PARTIE I
Portant son habituelle tenue de combat, Némésis déambulait dans les jardins du palais royal, effleurant du bout des doigts les fleurs et feuillages en tout genre bordant l'allée centrale. Le gazouillis des oiseaux emplissait tout le jardin, et une douce brise agitait les branches des arbres. La fontaine au centre du jardin coulait normalement, brillant de mille feux, ayant été nettoyée récemment, lors du couronnement de Thor, quelques jours auparavant. Une impression de sérénité absolue régnait dans le jardin. À une exception près.
La jeune femme qui se trouvait là était tout sauf sereine. Mille émotions se bousculaient dans sa tête, faisant se lever et s'abaisser sa poitrine plus rapidement que d'ordinaire. Impassibles, les deux gardes du palais qui avaient été chargés de garder un œil sur elle se tenaient à une distance respectable derrière elle, afin de lui laisser toute l'intimité dont elle avait besoin, mais aussi afin d'éviter de s'attirer les foudres de la guerrière.
En effet, celle-ci fulminait, autant de rage que de désespoir. Lorsqu'elle s'était réveillée ce matin-là, à l'infirmerie du palais, les guérisseuses avaient effectué les dernières vérifications nécessaires, puis avaient demandé à ce que deux gardes royaux suivent Némésis partait où elle irait, afin de veiller à ce qu'elle ne s'écroule pas subitement. Celle-ci avait rétorqué qu'elle avait déjà Nébuleuse pour veiller sur elle, avant d'ajouter qu'elle était encore loin du stade d'effondrement que craignaient les guérisseuses. Pour qui la prenaient-elles ?
Il était vrai que, dernièrement, elle n'avait pu se reposer que très brièvement, et la morsure du puma que les médecins midgardiens avaient cousu s'était rouverte, par deux reprises. Mais de là à ce qu'elle tombe comme une feuille morte soufflée par le vent, il y avait encore de la marge ! Elle n'était pas en sucre, ou en porcelaine. Et même si à l'intérieur, elle ressentait une déchirure dans son cœur, ce n'était pas ça qui allait la faire s'effondrer. Car même si personne n'avait osé le formuler à voix haute, elle savait pourquoi on lui avait assigné des gardes, qui devaient veiller sur elle en permanence depuis son réveil.
Une fois sûr qu'elle encaisserait le coup, après qu'on lui ait prodigué quelques soins supplémentaires, un garde était venu lui annoncer la bien triste nouvelle, qui ne tarderait pas à circuler bientôt dans tout Asgard, puis dans les neuf royaumes, se propageant dans chaque branche de l'arbre-monde Yggdrasil, tel un feu de forêt prenant de l'ampleur et se propageant à toute vitesse : le prince Loki, dieu de la malice, était mort. Si extérieurement, Némésis avait feint l'indifférence, pour ne pas montrer que la nouvelle l'atteignait, et afin d'éviter que deux gardes supplémentaires ne viennent lui coller aux basques, intérieurement, une partie d'elle-même s'était brisée, en mille morceaux éparses qu'il serait impossible de recoller. Loki et elle n'avaient pas connu des années très heureuses, dernièrement. Pour autant, et même s'il avait tenté de les tuer sur Midgard, il restait et resterait à jamais son ami. Un ami qu'elle regrettait amèrement d'avoir perdu, par deux fois.
Et si elle souffrait ainsi, elle n'osait même pas imaginer la douleur que devait ressentir Thor actuellement. Il avait toujours aimé son frère, malgré ses accès de colère, malgré les tours malicieux qu'il avait pu lui jouer, et malgré sa jalousie, qui l'avait plusieurs fois poussée à commettre des actes plus ou moins horribles. La disparition de Loki devait être terriblement difficile à encaisser pour le dieu du tonnerre, elle s'en doutait. C'est pour cette raison qu'elle avait voulu le rejoindre dans ses appartements, afin de lui apporter un peu de réconfort, bien qu'elle savait qu'elle ne pourrait pas faire de miracles. Mais on lui avait formellement interdit d'aller voir le prince, son meilleur ami, tout comme on lui avait formellement interdit de quitter le palais. Et elle ne pouvait rien faire pour déroger à ces obligations, n'ayant plus la possibilité de se téléporter depuis que le Père de Toute Chose lui avait retiré ses pouvoirs et les avait précieusement gardé sous le coude. Sinon, il ne faisait aucun doute qu'à l'heure actuelle, elle serait loin d'ici, certainement au bord de la plage, à écouter le bruit de la mer, à la laisser lui lécher les pieds, et à porter un regard pensif sur l'horizon.
Alors, pour éviter de laisser libre court à sa colère, qui la faisait bouillir de l'intérieur, elle avait décidé de faire un tour dans les jardins luxuriants du palais, afin d'apaiser au moins un peu son esprit échauffé. Nébuleuse l'avait tout naturellement accompagnée, la collant encore plus qu'avant, comme si elle craignait de la perdre à nouveau, de se retrouver séparée d'elle sans pouvoir rien y faire. Le félin semblait s'être calmée, alors qu'un peu plus tôt dans la journée, elle avait failli dévorer vivants plusieurs gardes, pour avoir repoussé sa maîtresse lorsqu'elle avait demandé à voir Thor et avait tenté de passer en force. Némésis avait dû se calmer, et calmer le jeu pour éviter qu'un carnage n'ait lieu au sein du palais, bien qu'elle ait été extrêmement reconnaissante envers sa panthère pour le soutien infaillible dont elle avait une nouvelle fois fait preuve. Il n'y avait pas plus fidèle que les animaux, c'était bien vrai, elle pouvait en témoigner.
Jetant un bref coup d'œil derrière elle, en espérant que les gardes se seraient lassés et seraient partis vaquer à des tâches bien plus intéressantes que veiller sur elle, elle fut déçue de constater que ce n'était pas le cas. Lâchant un profond soupir, elle tripota le pendentif du fin collier qu'elle avait placé autour de son cou du bout des doigts, agacée. Il s'agissait du collier que Loki lui avait offert, quelques centaines d'années plus tôt, lors de son anniversaire. Lorsque leur relation s'était dégradée, elle l'avait retiré mais l'avait gardé auprès d'elle, le plaçant autour du pommeau de son épée. Mais aujourd'hui, elle ressentait le besoin de le porter. C'était inexplicable, mais nécessaire.
Cherchant un peu de fraîcheur, elle alla s'asseoir au bord de la fontaine, dont le côté ouest se trouvait ombragé par un arbre d'Asgard aux feuilles dorées. Nébuleuse sauta sur la fontaine, à sa droite, et s'allongea au bord de l'eau, à l'ombre, la gueule entrouverte pour chercher un peu de fraîcheur. Némésis, quant à elle, fit glisser ses doigts sur l'eau, créant de petites ondulations en surface. Ce geste l'apaisa un peu, et les gardes restèrent à distance, le visage impassible, mais prêts à intervenir au moindre signe alarmant.
« Puis-je savoir qui vous surveillez ainsi, messieurs ? Est-ce bien cette jeune femme que vous surveillez ?
En entendant cette voix, mélodieuse et toute en douceur, qui ne pouvait appartenir qu'à une seule personne, Némésis se redressa et retira ses doigts de l'eau de la fontaine. Nébuleuse tourna elle aussi la tête sur le côté, et agita les oreilles en reconnaissant la femme d'âge mûre qui venait de s'adresser aux deux gardes qui venaient de se mettre dans une position de salut respectueuse.
- Oui, ma reine, répondit l'un des deux. Les guérisseuses nous l'ont demandé.
- Les guérisseuses ? Et depuis quand est-ce que les guérisseuses vous donnent des ordres ?
Sa question n'avait pas pour but de les sermonner, mais les mit dans un profond embarras. Ni l'un ni l'autre ne répondirent, et la reine Frigga leva une de ses mains, qu'elle avait gracieusement croisées devant elle, afin de leur faire signe qu'ils pouvaient partir.
- Vous pouvez disposer.
Les deux gardes hésitèrent et échangèrent un regard, avant de se pencher légèrement en avant comme l'exigeait le protocole, claquer les talons, puis partir. Frigga les regarda s'éloigner, tandis que Némésis gardait son regard rivé droit sur elle, ébahie. Cette femme inspirait le respect à tous, par sa douceur et sa force. Lorsqu'elle se tourna vers elle, Némésis se leva et baissa respectueusement la tête. À son grand étonnement, Frigga s'approcha d'elle pour venir poser ses mains sur ses bras, avant de l'attirer à elle dans une étreinte réconfortante. Surprise, Némésis ne dit rien, et se contenta se répondre timidement à l'étreinte que la mère de son meilleur ami, mais également sa reine, lui offrait.
- Tu dois te poser bien des questions, mon enfant, lui souffla-t-elle contre son oreille. Et je vais y répondre, aussi précisément que possible.
Némésis écarquilla les yeux, encore plus surprise par les paroles de la reine. Celle-ci mit fin à leur étreinte mais garda ses mains sur ses bras, et lui offrit un sourire des plus doux qu'il ait été donné à Némésis de voir. D'un geste de la main, Frigga l'invita à retourner s'asseoir au bord de la fontaine, et les deux femmes s'assirent toutes deux côte à côte, leurs corps légèrement tournés sur le côté, de sorte à se faire face. Frigga, assise près de Nébuleuse, tendit le bras et se mit à la caresser distraitement. Au départ, Némésis n'osa pas formuler la moindre question, par politesse, attendant que la reine l'y invite, bien qu'elle l'ait déjà fait, mais aussi par pudeur sans doute. Lorsqu'elle vit que Frigga ne comptait pas prendre la parole la première, elle posa sa première question, celle qui lui torturait l'esprit et lui brûlait les lèvres.
- Comment va Thor ?
- Je me doutais que tu me poserais cette question, lâcha Frigga avec un petit sourire amusé qui fit légèrement rosir les joues de Némésis. Il pleure la mort de Loki. Mais il reste fort devant tout le monde.
- Comme il l'a toujours fait, soupira doucement Némésis.
- Il est aussi perdu et attristé que toi, déclara Frigga après quelques secondes de silence et en arrêtant de caresser Nébuleuse pour plonger son regard dans celui de Némésis. Il a tenté de venir voir comment tu allais, mais on l'a empêché de le faire.
- Pourquoi ?
La frustration tout juste contenue de Némésis avait refait surface, donnant un ton de supplique à sa question. Frigga secoua la tête, et la regarda d'un air désolé.
- Je crains de ne pouvoir te répondre... Mais je fais tout pour que Odin vous laisse vous voir au moins cinq petites minutes.
- Merci.
La reine se contenta de secouer humblement la tête, et un nouveau silence s'installa. Némésis avait de nombreuses questions à poser, mais elle ne savait pas par où commencer exactement. Tout se bousculait dans sa tête, s'emmêlait, et de nouvelles questions étaient venues rejoindre les premières suite à la réponse de Frigga concernant sa deuxième interrogation : pourquoi donc Odin tenait à les tenir séparés l'un de l'autre, Thor et elle ? Finalement, une autre question lui vint à l'esprit, une question de pure curiosité.
- Et Sigyn ?
Pour toute réponse, la reine lâcha un profond soupir, qui fit grimacer Némésis. Comme elle s'y attendait, Sigyn devait être dans un état terrible. Elle avait aimé Loki plus que quiconque, et avait su lui offrir le bonheur qu'il cherchait tant, et que Némésis n'avait pu lui donner. Leur amour était sincère et profond, tout le monde le savait, et le coup de théâtre de Loki lors du mariage de Sigyn en avait été l'une des multiples preuves fournies au fil des ans. Némésis reporta son attention sur l'eau de la fontaine, et y glissa cette fois toute sa main, appréciant grandement la fraîcheur de l'eau.
- Quand pourrais-je retrouver mes pouvoirs ?
- Bientôt, sans doute. Odin ne m'a pas fait part de ses projets, il reste fermé comme une huître, et buté. Pire que son fils aîné.
Némésis ne put retenir un rire de passer la barrière de ses lèvres, tandis que Frigga lui adressait un clin d'œil complice. Mais bientôt, l'inquiétude tordit le ventre de Némésis : si la reine elle-même ne parvenait pas à savoir ce que son mari prévoyait de faire, alors elle était quasiment certaine de s'être fourrée dans de sales draps... Frigga dut percevoir son inquiétude, puisqu'elle posa sa main sur celle de Némésis, qu'elle avait sorti de l'eau pour placer sur le rebord de la fontaine. Se fichant éperdument d'être mouillée, la reine plongea un regard plein de sagesse et d'assurance dans le sien.
- Je parviendrais à savoir ce qu'il manigance, comme à chaque fois, sois-en certaine mon enfant. Et tu en seras immédiatement informée.
- Merci, ma Reine.
- Oh, je t'en prie. Depuis toutes ces années, je crois que nous sommes bien plus que de simples connaissances, toi et moi.
Les yeux de Némésis se mirent à briller de gratitude, tandis que Frigga pressait sa main dans les siennes. Ce moment d'intimité fut brusquement coupé lorsque les mêmes gardes que tout à l'heure revinrent et s'arrêtèrent juste devant elles dans un salut répété maintes et maintes fois durant leur formation. L'irritation prit place sur le visage de la mère de Thor, qui se leva pour leur faire face, les sourcils froncés.
- Je croyais vous avoir demandé de nous laisser. Qu'est-ce que cela signifie ?
- Veuillez nous excuser, ma Reine, commença le même qui avait pris la parole tout à l'heure, d'un air sincèrement gêné. Mais nous devons conduire la dame Dellingdottír dans ses appartements. Ordre de Sa Majesté Odin, ajouta le garde comme pour s'éviter les foudres de la reine, alors qu'il ne faisait qu'exécuter les ordres de son Roi.
Frigga ne répliqua rien, et Némésis sentit sa gorge se nouer, car elle avait compris que cette fois, Frigga était totalement impuissante face aux ordres impérieux de son mari. Elle adressa alors un regard désolé à Némésis, qui la rassura d'un petit sourire crispé, avant de se lever et rejoindre les deux gardes. Elle s'attendait presque à ce qu'on lui passe les menottes, comme une prisonnière, mais pourtant, rien de cela ne se produisit. Au contraire, les gardes s'écartèrent pour lui laisser un peu d'espace, de façon presque... respectueuse ? Elle ne comprenait rien à ce qu'il se passait, et cela ne faisait que l'inquiéter davantage. Pourtant, elle se dirigea vers ses appartements de façon droite et confiante, après avoir salué sa Reine et ce qui semblait être son amie, escortée par deux gardes aussi impassibles que s'ils avaient été faits de marbre.
* * *
Enfermée depuis un peu plus d'une heure dans la chambre qu'elle occupait lorsqu'elle venait au palais, Némésis faisait les cent pas, de plus en plus inquiète. D'ordinaire calme, elle ne pouvait cette fois-ci empêcher les mille scénarios, tous plus improbables les uns que les autres, qui se formaient dans sa tête, de la torturer mentalement. Frigga n'était pas revenue la voir, Thor n'était pas venu non plus, et personne ne daignait lui apporter la moindre information, ce qui la rendait de plus en plus nerveuse. Odin manigançait quelque chose, elle en avait désormais la certitude, mais de quoi s'agissait-il ?
Cela ne pouvait pas être un jugement, car elle n'avait rien fait de mal, et lorsqu'elle s'était dressée face au Père de Toute Chose, elle avait été sur-le-champ punie pour son arrogance, en étant bannie sur Midgard. Toutefois, ses pouvoirs ne lui avaient toujours pas été rendu, ce qui la faisait hésiter quant à la véracité de sa première hypothèse. Elle avait ensuite envisagé un mariage arrangé, Odin étant parfaitement en droit de la marier, même si elle n'était pas sa fille. Il était le Père de Toute Chose, après tout, et cette position ne permettait de contester aucune de ses décisions. Pourtant, elle doutait qu'il s'agisse d'un mariage, pour la simple et bonne raison que Frigga, la déesse du mariage, ne semblait être au courant de rien. Or, si l'union devait se passer correctement, il fallait que ce soit elle qui scelle le destin de deux personnes, en toute connaissance de cause. De plus, Némésis n'avait pas été préparée pour un mariage, portant encore sa tenue de combat, et non une robe resplendissante comme il était d'usage sur Asgard.
Ruminant ces pensées en rongeant nerveusement l'ongle de son pouce, la jeune femme sursauta lorsqu'on toqua à sa porte, avant que l'un des gardes n'entre, la stoppant dans ses allés-retours incessants, que Nébuleuse regardait depuis tout à l'heure sur son lit, la tête posée sur ses pattes musclées.
- Veuillez me suivre, dame Dellingdottír. Et ne pas poser de question jusqu'à notre arrivée, ajouta-t-il en la voyant ouvrir la bouche.
Némésis se renfrogna dans un grognement mécontent, puis se tourna vers Nébuleuse, qui se leva et sauta gracieusement au bas du lit, afin de la rejoindre. Avant de quitter la chambre, la brune lança un regard à l'extérieur, où le soleil commençait à se coucher, donnant des tons orangés au ciel auparavant d'un bleu limpide.
Dans le plus grand des silences, elle suivit le garde, qui lui jetait par moments de petits coups d'œil, lui faisant lever les yeux au ciel. Comme si je pouvais m'échapper..., se dit-elle. Ils tournèrent plusieurs fois, et descendirent les grands escaliers de marbre conduisant au rez-de-chaussée, avant d'emprunter un couloir que Némésis ne connaissait que trop bien, pour y avoir été lors d'événements de grande ampleur, comme le mariage de Sigyn, et le couronnement de Thor, qui avait malheureusement mal fini. Le garde la conduisait droit vers la salle du trône.
Une bouffée de panique s'empara d'elle, mais elle maintint la cadence imposée par le garde, la tête haute, comme sa mère le lui avait appris. Ne jamais montrer tes émotions. Peut-être parviendrait-elle à mettre ce conseil en application aujourd'hui... Alors qu'ils parvenaient devant la large porte dorée menant tout droit à la salle du trône, le bruit de pas claquant contre le sol se firent entendre, et des murmures parcoururent le grand hall. Némésis et le garde tournèrent la tête dans cette direction, et virent alors une silhouette massive se diriger droit vers eux, à un rythme rapide. La guerrière reconnut sans mal son meilleur ami, Thor, qui tenait Mjölnir dans sa main droite et ne semblait absolument pas content. Des gardes tentèrent de s'interposer, mais Thor les écarta aisément, en les menaçant d'être beaucoup moins doux et clément avec eux s'ils l'empêchaient à nouveau de passer.
Le garde se tenant à la droite de Némésis s'avança d'un pas, mais un simple regard plus que noir de la part du dieu du tonnerre, et un grognement venant de Nébuleuse, suffirent à le convaincre de ne pas faire d'histoires. Le prince posa finalement son regard sur son amie, et posa délicatement une main sur sa joue, la regardant avec inquiétude.
- Tu n'as rien..., soupira-t-il de soulagement avant de foudroyer le garde du regard. Ils ne t'ont pas brutalisée ?
- Non, pas du tout. Ça va.
Thor reporta son regard sur elle, et se radoucit alors immédiatement. Au fond de ses prunelles bleutées, Némésis vit qu'il était aussi perdu qu'elle, et aussi inquiet. Gardant sa main sur sa joue, il caressa sa peau avec le gras de son pouce, et laissa un silence planer, visiblement perdu dans ses pensées. Tout comme Némésis avant lui, il tentait de comprendre ce qui se passait, mais n'y parvenait pas, et cela le rendait fou.
- Par Odin, quelqu'un peut me dire ce qui se passe ? finit-il par demander d'une voix forte où perçait la colère. Pourquoi donc la traitez-vous comme si elle était une prisonnière ? Et pourquoi Père a-t-il invité la moitié d'Asgard dans la salle du trône ?
- Quoi ? s'étrangla Némésis en faisant les gros yeux.
Thor jeta un nouveau regard cinglant à l'un des deux gardes qui avait surveillé Némésis toute la journée et venait de la conduire jusqu'à la salle du trône, puis prit délicatement celle-ci par le bras et l'écarta un peu de lui, afin de lui parler de façon plus intime. Il plongea alors son incroyable regard dans le sien, et Némésis soutint ce regard qui avait le don de l'apaiser en temps normal, mais qui ne faisait que l'inquiéter davantage aujourd'hui.
- Je ne sais pas ce qui se passe. Père m'a empêché de te voir durant toute la journée, et tout à l'heure, on m'a demandé de venir dans la salle du trône, sur ordre du Père de Toute Chose, lui souffla-t-il. Quand je suis arrivé, des centaines de personnes se trouvaient là. J'ai tenté de faire parler mon père, mais il est encore plus têtu que moi, et je n'ai rien pu en tirer. Je suis donc sorti en passant par les fenêtres avec mon marteau, et je t'ai rejoint. Mais c'est étrange... Père avait l'air incroyablement serein lorsque je lui ai posé toutes ces questions, même lorsque j'ai élevé la voix. S'il avait voulu te punir, il n'aurait pas été aussi calme avec moi lorsque j'ai évoqué ton nom. Il avait même l'air... amusé.
Némésis fronça un peu plus les sourcils. Cette fois, elle était totalement perdue, pour de bon. Thor dut percevoir son inquiétude, puisqu'il prit un air plus doux et ouvrit la bouche, certainement pour la rassurer. Némésis n'en saurait jamais rien, car le garde les interrompit en annonçant qu'elle devait entrer, qu'on l'attendait. Le dieu du tonnerre lâcha alors sa joue, mais contrairement à ce à quoi elle s'attendait, il ne repartit pas d'où il venait. En fait, il fit tout l'inverse. Gardant Mjölnir dans sa main droite, il se plaça à moitié devant elle, de manière totalement protectrice, et se dressa de toute sa hauteur, plus imposant que Némésis ne l'avait jamais vu. D'ordinaire, elle n'aimait pas qu'on la protège de cette façon, car cela lui donnait l'impression d'être faible, ce qu'elle n'était pas, depuis bien longtemps. Mais cette fois-ci, elle ne broncha pas, et resta derrière lui, le cœur battant la chamade dans sa poitrine.
- Je reste avec elle, déclara-t-il de manière inflexible.
Le garde voulut protester, mais Thor lui fit clairement comprendre qu'il ne changerait pas d'avis. Résigné, il se détourna alors et se plaça contre la porte, une main sur la poignée en or de celle-ci. Thor se tourna de profil, puis tendit sa main à Némésis, qui, après une brève hésitation, s'en saisit avec douceur. La large main de son meilleur ami se resserra sur la sienne, plus fine, et il entrelaça ses doigts aux siens, de la façon la plus naturelle du monde. Nébuleuse vint quant à elle se placer sur sa droite, pour toujours et à jamais à ses côtés. La jeune femme s'avança, de sorte à être à la hauteur de Thor, puis hocha la tête en le regardant. Celui-ci tourna alors la tête pour regarder droit devant lui, ce qu'elle fit elle aussi, en s'avançant d'un pas supplémentaire. Le garde abaissa alors lentement la poignée de la porte, puis l'ouvrit. Et alors, le spectacle qui s'offrit aux yeux de Némésis la figea sur place.
Dans la grande salle du trône, la plus grande du palais, se trouvaient des centaines de personnes, comme Thor le lui avait dit quelques instants plus tôt. En entendant les lourdes portes s'ouvrirent, tous ces regards avaient convergé dans sa direction, et elle put alors voir diverses émotions parcourir leurs yeux : de la curiosité, de la surprise en voyant Thor, et de l'excitation. Déglutissant péniblement, Némésis porta de nouveau son regard droit devant elle, suivant la ligne parfaitement droite de gardes, qui ouvrait un chemin au-milieu de la foule, postés au garde à vous. Et au bout de ce parfait alignement, tout au fond de la salle, en haut des marches, se tenait Odin, assis sur son trône, sa lance récemment récupérée à la main. Frigga se tenait à sa droite, comme d'habitude, tandis que le Trio Palatin ainsi que Sif se tenaient de part et d'autre des marches. Même Sigyn était là. Mais cette surprise ne fut rien comparé à celle qui s'empara de Némésis lorsqu'elle vit les deux derniers invités d'honneur, qui se tenaient au plus près du Père de Toute Chose et de la reine Frigga. Car il s'agissait de sa mère, et de son père.
Je sais, je devais terminer cette deuxième partie pour entamer la troisième. Mais le chapitre était beaucoup trop long (8000 mots et quelques) et j'ai décidé de le couper en deux, comme vous me l'avez suggéré ^^ et pour éviter de vous laisser réfléchir trop longtemps, et aussi pour arriver plus vite à la troisième partie, qui portera sur le premier Avengers, j'ai également suivi vos conseils et ai décidé de poster la suite de ce chapitre dimanche. Vous n'aurez pas à trop patienter comme ça ahah !
La deuxième partie de ce chapitre est un peu plus longue que celle-ci, mais il se passe plus de choses. Soyez prêt(e)s les ami(e)s ! 😁