2- Cadence

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Le baraqué a toujours sa main fermement accrochée autour de mon bras. Avec sa peau noire et la mienne blanche comme neige en dessous, on croirait un gros Oréo. Impossible de ne pas penser au sucre dans un moment pareil. Par contre, il prendrait sûrement très mal que je lui croque un doigt.

— Tu peux lâcher mon bras tu sais, je vais pas m'échapper.

— T'es sûre ? Pourtant avec un tuteur comme Mas, c'est le moment ou jamais.

— Mas ?

— Le numéro 9. T'as pas tiré le gros lot, gamine. T'es clairement pas son genre de prédilection. J'espère que tu sais dans quoi tu mets les pieds.

Il m'adresse un regard difficile à déchiffrer et j'essaie de deviner ce qu'il pourrait m'arriver de pire que ce que je viens de vivre, dans cet endroit. J'ai toujours aimé me bercer d'illusions, alors autant ne pas penser à ce qui m'attend derrière cette porte. Je vais me contenter de me rappeler pourquoi je fais ça, en espérant que ça ira. J'ai déjà fait le plus dur, j'en suis sûre : réussir à pénétrer ce club sans avoir à coucher avec le type de l'entrée. Montrer un peu mes sous-vêtements, sourire bêtement... Le Round veut des prostituées à formater, je peux jouer le jeu pour y accéder. Je devrais réussir à retrouver Ingrid assez facilement maintenant, du moins, c'est ce que je veux croire. Le hic, c'est la réaction de ce fameux Mas tout à l'heure, il n'a pas l'air ravi d'être tombé sur moi. Ce qui risque de rendre tout cela beaucoup plus compliqué.

— On peut entrer ? demande mon garde du corps en passant sa tête par l'entrebâillement d'une porte.

Je n'entends pas la réponse, mais le battant s'ouvre en grand et un type me mate immédiatement de la tête aux pieds.

— On va bien se marrer, je le sens, il ricane en me jaugeant.

J'espère que ce n'est pas Mas, car si c'est le cas, je crois que je vais prendre mes jambes à mon cou finalement. Ses tatouages lui remontent jusqu'au crâne et des piercings bizarres recouvrent son visage. Je déteste ça !

— Laisse-la entrer Garett putain, qu'on en finisse ! gronde une voix derrière lui.

Le percé me fait un sourire à faire trembler un mort et je me pare de mon plus bel air niais. Celui qui affiche clairement que je ne cherche pas d'ennuis, que je suis une gentille fille très innocente. Ce n'est pas vraiment la réalité, mais ça marche à tous les coups pour m'éviter les emmerdes.

— Entre et profite du spectacle, Umar.

Il tape sur l'épaule de mon escort, qui me lâche enfin pour se faufiler dans la pièce.

— Allez entre, 16. Comment tu te sens ? me demande le fameux Garett en posant une main contre mes reins nus.

Le contact de sa paume rugueuse sur ma peau me fait réagir. Putain, ma jupe ! Je réalise à l'instant que j'ai laissé mes habits sur la scène et que depuis dix minutes, je me trimballe en sous-vêtements comme une dinde de Victoria's Secret. Ou plutôt deux dindes, vu mes mensurations. Pour le coup, cet ensemble de lingerie est un achat largement rentabilisé !

— Je m'appelle Cadence, je sors sans réfléchir.

— On s'en branle, ferme-la.

Je me retourne au ralenti vers celui qui vient de me cracher ça au visage. Souffle Cad, respire. Ouais, j'ai bien besoin de souffler et vite, parce que quand je croise un regard foncé, bordé de cils fournis et dominé par de larges sourcils, mon oxygène me fait un gros fuck et se barre par toutes les issues possibles. Ce type est juste... terrifiant. Il est plutôt costaud, avec des cheveux bruns épais qu'il a dû raccourcir lui-même et une mâchoire si carrée qu'il doit pouvoir broyer des cailloux au petit-déjeuner.

PRUDE A FRANGEΌπου ζουν οι ιστορίες. Ανακάλυψε τώρα