Écrit 1: La société

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-Ferme ta gueule, juste deux minutes Ryuki.
Parce que j'en peux plus, j'en peux plus que tu viennes chaque jour me déballer ta vie dont j'ai strictement rien à foutre, que tu m'étales tes problèmes, que tu me fasses limite un court-métrage de toute ton histoire qui n'en est même pas une. Parce que t'as rien vécu, ou peut-être que si, je sais pas, je suis personne pour juger, mais j'le fais quand même parce que c'dans la nature humaine de faire ce genre de chose dégueulasse, parce qu'on s'crache tous dessus, qu'on est tous hypocrites qu'importe envers qui, on l'est tous, on l'a tous été. Si tu savais, je craque totalement. J'ai mal au cœur, mal aux épaules, mal à la bouche, mal aux yeux, j'ai mal partout à force de supporter le malheur d'autrui, mal à force de les aider, de pleurer et de compatir. En fait, je compatis même plus, je fusionne avec eux, je ressens leurs putain émotions jusqu'à tomber aussi bas qu'eux voir plus, je les enfonce au lieu de les remonter, pourtant la plupart n'ont rien demandé Ryuki, tout ça c'est ma faute, moi et mon empathie à la con. Et cette générosité sans borne que j'trimballe avec moi partout.
 
Regarde, cette société devient totalement timbré, elle a les mains inondées de sang, le monde a perdu toute innocence, mais au final est-ce leur faute ? J'veux dire, regarde-les, à s’abrutir devant un écran de verre qui produit des lumières multicolores et leur débite mécaniquement les dernières informations, un suicide ou un meurtre, des politiques qui s'crachent à la gueule, comment maigrir, le sondage récent qui vient d'tomber sur qui est pour quoi et qui est contre y a même le sondage du qui s'en fout. Allez, regarde autour de toi, le monde pue la tristesse faut l’avouer, les gens gerbent derrière leurs murs toute leur haine et plus, puis ils s'essuient la bouche et sourient avant d'sortir, tu sais bien ce sourire idiot quand tu croise un inconnu, ils continuent jusqu'à c'qu'ils se rendent compte que l'humanité n'est plus, que souriant ou pas, on s'en branle d'eux, on s'en branle de tout. Des maladies, des petits africains ou asiatiques qui crèvent dans leurs villages, des soldats qui meurent chaque jour pour un peuple qui n'en a strictement rien à foutre, des gosses qui s'font harceler puis tabassés à la sortie des cours. Ouais ma vieille, on s'fait agresser où qu'on soit, même devant chez soi, t'as pas entendu l'histoire de la gamine qui allait à l'école et s'est faite niqué sa virginité par un espèce de dégénéré ?
 
En fait ouais, c'est totalement notre faute, j'débite que des conneries, mais c'est pour te dire que cette société m'a totalement abîmée ya qu'à regarder mes bras ou mes cuisses, mes yeux sont devenu des étoiles, des planètes mortes, mes lèvres ont des crampes à force d'sourire pour de faux, parce qu'au fond d'moi reste une p'tite pincée d'espoir, parce que faut croire que j'suis maso mais oui, j'espère, j'espère surement trop, mais j'en ai besoin pour vivre, et tant pis si ça m'achève, j'aurais vécu. Et comme une dingue ouais.
 
Vodka, Marlboro, et weed, tu t'défonces puis tu vas baiser un petit enfoiré, tiens pourquoi pas celui qui est en train d'agoniser tout au fond du comptoir d'ce foutu bar ? Non mais parce que le beau mec qui chauffe chaque nana qu'il croise sur la piste de danse, tu vois, c'pas pour moi, j'me respecte un minimum, ouais, un minimum.
-T'as fini ton charabia ?
-Oui, tu peux continuer.

L'incœrcible véritéحيث تعيش القصص. اكتشف الآن