Chapitre 12 : L'Amour Royal

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La sensation des lèvres de Bernon contre les siennes étaient de loin la chose la plus agréable que Rothaïde avait jamais vécu. Elle sentait sa barbe chatouiller son cou mais cela ne la dérangeait pas. Tout ce qu'elle désirait était de le sentir encore plus près d'elle. Sans réfléchir, elle posa ses mains sur les joues du jeune homme et le rapprocha encore plus. Ce dernier se laissa aller en avant, passa un bras dans son dos et la poussa juste assez pour la faire basculer sur le sable sans la blesser. Couchés, il ne lâcha pourtant pas son emprise sur sa bouche, continuant inlassablement de mouvoir ses lèvres contre les siennes.

Soudain, leurs langues s'entrechoquèrent. Rothaïde resta un instant surprise par la sensation, puis se laissa de nouveau aller dans les bras de celui qui avait finit par conquérir son cœur. Quelques semaines auparavant, alors qu'elle vivait encore au château, elle rêvait d'un amour intense qu'elle ne connaîtrait probablement jamais. Désormais, elle ne comprenait plus comment elle avait fait pour vivre sans Bernon, cet homme qu'elle avait pourtant haï au moment de leur rencontre. Toutes les émotions qu'elle ressentait à ses côtés étaient si intenses, si indispensables. Elle aurait voulu que leur étreinte ne s'arrête jamais.

Malheureusement, ils durent reprendre leur souffle. La danse de leurs bouches avait été si passionnelle qu'ils en avaient oublié de respirer. Les deux jeunes adultes ne s'éloignèrent cependant pas, leurs fronts restant collés l'un contre l'autre. Ils restèrent silencieux un instant, tous deux terrifiés à l'idée de briser l'instant magique qu'ils venaient de créer. Ils se comprenaient en un regard, communiquaient en un souffle, s'aimaient en un contact.

Finalement, Bernon glissa sur le côté et rapprocha le corps de Rothaïde contre lui. Il regarda le ciel et entreprit de caresser la douce chevelure de la femme qu'il souhaitait chérir jusqu'à la fin de ses jours.

- Je suis désolé de t'avoir arraché à ta vie à Seinbur, finit-il par dire.

La jeune femme comprit que le capitaine avait envie de lui confier ces mots depuis de longues semaines. Désormais cependant, ils paraissaient insensés aux yeux de l'héritière. Bernon lui avait tout donné en l'emmenant avec elle sur son navire : l'amour, la liberté, la vérité. Elle ne regrettait pas son quotidien d'antan.

- Je ne sais pas réellement ce qu'il m'a pris, poursuivit le pirate. Tu étais là, et la princesse venait de s'enfuir. Je ne me suis pas non plus reconnu lorsque je t'ai dit que tu ne serais libre que si tu me disais ce que je voulais savoir. Tu es libre que tu décides de me parler ou non de la princesse, je veux que tu le saches. Je n'ai jamais réellement désiré te retenir captive.

En réalité, Rothaïde savait déjà tout cela. Elle l'avait compris au gré des jours en compagnie du pirate, et elle avait cessé de craindre pour sa vie depuis bien longtemps.

- Que veux-tu faire au château ? demanda finalement la jeune femme.

Bernon resta un instant silencieux.

- Je ne sais pas vraiment. Je sais juste que piller la capitale n'est qu'une solution à court-terme pour éviter la famine. J'aimerais...

Il chercha ses mots.

- J'aimerais faire plus. Rétablir la justice qui existait autrefois. Et je ne peux faire cela qu'au château.

- Et la princesse ?

- J'ai l'impression qu'elle pourrait permettre de changer les choses politiquement.

- Tu souhaiterais la prendre en otage pour faire pression sur le gouvernement ?

Le renégat regarda son interlocutrice d'un air horrifié.

- Bien sûr que non ! Je souhaiterai lui parler, la convaincre de marcher dans les traces de son grand-père. Son frère avait déjà ce projet.

Rothaïde se releva brusquement, surprenant son amant.

- L'ancien héritier du trône voulait rétablir la justice dans le royaume ?

Bernon se redressa à son tour et hocha la tête.

- C'est ce qu'on dit. Il a fait parvenir des lettres dans plusieurs villes pour annoncer ses projets politiques. Arton en a reçu une, il a redonné beaucoup d'espoir. Puis il est mort, et nous avons compris que la situation ne changerait pas.

La jeune femme observa la sincérité du jeune homme avec ses yeux brillants. Son frère était au courant de la pauvreté des villes de Centule ? Des horreurs que la démence de leur père avait laissé ?

- Nous devrions rentrer à l'auberge, annonça-t-elle.

Le hors la loi fronça les sourcils.

- J'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? s'inquiéta-t-il.

Elle nia.

- Aucunement. Tu as rendu ma soirée magique. Je suis simplement fatiguée.

Le jeune homme la regarda avec doute. Rothaïde savait qu'il ne comprenait pas sa décision soudaine de retourner à la taverne.

- D'accord, finit-il par dire.

Il se releva et frotta les grains de sable sur son pantalon de tissu. Il tendit sa main à celle qu'il venait d'embrasser avec passion et l'aida à se relever. Le pirate hésita un instant mais finit par attraper les doigts de la fausse domestique dans sa main rugueuse. Rothaïde l'accepta même si elle ne put empêcher ses joues de s'empourprer. Elle n'aurait jamais cru, un mois plus tôt, que son cœur bâterait aussi vite en tenant la main d'un hors la loi. Le couple entreprit de longer la plage de sable fin afin de revenir sur leur lieu de séjour temporaire.

Arrivés à l'auberge, Bernon conduisit la femme brune à sa porte de chambre. Celle-ci tritura son esprit un instant puis finit par murmurer :

- Le château surveille toutes ses entrées, mais pas ses fenêtres. Il faut simplement savoir escalader.

Puis, afin de ne pas lui laisser le temps de répondre à la confidence, elle se pencha vers lui pour déposer un baiser sur le coin de la bouche afin de lui souhaiter bonne nuit. Cela ne suffit cependant pas au renégat : il apposa sa main sur la nuque de l'ancienne noble et l'attira à lui pour l'embrasser avec douceur. Leurs corps ne tombèrent pas comme sur la plage, mais le sang de Rothaïde frappa avec la même intensité dans ses veines. Pourrait-elle se lasser de cette sensation si agréable ? Elle ne pensait pas. Mais le saurait-elle ?

Quand elle ferma le bois de sa porte, elle dû prendre plusieurs secondes pour réaliser ce qu'il venait de se passer. Bernon l'avait embrassée. Il lui avait demandé si elle le désirait puis il l'avait embrassée avec une passion qu'elle pensait ne jamais connaître. Puis il l'avait ramenée jusqu'à sa chambre et avait recommencé. Un élan d'euphorie s'empara alors de son corps et elle dû poser sa main sur son cœur pour l'apaiser.

Ensuite, Rothaïde s'avança vers le bureau de sa chambre. Elle s'y assit alluma une bougie. Elle trouva ensuite un papier, de l'encre et une plume. Et elle commença d'écrire. Alors qu'elle découvrait un tout nouvel amour, elle commença d'écrire une lettre d'adieu.

Elle aimait sa vie de hors la loi. Elle aimait encore plus l'homme avec qui elle pourrait la partager. Mais elle comprenait qu'elle ne pouvait rester immobile face à l'injustice dans son royaume. Quelques semaines auparavant, son pays aurait pu tomber aux mains de son cousin ou même d'un inconnu, elle n'aurait été inquiète. Mais désormais, tout était différent. Car en même temps que ses sentiments, Bernon avait réveillé en elle un amour infini pour Centule et ses habitants. Alors elle avait décidé de rentrer. Elle allait retourner à Seinbur et assumer ses responsabilités. Comme son frère avant elle, elle tenterait de sauver son peuple de la famine qu'avait commencé son père.

Hors la loi et bientôt ReineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant