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Quelques semaines plus tard, le brouillard qui m’entourait était toujours aussi épais, aussi dense, aussi insoutenable. Je passais mes journées seules dans ma chambre ou dans mon jardin, un livre à la main, attendant désespérément que le temps emporte avec lui la douleur qui me rongeait et me consumait à vue d’œil. Cet été était particulièrement chaud et sec, ce qui n’était pas inhabituel à New York, mais cette année, il me paraissait pire que tout, mais surtout, interminable. Mes parents avaient essayé de me convaincre de partir avec eux quelques jours dans notre maison familiale des Hampton, passer du temps avec mes cousins, m’amuser… M’amuser ? Ce mot me semblait étranger. Depuis un mois, j’étais une épave. Oui, une vraie épave.  Annesley m’avait proposé de sortir, de me balader dans Central Park avec un de ses amis, que je soupçonnais d’ailleurs d’être son petit-ami, j’ai décliné. Plusieurs fois.

Puis, aujourd’hui, dans une envie de lui faire plaisir, j’ai dit oui, sans même savoir réellement pourquoi. Je pris donc la petite robe noire que j’aimais tant avec ses détails en dentelle, une paire de sandales couleur camel et un sac de la même couleur. J’applique une fine couche de fond de teint et d’anticernes, un ombre à paupière couleur champagne, et un fin trait d’eyeliner. C’était la première fois en un mois que je passais du temps à me préparer, et pour être honnête, ça m’avait manqué.  La sonnette de la porte d’entrée retentit comme un réveil un dimanche matin. Je me précipitai en bas pour lui ouvrir la porte, elle m’afficha son plus grand sourire et me pris dans ses bras.

- Ava, tu es splendide, ça me fait tellement plaisir de ne pas te voir en jogging ou en pyjama, tu n’as pas idée. Bon mettons-nous en route, on rejoint Detroit directement dans Central Park, il m’a dit que son petit-frère allait être là aussi, si ma mémoire est bonne il s’appelle Nolan et a 20 ans. Pas de pression évidemment. Et promis, je n’y suis pour rien, enfin je veux dire tu me connais bien sûr… Enfin bref, on y va?

Le sourire aux lèvres, on se mit alors en route pour Central Park. Dans le métro je ne pouvais m’empêcher de penser à Dan, que penserait-il à cet instant ? Je n’avais pas envie de voir du monde et encore moins des inconnus, mais la tristesse me rongeait petit à petit, ça ne pouvait plus continuer ainsi. Je m’enfermais de plus en plus dans une bulle, le médecin avait d’ailleurs commencé à tirer la sonnette d’alarme. Annesley m’indique que le point de rendez-vous est le lieu de l’hommage à John Lennon, ce qui était notre endroit préféré avec Dan. Mais il faut que je sois forte, que j’essaie de me le sortir de la tête ne serait-ce que le temps d’un après-midi. Il faut que je réapprenne à vivre sans lui, bien que cela me paraisse totalement impossible.

J’aperçu Detroit, un grand garçon, brun, les yeux marrons, bien habillé. Il présentait drôlement bien et d’un coup, cela ne m’étonnais plus qu’il plaisait à Annesley : c’était tout à fait son style. A côté de lui se tenait un autre garçon, tout aussi grand, il me rappelait un peu Dan. J’en déduis que c’est Nolan. Il a les cheveux noirs, bouclés, des yeux bleus ou peut-être bien gris. Il porte un simple tee-shirt blanc, un slim noir et des converses blanches, une tenue simple mais qui le met totalement en valeur. 

- Salut, me dit Detroit avec un grand sourire, tu dois être Ava, Annesley m’a beaucoup parlé de toi. Je te présente mon frère Nolan, ça t’évitera peut-être de te sentir comme la troisième roue du carrosse !

Lui et Annesley éclatèrent de rire et se prirent dans les bras. Mes yeux ne pouvaient se décoller de Nolan, il marmonna un « Salut » et ses yeux cherchèrent un endroit à regarder pour éviter mon regard. Mais le mien semblait incroyablement scotché à lui. En plus de sa légère ressemblance physique avec lui, il semblait mystérieux. Je ne savais pas totalement ce qui me fascinait chez lui, peut-être son être tout simplement.

On se mit alors en marche, et arrivés devant le zoo nous avons décidés d’y entrer. Je n’ai jamais aimé le concept des zoos, de voir des animaux sauvages enfermés dans des cages qui prétendent reproduire leurs habitats naturels. Néanmoins ce zoo était une petite merveille, il était si beau, si paisible, si reposant. C’était un endroit qui sortait totalement de la frénésie dans laquelle New York était plongée depuis toujours. Il dénotait tout simplement. Annesley et Detroit riaient aux éclats, Nolan suivait le mouvement en prenant quelques photos par-ci par-là, et il y avait moi. Le boulet qui trainait derrière.

- Ça vous dit un petit Frappucino ? Il fait tellement chaud que ça pourrait nous faire du bien, proposa Annesley. 

On se dirigea alors vers le Starbucks le plus proche, qu’est-ce que j’adorais cet endroit. C’était une sorte de refuge permanent. Je m’asseyais souvent près d’une vitre à regarder la vie et les gens passer en me demandant ce qu’ils faisaient, ce qu’ils pouvaient penser. Etrange, je sais.

- Je vais prendre un Frappucino chocolat s’il vous plaît.

- Et moi un au caramel, se précipita Nolan.

Il paie nos deux boissons et je le regarde, perplexe je dois avouer. Qu’est-ce qui venait de se passer exactement ?

- Eh… hm, merci, chuchotai-je quand il fut près de moi.

Il me fit un signe de tête, prit sa boisson et sorti du coffee shop. Je restais plantée là comme si j’étais une simple spectatrice de la scène qui venait de se dérouler, tandis qu’il marchait sans même se retourner.  

L'AprèsWhere stories live. Discover now