-Magnifique machine !
La voix de Xavier résonne dans la maison vide et presque irréelle des Minuit.
Toute cette boucherie mécanique a laissé ses traces mais les Primus vont s'occuper de tout vider et remettre une nouvelle maison sur ce terrain.
Ça nous paraît tellement lointain alors que pourtant, c'était seulement hier, il y a à peine quelques heures...
Alexis et moi faisons bande à part.
-Je suis heureuse de vous avoir connus...
-Ne dis pas ça comme si tu étais condamnée ! je dis, triste.
-Malheureusement, Xavier ne peut rien faire pour moi. Il a essayé. Mais mon corps est plutôt expérimental vu que j'ai été un des premiers cobayes réussis de...Fabrizia.
Anna est face à nous mais ne bouge pas. Seule sa tête est encore xapable de bouger et parler.
-Alexis...Je suis contente que tu n'aies rien et que tu aies survécu...
-Merci, Anna, dit Alexis avec un petit sourire triste. Mais j'aurais aimé que tu vives aussi, avec nous...
Anna nous sourit. Elle paraît si mature, ainsi. Xavier nous rejoint.
-Je suis sincèrement navré, Alexis...Amaryllis, surtout. Je n'arrive pas à accorder son corps aux plans que j'ai trouvés dans le bureau de Fabrizia...Vraiment désolé !
-Ça ne fait rien ! dit Anna, ne nous laissant pas parler. C'est le cycle de la vie, de toute façon...S'il vous plaît...
Elle a un regard suppliant.
-Détruisez mon système central...Je veux m'en aller auprès de mes seuls amis...Alexis...Et surtout toi, Amaryllis...
Je lui prends une main, les larmes aux yeux.
-Je suis ravie d'avoir été ton amie...Anna ! Anna Mitror, c'est ça ?
-Oui...me dit-elle avec un sourire. Il y a une machine au sous-sol avec mon nom dessus. C'est celle qui a servi à me modifier...
-Je vois...je lui réponds. Ça a été un honneur d'être ton amie !
-Merci...
-Je t'ai moins connue mais tu es une fille courageuse...dit Alexis avec un regard un peu atristé.
-Merci...
Après ces adieux déchirants, Xavier finit par détruire complètement le système central d'Anna qui s'éteint, qui meurt, le sourire aux lèvres. Je pleure. Pourquoi les bonnes personnes doivent-elles toujours mourir ? Alexis a aussi une larme à l'œil.
Avec Xavier, nous lui montrons la machine dont vient de nous parler Anna. Quand nous arrivons, il retire entièrement la bâche et effleure la surface métallique de la machine, vieille et un peu rouillée. Il déclare avec un air un peu attendri :
-C'est une telle machine...Mais utilisée à de si mauvaises fins...
Nous regardons encore Xavier examiner la machine.
Après de nombreuses minutes, nous remontons à l'étage. Il demande à d'autres loups-garous d'aller chercher cette machine pour la ramener chez mon grand-père. Il ramène bien quelques huit ou neuf machines différentes...
À cause de Fabrizia et ses horribles expériences, la technologie va encore avancer. Xavier, seul, va sans nul doute réussir à dompter cette technologie pour en faire quelque chose de bien. Nous avons confiance en lui pour tout ça.
Avec Alexis, nous sortons un moment dans le jardin touffu, seuls. Nous nous promenons, main dans la main, sans parler ni savoir où nous allons.
Nous nous asseyons sous un arbre, dans son ombre, pour nous reposer et discuter. Nous rions ensemble et tout est comme si rien n'était jamais arrivé.
Nous sommes si bien, ensemble, tous les deux...
Soudain, Alexis me prend dans ses bras et me tire vers lui avec douceur. J'entends sa respiration régulière directement dans mes oreilles. Il ne dit rien. J'entends juste son souffle aussi bien que je le sens sur la peau sensible de mon cou et ma nuque...
Soudain, il me mordille le lobe et je me mets à rire.
-Alexis ! lui dis-je comme un reproche que je ne lui ferai en réalité pas.
Je le sens sourire contre ma peau, je ne vois que ses cheveux courts et tout doux dans mon champ de vision.
Puis il se met à parler tout doucement :
-Si tu savais comme je t'aime, Amaryllis...
Je tourne ma tête tant bien que mal.
-Je sais que tu m'aimes, Alexis, comme tu sais que moi, je t'aime aussi.
-Oui...souffle-t-il avec un autre sourire. Mais tu ne sais pas combien...
-Pourquoi me dis-tu ça maintenant ? Ce n'est pas dans ton habitude de faire de grandes déclarations là où tout le monde pourrait nous entendre...
J'essaie de me dégager de son étreinte mais il me serre encore plus fort contre lui et me dire :
-Non, ne bouge pas...C'est plus facile pour moi de le dire si tu ne me vois pas...
Je suis surprise mais accepte ça sans discuter. Je sais à quel point dire les choses en face peuvent être effrayantes...
-D'accord, lui murmurais-je, me voulant rassurante.
Alexis commence alors à parler :
-Je m'en suis rendu spécialement compte hier soir et aussi ce matin...Tu sais que tu...
-Alexis ! Amaryllis !
Mince, Yegram nous appelle. Nous nous levons et sortons de sous notre cachette.
-Tu me diras après, lui dis-je, tout sourire en lui effleurant la main.
Je vois une larme briller au coin de son œil mais je ne lui dis rien. Ça avait l'air très important, ce qu'il voulait me dire...Malheureusement, on ne fait pas ce qu'on veut. Surtout pas maintenant.
Nous arrivons près de Yegram accompagné par Xavier.
-J'aimerais t'examiner. J'aimerais voir si mon antidote a vraiment marché et si tu es hors de danger.
-Bien, acquiesce-t-il.
-Amaryllis, tu peux venir aussi.
-Oui ! Merci.
Nous allons dans une pièce vide et Xavier ferme le verrou. Il demande à mon petit ami de retirer son haut.
Alexis s'exécute sans râler.
Quand il se retrouve torse nu, je suis étonnée. Pas complètement mais celae fait tout drôle.
Maintenant, sa musculature est nette et bien visible. Les lignes de ses muscles sont clairement délimitées et ses pectoraux comme ses abdominaux sont bombés vers l'avant. Je ne peux détacher mon regard de son corps. C'est un corps de loup-garou fortement entraîné et endurci. Je souris bêtement toute seule.
Alexis a tellement changé depuis ces quelques mois...Un changement surprenant, grandement influencé par la découverte de sa seconde natutr mais qui n'est pas pour me déplaire...
Alexis tourne son regard vers moi, un peu gêné.
-Qu'est-ce que tu regardes comme ça ? me demande-t-il.
Avec un sourire, je réponds, sans filtre et très directe :
-Toi.
Il rougit sur les joues. Trop mignon ! À croquer, mon loup à moi !
Xavuer termine ses examens sur Alexis et soupire. On attend le verdict avec une fébrile appréhension, mais comme Alexis bouge mieux qu'hier soir, on ne s'attend pas vraiment à ce que Xavier nous dide que l'antidote s'est révélé inefficace.
-Tout va bien, Alexis. Ton corps est très résistant...Et tes anticorps ont l'air particulièrement hargneux et tenaces, même par rapport à ceux des autres Primus.
-Sérieusement ? demande Alexis, ne voulant pas y croire.
-Oui, dit Xavier, pensif. C'est peut-être parce que tu as développé beaucoup d'anticorps humains avant ta première transformation, plus tardive que pour les autres Primus, l'ayant presque tous eu de manière assez précoce.
-Comme quoi, se faire charrier parce qu'on est en retard par rapport à la norme, ça peut avoir du bon en retour, sourit Alexis.
-Exact ! lui répond Xavier en riant.
Il s'adresse ensuite à moi :
-Amaryllis, puis-je juste regarder chez toi aussi ? Si le poison n'a pas fait le chemin inverse pour venir s'immiscer dans ton corps ? Comme c'est un poison inconnu, je préfère prendre toutes les précautions possibles.
-Pas de problème, dis-je.
Xavier examine mon bras avec soin et me fait une prise de sang. Avec un matériel que je qualifierais de rudimentaire au vu de sa petite taille alors c'est probablement juste une version réduite et plus transportable de sa grosse machine de laboratoire dont la complexité n'a d'égale que son efficacité.
Il soupire aussi et nous annonce sourire aux lèvres :
-C'est tout bon. Tu n'es pas contaminée. Tout va bien !
-Super ! lâche Alexis.
Nous ressortons.
Les cousins au complet d'Alexis nous prennent d'assaut dès que nous mettons un pied hors de la pièce.
-Alexis, on n'a pas pu te le dire hier soir !
-Mais tu as assuré !
-Quand tu as tué l'autre louve, là, j'ai eu tellement peur !
-Tu t'en es bien sorti !
Quelle cacophonie ! Je ris et Alexis me regarde avec un air suppliant. Ses cousins parlent tous en même temps et de tous les côtés. Seul Georges n'a encore rien dit et se contente de sourire, au dernier rang devant nous, sa tête surplombant le reste du groupe, étant le plus grand.
-Merci, merci, répond Alexis un peu nerveux.
Georges se racle alors la gorge. Tous les autres se taisent. Amusante preuve d'autorité...Il s'avance vers Alexis et lui dit :
-Je ne pensais pas qu'un jour, tu serais si fort. Tu es vraiment un loup-garou, à part entière. Tu feras un bon alpha. Je suis désolé d'avoir douté de toi.
Il lui fait alors un magnifique salut d'alpha des Primus. Les yeux clos, pourtant un léger sourire sincère flotte sur ses lèvres. Alexis lève légèrement le menton, inconsciemment fier. Les autres suivent également et je sens Alexis se gonfler d'orgueil et de fierté à mes côtés.
Georges finit par se redresser et lance un petit sourire à son cousin et dit :
-Tu es devenu plus fort que moi, je crois. Mais je ne vais pas me laisser distancer aussi facilement !
Alexis lui rend le même sourire en coin et répond :
-Je ne savais pas, mais merci. Je ne vais pas me laisser faire alors !
Georges lui sourit et il semble voir des éclairs entre les quatre yeux. C'est alors que Maria s'approche de moi, me prend les mains avec les siennes et me dit :
-Amaryllis...Tu as bien pris soin de notre cousin, merci ! Nous n'avons pas été très malins, surtout à cause du fait qu'il a eu une première transformation tardive, mais toi tu as toujours été là pour lui alors je te remercie pour avoir rempli ce rôle à notre place !
Alexis ne dit rien mais sourit.
Le soir, nous rentrons chez nous. Pour cette nuit, je resterai dormir chez Renfir. Nous avons tous besoin de repos...Et d'une bonne nuit de sommeil. Quand nous arrivons, Mimosa se rue sur Alexis et elle le serre dans ses bras à tel point que ses os risquent de se briser...Elle lui dit :
-On m'a raconté au téléphone ! Je suis tellement contente que tu sois sain et sauf !
Yegram et Xavier sont encore restés là-bas et l'alpha l'a appelée pendant que nous rentrions. Xavier, lui, est resté sur place pour continuer ses analyses et ses tests. Il prend toutes les informations qui pourraient lui être utiles. Malgré ces recherches peu éthiques, elles peuvent toujours apporter de possibles progrès dans la science. Comme la plupart des guerres, celles lupines mais surtout celles humaines...
Alexis se couche à côté de moi et me sourit. Je me blottis contre lui et il se tourne subitement en me prenant dans ses bras. Je ne vois plus son visage et j'entends son souffle dans mon oreille la plus proche. Il a la respiration régulière et sereine, il est calme.
Soudain, il se redresse sur ses bras et me dit :
-Amaryllis, je devais te dire quelque chose !
-Je sais, lui souris-je. Je suis tout ouïe !
Il me sourit et me regarde dans les yeux.
-Cette fois, je te le dis comme ça !
Il plante ses beaux yeux verts, couleur de l'espoir, dans les miens, noirs comme de la suie. Et commence à parler :
-Je te remercie pour tout ce que tu as fait pour moi ! Tu es entrée avec moi dans ce monde sans jamais te plaindre en m'écoutant moi râler et quand je souffrais, tu étais toujours là pour moi et m'apporter du réconfort. Tu ne t'es jamais plainte de mes cousins, et ça, ça relève du miracle !
Nous rions tous les deux et il continue :
-Tu es un tel soutien dans cette nouvelle vie qui est la mienne...Enfin, non, pardon, la nôtre. Tu m'as tellement apporté et m'apportes encore tant aujourd'hui, je te remercie...Du fond du cœur...Si tu savais...
Il reprend son souffle et poursuit :
-Je crois que sans toi, je n'en serais pas là...J'en aurais déjà eu marre...Qui sait, peut-être que je ne serais même plus de ce monde. Tout ça pour te dire que tu m'as donné tellement de soutien et d'amour que je ferai n'importe quoi pour toi ! Sans toi, je n'y serais pas arrivé, je n'en serais pas là...Merci. Pour tout ça, merci !
Il a une larme qui brille au coin de son œil.
-J'ai tellement de chance de t'avoir ! commence-t-il avec un sanglot étouffé. Si tu savais à quel point je tiens à toi ! Je t'aime, Amaryllis, je t'aime !
Je m'assieds et le prends dans mes bras. Peu importe que ce soient des larmes de joie ou de tristesse, les gens qui pleurent me font de la peine. Je frotte ses cheveux courts sous ma main et lui chuchote :
-Moi aussi, je tiens énormément à toi, et je t'aime tellement que seul l'infini équivaut à la valeur de mon amour pour toi ! Je t'aime, Alexis, de tout mon cœur, je t'aime !
Les larmes me montent aussi aux yeux. Des larmes de joie et d'émotions...Quand Alexis me regarde, nous rions en chœur en voyant les larmes de l'autre couler sur nos joues respectives.
Nous nous embrassons passionnément avant de sombrer tous les deux petit à petit dans un sommeil profond...