Samedi

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« Le père de Juliette posa le saumon sur la table.

- Papa ! Je suis trop contente j'ai trouvé une passion... dit elle, toute fière.

-J'ai regardé des vidéos de pêche toute la semaine ! J'y suis allée la semaine dernière et j'ai adoré ! Ma première truite pour mon anniversaire. Super, non ?

-Oui oui. Je vais te poser une question. Tu es sure que tu n'aimes pas les filles ?

Gênée, elle répondit :

-Ben non, pourquoi ?

-Je me comprends... Tu sais, les filles qui pèchent ce ne sont jamais des canons, blondes aux yeux bleus... T'en as déjà vu ? Pas moi. C'est plutôt des camionneuses, ricana t-il en allant chercher de la glace dans le congélateur

Juliette resta muette. Elle avait envie d'exploser et de contredire tous ces préjugés qu'elle trouvait débiles. A la place, elle lui demanda seulement de lui prendre une glace au chocolat.

C'était ces discussions autour de la table qu'elle détestait le plus. Le week-end précédent, il lui avait fait un cours sur les noirs. Elle ne devait pas en ramener a la maison. Quand il disait ca, il rigolait, surement pour faire comme si c'était une blague. Même un aveugle aurait vu que ce n'était pas une blague. Il aimait aussi lui dire que c'était un camionneur quand elle rotait. Elle ne s'habillait pas forcément en fille, pas en garçon non plus. Il adorait lui faire remarquer, et lui avait d'ailleurs demandé si elle aimait les filles, pour ca. »


Voila la discussion qui a causé tellement de tort, un soir de juillet.

Juliette était triste. Son père commençait à lui manquer. L'été dernier, elle avait essayé de lui parler, encore une fois, et encore une fois, il ne l'avait pas laissé parler. Sa mère et elle lui avait donné rendez vous dans un café, pour éviter les éclats de voix. Juliette avait commencé à lui raconter ce qu'il n'allait pas, pourquoi elle se sentait mal. La raison de son mal être était très simple. Elle détestait sa belle-mère, qu'il lui faisait subir depuis 4 ans, mais il ne l'avait jamais écoutée. Son père était raciste, homophobe, grossophobe. Juliette avait d'ailleurs été comme lui très longtemps, on le sait, les parents ont une grande influence sur les enfants. C'était déjà très compliqué pour elle de mettre toutes ces choses sur la table. Elle n'avait même pas eu le temps de finir sa première phrase qu'il l'avait coupé et nier le peu de ce qu'elle avait dit. Elle se mit à pleurer, à cause de la pression, et à cause de ce regard de « méchant de film »qu'il lançait quand il était énervé. Sa mère, car elle était là aussi, pour la soutenir, lui fit signe de partir. Juliette était complètement d'accord, elle se leva, continua de pleurer et partit. Elle était dégoutée et hors d'elle. Elle avait envie de sauter au cou de son père et de l'étrangler violemment. Ce n'était pas la première fois qu'elle essayait de s'exprimer et qu'il ne la laissa pas faire.

Depuis ce jour, plus aucune nouvelle, mis à part le message qu'il avait laissé à sa mère, un jour après. Ce fameux message avait fini d'achever Juliette. Il racontait que Juliette portait des accusations graves, qu'il croyait avoir une complicité avec elle, mais que finalement non. Il disait qu'il était déçu, et qu'il attendait des excuses, sinon quoi il ne renverrait pas de messages.

Il mettait la rage à Juliette. Le soir, elle pleurait de tristesse et de colère a la fois. C'était son père, malgré tout, et ils avaient passé beaucoup de bons moments ensemble. Mais elle se rassurait en se disant :


« Je ne rate rien, c'est un con »

JULIETTEWhere stories live. Discover now