Chapitre 48 - Le sens du devoir

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Un simple mot qui balaya toutes ses barrières. Si brutalement qu'elle mit quelques secondes à réaliser que des larmes brouillaient sa vue. Que des perles brûlantes et salées coulaient sur ses joues.

Ambroise ne parut pas les remarquer. Pourtant, aucun détail ne lui échappait jamais, Lizzie le savait bien.

— Était-elle la seule témoin ?

Le ventre de Lizzie se tordit. Elle acquiesça, et Ambroise la dépassa pour rejoindre la porte.

Non, hurla-t-elle en son for intérieur.

Elle voulait le retenir, elle voulait qu'il la prenne dans ses bras, qu'il la réprimande, qu'il fasse tout, n'importe quoi, plutôt que ce silence.

— Jan sait, souffla-t-elle.

Ambroise s'arrêta, sa main sur la poignée. Lizzie aurait voulu se rétracter, mais c'était trop tard : les mots avaient franchi ses lèvres — les seules paroles susceptibles de le faire réagir.

— Il sait que j'ai aidé Magdalene. Et il sait qui je suis. Ce que je suis. Il le sait depuis le début.

Il ne se retourna pas pour la foudroyer du regard. Il n'en eut pas besoin. Tout, dans sa posture, clamait une soudaine et bouillonnante colère.

— Et vous n'avez pas jugé utile de me prévenir ?

— Je ne lui ai rien dit, je vous le jure ! Il savait avant même que je n'arrive à Fort-Rijkdom.

— Ne vous êtes-vous pas demandé pourquoi il le savait ?

— Si.

— Et qu'avez-vous appris ?

Lizzie tressaillit.

— Rien, mentit-elle. Je n'ai pas... je ne...

— Vous avez eu peur. Vous n'avez pas osé chercher une explication.

Son ton ne souffrait aucune objection. Et Lizzie devait reconnaître qu'il avait raison.

Oui, elle avait eu peur.

Elle avait mis si longtemps à aborder le sujet avec Jan ; elle avait eu peur de ce qu'elle aurait pu découvrir.

— Ça n'a pas d'importance, lâcha Ambroise. Il sera bientôt mort.

Le cœur de Lizzie rata un battement.

— Vous saviez ? Vous saviez qu'il savait. C'est pour cela que vous voulez l'éliminer. Pour qu'il ne puisse pas parler.

— Je ne veux rien. Notre royaume a ses raisons de souhaiter la mort de Jan van Stoker. Le Roi l'ordonne, et tu obéiras.

— Je ne le tuerai pas.

— Pourquoi ?

Lizzie garda le silence. C'était la deuxième fois qu'il lui posait la question aujourd'hui. Elle savait que cette fois, elle ne pourrait pas mentir.

— Pourquoi ? répéta-t-il.

— C'est mon ami.

— Ton ami ? Ne sois pas stupide. Tu n'as jamais eu d'amis, et tu n'en auras jamais.

Elle tressaillit devant la cruauté de ses paroles.

Pourtant, il avait raison.

Elle n'avait pas d'amis.

— Mais Jan a été bon avec moi. Il ne mérite pas la mort.

— Cette pauvre fille que tu as voulu aider ne méritait pas la mort, elle non plus. Et pourtant, tu l'as tuée.

La Lame des Bas-Royaumes / 1Where stories live. Discover now