L'entraînement

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Pendant les sept premières années de sa vie, la jeune Aubin fut éduquée dans la pure tradition des Marquis de Provins. Son père jouait souvent avec elle, avec des pistolets et des épées en bois et lui fit apprendre très tôt l'équitation. Son professeur était très impressionné par la facilité d'apprentissage et sa manière efficace de dompter les chevaux.

On la confia à un précepteur très érudit qui lui fit aimer les études. C'était une élève attentive et attentionnée qui s'intéressait à tout, malgré quelque difficulté en le latin.

À sept ans, Aubin était devenue une magnifique petite fille, dont ses courts cheveux bruns encadraient un petit visage rond au teint blanc ou l'on ne pouvait voir que ses grands yeux émeraude. Malheureusement, sa beauté naturelle était cachée sous ses atours masculins et rien n'allait arranger les choses, car son père fier de son travail, lui offrit une épée et l'emmena chez un maître d'armes, où elle recevrait sa véritable leçon d'escrime.

C'est là-bas, que sa grande amitié était née. Bien que le Duc et son fils venaient régulièrement les voir, elle avait vraiment appris à connaître François qui avait deux ans de plus qu'elle. Son talent avait impressionné la petite fille qu'elle était. Il maniait déjà son arme avec souplesse et rapidité. Les sourires qu'il lui adressait, la motivaient à donner le meilleur d'elle-même pour être capable d'être à sa hauteur. Malheureusement, ses années d'avance lui donnaient toujours l'avantage.

De son côté, François était impressionné par ce petit garçon qui se battait vaillamment face à lui, sa détermination et sa force l'impressionnaient grandement. Sa rapidité d'apprentissage le frustrait, il ne voulait pas se laisser dépasser par lui. Il donnait donc le meilleur de lui-même pour que celui-ci ne soit jamais meilleur que lui. Mais il ne lui en voulait pas, au contraire, malgré son jeune âge, il avait compris que c'était ce qu'il y avait de mieux pour eux.

Un matin, Aubin arriva quelque peu en retard à sa séance quotidienne d'entraînement, elle savait que son ami ne serait pas content.

En pénétrant dans la grande salle éclairée par de grandes fenêtres, elle put admirer le travail de François. Elle était toujours impressionnée par ses efforts, car comme elle, il ne perdait jamais son temps à ne rien faire. C'est pour cela qu'elle le surprit à frapper le mannequin de paille qui tournoyait sur lui-même grâce à l'aide d'un pivot. Ces attaques étaient parfaites et précises, comment ne pouvait-elle pas être éblouie par son talent.

François ayant la sensation d'être observé, il tourna la tête cherchant le spectateur des yeux, un sourire se dessina sur son visage quand il aperçut son ami légèrement essoufflé et les joues rougies. Il ne put s'empêcher d'admirer ses yeux dont la couleur le fascinait toujours. Amusé par sa tête paniquée, il décida de jouer avec lui.

Lorsque, l'enfant sentit sa présence, il se tourna face à elle et vint à sa rencontre. Elle observa sous ses cheveux bruns, illuminés sous les rayons du soleil, quelques mèches qui cachaient des yeux noisettes et un petit visage recouvert d'une fine pellicule de sueur.

- Te voilà enfin ! Dit-il avec un air de reproche. Je commençais vraiment à m'impatienter. Qu'est-ce que tu faisais ? Tu le sais pourtant que je déteste attendre.

- Pardonne-moi, balbutia la petite fille. Je n'ai pas réussi à me réveiller. Elle baissa sa tête, en signe de soumission.

François amusé par sa mine boudeuse, se mit à rire à gorge déployé. Le jeune garçon posa la main sur l'épaule de son amie et pencha sa tête pour chercher son regard.

- Tu ne te refais pas, dit-il en lui souriant. Allez, ne fais pas cette tête, ce n'est pas grave. Allons nous entraîner.

Aubin releva sa tête et lui sourit aussitôt. Décidément, il savait toujours comment lui redonner sa bonne humeur.

Après un soupir de soulagement, elle alla poser ses affaires dans le vestiaire et alla rejoindre son ami au milieu de la salle, tandis que les autres étudiants s'étaient installés sur les gradins, pour observer leur duel.

Aubin avança d'un pas déterminé et se plaça face à François. Elle posa son regard dans le sien et écouta les dernières recommandations de leur maître. Une fois celles-ci fini, les deux enfants se saluèrent et se mirent en garde.

Ce fut elle qui lança sa première attaque, mais François la para. Grâce à son habileté, il fit de nombreuses fois reculer son amie, par de petites attaques. Aubin accéléra rapidement leur échange, elle pouvait entendre sa lame cogner contre celle de son adversaire, mais elle ne renonçait pas, elle voulait donner le meilleur d'elle-même.

François ne laissait rien paraître, mais la rapidité et la souplesse de son compagnon, le mettait grandement en difficulté, heureusement qu'il avait pour lui l'avantage de sa taille et de son expérience, car sinon, il savait qu'il aurait perdu contre lui. Il savait aussi qu'il avait tendance à trop se précipiter, l'obligeant à commettre d'infimes erreurs, lui donnant ainsi l'occasion de le désarmer.

Aubin ne put retenir sa lame qui lui échappa des mains, pour tomber bruyamment aux pieds de François. Elle ne put s'empêcher de pousser un soupir d'exaspération. Elle était vraiment frustrée d'avoir encore perdu face à lui. Elle ne pouvait pas lui reprocher son talent, elle était bonne joueuse et le félicita.

François admiratif, rangea son épée dans son fourreau et se pencha pour récupérer celle d'Aubin qu'il lui rendit aussitôt.

Des applaudissements résonnèrent en échos dans la salle, tandis que leur professeur s'approcha d'eux.

- Bravo, Messieurs. Magnifique spectacle. François vous êtes encore un peu lent, sinon vous avez une bonne analyse. Aubin, quant à vous, il se tourna vers la jeune fille. Ne soyez pas si pressé, vous avez du talent, il serait malheureux que votre empressement vous coûte la vie.

- Je l'admets, dit-elle amusée. Je le sais pourtant, mais mon excitation a tendance à prendre le dessus. Elle tourna la tête face à son ami. Je suis sûre qu'un jour, je pourrais gagner.

- N'y comptes pas, lui répondit-il en riant. Je serais toujours plus fort que toi. Il posa sa main sur son épaule. En tout cas mon ami. Bon duel.

Aubin ne put s'empêcher de sourire quand elle croisa ses yeux.

Après quelques heures, l'entraînement toucha à sa fin,  Aubin épuisée, salua son professeur et son ami avant de reprendre la route, pour enfin retrouver le sourire de sa sœur qui l'attendait sûrement avec impatience.

Quand les gens les voyaient réunies, ils ne pouvaient nier qu'elles étaient bien du même sang. Elles avaient le même visage, les mêmes lèvres et la même fierté dans le regard qu'elles avaient hérité de leur père. Il y avait tout de même une grande différence entre elles, l'aînée avait de longs cheveux blonds et de magnifiques yeux azur que sa mère lui avait transmis, tandis que la plus jeune avait une chevelure brune aux reflets cuivrés quant à ses yeux, ils étaient d'un magnifique vert ambré qu'elle était la seule à posséder.

Les années passant, Aubin se posait de plus en plus de questions. Pourquoi son père lui donnait un apprentissage de la guerre et des armes, alors que sa grande sœur pouvait jouer avec des poupées et apprenait la broderie. Son corps était pourtant identique au sien, alors pourquoi cette différence d'éducation. Aubin n'arrivait pas à comprendre, pourtant, elle avait maintes fois interrogé ses parents.

Quand elle allait interroger sa mère, elle voyait bien que quelque chose n'allait pas, car souvent, elle la regardait avec tendresse et partait sans un mot, les larmes aux yeux. Son père, changeait de conversation et l'emmener avec lui à la chasse, faisant ainsi oublier à la petite fille, les questions qui tournaient dans sa tête.

Mais elle se jura qu'un jour, elle découvrirait la vérité. Quel que soient les obstacles qui se dresseraient devant elle.

Un drôle de destin. ( En Correction )Där berättelser lever. Upptäck nu