3 ~ Choquée

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 Je ne m'en remets pas... Et Dieu seul sait si je m'en remettrais un jour. Geekette oui, mais je ne manque pas non plus de sensibilité. Je tremble. Depuis tout à l'heure, cette vision d'horreur et le stress, je n'arrête pas, c'est affreux. J'ai un haut le cœur. L'envie de vomir non plus ne me quitte pas. Certains se seraient sans doute moqués. Mais ça n'a rien d'une plaisanterie. J'ai réveillé la moitié de l'immeuble en hurlant, enfin, au moins la moitié... Madame Corvet, la gardienne, est montée en premier. Une dame d'une cinquantaine d'année et qui doit dormir seulement quatre ou cinq heures par nuit tant elle est disponible pour les habitants de l'immeuble. Elle a immédiatement appelé la police. Frédéric est aussi sorti rapidement, et a aussitôt vidé le contenu de son estomac dans les toilettes ou le lavabo le plus proche.

Sous mes grands airs d'informaticienne ambitieuse et un peu folle, je suis une amoureuse des animaux, une chose que je ne peux cacher à personne. Je pourrais, mon appartement serait certainement une arche de Noé ! Mais le propriétaire refuse les animaux... Et, voir ça... J'étouffe un sanglot. J'ai marché sur un chat mort, putain ! Un beau chat noir, jeune encore, pas plus de deux ou trois ans, égorgé devant ma porte ! Ça ne peut pas être une bagarre d'animaux, c'est sûr et certain ! Même moi j'ai remarqué que la coupure est bien trop nette ! On a volontairement tué ce chat pour me faire du mal.

Je me lève et cours dans les toilettes avant de vomir à mon tour, sans fermer la porte. Il y a des flics dans l'appartement, mais je m'en moque... Si seulement il n'y avait eu que le chat. Mais le mot écrit sur ma porte, sûrement avec le sang de la pauvre bête. Mais qui peut bien faire ça, bordel ?! C'est clairement horrible ! Ce salopard a pris le temps de dessiner un pentacle et d'écrire « L'ANTRE DU DIABLE ET DE SON ESCLAVE » sur la porte. Heureusement, grâce à la concierge, la police est arrivée promptement.

Je me redresse, tirant la chasse d'eau après m'être essuyée la bouche avec du papier toilette. Je sors de la pièce exiguë et une main se pose sur mon bras, me faisant sursauter... Ce n'est pas le moment. Je tourne la tête vers le jeune policier qui est là, et me tend un vers d'eau.

- Merci.

Je réponds d'une voix faible, attrapant le verre à deux mains, de peur de le faire tomber. J'en bois une gorgée, ce qui calme un peu ma gorge enflammée.

- Allez vous asseoir, ça ira mieux d'ici quelques minutes. Vous êtes encore sous le choc.

J'acquiesce d'un signe de tête et il me raccompagne vers le canapé.

Pourquoi ? C'est la question qui tourne dans mon esprit depuis tout à l'heure et me torture sans que je ne puisse trouver la moindre réponse. Et comment aussi ? Pourquoi s'en prendre à nous ? Frédéric et moi sommes des jeunes sans histoire, je ne vois pas pourquoi on pourrait nous en vouloir. Ni même nous accuser de quoi que ce soit... Et ce mot horrible sur la porte... Je suis prise d'un nouveau frisson... Le diable et son esclave ? Qu'est-ce que ça peut vouloir dire ? Trop de questions sans réponses qui me révulse. Je dois me retenir de vomir, encore une fois. Respire, Julie ! Le canapé s'affaisse à côté de moi, et je me tourne vers un autre agent de police à l'air sérieux mais relativement compatissant... Je n'ai pas besoin de pitié, alors pour le moment, ça me va.

« Mademoiselle Girard, vous vous sentez mieux, apparemment. Cela vous dérangerait-il de répondre à quelques questions ? Ou préférez-vous venir faire votre déposition demain matin ? »

Je soupire. Autant en finir immédiatement. J'aurais aimé dormir le lendemain, il était déjà trois heures du matin. Enfin, si j'arrive à dormir avec tout ça. Mais ce n'est pas gagné. Je me retiens à cause de la présence de la police. Mais je n'ai qu'une envie : me rouler en boule dans un coin et pleurer toutes les larmes de mon corps.

- Autant le faire maintenant. Je préfère éviter les postes de police, en général.

Il a un petit sourire compréhensif. Je me retiens de lever les yeux au ciel. Pas de pitié ! Qu'on en finisse, merde ! Je suis à cran, même si j'essaie de ne pas le montrer. J'ai envie d'envoyer chier tout le monde. Qu'on me laisse pleurer tranquille... C'est tout ce que je souhaite au fond. Juste mon cocon, un ordinateur et le peu d'amis que j'ai. C'est tout... Pourquoi ? Pourquoi moi ?... Je ne comprends plus rien.

Il me pose pas mal de questions, auxquelles je réponds avec franchise, en essayant de ne pas ressentir de dégoût ou de peur... Mais c'est peine perdue, à vrai dire. Je ne me sens même plus en sécurité. Ça reviendrait... peut-être, pas sûr. Mais j'espère. Je serais bien rentrée chez mes parents, mais ils habitent à Paris, à présent, plus dans cette bourgade de l'Ain dans laquelle j'avais grandi. C'est un peu loin de Lyon... Surtout sans voiture et un budget trop serré pour prendre le train. Bref, je lui explique tout, des pas qui m'ont suivie dans la rue à la découverte de cette pauvre bête et de ce mot affreux sur la porte. Je les ai entendu dire qu'ils n'avaient pas trouvé d'empreintes... Bah oui, des gants, c'est pratique... Bref, trouver la personne qui a fait cette horreur serait compliqué. Ils n'ont pas besoin de me le dire, je le sais.

« Nous allons quitter votre appartement, dormez tranquille, on va laisser une patrouille dans le coin. Vous avez autre chose à ajouter avant ? »

Je relève la tête, je sais que j'ai oublié quelque chose et pourtant, ça peut avoir son importance. J'attrape mon sac, derrière le canapé et en sors la fameuse carte.

- J'ai reçu ça, tout à l'heure... J'ai pensé à une mauvaise blague, ça y ressemblait beaucoup du moins. Mais là, je ne trouve pas ça drôle du tout.

Il enfile rapidement un gant en latex et prend la preuve qu'il enferme dans une sorte de sac congélation pour pièce à conviction. Un peu comme dans Esprits Criminels quoi... Sauf qu'on est pas dans une série et que celui qui m'interroge est loin de ressembler à Derek Morgan.

- On vous tient au courant, Mademoiselle. Ce sera tout pour ce soir.

Je vois dans le même temps Fred sortir de la cuisine avec deux autres agents de Police. Il semble détendu et a même un sourire sur les lèvres. Je fais l'effort de me lever pour saluer les officiers qui partent.

- Tiens... Tu devrais prendre ça. Ça t'aidera à dormir. Et détends toi bichette ! Ce n'était sans doute qu'une blague foireuse !

Il m'embrasse sur le front avant de me tendre un somnifère. Il semble nonchalant mais je le sens tout de même tendu, préoccupé... Pour la première fois de ma vie, je sais que mon meilleur ami, mon frère de sang me cache quelque chose. Trop de choses clochent dans son comportement. Doucement, je tourne la tête vers la porte de sa chambre, où il vientt de disparaître. Et si la carte parle de lui ? Et si le Diable... Non, impossible, pas vrai ? Il n'a pas pu rompre le pacte... Et pourtant, pour la première fois depuis que je le connais, je doute. Et si jamais il y est pour quelque chose dans cette histoire ? Et si c'est lu le véritable problème dans le fond, et qu'il me cache tout pour ne pas m'impliquer ?... J'espère sincèrement que non. 

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⏰ Last updated: Oct 11, 2018 ⏰

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