SEPTEMBRE

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J'ai rarement vu quelqu'un d'aussi abasourdi. Elle s'est figée et ses yeux ont failli sortir de leurs orbites, si bien que je me suis empressé de m'expliquer.

- Attention hein, je ne vous demande pas de jouer la psychologue pleine de compassion et de méthodes novatrices, ça j'en veux toujours pas.

Elle expira avec un sourire, soudainement plus détendue.

- Dis-moi ce que je peux faire pour t'aider, Antarès.

- Est-ce que vous pensez que mon père est gros con ?

Elle toussote légèrement, les joues roses d'embarras.

- Je ne suis pas sûre d'avoir mon mot à dire, après tout je n'ai lu qu'une lettre et n'importe qui...

- Vous le pensez oui ou non ? Je la coupe, agacé par ses manières.

Elle frotte ses mains sur son pantalon chino avant de lever les yeux vers moi.

- Oui, je pense que c'est un con.

J'hausse un sourcil et elle rajoute:

- Un gros con.

- Parfait, alors avec votre expérience sociale, est-ce que vous avez des suggestions concernant la formulation de ma réponse ?

- Je ne vois pas le rapport...

- Et bien, vous fréquentez des cons tous les samedis alors...

- Antarès !

- Vous avez raison, Orion n'en est pas un, toutes mes excuses.

Elle rejoint ses mains sur ses genoux collés.

- Ecoute, je ne pense pas pouvoir t'aider si tu n'es pas sérieux. Arrête de te disperser et viens-en aux faits !

Je roule des yeux, peu content qu'elle précipite les choses.

- ça va, on y vient. Bon. Vous comprenez au moins pourquoi je vous montre cette lettre maintenant ?

Elle s'apprête à hocher négativement la tête quand son regard s'illumine.

- La Bible, chuchote-t-elle. C'est parce que j'allais te donner la Bible.

Je gigote sur ma chaise, détestant ce mot un peu plus à chaque fois que quelqu'un le prononçait devant moi.

- Ouais, Satan et tout le bordel. Vous voyez, la Bible, c'est cette lettre pour moi. Je n'ai pas de problème avec les autres religions, j'ai au moins réalisé ça grâce à vous.

Elle sourit à mes mots et je me retiens de lever les yeux au ciel. Elle n'a rien fait à part avoir l'idée de me donner ces bouquins, il ne faut pas exagérer non plus.

- Alors, je vous prierais tout d'abord de ne pas sortir votre exemplaire de cette chose devant moi, j'en ai déjà un résumé ici, continué-je en pointant la lettre du doigt. Et ce résumé a déjà fait trop de dégâts pour que j'en rajoute, vous comprenez ?

- Écoute...

- Non, taisez-vous. Je dois vous dire que je hais mon père et que je hais le catholicisme. Je dois aussi vous dire que ces deux-là sont des meurtriers et qu'ils ont détruit ma vie. Et je ne sais pas si j'ai la force d'accorder mon pardon, ne serait-ce qu'à l'un d'entre eux.

- Et Dieu, dans tout ça ? S'enquit-elle.

Je trempe mes lèvres dans mon verre avant de grincer.

- Quoi Dieu, qu'est-ce qu'il a encore celui-là ?

- Ton père n'est pas Dieu et les catholiques ne sont pas Dieu.

Un silence accompagne sa déclaration.

AntarèsDonde viven las historias. Descúbrelo ahora