Vive les mariés
Deux jours plus tard ...
Quelqu'un frappe à la porte. J'entends Elias se rendre dans l'entrée et saluer ma mère. Il l'informe que je me trouve dans la chambre et que je refuse de sortir. Puis il lui annonce qu'il est sur le point de quitter l'appartement afin d'aller se préparer ailleurs pour notre mariage. Ma mère lui rappelle qu'il a intérêt d'arriver à la salle du « Cérémonial » à l'heure avant de lui assurer qu'elle s'occupe de moi et de le laisser partir. L'instant d'après, ma mère ouvre la porte de ma chambre et pénètre à l'intérieur. Elle me découvre cachée dans mon lit, toujours sous les draps. Je suis loin d'être lavée, habillée, maquillée et coiffée. Pourtant, je me marie dans moins de trois heures.
- Ange ... » Soupire ma mère tout en s'approchant de mon lit.
Elle tire vivement la couette en arrière puis m'oblige à me mettre sur pieds.
- Je ne peux pas faire ça maman ... » Je lui confie en lui obéissant tout de même.
- Bien sûr que si ma fille ! Tu peux le faire ! Tu vas le faire ! » M'assure-t-elle tout en recoiffant rapidement mes cheveux à l'aide de sa main.
- J'ai fui Elias toute la matinée ... » Je lui avoue avec honte.
- Pourquoi, s'étonne-t-elle sincèrement, j'avais pourtant l'impression que tu l'aimais bien ! Et sa façon de te regarder ne trompe pas !
- N'importe quoi ! Elias ne m'aime pas ! » Je lui assure immédiatement, étonnée par sa remarque.
- Ange, ma chérie, l'instinct d'une mère ne se trompe jamais. La première fois que je t'ai vue avec Elias, je me suis inquiétée pour toi. J'avais peur que tu n'aies pas un mariage d'amour. Mais quand je vous ai vu ensemble le jour de l'exécution ... j'ai été rassurée pour toi, pour vous. J'ai vu que vous teniez vraiment l'un à l'autre. Je t'assure que tu ne le laisses pas indifférent ma chérie ! Quand il m'a ouvert la porte, j'ai tout de suite remarqué qu'il était aussi anxieux que toi ! Un homme n'est anxieux pour son mariage que quand il tient à sa future femme ! » M'explique ma mère tout en caressant mes joues afin de me rassurer.
- Tu le penses vraiment ? Tu penses que Elias pourrait m'aimer ? » J'insiste alors que mon cœur se gonfle d'espoir.
- Mon bébé, je crois qu'il t'aime déjà. » M'assure-t-elle d'une voix douce.
Ses paroles me rassurent et je lui suis incroyablement reconnaissante d'être présente pour moi en ce jour. Je me doute que mon père n'est pas aussi heureux qu'elle de devoir assister à mon mariage. Mais cela n'a pas une si grande importance tant que ma mère reste à mes côtés. Cette dernière m'embrasse la joue puis me pousse jusqu'à la salle de bain. Elle m'oblige à prendre une longue douche et à me laver les cheveux puis elle s'occupe de les sécher et de les coiffer en faisant de belles boucles qui tombent le long de mon dos. Elle accroche quelques mèches de mes cheveux en arrière puis commence à maquiller légèrement mes yeux. Une fois qu'elle a terminé, elle retourne dans le salon pour prendre son sac posé à côté d'une grande housse de vêtement et en sort une petite pochette. Je la regarde faire avec curiosité pendant qu'elle l'ouvre et la renverse doucement sur la table de la salle à manger. C'est alors que je découvre une magnifique parure de bijoux en faux diamants.
- Qu'est-ce que c'est ? » Je questionne bêtement tout en prenant les bijoux dans mes mains.
- Les bijoux que je portais le jour de mon mariage avec ton père. Et ceux que ma mère portait pour son propre mariage. » Me confie-t-elle avec émotion.
- Je ne peux pas accepter. » Je l'arrête immédiatement tout en reposant les bijoux sur la table.
- En réalité, tu n'as pas le choix ! » Me fait remarquer ma mère tout en riant.
- Vous avez toutes les deux eu des mariages heureux ? » Je la questionne avec hésitation.
- Oui, et toi aussi, tu l'auras ! » M'assure-t-elle tout en passant le collier incrusté de pierres autour de mon cou.
Elle l'accroche puis m'aide à mettre le bracelet et les boucles d'oreilles assortis.
- Il ne reste plus que la robe et nous pourront y aller ! » M'annonce finalement ma mère avec joie tout en prenant la housse à côté de son sac.
Le stress s'empare à nouveau de moi alors que ma mère me traîne de nouveau jusqu'à la chambre.
- Tu en as trouvé une ? » Je la questionne avec angoisse tout en regardant la housse.
- Bien sûr que je t'ai trouvé une robe ! » Se vante ma mère. Elle avait été ravie lorsque je lui avais confié cette mission, deux jours plus tôt.
Je la regarde ouvrir la housse avec appréhension. Elle semble encore plus excitée que moi lorsqu'elle sort une magnifique robe blanche et la tend devant moi à bout de bras. Je l'admire sans arriver à y croire. La robe est absolument magnifique. Elle est longue et recouverte de dentelles. Le haut de la robe semble moulant et possède un décolleté assez important sans être vulgaire. La jupe de la robe est plus ample et tombe droite. Ma mère me presse afin que je l'enfile. Elle est pressée de me découvrir dedans. Je dois dire que je partage son empressement. Lorsque ma mère termine de refermer ma robe, elle se recule de quelques pas pour m'admirer, les larmes aux yeux.
- Alors ? » Je la questionne avec inquiétude.
- Tu es magnifique ! » M'annonce-t-elle avec fierté.
- Tu penses que Elias me trouvera jolie ? » Je lui demande de nouveau avec hésitation.
- Il ne pourra pas faire autrement ! » M'assure-t-elle tout en me guidant jusqu'à la salle de bain.
C'est à ce moment-là que je me découvre pour la première fois. Durant quelques secondes, je n'ai pas l'impression de me voir dans le reflet du miroir. La jeune mariée qui me fait face est magnifique et souriante malgré son regard rempli d'inquiétude. Pourtant, c'est bel et bien moi. Ma mère a raison. Si Elias ne me trouve pas belle dans cette robe alors il ne m'aimera jamais ... J'espère lui plaire. J'espère pouvoir le lire dans son regard et être rassurée au sujet de notre couple.
- Est-ce que tu es prête ? Il est l'heure de se rendre au « Cérémonial ». » M'annonce alors ma mère après m'avoir laissée m'admirer quelques minutes.
- Je suis prête. » Je souffle sans en être certaine.
Ma mère sent mon hésitation mais ne fait aucun commentaire. Elle regroupe ses affaires, se change rapidement puis nous quittons l'appartement ensemble. En bas de mon immeuble, des hommes de la Garde nous attendent à côté d'une voiture. Je remarque à leur regard qu'ils me trouvent belles mais ils ne disent rien. L'un d'eux m'ouvre la portière de la voiture et m'aide à monter dedans avec ma robe. Puis il aide ma mère et la voiture démarre. Nous arrivons rapidement à la salle du « Cérémonial » qui se trouve proche de la place principale. Mes yeux se posent malgré moi sur le « mur des fusillés » mais ma mère attire rapidement mon attention sur autre chose. Elias est là, devant l'entrée de la salle, dans un magnifique costume noir. Pour une fois, il semble avoir coiffé ses cheveux. A côté de lui, George et mon père se tiennent à bonne distance, tous les deux sur leur trente-et-un. Mais je n'ai d'yeux que pour Elias. Il est plus beau que jamais mais surtout, il est là. De plus, ma mère avait raison. Il semble aussi nerveux que moi.
La voiture s'arrête lentement devant la salle et mon père s'approche immédiatement. Cette fois-ci, c'est lui qui ouvre la portière et aide ma mère à descendre. Elias reste en arrière, les yeux fixés sur la portière. Lorsque je sors à mon tour de la voiture, nos regards se croisent et je découvre au fond de ses yeux ce que je voulais : de l'admiration. Il me trouve belle. Soulagée, je m'avance jusqu'à lui, ignorant malgré moi la présence de mon père qui me fixe lui aussi avec étonnement. Lorsque j'arrive à son niveau, Elias tend les mains vers moi et entoure mon visage avec tendresse.
- Tu es magnifique ... » Souffle-t-il tout en m'admirant de la tête aux pieds.
- Tu es très beau. » Je lui confie à mon tour tout en passant une main dans ses cheveux.
- Ne le décoiffe pas ! » Se moque gentiment George à nos côtés.
Je me tourne vers lui avec surprise et lui lance mon plus beau sourire.
- C'est vrai, c'est tellement rare qu'il soit coiffé ! » Je fais remarquer en riant.
George hoche la tête. Il a l'air d'accord avec moi. A ses côtés, Elias fait la moue et attrape mes mains.
- Ne commencez pas tous les deux ! » Nous gronde-t-il tout en m'attirant vers lui.
Il passe un bras autour de ma taille et son regard plonge dans mon décolleté l'espace de quelques secondes. Je m'apprête à lui faire une remarque mais ma mère intervient avant moi.
- C'est l'heure, les enfants. Nous allons nous installer et ensuite vous ferez votre entrée. » Nous informe-t-elle, tout sourire.
Elias hoche la tête alors que ma respiration se coupe. Nous y voilà. Dans quelques minutes, Elias et moi seront mariés !
- On se retrouve à l'intérieur les jeunes ! » S'exclame George tout en donnant une tape dans le dos de Elias.
Ce dernier hoche la tête et nos proches disparaissent derrière la porte.
- Tu te sens prête ? » Me questionne alors Elias tout en plongeant son regard dans le mien.
- Oui. Et toi ? » Je lui demande en retour.
- Oui. » M'assure-t-il dans un souffle tout en m'admirant de nouveau.
- On ne s'est jamais embrassés ... » Je m'exclame soudain sans réfléchir.
Elias semble surpris par ma remarque et je rougis immédiatement.
- Tu as raison, finit-il par reprendre, on devrait au moins s'embrasser une fois avant d'être mariés. » Décide-t-il tout en passant ses bras autour de ma taille.
Lentement, Elias m'attire davantage contre lui jusqu'à ce que mon corps se retrouve pressé contre le sien. Je passe à mon tour mes bras autour de son cou afin de plonger mes mains dans ses cheveux. Je n'ai jamais embrassé aucun garçon. Je suis sur le point de recevoir mon premier baiser, le jour de mon mariage. Pourtant, je n'ai pas peur. Au contraire, j'en meurs d'envie. Je suis impatiente de sentir ses lèvres contre les miennes. Je suis impatiente qu'il soit enfin à moi et que je sois à lui. Elias semble se rendre compte de mon empressement et rapproche son visage du mien. Puis, tendrement, il pose ses lèvres sur les miennes. Par instinct, je ferme les yeux et profite de la sensation de chaleur qui parcourt mon corps. Je ressens une terrible frustration lorsqu'il s'éloigne légèrement de moi, à la recherche de ma réaction.
- Embrasse-moi encore ... » Je murmure sans même en avoir conscience.
Mon désir a pris le pas sur ma timidité mais cela ne semble pas gêner Elias. Au contraire, il s'approche de nouveau de moi et scelle nos lèvres pour la seconde fois. Cette fois-ci, je l'embrasse avec plus de passion et colle encore davantage mon corps contre le sien.
- On devrait rentrer. Ils doivent nous attendre. » Souffle finalement Elias alors que nous nous séparons pour la seconde fois.
- Tu as raison. » Je confirme tout en m'accrochant à son bras.
Je vérifie que ma robe est toujours bien en place puis Elias m'entraîne avec lui jusqu'à l'entrée du « Cérémonial ». Deux hommes nous ouvrent les portes de la salle et nous pénétrons dedans. Mes parents et George se trouvent sur l'un des côtés de la salle. Ils semblent soulagés lorsqu'ils nous voient entrer. Ma mère se met de nouveau à pleurer pendant que je marche au bras de mon fiancé le long de l'allée centrale qui mène jusqu'au « Baptiseur ». Ce dernier se tient sur une petite marche, habillé tout en noir. Il est souriant et nous regarde avancer jusqu'à lui. Puis, il nous demande de nous mettre face à face et commence par nous rappeler le Code. Il nous fait promettre de suivre scrupuleusement plusieurs articles du Code et je souris d'un air malicieux à Elias pendant qu'il donne sa promesse.
- Promettez-vous de donner trois enfants à votre société suite à votre union ? » Questionne de nouveau le « Baptiseur » en se tournant vers Elias.
- Je le promets. » Répond ce dernier sans une hésitation.
Le « Baptiseur » se tourne vers moi mais j'en ai à peine conscience. Je repense à l'accord que nous avons passé avec la Garde et l'Assemblée. Je n'en ai parlé à personne mais cette promesse de tomber enceinte rapidement me fait toujours aussi peur.
- Ange ... » Murmure soudain Elias tout en prenant ma main.
Je sursaute et plante mon regard dans le sien. Je comprends rapidement qu'il sait à quoi je pense. Mais il me sourit tendrement et caresse ma main du bout de son pouce. Je décide alors de lui faire confiance pour m'aider au sujet de cet accord.
- Je le promets. » J'assure sans quitter Elias des yeux.
- Je vous déclare donc mari et femme ! Embrassez-vous pour sceller le lien qui vous uni. » Termine le « Baptiseur » d'un air joyeux.
Elias n'hésite pas une seconde avant de se pencher sur moi pour m'embrasser. Cependant, son baiser est plus timide que ceux que nous avons échangé à l'extérieur et plus court. Trop court à mon goût. Je reste sur ma faim alors que le « Baptiseur » nous informe que nous pouvons quitter le « Cérémonial ». A peine dix minutes après être rentrés, nous ressortons sur la place principale accompagnés de mes parents et de George. Ma mère me serre immédiatement dans ses bras alors que mon père garde ses distances.
- Bien, c'est fait, marmonne-t-il, rentrons maintenant !
- Vous semblez ravi ! » Ironise George pendant que mon père lui lance un regard noir.
- Merci d'être venu George. » Intervient alors Elias tout en lui serrant la main.
- C'est normal ! Tu as une jolie femme ! Tu n'as plus qu'à en prendre soin maintenant, rappelle-toi bien ça ! » Insiste-t-il d'une voix étrange qui me fait froncer les sourcils.
- Je sais George. » Lui assure Elias d'une voix tout aussi étrange.
- Aller, rentre donc chez toi avec ta femme et suis le Code à la lettre ! » Termine-t-il tout en nous faisant un clin d'œil.
Je rougis face à son allusion pendant qu'il tourne les talons et s'éloigne dans une rue parallèle.
- Nous te la confions. » Ajoute alors ma mère à l'intention de Elias avant de nous embrasser tous les deux et de partir avec mon père.
- Rentrons. » Décide alors Elias en commençant à s'éloigner.
Sans trop savoir pourquoi, je le retiens par le bras et l'attire contre moi.
- Tu m'as à peine embrassée. » Je lui fais remarquer avec hésitation et envie.
- Tes parents étaient là ! » Se défend-t-il avec amusement.
- Et bien, ils ne sont plus là ... » J'ose tout en tendant mes lèvres dans sa direction.
- C'est vrai ... » Murmure Elias alors que sa mâchoire se crispe de désir.
Il se penche alors lentement vers moi et pose de nouveau ses lèvres sur les miennes. Cette fois-ci, il n'est pas timide et m'embrasse avec passion. Je lui rends son baiser avant de m'écarter légèrement de lui, consciente du regard des passants sur nous.
- Maintenant, on peut rentrer. » Je lui annonce avec un grand sourire.