Il n'avait plus trop de nouvelles de ce qui se passait dans le château, mais il ne pouvait que l'imaginer. Sans Dumbledore ni plus aucun garde-fou, le Ministère et les mangemorts avaient fait main basse sur l'illustre école et presque plus rien ne filtrait à l'extérieur. Avant, Charity avait été son indic. Dès qu'ils se voyaient, elle ramenait avec elle un stock d'anecdotes toutes plus invraisemblables que les autres : un élève de Serpentard s'était retrouvé coincé dans les toilettes du quatrième étage sans que personne ne sache bien comment ; Harry Potter avait encore vécu quelque chose d'étrange durant son année ; ou même une élève qui avait confondu Hawaï et Hanoï pendant son test d'Etudes des moldus sur la guerre du Vietnam. Elle finissait souvent par rouler des yeux, amusée, pendant qu'il riait franchement. Seulement, ça allait faire un moment qu'il n'avait plus de nouvelles de Charity... Depuis cet été à vrai dire. Et il essayait de ne pas y penser, de se dire qu'elle avait dû partir sur un coup de tête à l'autre bout de la planète – ça n'aurait pas été la première fois – mais sa démission et le silence radio qui avait suivi lui tordait le ventre dès qu'il s'y attardait. Portée disparu. Ça aurait sûrement été le terme le plus approprié pour désigner la situation de Charity. C'est en tout cas ce que lui avait écrit Prudence, sa sœur, par lettre le mois dernier. L'écriture tremblante n'avait rien caché de son inquiétude à elle aussi.

Dans tous les cas, la réalité à Poudlard devait être pire que ce qu'il pouvait imaginer. Car même si le contrôle exercé était sévère et que rien ne devait filtrer hors des murs de Poudlard, toutes les familles qui avaient un enfant dans l'enceinte du château savaient ce qui se tramait. Le bouche à oreille fonctionnait ensuite à travers toute la société sorcière. Elle était peut-être là, la force du régime de Voldemort : tout le monde savait, mais personne ne pouvait le reconnaître ouvertement.

Soudain encore plus fatigué qu'avant, Julian retint un soupir. Il ne restait plus que cinq minutes de cours et, en face de lui, ses élèves faisaient mollement semblant de s'atteler à leurs exercices. Au premier rang, Sally regardait par la fenêtre sans même plus donner le change ; Rupert avait déjà rangé ses affaires ; et il vit même Simon qui discutait à voix basse avec son voisin, un coude posé sur la table pour soutenir sa tête. Et Julian était prêt à parier une mornille qu'ils ne parlaient pas de sortilèges.

- Bones, appela-t-il, juste pour le plaisir de le faire. Vous avez fini l'exercice ?

La classe entière parut se réveiller de sa torpeur et Simon sursauta si vivement que son coude en dérapa de la table. Son long nez se para d'une couleur rouge embarrassée.

- Euh...

Pris au dépourvu, il ne trouva visiblement pas de répartie dont il pouvait avoir le secret et Julian se retint de toutes ses forces de ne pas sourire. Avec cette expression, il lui rappelait presque Matthew le nombre de fois où il avait été pris en faute pendant un cours.

- Je vois, dit-il d'un air entendu. Ecoutez, je sens bien que votre week-end vous intéresse plus que mon cours, alors on se revoit lundi, d'accord ?

- Oh génial... entendit-il Sally murmurer, l'air soulagé.

Il sourit et se leva de son bureau.

- Vous finirez simplement l'exercice pour le prochain cours, je ne vous donne rien de plus. Révisez juste bien tous les chapitres vus jusque-là, le premier examen blanc est prévu pour le 11 janvier. (Il ouvrit la porte de la classe d'un coup de baguette). Allez, fuyez. Et bon week-end.

Immédiatement, un concert de raclement de chaises suivit, accompagné d'une dizaine de « bon week-end, professeur Shelton ! » jeté à la volée. Rupert fut le premier à partir, comme monté sur ressort, puis tous ses élèves sortirent un à un. Sally prit quand même le temps de pointer sa baguette sur la craie du tableau derrière lui au moment de partir, puis elle la fit léviter pour dessiner un flocon géant dessus. C'est vrai que l'hiver commençait à bien s'installer. Le geste était de toute façon tellement bon enfant qu'il rit de bon cœur et elle lui adressa un sourire en partant à son tour. Distraitement, il se mit alors à ranger ses affaires. Ne plus voir son bureau pendant deux jours ne serait pas de trop non plus et il avait hâte de rentrer.

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