The Lunacy

29 - Jouer à la provocation

Quelques jours passèrent, Séléné commença peu à peu à se sentir à l'aise dans ce nouvel environnement. Elle réussit à s'attirer les bonnes faveurs de quelques élèves et pouvait compter sur l'aide de Calixte pour éloigner ses prétendants.

Elle prit rapidement goût à ses nouvelles habitudes. Ce qu'elle adorait par-dessus tout était de surprendre les autres, surpasser la concurrence et multiplier les victoires au club d'échecs. Elle avait pour la première fois l'impression d'avoir le contrôle sur son petit monde, de ne pas récolter seulement de l'indifférence comme elle en avait tant l'habitude...

Un jour, elle vit Dai se promener à l'extérieur main dans la main avec la fille bizarre qu'elle avait vue la première fois qu'elle était rentrée dans leur établissement. Elle ne l'avait pourtant jamais revue. Elle les suivit discrètement pour voir si c'était bien ce qu'elle pensait. Très tactile, la jeune fille des plus agitées frôlait presque le harcèlement en enlaçant sans cesse Dai. Le pauvre garçon avait plus l'air de se sentir mal à l'aise qu'autre chose. Devant l'insistance de la fille, Séléné ne put s'empêcher d'intervenir :

— Dites, vous sortez ensemble tous les deux ?

— Ouiii ! Cria la fille à la limite de l'hystérie. Elle semblait totalement avoir oublié sa première rencontre avec Séléné.

— Oh, Séléné, tu nous as vue ? Demanda Dai gêné. Elle s'adressa à lui discrètement :

— Attends, elle est complètement dingue cette fille... Enfin, j'en ai rien à faire de toute façon ! Vous pouvez bien faire ce que vous voulez.

Elle s'en alla aussitôt en se demandant pourquoi elle avait soudainement voulu se mêler de leur histoire. « J'ai vraiment l'impression qu'il y a des trucs qui clochent chez moi en ce moment » se dit-elle en se retournant pour voir s'ils la regardaient.

Plus tard dans la journée, elle aperçut Dai par la fenêtre. Il travaillait sagement dans sa salle de classe vide qui baignait dans un rayon du soleil couchant.

— Tiens, tu travailles ? Lui lança-t-elle avec un sourire narquois en s'accoudant sur la fenêtre.

— Oui pourquoi ?

— J'avais raison, t'es un intello coincé. Glissa-t-elle.

— Mais t'as un problème, je vois pas pourquoi tu dis ça, toi aussi t'es une intello d'abord !

— Je suis pas une « intello », c'est juste que moi, j'ai eu une éducation supérieure à la moyenne, j'ai pas besoin d'autant étudier pour réussir.

— On vient pas tous d'une famille aussi prestigieuse tu sais, et je suis pas coincé en plus ! Se braqua Dai.

Il prit un air sérieux et referma son bouquin.

— Ah ! Si je pense ça c'est parce que ça se voit que tu sais pas t'y prendre avec les filles ha ha. Insinua-t-elle.

Il soupira et se contenta de l'ignorer ses petites provocations. Elle continua son chemin.

Le lendemain, Séléné recroisa la fille bizarre en se rendant dans son établissement. Celle-ci la fixa froidement pendant quelques instants avant de l'interpeller.

— Eh toi ! Comment tu t'appelles ?

— La politesse est de d'abord se présenter quand on demande. Rétorqua Séléné.

— Euphemia, et toi ?

— Séléné.

— T'as pas intérêt à me piquer mon mec, ok Séléné ? Je te vois jouer au basket avec des fois, alors t'as pas intérêt à trop l'approcher c'est clair ?!

— Mais t'es complètement givrée comme fille !! Où tu vas imaginer que je vais te « piquer » ton mec ?!

— Ouais ben fais gaffe, c'est moi qui l'ai trouvé en premier ! En plus il a encore jamais rien fait avec des filles donc je serai la première !!

Séléné s'éloigna d'elle en essayant d'oublier cette conversation des plus loufoques qu'elle venait d'avoir. Elle allait devoir faire comme si de rien n'était si elle voulait rejouer au basket après manger avec Dai et ses amis, bien qu'elle se sentait soudainement très tentée de se rapprocher de lui dans le simple but d'agacer Euphemia.

Dans la salle de sport, le parquet venait d'être nettoyé. Tout était brillant et sentait bon et quelques élèves présents étaient en train de planifier un programme de rangement et d'entretien à attribuer à chaque classe, Dai était parmi eux. Il était vêtu de la tête aux pieds d'un nouvel ensemble pour le basket et ce pour une bonne raison ; chaque mois le meilleur élève de chaque discipline présente dans l'établissement se voyait recevoir un cadeau en rapport avec celle-ci. Séléné s'approcha de lui et passa son bras sur ses épaules sans qu'il ne s'y attende.

— Ah !! Séléné qu'est-ce qu'il te prends ? Réagit-il avec surprise.

— Rien... Je me disais... On pourrait se faire un petit un-contre-un en attendant que les autres arrivent qu'est-ce t'en penses ?

— Euh, je.. Maintenant là ?

— Carrément, ce sera bien pour tester cette nouvelle tenue, elle te va plutôt bien d'ailleurs.. Lui dit-elle proche de son oreille.

— Je sais pas ce que tu as derrière la tête mais ça ne me dérange de relever le défi si c'est ça que tu penses.

— Parfait alors !

Elle retira son bras de ses épaules et ils se mirent en position pour jouer. Bien qu'en équipe Séléné soit assez douée, en un-contre-un elle finit par perdre le dessus. Comme si ça ne suffisait pas, elle se blessa à la cheville en faisant un mouvement trop sec et trébucha à terre.

— Tu t'es pas trop fait mal ? Demanda Dai en s'approchant d'elle.

— Mais non ! Gémit-elle alors que sa cheville la faisait souffrir.

Il lui tendit la main.

— Allez Sely, fais pas genre ! Prends ma main je vois que t'as mal !

— Non ! J'ai pas besoin d'aide des autres. S'insurgea-t-elle en essayant de se relever avec ses mains.

— Tu vas pas me faire croire qu'on t'a jamais aidée de ta vie ?

— Je me suis toujours débrouillée seule.

Soudain, elle repensa à son état de santé avant qu'on ne lui trouve un remède, le désespoir dans lequel elle se trouvait avant de connaître cette seconde vie, elle se rappela que sans l'aide de cette personne, « l'esméraldien » dont elle ignore l'identité, elle n'aurait jamais pu se relever seule. Comme elle était perdue dans ses pensées, elle ne s'était pas rendue compte que Dai avait quitté la salle. « C'est quoi mon problème ?! Je dois pas mériter d'avoir des personnes qui s'inquiètent pour moi ! » Se plaint-elle intérieurement. Au même moment, Dai rerentra dans la salle avec un pack de glace à la main pour l'appliquer sur sa cheville.

— Je veux pas dire mais t'as un peu les chevilles qui enflent ! Dit-il pour la taquiner.

Séléné, à la fois surprise et touchée de le voir s'occuper d'elle, se mit à verser des larmes.

— Quoi ! Mais ! Je disais pas ça pour te vexer Séléné ! Ou alors ça te fait trop mal ?

Il la regarda puis détourna rapidement son regard alors qu'ils étaient encore assis sur le parquet.

— Non, c'est pas ce que tu crois, désolée, oublie ça tu veux ?

— Euh t'inquiètes pas c'est pas très grave. La rassura-t-il, embarrassé.

Elle sécha ses larmes dans sa manche.

— Tu devrais rentrer chez toi, ça suffit pour aujourd'hui tu crois pas ?