Kilidohanas Tome 2 : Les Papillons [FIN]

Chapitre 51 : tuer un dieu

— Une épée ? demanda soudainement Lidonna en se souvenant de son rêve.

— Oui ! Tu t'es souvenue ? »

Elle comprenait mieux l'urgence qu'elle avait ressentie de protéger cette arme. Elle leur expliqua alors son rêve, en taisant la partie où elle avait vu Sam décapité.

« C'est bon signe, ça veut dire qu'on va réussir à la faire ! » s'exclama ce dernier les yeux brillants d'espoir.

Avec ce qu'elle savait, elle ne pouvait pas partager cet espoir. Peut-être devrait-elle lui en parler ? Mais elle avait peur que le mettre au courant de son destin soit ce qui l'y mène. Ce pouvoir était une sacré malédiction. Connaître le futur sans savoir comment le changer ni savoir ce qu'il le produira. Chacune de ses actions pouvaient être ce qui mènerait à la perte de Sam comme ce qui pourrait le sauver. Mais elle ne savait pas. Alors elle préférait garder le silence.

« Je sais que tu as peur, on a tous peur, mais il faut garder espoir. »

Sam s'approcha d'elle pour la prendre dans ses bras. Elle accepta volontiers cette étreinte. Certainement aussi parce qu'elle avait peur que ce soit la dernière.

« Si l'on a plus d'espoir, à quoi bon se battre ? L'espoir c'est ce qui nous maintient en vie. » ajouta alors Rivel.

Le sourire que lui offrit son ami se voulait rassurant. Mais Lidonna avait l'impression que l'espoir était mort en même temps que Rordian. Elle qui avait toujours été de nature assez optimiste aujourd'hui doutait de plus en plus de leur victoire contre Harrgos. Il était trop fort pour eux, trop préparé, trop sûr de lui... Elle secoua la tête pour ce sortir cette sombre pensée de l'esprit. Elle n'allait pas abandonner ses proches, elle devait se battre pour eux. Elle savait qu'elle devait y croire pour eux. Pour sauver Sam. Pour sauver tous les autres. Et pour venger Rordian. Venger Rordian, c'était ce qui lui permettait de tenir, de continuer à avancer.

Alors elle releva la tête déterminée :

« Expliquez-moi ce dont je dois me souvenir. Peut-être que ça aidera ma mémoire à se débloquer.

— Une partie du rituel et de l'arme. Actuellement, l'arme est séparée en trois sous la forme de bijoux. Moi j'ai vu un collier, commença Sam. Je sais parfaitement où il est. Les Papillons me l'ont donné à ma naissance.

— Moi c'était un bracelet. Et je ne l'ai évidemment jamais eu...

— Ce bracelet a sûrement été confié à un bébé des Papillons, réfléchit alors Lidonna. Mais moi je n'ai jamais eu de bijou. J'ai une peluche papillon qui vient d'ici et c'est tout.

— Hum... Sans le souvenir, on ne va pas pouvoir avancer de toute manière. »

Alors que Sam lâcha un long soupir, la rouquine eut une illumination. Et si les souvenirs que les Papillons avaient refusé de lui rendre étaient ceux-là ? Quel autre souvenir serait assez important pour qu'elle doive l'oublier pour la sécurité de tout le monde ?

« Il faut qu'on aille voir Jored. »

Ses deux amis hochèrent. Sam localisa alors le Mentaliseur. Ils n'avaient pas le temps de le chercher, l'existence du monde était en jeu. Dans leur course jusqu'à Jored, les Kilidohanas eurent un petit aperçu de la panique qui régnait. Les Papillons couraient dans tous les sens. Beaucoup se dirigeaient vers la salle des Pierres pour se téléporter sur la scène de combat. Il semblait à Lidonna comprendre qu'Ombres comme Papillons tentaient de contenir au mieux Harrgos dont la transformation en dieu était apparemment lente. Elle tenta de faire abstraction de toutes ses peurs quand elle vit ses amis se précipiter pour se battre. C'était leur dernière chance. S'ils échouaient ils étaient perdus et chacun le savait. Alors tout le monde s'élançait à cœur et corps perdu pour sauver leur planète, leur monde, leur peuple.

Heureusement pour eux, Jored était toujours au Cocon. Il se déplaçait, certainement prêt lui aussi à aller se battre. Sam suivait son pouvoir pour l'intercepter dans sa course. Quand ils le virent, ils se précipitèrent sur lui et l'entraînèrent dans une salle à part.

« Qu'est-ce que vous faites ?! hurla-t-il énervé.

— J'ai absolument besoin que tu me rendes tous mes souvenirs. » asséna la rouquine.

Le visage plissé de colère se détendit de surprise, jusqu'à ce qu'il affiche un malaise palpable.

« Comment ça tous vos souvenirs ? tenta-t-il d'éluder.

— Pas de ça avec nous. Je l'ai compris immédiatement, j'ai fait profil bas alors que j'aurais été en droit de réclamer qu'on me les rende il y a plusieurs mois. J'ai besoin de mes souvenirs.

— Pourquoi ?

— Parce que ce sont mes souvenirs ! Merde je n'ai pas à me justifier auprès de toi. »

Lidonna en avait assez. Marre d'être gentille et d'accepter tout en courbant le dos. Ils avaient le monde à sauver, pourquoi ne les laissait-on pas faire ? Si elle devait le secouer pour récupérer ses souvenirs et faire ce pour quoi on l'avait mise au monde, elle le ferait.

« C'est que je n'ai pas l'autorisation de Careil...

— Le monde est en train de s'effondrer et toi tu t'inquiètes pour une autorisation ? s'écria Sam à son tour. Mais qu'est-ce qu'il ne va pas dans ta tête ? Tu n'as pas entendu qu'Harrgos avait littéralement prévu de devenir un dieu pour détruire Kayolina ? Dans quelques heures on ne sera plus là pour donner ou recevoir les autorisations ! On t'a gentiment demandé ces souvenirs, mais si tu préfères qu'on te maltraite on peut le faire. »

Jored les dévisagea, cherchant à savoir s'ils étaient sérieux. Les regards noirs qu'il reçut lui firent comprendre qu'ils étaient sérieux. Ils étaient prêts à en découdre pour avoir ces souvenirs. Quoi qu'ils puissent contenir, le Mentaliseur comprit qu'ils étaient vraiment vraiment très importants.

« Ok, ok, capitula-t-il. Lidonna assieds-toi. »

La jeune femme attrapa la chaise la plus proche et s'installa. Heureusement, ils n'avaient pas eu à discuter longtemps. Jored n'était pas idiot il avait vite subit l'urgence de la situation. Alors il posa ses mains de part et d'autre de la tête de la rouquine. Il se concentra et laissa son pouvoir affluer dans l'esprit de la rouquine.

Les deux souvenirs qui auraient dû lui revenir en même temps que Sam et Rivel explosèrent dans son esprit. Tout d'abord elle aperçut d'une forme qui semblait être un corps de femme. Cette forme plutôt lumière que matière tenait dans ses... mains une chevalière en argent ornée, évidemment, d'un papillon. C'était donc ce bijou que les Kilidohanas devaient trouver. Mais la rouquine était persuadée qu'elle ne l'avait jamais vu de toute sa vie. Elle prit une grande inspiration. Elle n'eut pas le temps de soupirer le deuxième souvenir s'imposa à elle. La première partie du rituel, elle ne savait pas comment elle le savait, mais elle en était persuadée. Ce qu'elle était en train d'apercevoir était la première étape qu'ils devraient accomplir pour obtenir l'épée des Kilidohanas. Trois personnes représentant chacun des Kilidohanas, une arme à la main. Elle vit ces trois silhouettes s'entailler pour verser quelques gouttes de sang dans le brasier qui se trouvait entre eux.

Tous ses souvenirs rendus, Lidonna put mettre la dernière pièce manquante du puzzle en place. Elle comprit alors que ces souvenirs s'étaient déclenchés quand la Reine Célénine avait tenté de la tuer lors de son séjour sur Terre. Son corps d'enfant s'était senti menacé alors son subconscient, censé lâcher ces informations en cas de réel danger, avait cru que le moment était venu de lui apprendre la manière de tuer un dieu. Comment les Papillons avaient-ils su que ces souvenirs lui étaient revenus ? Elle ne le saurait probablement jamais. Mais elle comprenait pourquoi il avait mieux fallu les faire disparaître à nouveau de son esprit. On ne sait jamais ce qu'il aurait pu se passer si quelqu'un de mal intentionné y avait eu accès.

La jeune femme revint alors à la réalité. Le chaos, les cris, la panique. La fin du monde. De son monde. De ce monde qu'elle avait découvert il y avait peu de temps mais où elle se sentait si bien. Où elle se sentait si bien avant qu'on ne lui arrache tous ceux qui comptaient pour elle... Ses doutes à nouveau envolés, elle planta son regard sur ses compagnons plus déterminée que jamais. Elle hocha la tête pour leur signifier qu'elle se souvenait. Leur mission était loin d'être terminée. Ils avaient encore deux bijoux perdus à trouver ce qui n'allait probablement pas être une mince à faire, ils devaient fabriquer cette arme et puis finalement tuer Harrgos. Ils n'étaient pas sortis de l'auberge, mais ils étaient sur la bonne voie.