Chapitre 3

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Je respire profondément afin de reprendre mon calme. J'attends patiemment d'être arrivée sur un sol bien palpable et opaque.

— Si vous voulez bien me suivre. Je vais vous montrer les salles d'entraînement et vous présenter aux candidats, déclare Marc, un coup d'œil agacé dans ma direction.

La visite se poursuit en silence. Les étages consacrés aux entraînements des concurrents sont beaucoup plus sombres. Les murs sont peints en noir et éclairés par des milliers de lumières de couleurs différentes selon les pièces.

Nous pénétrons dans l'espace jaune. La salle ressemble à une salle de classe. Des bureaux individuels sont installés. J'imagine qu'elle sert pour les cours théoriques.

— Voici la salle qui permettra aux candidats d'approfondir leurs connaissances sur les différentes planètes et leur culture, ainsi que sur leurs adversaires. Ils y apprendront également les règles de conduite et le protocole des Jeux qu'ils devront respecter au cours de la compétition, nous explique Marc d'un ton sérieux.

— Intéressant, constate Luther.

Je ne peux m'empêcher de sourire. Mon oncle à la manie d'exprimer son opinion en utilisant un seul adjectif. Cette habitude me fait toujours rire parce qu'il trouve toujours le bon mot en adéquation avec ses pensées. Mais pour être honnête, ça magace beaucoup lorsque je ne sais pas ce qu'il attend de moi.

Je marche entre les différentes tables d'étude en lisant soigneusement les étiquettes qui y sont collées. Thomas Leroux, Calum Warden, Yuta Takahashi... Ces noms ne me seront plus étrangers d'ici quelques minutes. En attendant, j'examine les murs de la pièce. Des cartes y sont punaisées indiquant les différentes planètes du Système Titanesque ainsi que leur géographie. Les inscriptions et les légendes sont écrites dans des langues que je ne sais pas lire. Je suis fascinée par les symboles variés des calligraphies présentes sur ces affiches. Une vieille carte aux coins brûlés attire mon regard. La légende semble s'être effacée avec le temps.

— Vous vous occuperez des cours portant sur les techniques de combat armés. Ils sont programmés en début de journée, cela vous convient-il ? demande Marc alors qu'il se tourne vers Luther.

— Je ferai avec, bougonne-t-il.

Contrairement à moi, Luther aime paresser dans son lit jusqu'à des heures inimaginables. C'est pour cette raison qu'il m'entraîne le soir. Il n'est pas levé avant midi.

Je m'approche de la vieille carte et effleure son papier jauni par le temps. Il est rugueux sous mes doigts.

— Vous aurez à votre disposition tout le matériel nécessaire, comme des schémas ou des cartes. A part celle-ci qui est extrêmement fragile et qu'il est interdit de toucher sans protection, jeune fille ! s'exclame Marc dun geste brusque pour mattraper le poignet.

— Veuillez m'excuser. Je ne voulais pas...

— Ce n'est rien, rassurez-vous. Je vous ai averti avant que vous ne l'abîmiez. Poursuivons la visite.

Ma mère ne semble pas partager l'avis de Marc vu le regard désapprobateur qu'elle me lance. Je marche en baissant la tête. Bien sûr, il a fallu que je me fasse encore remarquer. Nous pénétrons dans l'espace bleu. Le sol y est complètement recouvert d'herbe et des arbres y ont été plantés. J'ai l'impression de me trouver dans une forêt couverte. Des oiseaux chantent leur douce mélodie et une brise légère vient me lécher le visage. Tout à l'air si naturel.

— Cette pièce est la fierté de nos ingénieurs. Dans celle-ci, les candidats apprendront à survivre dans n'importe quelle situation. Allumer un feu, chasser, purifier l'eau afin qu'elle devienne potable... Ce genre de choses.

— Pourquoi faut-il que les candidats apprennent à survivre en pleine nature ? je demande, surprise.

Luther ne semble pas y accorder autant d'importance que les personnes qui ont construit cette salle. Il m'a simplement appris à allumer un feu en frottant deux morceaux de bois l'un contre l'autre.

— Les personnes qui organisent les Jeux font généralement preuve d'une imagination débordante. Il y a quelques années, par manque de finances, les concurrents se sont retrouvés au cur d'une grande forêt dans laquelle ils devaient s'affronter et survivre par leurs propres moyens jusqu'à épuisement ou... pire.

— Ce scénario est plutôt effrayant, commente ma mère en déglutissant bruyamment.

Ce scénario n'est pas effrayant, il vous glace le sang. Qui voudrait participer à ça ? C'est totalement injuste et stupide. Les planètes naines en ont certainement souffert puisqu'elles ne fournissent plus autant de candidats qu'avant. Et je ne parle pas du dellien ou de la dellienne qui a dû affronter ça. Les Conquérants ont certainement dû être satisfaits. J'en ai des frissons dans le dos en les imaginant tuer mes semblables. Marc a dû comprendre le fil de mes pensées puisqu'il s'empresse de poursuivre.

— Le dellien est heureusement mort de froid. Cette fameuse année les Conquérants ont décidé d'exprimer leur mécontentement en refusant de combattre. Mais ils ont dû s'affronter entre eux pour... le divertissement.

Je tourne la tête avec un sourire moqueur aux lèvres. « Heureusement ». Mourir de froid n'est pas vraiment ce que j'appellerais une fin heureuse. Bien sûr, c'est clairement mieux que de se faire carboniser sur place ou manipuler, mais mourir n'est certainement pas une chose qu'on colle au mot « heureusement ». A mon plus grand soulagement, nous ne nous attardons plus dans cette pièce.

Alors que nous marchons côte à côte, ma mère me prend la main. Je ne sais pas si c'est pour se rassurer de ce que vient de nous apprendre Marc ou pour m'avertir qu'elle n'a pas changé d'avis sur ma possible participation. Dans tous les cas, elle m'écrase les doigts.

Nous nous dirigeons vers un grand couloir illuminé au fond duquel se trouve une porte rouge. Soudain, un coup de feu retentit. Son écho se propage jusque dans mes os. Ma mère hurle de surprise et de terreur. Luther a le réflexe de se plaquer au sol tandis que je reste complètement paralysée. Marc reste debout les sens en alerte. Toutes les lumières s'éteignent dans un grésillement désagréable. J'essaye de reprendre mes esprits calmement et de relativiser. Le point positif, c'est que ma mère a arrêté de me broyer la main. Le point négatif, en revanche, c'est que mon cœur a fait une tentative de suicide en voulant sauter hors de ma poitrine et maintenant il s'affole de plus en plus vite.

Mon regard se pose sur la porte rouge juste en face de moi. Le coup de feu venait de cette direction. Qui y a-t-il derrière cette porte ? Sans vraiment réfléchir, je pose ma main tremblante sur la poignée et j'entre.

Les jeux de la couronne. T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant