00. PROLOGUE

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Ce soir là, Bokuto était sorti de chez lui dans l'unique but de s'aérer l'esprit et de se vider la tête. 

Sans vraiment de raison, en plus de cela, mais ça ne faisait qu'accentuer son désarrois, de ne pas réussir à comprendre pourquoi il était comme cela.

Simplement, il était dans un de ces jours où peu importait le beau temps, peu importait la chaleur envoutante des rayons de soleil contre sa peau, peu importait qu'il n'avait pas de temps à perdre : il était dans l'un de ses jours où la mélancolie l'emportait sur tout, s'imposant sans prévenir dans un coeur innocent et ravageant toute motivation sur son funeste passage.

Et bien souvent, dans ce genre de situation, une chose aussi banale que de se promener, prendre l'air sans destination précise et attendre que ses pas le dirigent, lui faisait extrêmement de bien et lui permettait de se resourcer sur lui-même : de laisser son esprit se perdre dans ses propres souvenirs pour ne se concentrer que sur les moments de joie intenses qui avaient pu l'animer au cours de ses dix-sept ans.

La douceur de la brise contre sa peau découverte le réveilla tendrement de ses songes pour le ramener tout doucement sur Terre, et il pu constater que ses jambes l'avaient guidé jusqu'au parc qu'il aimait tant.

Ce parc était le seul espace de verdure de sa grande ville, et l'un des seuls endroits calmes où il pouvait se poser pour admirer le paysage, alors il décida d'entrer et de continuer son chemin. Se promener sur une allée de terre et de sable entourée d'arbres verts lui était bien plus agréable que de marcher dans une ville polluée de tout côté.
Il ne se voilait pourtant pas la face : le parc n'était pas synonyme de pureté et était lui aussi tacheté par la bêtise de l'homme, mais c'était bien moins pesant.

Le parc, en lui-même, n'avait rien d'incroyable, mais y marcher suffisait à réchauffer un temps soit peu son cœur.
Il était presque vide, ce qui n'était rien d'étonnant au vu de l'heure qu'affichait sa montre, et plusieurs bancs étaient libres. Cependant, le seul et unique banc qui attirait l'attention de l'adolescent était celui positionné face au ruisseau, et face au soleil couchant lui même, un banc qui était déjà occupé.
En s'approchant, il aperçut un jeune homme aux cheveux noirs désordonnés, qui semblait être un peu plus mince que lui. Il avait probablement son âge - du moins c'est l'impression qu'il donnait - et portait des lunettes, mais ce qui attira le plus l'attention de Bokuto, ce fut l'expression qui habillait son doux visage pâle : il fixait le ciel lointain avec une mine ennuyée, peut être même exaspérée. Il semblait bien plus ennuyé qu'heureux d'être là, et pourtant il ne bougeait pas, les mains dans les poches de sa veste oversize.

Sans même se poser de questions, le grisé s'installa à l'autre bout du banc, il n'était pas du genre à avoir peur du contact, et n'était pas gêné à l'idée de s'asseoir aux côtés de quelqu'un qu'il ne connaissait pas, il espérait simplement qu'il en était de même pour le jeune homme.

Il fut rassuré en voyant qu'il ne lui avait adressé qu'un seul regard en biais, nullement dérangé par sa soudaine présence, ce qui lui avait d'ailleurs permis de remarquer la couleur azur des pupilles fines de l'inconnu. Ses yeux étaient vraiment beaux même derrière ses lunettes, aucun doute à avoir là dessus. Bokuto se concentra à nouveau sur le soleil couchant devant lui, sa présence s'effaçait peu à peu alors que le rose prenait possession du ciel et qu'il laissait son esprit vagabonder au gré de la brise soufflant délicatement dans ses cheveux et sa nuque, et que le doux chant des oiseaux se faisait toujours présent.

Le ruisseau devant eux laissait refléter le coucher de soleil, et il se fit la réflexion que cette teinte rosée était l'origine même de la beauté du paysage.

─ Le ciel est vraiment magnifique. J'aime beaucoup quand il porte cette couleur.

Bokuto avait parlé sans chercher vraiment à faire de conversation : il avait surtout parlé pour lui même.
Les mots s'étaient formés naturellement dans un besoin spontané de décrire ce paysage qu'il aimant tant, cette beauté inaccessible qu'avait le ciel.

Alors qu'il n'attendait aucune réponse, laissant son règne aux bruits alentours, la voix de l'inconnu se fit entendre.

─ Peut-être bien, je ne peux pas voir sa beauté. De quelle couleur est ce qu'il est ?

Bokuto qui n'avait cessé d'observé la source de son apaisement intérieur, se tourna lentement vers son voisin. La curiosité dévorait maintenant ses iris dorées, et il avait envie de poser milles et unes question à la fois. Cette curiosité peut être mal placée s'accentua lorsqu'il détailla le jeune homme à ses côtés : ses prunelles azur ne laissaient transparaître aucune émotions particulières.
Il était lasse, peut-être.
Cependant, ce fut son sourire qui le trahit. À ce moment là, les lèvres fines du bel inconnu s'étaient étirées en un sourire perturbant. Perturbant car ce sourire n'avait rien de joyeux, c'était simplement un sourire triste, vide de sens.
Un sourire qui respirait la fatalité.

─ Rosé, dans des nuances d'orange.

Le silence reprit sa place, s'imposant comme lourd et oppressant.
Il n'avait plus rien d'apaisant.

Et pour cause, il fut brisé par un sanglot.
Un unique sanglot, faible, presque imperceptible. Le jeune homme avait prit sa tête entre ses mains, se donnant une posture désespérée, comme épuisé. Alors que Bokuto allait par réflexe lui demander ce qui lui arrivait, son camarade d'infortune prit à nouveau la parole, comme s'il avait anticipé la question.

─ Je n'arrive même pas à me l'imaginer, et ça me tue.

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