Chapitre 5

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TTess sortit de la douche une heure après y avoir mis les pieds. Le bien-être que l'eau sur sa peau lui avait procuré avait fait en sorte qu'elle n'avait pas vu le temps passer. D'ailleurs, cela avait pris un bon moment pour que la couche de crasse qu'elle avait accumulée sur sa peau ne disparaisse. Maintenant, elle était propre et le lait pour le corps qu'elle avait appliqué sentait la fraise.

La jeune femme trouva une brosse dans le tiroir de la vanité et entreprit de démêler ses cheveux. Les nœuds la firent grimacer et c'est plusieurs minutes plus tard qu'elle parvint à les brosser sans avoir mal au cuir chevelu. Elle se rendit alors compte que sa chevelure lui arrivait dans le bas du dos. Elle qui les attachait toujours n'avait pas remarqué à quel point ils avaient poussé au cours des dernières années.

Elle les attacha en soupirant. De toute façon, à l'endroit où on allait la conduire, ils deviendraient à nouveaux sales et dégueulasses. Elle se doutait bien que ce camp n'était pas un camp de vacances. Si elle se rendrait là-bas, plus jamais elle n'en sortirait. Elle passerait le reste de ses jours enfermée comme un animal, et ça, elle ne pourrait pas le supporter. Elle devait trouver le moyen de s'enfuir avant que l'officier tyrannique Miles ne revienne.

Karen toqua à la porte, la faisant sursauter.

— Tout va bien, là-dedans ? demanda la femme vampire. J'ai eu le temps de laver tes vêtements ainsi que ta tuque. Je t'ai également trouvé des nouvelles chaussures.

— Merci, répondit Tess, infiniment reconnaissante envers Karen.

Elle entrouvrit la porte et la vampire lui passa ses habits.

— Je t'attends en bas, ajouta-t-elle avant de Tess ne referme la porte.

Celle-ci enfila ses vêtements propres. Son pantalon était troués, mais faisaient encore l'affaire, tandis que son haut avait été remplacé par un t-shirt assez serré. Tess, qui était plutôt habituée à des vêtements amples, le trouvait trop ajusté, mais décida de garder cette pensée pour elle. Son chandail à capuchon était également propre et elle le renifla, sachant qu'il ne sentirait plus jamais aussi bon. Elle fourra sa tuque dans la poche kangourou de son chandail, n'en ayant pas besoin tout de suite puisque ses cheveux étaient propres.

Karen l'attendait au salon et lui sourit en la voyant.

— Quelle transformation ! s'exclama-t-elle en sifflant. On dirait que tu n'es pas la même personne.

— Tu exagères, répondit Tess.

Elle s'assit dans le fauteuil en face de la vampire. Une question la taraudait et elle s'empressa de la poser à Karen.

— Pourquoi es-tu si bienveillante avec moi ? lui demanda-t-elle. Je suis une humaine ; tu devrais me détester.

Karen resta silencieuse quelques instants.

— Parce que tu me rappelles moi avant que je ne devienne un vampire, répondit-elle. J'étais comme toi : seule et perdue.

— Pourquoi as-tu décidé de te faire transformer ? questionna Tess.

— Je n'avais pas le choix. J'étais tombée malade et je voulais vivre. Je n'étais pas aussi courageuse que toi. Je vivais avec mon frère et ce dernier était mort après avoir attrapé un virus, qu'il m'avait refilé tout juste avant de succomber. J'étais seule et souffrante et trois vampires m'ont trouvée à-demi consciente.

— Et ils ont eu pitié de toi ?

— Non, fit Karen en ricanant. J'ai dû les supplier de me transformer. Deux d'entre eux ont refusé, préférant me laisser mourir, mais le dernier m'a longuement fixé, puis il m'a vidé de mon sang pour ensuite me donner le sien.

— Qui était-il ?

— Ça n'a aucune importance, puisqu'il a filé et m'a laissé seule dans la ruelle. J'avais besoin de me nourrir et j'ai dû me débrouiller seule. Je dois t'avouer que je ne suis pas fière de ce que j'ai fait pour survivre.

Tess s'en doutait un peu, mais ne prononça pas le mot qui la répugnait.

— J'ai tué, dit enfin Karen en baissant les yeux. Et pas qu'un seul humain. J'étais devenu un monstre et je n'étais plus capable de m'arrêter. Un vampire qui n'est pas pris en charge par un des siens devient un animal sans scrupule et j'ai honte d'avouer que c'est ce que je suis devenue.

La jeune humaine avait de la difficulté à s'imaginer cette belle vampire comme telle.

— Que s'est-il passé ? interrogea-t-elle.

— On m'a arrêtée, mais au lieu de m'enfermer, on m'a appris à vivre décemment. Cela a pris du temps, mais je suis parvenue à me contrôler et à refaire ma vie en tant que vampire. J'ai fait des études en criminologie et j'ai fini par travailler ici avec le lieutenant.

Tess plissa son nez de dégoût en entendant parler de cet homme qui n'exprimait qu'haine et antipathie.

Karen dut remarquer sa réaction, car elle laissa échapper un petit rire.

— Je sais qu'il ne t'a pas fait bonne impression, mais je peux t'assurer qu'il est vraiment sympathique en temps normal. Il est juste un peu sur les nerfs ces temps-ci et, en plus, avec les explosions dans la ville, il ne sait plus où donner de la tête.

Tess doutait que cet homme serait un jour amical avec elle.

— Il me déteste et il ne me connait même pas, fit-elle, dépitée.

— Les humains lui ont causé beaucoup de problèmes, c'est pour cela qu'il vous met tous dans le même bateau.

— C'est un préjugé !

— Je sais, mais tu aurais fait pareil. Avoue que tu pensais que tous les vampires étaient cruels et barbares !

Elle avait raison, se dit Tess.

— Oui...répondit-elle.

— Tu vois ? Nous avons tous des personnalités différentes. J'ai décidé d'aider mon prochain, qu'il soit humain ou vampire, c'est pour cette raison que j'ai décidé d'accepter ce poste ici.

— Alors, tu crois m'aider en m'envoyant dans ce camp ?

Tess venait d'avoir une idée. Si elle parvenait à convaincre Karen de l'aider, peut-être arriverait-elle à se sauver.

— Oui, répondit tristement Karen. Miles avait raison sur un point : c'est soit cela, soit la mort qui t'attend.

— J'ai réussi à survivre jusqu'ici.

— Je sais, mais Juan Marcello vient de nous déclarer la guerre. Les rues deviendront des scènes de crimes et des innocents mourront. Tu seras continuellement en danger. Ils vont installer des bombes dans toute la ville si nous ne les arrêtons pas et ils les feront exploser au hasard.

Tess médita sur ces paroles.

— Dans ce cas, je vais partir d'ici, annonça-t-elle en se levant. Je vais quitter Vancouver et j'irai dans une autre ville.

— À pied ? Ne sois pas ridicule, Tess. Tu sais très bien que c'est impossible. La seule façon pour toi d'être en sécurité, c'est d'aller au camp.

— Jamais !

La jeune femme croisa ses bras sous sa poitrine. Au moment où Karen ouvrait la bouche, une porte claqua et une voix féminine se fit entendre.

— Tayrick, chéri ! C'est toi ?

— Oh non, pas elle, chuchota Karen d'un air las.

Chute Nocturne ( SOUS CONTRAT D'ÉDITION)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant