Chapitre 3

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Le lendemain, j'embauche pour le service du soir, motivée et stressée à l'idée de devoir me débrouiller par moi-même. N'avoir été formée que sur un seul service est à l'évidence loin d'être suffisant pour une novice comme moi. Je risque de galérer, surtout qu'on est samedi soir donc il devrait y avoir du monde. Mais bon, je demanderai de l'aide aux collègues. Daniel est vraiment gentil et très pédagogue. Heureusement, ce soir c'est encore avec lui que je travaille ce qui me rassure un peu. Je m'engage dans le hall d'entrée de l'hôtel, bien décidée à ne faire qu'une bouchée du service de ce soir, quand j'entends une voix. Sa voix.

̶  Bonjour Élisabeth.

Les yeux bleus brillants de Matthias m'observent de haut en bas. Son regard est d'une telle intensité que j'ai l'impression qu'il peut voir à travers mes vêtements. Je ne peux pas m'empêcher de ressentir une gêne. Aucun homme ne m'a jamais scrutée comme ça. Pas que je sache en tout cas. C'est flatteur et en même temps perturbant pour la timide que je suis. Ses lèvres forment un grand sourire, dévoilant de belles dents blanches bien alignées. Il a vraiment un sourire à tomber... Le temps que je le rejoigne derrière le comptoir de la réception, il ne cesse de me reluquer. Je dois être toute rouge, enfin écarlate voire même cramoisie... A ce stade ce n'est même plus une couleur définissable. Mes joues sont bouillantes lorsque je m'approche de lui pour lui faire la bise. En même temps que nos joues se touchent, il pose une main sur mon épaule dénudée, à côté de la bretelle de mon débardeur. Ce contact me donne immédiatement un frisson. Je ne sais pas s'il s'en rend compte mais son sourire s'agrandit encore un peu plus. Il est tant penché sur moi que je suis obligée de me cambrer le dos si je ne veux pas avoir son visage dans mon cou. Toutes ses sensations nouvelles me rendent muette. Je finis tant bien que mal par bredouiller :

̶  S...Salut.

J'essaye de lui sourire mais je crois que ma tentative se conclue par une espèce de grimace. Pourquoi je me sens comme ça ? On dirait qu'il a une espèce de pouvoir sur moi et que je ne peux rien y faire. Comme il n'esquisse aucun mouvement pour s'éloigner de moi, je suis obligée de faire un pas en arrière pour retrouver un peu d'espace vital. Il finit par me lâcher, toujours tout sourire.

̶  On dirait qu'on bosse ensemble ce soir !

̶  Oui apparemment.

Je me serais contentée de ce bref échange en temps normal mais je me suis dit que ce ne serait pas très poli de ma part. Ok il est un peu perturbant mais il a l'air gentil donc je vais essayer d'être sympa avec lui.

̶  Daniel aussi travaille ce soir. Heureusement car il y a plein de choses qu'il doit encore me montrer. J'espère qu'il ne va pas y avoir trop de monde.

̶  Ne t'inquiète pas, je suis sûr que ça va bien se passer. Et surtout tu n'hésites pas à me demander si tu as besoin d'un coup de main.

Comme pour appuyer ses propos, il se penche légèrement vers moi et me fixe droit dans les yeux. Ses iris sont d'un bleu vraiment magnifique, presque turquoise. Pour toute réponse, je n'arrive qu'à hocher la tête. Je lui fais un léger sourire, bouche fermée, puis me décide quand même à lui dire un timide « merci ». Il semble satisfait et reprend sa place à la réception, des clients attendant de pouvoir retirer la clé de leur chambre.

Le service est calme. Il n'y a pas foule, ce qui me permet d'assimiler petit à petit les informations. J'essaye de faire moins d'allers et retours inutiles, comme me dit Daniel :

̶  Si tu apportes une bouteille d'eau à une table, profites-en pour observer les autres tables et voir où elles en sont. Regarde la table là-bas, ils ont besoin de la carte des desserts et eux ont demandé du pain. Fais un seul trajet pour tout ça, sinon tu vas t'épuiser !

Heureusement que Daniel est là pour me guider, sinon je serai complètement perdue. Je prépare des cafés au percolateur, comme Daniel me l'a montré, en tassant bien le café moulu et sans trop en mettre, sinon ça déborde de partout. C'est évidemment ce qu'il s'est passé quand j'en ai fait la première fois. Je me félicite, fière de mes trois expressos en train couler, quand je sens une main se poser délicatement sur ma peau, entre mes deux omoplates. Puis je sens un souffle chaud près de mon oreille, mélange de tabac et de réglisse.

̶  Ça va ? Tu t'en sors ? Tu as besoin que je t'aide ?

̶  Non non ça va. Tout se passe bien pour l'instant. Les clients sont compréhensifs avec moi.

̶  Ok tant mieux. Tu n'hésites pas hein ? Si tu as besoin... Dit-il en s'éloignant à reculons, me faisant un clin d'œil.

Je ne sais pas quoi penser. Est-il tout simplement gentil, sans arrières pensées ? Bon et aussi un peu trop tactile... et sexy... et... enfin bref... Ou est-il un tombeur invétéré dont je serai le nouveau jouet ? Si c'est la deuxième option, alors il devrait vite se lasser avec moi, car timide comme je suis, je risque fort de ne pas avoir le mordant suffisant pour que jouer avec moi suscite toujours chez lui un quelconque intérêt d'ici quelques jours. Même si ma raison me dit que c'est probablement un séducteur, je ne peux m'empêcher d'être touchée par son comportement attentionné pendant tout le service. En effet en plus de m'avoir proposé son aide à plusieurs reprises, il m'a préparé un diabolo citron. Mais d'ailleurs comment sait-il que c'est ma boisson préférée ? Est-ce possible que ce soit un coup de chance ?

Je suis tirée de mes pensées par Daniel qui me demandegentiment de me bouger car des plats attendent d'être servis et sont en trainde refroidir sur le passe-plat. Je reprends mon travail en essayant de ne pluspenser à Matthias. 

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