III : Lorsque deux âmes se fracassent en une rencontre

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    Il faisait la queue devant le magasin depuis trop longtemps et ça l'agaça. Heureusement, une jeune femme le reconnut et lui demanda une photo. Elle engagea la conversation :
« Je suis fan de ce que tu fais !
Il sourit de toutes ses dents. Il était si fier de lui, fier d'apporter du bonheur aux gens, fier que son art plaise.
   - Merci c'est gentil. C'est aussi pour ça que je fais ça, pour ce plaisir que je vous apporte à tous. Alors merci de me montrer que ça fonctionne.
Elle lui sourit et la pluie se mit à tomber.
   - Ça te dérange si j'attends avec toi ici ? Je dois rentrer dans ce magasin aussi et il faut que j'attende juste derrière toi vu que tu es le dernier. On peut parler si tu veux. »

Sa maladresse le fit sourire et il secoua la tête pour accepter. Alors ils parlèrent rapidement de leurs études, de ses concerts, de ses musiques qu'elle trouvait magnifiques. Il la stoppa lorsqu'elle s'aventurait un peu trop dans la pénombre de sa vie, qui sait à qui elle aurait pu tout raconter et de quelle manière... Les gens ne sont pas tous bons, il l'avait appris à ses dépens. Il se retourna pour regarder jusqu'où allait la file d'attente. Seules quelques personnes s'étaient ajoutées depuis. Il soupira discrètement d'agacement tandis qu'une couleur attira son attention. Les paroles de la fan devinrent un bruit de fond et ses yeux se détachèrent du paysage.

Un ciré rouge.

Il dansait sous la pluie. Enfin il jouait plutôt. Il rigolait. Son propriétaire semblait rire à gorge déployée avec un jeune femme un peu plus loin. Lindo détourna ses yeux de l'amie et les plissa pour mieux voir le propriétaire. Le ciré se rapprochait de plus en plus. Alors il la vit. Elle était brune aux cheveux longs ondulés. Sa chevelure, même mouillée, paraissait à du coton teinté. Son sourire éclairait à lui tout seul les rues cruellement en manque de soleil. Elle le fascinait. Il s'arrêta et alors que fangirl le tirait par le bras pour avancer, il laissa passer le couple qui attendait derrière lui. Cette dernière soupira mais il l'ignora. Toujours suivre sa première opinion sur quelqu'un, il en était presque certain désormais. Alors que son cerveau s'activait de part et d'autre, ses yeux ne se détachèrent pas du ciré. La jeune femme aux cheveux de coton riait constamment. Il attendait la chute. La fin du rire. Le moment où tout se brise, où on repose enfin les pieds sur Terre et que la réalité nous assène une violente claque. Mais même quand ses lèvres se fermèrent, il crût que ses yeux souriaient encore. Une fille qui n'est jamais triste. Incroyable n'est-ce pas ? Pourtant, devant l'entrée du magasin de vêtements, il en était certain. Cette fille ne s'arrêterait jamais de rire, de pétiller. Son âme riait. Et puis comment pouvait-on aimer à ce point la pluie ? La poésie s'échappait de chaque mouvement de cette fille. Elle sentit sûrement son regard insistant puisqu'elle s'arrêta et le contempla à son tour. Elle se planta au milieu de la rue. Son sourire s'en alla lentement, très lentement. Alors que les nuages dansaient la salsa et que le ciel s'énervait contre ses enfants trop bruyants, ces deux individus se dévisagèrent un long instant.

La valse des poètesWhere stories live. Discover now