Kian
On ne se rend pas réellement compte de la valeur d'une chose, jusqu'à ce qu'on la perde. Je ne m'étais jamais rendu compte d'à quel point j'aimais le ciel, jusqu'à ce que j'en sois privé durant plus de deux semaines. C'était un morceau de liberté qui s'offrait à moi, d'un bleu éclatant. Je dus cligner des yeux pour m'habituer aux rayons du soleil.
- Je vous laisse faire connaissance, j'ai du travail.
- Pas de problème docteur, répondit l'un des frères, tout sourire.
- A plus tard !
J'ignorai ma mère quittant la pièce et m'approchai des fenêtres. Mais avant que j'aie pu les atteindre, l'un des frères m'attrapa par le bras. Je dus me faire violence pour ne pas le repousser. Son toucher me répugnait et l'extérieur m'appelait.
Je leur offris tout de même un grand sourire en me plaçant dos à la liberté.
- Désolée, je n'avais pas trouvé de fenêtres jusqu'ici, ça fait du bien de... Revoir le soleil !
Celui qui m'avait attrapé me relâcha et un sourire en coin apparut sur ses lèvres. Grand, de bonne condition physique, il avait l'air sportif. A côté de lui, son frère était carrément frêle.
- Lequel est Jackson et lequel est Samuel ?
Son sourire s'agrandit.
- Ne te force pas avec nous Kian, nous sommes des alliés.
Je fronçai les sourcils.
- Pardon ? Je m'appelle Hélène, personne ne m'appelle Kian.
- Mon troisième prénom est Murd, se présenta Sammy en s'avançant.
- Moi c'est Ezra, dit Jackson.
Je reculai d'un pas.
- Je ne vois pas de quoi vous parlez.
Jackson passa sa main dans ses cheveux châtains tout en s'approchant de moi.
- La fondation est tellement obnubilée par son idée de sauver la Terre par leur propre méthode qu'elle ne pense pas à laver le cerveau de ses propres enfants. Notre père est peut-être à l'initiative de tout ce bordel, mais tout comme ton frère et toi, nous avons fui avant que notre père n'ait pu nous forcer à rejoindre ses rangs. Notre période foras a duré un peu moins d'un an.
Mon visage se durcit immédiatement et je me mis sur la défensive.
- Comment je peux vous croire ? demandai-je sèchement.
- On peut te dire tout ce qu'on sait sur Novus et vous aider, toi et tes amis, à vous échapper.
Je ne bronchai pas, les dévisageant tour à tour. Murd, qui se différenciait d'Ezra par une constitution plus frêle et des cheveux plus sombres, mais aussi par sa plus grande taille, sortit une carte d'identification d'une poche arrière de son pantalon.
- Nous sommes les fils du grand patron, ils ont totalement confiance en nous. Nos cartes nous donnent accès à toutes les salles et tous les dossiers, à l'exception des trois premiers nivaux.
- Qu'est-ce qu'il y au dixième étage dans ce cas ?
- Une salle de réception gigantesque avec un dôme en verre pour observer le ciel, répondit Ezra du tac au tac.
- Et les niveaux quatre et cinq ?
- Au cinquième c'est les labos noirs et au quatrième la prison.
Je fronçai les sourcils.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Les labos noirs servent à toutes les expériences officieuses de Novus, celles qui choqueraient le grand public. Ta mère travaille à cet étage. Leurs cobayes dorment à la prison.
- Les cobayes sont des humains ?
- Des rebelles faits prisonniers.
Je tiquai là encore. Wade avait-il été l'un de ces prisonniers ? Il n'avait jamais parlé d'expériences de la fondation. Puis je me rappelai ses dires. Selon lui, les rebelles capturés par Novus étaient divisés en plusieurs groupes.
- Où est-ce que l'on se trouve ? les interrogeai-je, toujours avec une certaine défiance.
Ezra se mit à sourire. Il avait le regard joueur, un peu comme Charly. Il lui ressemblait d'ailleurs, autant par ses cheveux sombres que par ses yeux noisette.
- C'est la partie amusante de l'histoire ! Je suppose que tes amis et toi vous êtes demandé pourquoi il n'y avait aucune fenêtre.
Je hochai la tête. Il m'invita alors à me rapprocher des fenêtres. Je tentai de dissimuler mon empressement, j'avais hâte de regarder à l'extérieur. Pourtant dès que je baissai les yeux afin d'apercevoir le sol, mon souffle se coupa.
- Oh putain, dites-moi que c'est une blague...
Murd vient se placer à ma droite. J'étais donc encadrée par les deux frères, face à l'immensité du ciel.
- La lumière du soleil au-dessus des nuages est trop forte, alors il n'y a presque pas de fenêtre.
- Ce n'est pas une base sous-terraine, dis-je en fixant le champ de nuage qui s'étendait jusqu'à l'horizon sous nos yeux. C'est une navette...
- Un vaisseau pour être exacte, qui se déplace à 5000 mètres d'altitudes la plupart de temps.
- On est au-dessus de quoi ?
- De la Virginie, répondit Murd, pas loin de Roanoke.
Je hochai doucement la tête. Cette nouvelle information venait de m'achever. Comment pouvions-nous nous échapper alors que nous nous trouvions à 5000 mètre au-dessus du niveau de la mer ?
- Vous nous aideriez à nous échapper ? repris-je au bout de quelques secondes.
Ezra hocha la tête.
- Qu'est-ce que vous voulez en contrepartie ?
- On part avec vous et vous nous trouvez une place à l'ampoule.
Je ne pouvais pas leur refuser s'ils pouvaient nous permettre de nous échapper, aussi j'acceptai sans rechigner. Ils m'avaient donné des informations capitales sur la fondation. J'ignorais si je pouvais réellement leur faire confiance, mais ils avaient l'air sincères et je n'avais pas vraiment le choix.
- D'autres choses que je devrais savoir ?
Les deux frères échangèrent un regard entendu puis se tournèrent vers la porte.
- Oui, mais tu vas devoir nous suivre.
Ezra me fit signe de le suivre et nous sortîmes de la pièce.
- Reste naturelle.
- Où est-ce que vous m'emmenez ?
- Tu ne t'es jamais demandé en quoi consistait exactement le travail de ta mère ? me demanda Ezra en passant son bras autour de mes épaules.
Je le retirai aussitôt.
- Ma carte ne me donne pas accès à l'étage des « labos noirs » comme vous dites. Je n'ai jamais pu aller voir.
- Tu n'as pas idée de ce que tu as manqué ! Comment c'est l'extérieur ?
- Je croyais que vous y aviez été.
- Oui, il y a plusieurs mois. Mais on devait toujours se cacher et fuir Murd et moi. Notre père a toujours cherché à nous ramener à ses côtés. On a trouvé un groupe, on se faisait confiance, on voyageait ensemble.
- Et où est votre groupe maintenant ?
Ezra se pinça les lèvres. Ils me guidaient à travers les couloirs afin de rejoindre les ascenseurs.
- Ils ont fini comme le reste des populations.
- Quoi ?
Je voulus m'arrêter, ne comprenant pas ce qu'ils voulaient dire, mais Ezra posa une main dans mon dos et me força à avancer. Ils accélérèrent même le pas.
- Comment ça « quoi » ?
- Novus a envoyé vos compagnons de voyage sur un continent déjà colonisé ?
Ils échangèrent un nouveau regard. Murd finit par baisser les yeux et appela l'ascenseur. Ezra me prit par les épaules afin que je lui fasse face.
- J'ai besoin que tu montres le moins de réaction possible. Les ascenseurs sont dotés de caméras et de micros. Nous ne sommes pas censés te mettre au courant. Quand tu retrouveras ta mère, tu devras faire comme si de rien n'était.
Je hochai lentement la tête. J'avais peur de comprendre.
- Novus n'a jamais déplacé les populations américaines sur les autres continents, Kian.
Murd tapait du pied sur le sol.
- La fondation les a tués.
Je plaquai immédiatement mes mains sur ma bouche pour ne pas crier. Je ne pouvais pas le croire ! Novus n'avait pas pu tuer des milliards d'êtres humains sans scrupules ! Ils n'avaient pas pu anéantir ainsi des familles, des villes, des peuples tout entier ! Qui pourrait avoir une idée aussi folle !?
Alors que mes genoux faiblissaient, Ezra me prit dans ses bras pour me relever.
- Les autres pays à travers le monde luttent, tout comme les Etats Unis, contre Novus. D'autres réseaux de rebelles ont été créés à travers le monde et doivent faire face à d'autres bases de la fondation. A Paris, à Londres, à Berlin, à Moscou, à Bagdad, à Niger, à New Delhi, à Shangai, à Tokyo, à Sydney, à Melbourne, à Brisbane... Il y a plus de rebelles qu'on le croit !
- Mais les survivants... murmurai-je entre deux souffles. Les survivants...
- Je sais...
Il m'aida à me redresser lorsque le « ding » caractéristique de l'ascenseur se fit entendre. Je me forçai à reprendre une expression neutre alors que l'envie de pleurer m'assaillait. J'avais de la famille, en plus de mon oncle, des amis que je n'avais retrouvé à l'ampoule, des centaines de personnes que je croisais auparavant tous les jours et que Novus avait simplement tué pour mener je ne savais quelle expérience tordue. Jamais je ne m'étais imaginé ce scénario, puisque c'était impensable ! Personne ne pouvait être aussi dérangé pour avoir une idée pareille et convaincre d'autres personnes de l'aider à anéantir la population humaine.
Ezra se mit à sourire comme si nous faisions simplement connaissance alors que Murd restait silencieux. Ils agissaient comme ils le devaient, ils jouaient le jeu. Aussi je fis un effort, ravalai mes larmes et me forçai à me donner un air intéressé.
- Au cas où tu ne l'aurais pas compris, je suis l'ainé, m'expliqua Ezra. Samuel a un an de moins que moi. Nous sommes demi-frères, nous avons le même père comme tu l'as compris. On ignorait l'existence de l'autre jusqu'à l'âge de neuf et dix ans. La mère de Sammy qui avait une liaison avec notre père et son beau-père ont été assassinés, malheureusement. On n'a jamais trouvé le coupable.
Il m'adressa un regard significatif. Dominic Preston n'y était pas pour rien dans ces meurtres d'après eux.
- Je suis vraiment désolée Mu... Samuel.
Il sourit brièvement comme pour dire que ce n'était rien puis son regard se perdit dans le vide. Il tapait toujours du pied sur le sol.
- Après ça, on a été élevé comme des frères, ce que l'on est en fin de compte. C'était plutôt cool d'avoir un frère. On avait une sœur aussi.
- Demi-sœur pour moi, précisa Murd.
Je pris quelques secondes pour détailler un peu plus précisément. Sa carrure n'était pas si frêle, mais il était si grand, si élancé, que l'on croyait l'inverse à première vue. Ses longues jambes et ses épaules carrées me laissaient penser qu'il devait être bon en course, endurant et rapide. Ezra faisait peut-être quinze centimètres de moins que lui et me dépassait toujours. Les deux frères se ressemblaient par leurs yeux noisette, leurs sourcils fournis et leurs lèvres fines. Cependant, leurs caractères bien différents animaient leurs visages de deux façons distinctes. Ezra souriait sans relâche, savait jouer de ses atouts et trouvait toujours un moyen de conversation. Murd semblait plus renfermé sur lui-même, discret mais attentif, à l'écoute mais effacé. Les deux (demi) frères se complétaient presque.
Je frémis lorsque les portes de l'ascenseur s'ouvrirent au cinquième étage. Ezra me poussa doucement en dehors de la cabine puis se pencha vers mon oreille.
- Quand tu retrouveras ta mère, tu devras agir comme si tu ignorais tout de ce que l'on t'a dit et de ce que l'on s'apprête à te montrer. Si elle a le moindre doute, cela compromettrait nos chances de nous échapper.
Je hochai la tête tout en les suivant à travers les couloirs. Nous croisions de nombreux scientifiques vêtus de blouses blanches, se déplaçant en petits groupes, trop occupés à parler entre eux pour nous prêter attention. Nous marchâmes de longues minutes dans un silence complet dans les couloirs, jusqu'à ce qu'ils poussent une porte à notre gauche sur laquelle on pouvait lire « simulation 4 observateur ». Ezra passa une tête pour s'assurer que la pièce était vide puis nous fit signe d'entrer. Comme la plupart des autres salles du vaisseaux, c'était très épuré. Deux rangées de fauteuils faisaient face à une gigantesque vitre. Je m'approchai lentement de celle-ci. Elle nous permettait de voir une gigantesque pièce dont tous les murs étaient couverts de miroirs.
Il n'y avait qu'une personne dans cette pièce. Je crus d'abord halluciner. Il ne pouvait pas être ici. Non. C'était impossible. Je ne pouvais pas y croire.
- Tu le connais à ce qu'on a compris. Waren Donovan, ou Charly, c'est ça ?
Je posai ma main sur la vitre.
- Charly... Q-Qu'est-ce qu'il fait ici ?! Qu'est-ce qu'ils lui font ?!
- D'après ce que j'ai pu lire dans les rapports, quand vous vous êtes endormis à cause des gaz, James Harper, celui que vous appelez Delta, a réussi à s'enfuir par une fenêtre, expliqua Murd. Charly est retourné dans le bâtiment pour vous secourir. Ils l'ont ramené ici avec vous pour qu'il serve de cobaye.
Je tremblais, incapable de prononcer un mot. Je ne le réalisais pas. Charly ne pouvait pas être ici !
Je collai mon front à la vitre, comme pour tenter de me rapprocher. Il ne portait qu'un short de sport. Je pouvais donc voir aisément son torse, ses jambes et ses bras couverts de cicatrices et de circuits imprimés. Les fils électriques remontaient le long de son cou puis se séparaient pour aller dans sa nuque ou sur jusqu'à ses tempes où ils disparaissaient totalement sous sa peau. Un épais tuyau reliait une machine à son cœur. Cette vision me brisait. Depuis des semaines, je le croyais en sécurité, à l'ampoule, alors qu'il devait vivre un enfer deux niveaux sous mes pieds.
Jusqu'ici, il restait immobile, debout au centre de la pièce. Puis il regarda soudainement autour de lui, tout en gardant les yeux fermés, avant de se mettre à courir. Le sol se mit alors à coulisser afin qu'il reste toujours au milieu de la salle, puis il changea de forme afin de former des obstacles. J'ignorais comment Novus avait pu atteindre un tel niveau de technologie et de cruauté, mais j'étais scotchée dans les deux cas.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? demandai-je d'une voix étouffée sans quitter Charly des yeux.
- C'est une stimulation, m'expliqua Murd. Tu vois tous ces circuits ? Ils lui ont fait subir de nombreuses opérations durant son sommeil pour les lui implanter progressivement, chaque fois plus intrusives. Ils ont un contrôle presque total de son système nerveux. Ta mère possède une tablette qui active certains implants. S'ils envoient tous une décharge, c'est juste de la douleur, comme une punition. Mais si elle cible ceux qu'elle active, elle peut le forcer à faire des mouvements précis. Ils le contrôlent.
- Ils vont le détruire, murmurai-je d'une voix brisée. On doit le sortir de là ! Il ne peut pas rester plus longtemps ici !
Je courrais déjà vers la porte quand Ezra m'attrapa par le bras.
- Tu ne peux pas faire ça Kian ! Ta mère ne doit pas savoir que l'on t'a mis en courant, sinon on anéantit toutes nos chances de nous enfuir un jour !
Je hochai négativement la tête en fermant les yeux.
- Non ! Non ! Non ! Je ne peux pas retourner au confort des habitations civiles après l'avoir vu comme ça ! Regardez-le ! C'est inhumain !
Les larmes se mirent à dévaler mes joues alors que je retournais me coller à la vitre pour revoir Charly.
- Q-Qu'est-ce qu'il lui arrive ? Pourquoi il court ?
- Ils testent ses capacités physiques, soupira Murd en se postant à côté de moi. On ne voit qu'un homme qui court dans une salle tapissée de miroir, mais Charly est dans un tout autre univers.
Il alluma une tablette mise à disposition et glissa quelques secondes son doigt sur l'écran avant de reprendre :
- Il se trouve dans une espèce de boyau étroit entre deux immeubles, mais le chemin est encombré par des obstacles qu'il doit éviter.
- Pourquoi court il ? l'interrogeai-je en essuyant mes joues qui redevinrent humides aussitôt.
- Pour... Vous protéger... Sa sœur et toi... Il vous voit au bout du chemin, vous êtes en danger et il doit vous sauver. Il doit arriver au bout de la simulation là.
Et en effet, quelques secondes plus tard, Charly tomba à genoux. Il regarda autour de lui, comme s'il cherchait quelqu'un, puis il ouvrit brusquement les yeux et poussa un cri. Deux miroirs coulissèrent alors et Nora entra dans la salle, suivie par un escadron de médecins.
- Impressionnant, Waren. Très belle performance.
Je cessai de respirer. Je n'en étais plus capable.
Charly tenta de parler mais à la place il se mit à tousser.
- Je te demande pardon ? dit ma mère en faisant un signe à ses assistants qui arrêtèrent tout mouvement.
- Arrêtez...
Je l'entendais à peine. Sa respiration sifflante traduisait sa difficulté à expirer. Ce n'était plus le Charly fier et rieur que j'avais en premier lieu rencontrer. C'était un Charly fatigué, mutilé, en bout de course. J'ignorais comment il avait pu tenir jusqu'ici. Je ne pus retenir un cri lorsque Nora tapota sur sa tablette et que Charly fut pris de convulsion. Il s'écroula au sol et les médecins s'occupèrent enfin de lui. Ils le chargèrent sur une civière sortie du sol modulable et le débranchèrent de la machine. Ils commencèrent à lui injecter des liquides de toutes les couleurs et à observer ses plaies et les circuits sous sa peau. Dès qu'il eut quitté mon champ de vision, je me laissai glisser contre la vitre jusqu'à me recroqueviller sur moi-même. C'était trop. Deux semaines que je voulais mener notre équipe et nous sortir d'ici, mais maintenant je ne voyais plus aucun espoir. J'avais peur, j'étais perdue, désespérée, fatiguée de me montrer forte.
Il fallut qu'Ezra aille chercher Silver et lui explique tout pour que je puisse reparler et cesser de sangloter. J'avais besoin de mes proches, de mes amis, de ma vraie famille, de liberté. J'avais besoin de savoir ceux que j'aimais en sécurité.
Hey ! J'espère que vous allez bien et que ce chapitre vous a plu ! N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé en commentaires !
Que pensez-vous de Ezra et Murd ?
Qu'attendez-vous pour la suite de l'histoire ?
Merci pour tous vos votes, vues et commentaires ? Je vous aime fort !