'elle l'accueillit :

-Par la Déesse, Orianna, vite, rentre !

Elle ne se fit pas prier, et se précipita à l'intérieur. Une fois au sec, elle déposa sa précieuse cargaison sur le canapé et enleva sa cape gorgée d'eau. Elle-même était mouillée et l'état de ses vêtements ne pouvait que justifier ce qui se passait dehors... l'autre femme arriva avec des serviettes. La dénommée Orianna en saisit une et sécha le bébé afin de lui éviter un rhume. Son tour viendrait ensuite.

-Elle n'a rien ?

-Non, j'ai réussi à la réchauffer et lui épargner la douche de dehors..., fit-elle les yeux rivés sur l'enfant.

Elle bougeait dans ses petits vêtements d'hôpital. On pouvait aisément deviner sa petite corpulence et ses yeux plissés qui montrait ses expressions. Elle pleurait encore, mais le contact de la chaleur et la douceur du tissu finirent par l'apaiser au fur et à mesure. Les deux femmes se regardèrent :

-Personne ne t'a suivi ?

-Non, personne. Sinon je ne serais pas là... et elle non plus.

-Bien, bien, bien... sa future famille devrait arriver d'ici deux jours. Elle sera placée dans une famille au Wutai, dans un village assez reculé de la Capitale Impériale. Ainsi elle pourra vivre une vie tranquille loin de tous ces problèmes... loin de la Shinra...

-Et loin de son frère, qu'elle ne connaîtra jamais. Ils ont été séparés suffisamment tôt pour ne pas pouvoir créer un quelconque lien. Ils seront étrangers l'un de l'autre.

-Malgré les cellules en eux ?

Elle inclina la tête, sûre de cela. Elle se sécha à son tour et regarda son amie :

-Fiona, aurais-tu des vêtements à me prêter ? Je risque une pneumonie comme ça.

-Oui, je vais te donner ça. Emmenons-là à l'étage.

ooo

Une fois changée et réchauffée, Orianna s'était installée dans le salon, buvant une tasse de thé, attendant que la pluie cesse. Elle pensait à l'avenir de la petite, un pincement au cœur tout de même : elle ne pourrait pas sauver son frère qui était aux mains de Hojo, à Nibelheim. Elle secoua la tête et vit Fiona s'asseoir à ses côtés.

-Tu as fait ce que tu as pu, Orianna...

-C'est tout de même frustrant... mais je suis heureuse pour elle, elle vivra une belle vie.

-En effet. Et toi, où seras-tu assignée bientôt ?

-A Corel, pour un projet qui semble assez important. C'est un laboratoire d'expérimentation... le même schéma va recommencer... mais je ne pourrais pas les sauver... les nouveaux... vu le risque que cela m'a pris, je préfère ne pas recommencer... même si l'un d'entre eux doit être mon fils.

Fiona soupira longuement, mais se retint tout commentaire. Son amie leva alors les yeux vers le plafond et laissa le silence s'installer. Ces manipulations génétiques allaient causer le malheur sur cette planète... elle le sentait... elle n'avait que 16 ans mais... le peu qu'elle avait vu le lui faisait penser...

ooo

Les deux parents furent émus de voir la petite frimousse argentée qui leur souriait et jouait avec eux. Elle était définitivement adoptée par les Wutaiens qui remercièrent les deux femmes de ce don du Léviathan. Ils ne pouvaient pas avoir d'enfants, alors voir cet amour dans leur bras les rendait heureux. Ils avaient traversé la mer et Westeria pour en arriver ici et leur patience porta leurs fruits quand ils découvrirent le petite dans son berceau. Elle était vivante et enchantait le couple. Orianna eut un pincement au cœur, tout de même fière d'avoir offert le bonheur à ces deux personnes.

-Vous habitez loin de la Capitale n'est-ce pas ?

-Tout à fait, nous sommes dans un petit village, assez éloigné dans les montagnes, vers le Sud. Les touristes ne s'y aventurent quasiment jamais et encore moins les hommes de la Shinra, répondit la femme

-Elle grandira dans la sérénité et l'harmonie, assura l'homme qui caressait le bout du nez du bébé.

Elle répondit par des gazouillis de joie, gesticulant dans les bras de la femme pour faire son petit numéro. Elle fit rire tout le monde et la mère adoptive répondit :

-Quel caractère de feu !

-Aussi vivace qu'une flamme, c'est vrai, renchérit le compagnon

-Avez-vous un nom en particulier pour elle ? demanda Fiona

Ils se regardèrent, avant de se tourner vers le nourrisson si innocent et si insouciant. Elle ne comprenait pas ce qui allait lui arriver, elle était dans son monde en pleine découverte de son environnement, à jouer avec n'importe quoi, même les cheveux de la Wutaienne, qu'elle serrait dans ses petites mains potelées, à crier surexcitée par son exploit. La mère eut un sourire attendrie par cette énergie :

-Oui... je crois que j'en ai un pour elle... Karen.

La Voie du Pardon, Le Codex de Gaia : le Livre du WutaiUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum