Tout est noir. Mes pensées sont noires, mes envies sont noires, ma vision est noire. Je fonce à la planque récupérer le machin, avant d'avoir une réelle piste. Deux trois de mes gars ont été envoyés pour récolter des informations, en attendant je tourne en rond dans cette pièce sombre où seule la voix de mes démons résonnent. Tout s'entremêle dans mon cerveau et je sais qu'il me faut un petit moment pour me calmer et réfléchir à un plan. Oui, j'ai envie de le buter, de le détruire, de le démembrer, de broyer tous ses os à ce gros fils de pute mais avant cela il faut que je songe à une stratégie.
Je ne peux pas foncer tête baissée et risquer de tout perdre : mon business, ma liberté et la femme qui me fait sentir unique. J'ai été très peu habitué à ce sentiment que je ne le laisserai pas disparaître aussi rapidement. L'arme enveloppée dans ma main gauche je décide de m'asseoir un instant, je me refais toute la trame de cette affaire. Quelque chose m'a échappée.
Cette fois j'en suis certain, quelqu'un m'a trahi.
Ma pression peu à peu descendue, j'examine le barillet et c'est ainsi que mon plan se dessine. J'attrape mon cellulaire pour envoyer un message collectif à mon équipe sur le terrain.
Rita est ma priorité mais je suis obligé de les prendre à contre pied. Ils veulent que je me focalise principalement sur sa recherche, sous l'impulsion c'est aussi ce que je m'apprêtai à faire. Je ne voulais rien entendre il y a de cela quelques minutes, je voulais simplement arracher des vies. L'envie est toujours présente.
Il faut juste la jouer plus finement. Ça veut me baiser et me prendre pour un fils de pute?
Alors attendez, je vais me comporter comme tel.
J'appelle tous les contacts dont j'ai besoin pour mettre ce traquenard en place. Avec ces coups de fil express, j'ai même fait une fausse manip en répondant à ce putain d'appel de Émilie.
« - Rassure-moi et dis-moi que tu n'as pas ce truc entre tes mains? » dit-elle angoissée
« - J'ai les idées très claires,
t'inquiètes pas pour moi. »
« - Putain tu l'as récupéré à la planque ?
Ne l'utilise pas s'il te... »
« - Ton appel est inutile,
tu me fais perdre du temps. »
« - Je veux pas que tu fasses quelque chose que tu pourras regretter, écoute-moi. »
« - Fais-moi confiance, je gère l'affaire. »
« - Nima veut qu'on le laisse s'en charger. »
« - Je m'en bats les couilles. »
« - Tu sais qu'il est très puissant. Il peut régler ça très vite, s'il te plaît laisse-le faire, tu n'auras pas à te salir les mains. »
« - Je crois tu capte pas. Cette salope s'en est pris personnellement à moi. Je vais fixer mes bails tout seul. Sur ma vie tu me fais perdre un temps considérable. Reste au QG avec les autres et ne bouge pas. »
« - Arrête de... »
Évidemment j'ai coupé cet appel qui n'avait aucun intérêt hormis discuter dans le vent.
Si Nima veut mettre sa pierre à l'édifice qu'il vienne, j'en ai rien à branler mais qui ne commence surtout pas avec ses grands airs d'ancien « je m'occupe de tout, restez à votre place les jeunes». C'est mon affaire à moi seul, c'est à moi de récupérer ce qui m'appartient
et si je dois couper les couilles de qui que ce soit pour qu'on me respecte et qu'on me rende
ce qui m'est dû je le ferai les yeux fermés.
Ça ne serait une aventure nouvelle pour moi et je pense en toute humilité que Yaya ne sait pas encore à qui il vient de s'en prendre. La malice et le vice seront désormais mes meilleurs alliés.
J'ai envoyé comme consigne aux gars de quitter leurs points de vente respectifs sans exception. Jusqu'à nouvel ordre tous nos fours seront vides et inactifs. C'est un signal fort et ça risque bien de foutre des dégâts monstres dans la ville.
Et cela à tous les niveaux, en passant de la petite ménagère de trois enfants nourrice à ses heures perdues, aux clients, guetteurs, vendeurs, gérants, fournisseurs jusqu'aux concurrents, bref la ville entière sera impactée.
Le business sera en suspens tant que mes yeux n'auront pas rejoins ceux de Rita,
je ne reviendrai pas sur cette décision.
Ça ne va pas s'arrêter là, bien évidemment. Ils verront en temps voulu, le déroulé de mon plan.
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Cléa Ventura.
J'ai des nausées, des remontées acides tellement je me sens mal et stressée. Je ne comprends pas comment mon corps est en train de réagir. Il tremble comme si c'est moi qu'on venait à l'instant d'enlever. J'en reviens pas que cette scène ce soit passée sous mes yeux sans que je ne puisse rien faire. Je n'ai même pas dénié ouvrir ma bouche, moi qui ai toujours quelque chose à dire. J'étais comme tétanisée face au regard de Catena rempli de détresse. J'ai été incapable de bouger ne serait-ce que le petit pouce pour elle. Elle qui malgré tout est celle avec qui j'ai grandi, celle avec qui j'ai partagé la moitié de ma vie, celle avec qui je suis liée par les liens du sang. Tous les regards sont braqués sur moi, j'ai l'impression de passer vers le chemin de l'abattoir. Tout le monde a l'air de me juger complice de cet enlèvement et je sais que cela est juste dans ma tête car personne n'est vraiment au courant de notre relation destructrice entre ma cousine et moi.
Toujours est-il, je me sens coupable.
Et si je l'étais vraiment?
Autour de moi c'est le désordre, c'est comme si nous revivions sa disparition une énième fois. A peine mon père était sur le point de la retrouver, qu'elle s'est déjà évaporée à nouveau. Je ne pouvais et ne voulais plus rester dans cet endroit. Leo a su le comprendre très rapidement puisqu'il m'a escorté dans une pièce isolée et silencieuse. Adossé contre la porte, il veille à ce que personne ne nous rejoigne.
- Ici tu seras mieux, dit-il en me regardant
- Merci Leonardo !
- Ne me remercie pas, j'ai mal fait mon boulot.
Je devais m'occuper et protéger Catena.
- Ce n'est pas ta faute.
- Je peux te poser une question?
- Tu peux juste s'il te plaît me trouver une cigarette? J'ai besoin de fumer.
- Tiens ça, ajoute-t-il en me tendant une clope, maintenant dis-moi comment as-tu su que ta cousine serait probablement en danger?
- J'ai mes sources Leo et là j'imagine bien que tu me juges intérieurement.
- Non tu me connais Cléa, ce n'est pas mon genre mais je t'avoue que tout ça me laisse perplexe. Je sais plus quoi en penser.
- Peux-tu me laisser seule 2 minutes?
Sans dire un mot, simplement en hochant la tête il quitta discrètement la pièce. J'étais alors seule sur ce fauteuil d'époque, les yeux dans le vide. Cette gorgée de fumée devrait m'apaiser le temps de quelques secondes. Une fois calme, j'ai ainsi tenté d'appeler l'une de mes sources.
« - Ouais ? »
« - Elle est où ? »
« - Je peux rien te dire Cléa. »
« - Ne me fais pas ça. Dis-moi elle est où !? »
« - Tu sais que je risque d'avoir des problèmes? Elle va bien, crois-moi. »
« - Qui est derrière tout ça? Ramenez là putain, je te jure vous allez le regretter. »
« - Écoute j'y suis pour rien. Ne me menace pas, je t'ai juste apporter des infos. »
« - Je te promets s'il lui arrive quoi que ce soit, ça va se savoir. Commence déjà à les prévenir mon père va rentrer en jeu. »
« - Cléa tu ne m'écoute pas, je n'ai rien à voir avec tout ça. J'ai simplement eu un écho que je t'ai répété pour le reste j'ai pas de plug. »
« - Ok comme tu voudras! »
« - T'es autant complice que moi.
Tu n'as rien fait pour éviter ça. »
« - Va te faire foutre. »
Je me lève et fais le tour de cette table basse, mon cœur bats à la chamade. Je ne sais quoi faire. Je pense que je m'en voudrais toute ma vie s'il lui arrive quelque chose. Aussi étrange que cela puisse paraître, je tiens à cette personne. Certes j'ai passé le quart de ces dernières années à la détester, à lui faire du mal sans relâche mais je ne peux pas supporter la savoir seule sans défense face à des hommes.
La porte s'ouvre et cette fois-ci j'y aperçois ma petite sœur Cassie en larmes, les yeux rougeâtres, le mascara coulant. Elle est dans un sale état. C'est celle qui connaît le mieux notre cousine. Elle s'effondre dans mes bras, Leo lui est à l'extérieur et choisi de ne pas intervenir pour nous laisser ce moment intime.
- Est-ce que tu sais quelque chose? Je t'en supplie Cléa, dis-moi la vérité. Je ne supporterai pas de la perdre une fois de plus.
- J'en ai aucune idée. Mais t'inquiètes Cassie, tu la connais c'est une battante...
- C'est une battante donc j'ai pas à m'en faire de savoir qu'elle vient de se faire enlever par des hommes? Elle qui a déjà été abusée plus d'une fois mais comme c'est une battante, c'est cool?
- J'ai pas dit ça, c'est pas le moment. Je sais pas où elle est et j'y suis pour rien. Faut arrêter de penser que dès qu'un malheur lui arrive j'en suis la cause.
- Mais j'hallucine, même dans cette situation tu remets tout à toi? Si je t'ai demandé si tu savais quelque chose, c'est uniquement parce que tu as le bras long, beaucoup de contacts et de sources. Rien à voir avec le fait de t'accuser.
- J'en sais pas plus que toi et même si je ne pleure pas sache que je suis autant affectée que toi, me prends pas de haut.
- Cléa ce n'est pas un concours d'émotions, notre cousine s'est faite enlevée merde!
- Je suis au courant bordel, j'étais présente. Et j'ai cette putain d'image qui ne veut pas quitter mon esprit depuis cette scène repasse en boucle. Je n'ai pu absolument rien faire, pas même un son, rien. Pendant qu'elle me regardait en se débattant, la bouche recouverte par une main gantée. Je n'ai rien fait Cassie.
Cette fois-ci, je me suis mise à pleurer. Ma sœur s'est contentée de me prendre dans ses bras et de me rassurer. C'est le monde à l'envers, elle était venue jusqu'à moi pour trouver du réconfort et il s'avère que c'est elle qui s'occupe maintenant de moi. Pendant cette étreinte, j'ai senti un regard sur nous. Il s'agissait de Leonardo qui s'excusait de nous interrompre,
- Les filles je suis sincèrement désolé de vous couper. Cléa, ton père demande à ce que tu le ramènes tout de suite chez un certain Jaffar...