Je le regardais. Il me regardait. Nous nous regardions. Un silence s'installa dans la pièce, avant que je ne me recule, et me mette à courir comme une malade en direction de ma chambre.
– Ruby ! S'exclama aussitôt cette voix grave et masculine, alors que j'essayais un maximum de prendre de l'avance.
Il est fou, mais fou ma parole ! Personne ne partagera mon lit, ah ça non, et cela ne sera sûrement pas lui !
Je m'empressais de sauter les marches d'escaliers, alors que je l'entendais m'appeler. Essoufflée, j'arrivais enfin dans mes quartiers. Je me jetais dans ma chambre, attrapais ses valises et les balançais violemment dans le couloir.
Du balai le babysitteur !
Je le vis au loin s'approcher à grand pas, les sourcils froncés, tandis que je jetais sa dernière valise noire sur le sol. Je claquais brusquement la porte, la fermais à clé et me laissais glisser contre celle-ci, morte de fatigue. Désormais je soufflais comme un charmant bœuf, mes cheveux bruns retombant sur mon visage.
– Ouvrez moi Ruby ! S'écria-t-il, avant que je ne décide de me relever.
– Vous ouvrir ? Vous ne me connaissez sûrement pas, monsieur. Je suis très très têtue, à ce qu'on dit. Bonne nuit mon babysitteur adoré ! " M'exclamais-je en me laissant plus tard retomber sur mon lit.
Les coups redoublèrent contre la porte, Esteban n'étant visiblement pas prêt de lâcher l'affaire. Tenace l'homme, tenace.
– Toutes mes affaires sont à l'intérieur, bon sang ! Elles sont accrochées dans les penderies ! Continua-t-il encore de brayer comme un petit veau, me faisant échapper un soupir.
– Arrêtez de crier comme un veau oh la la ; elles arrivent vos affaires !
Mon impulsivité sembla soudainement me reprendre, alors qu'une merveilleuse idée venait d'apparaître dans mon esprit.
Vais-je oser ? Évidement, j'adore faire des bêtises.
Oh... Ruby tu es une génie de chez génie... Parfait.
Un sourire triomphant venait étirer mes lèvres, avant que je ne me dirige vers mon balcon. Bien sûr, les coups contre la porte continuaient encore de résonner. Appuyée contre la rambarde, je laissais échapper un profond soupir de bonheur avant de...
Oups alors. Que je suis maladroite... Ses affaires venaient soudainement de m'échapper et de tomber des trois étages, atterrissant ensuite... dans l'herbe.
Que tu es maladroite Ruby, ce n'est pas bien...
Je revenais ensuite normalement dans ma chambre, étrangement soulagée d'un certain poids. Je me sens beaucoup mieux désormais ; c'est génial !
– Ruby ! Ouvrez moi ou je n'hésiterai pas à défoncer la porte ! Cria encore monsieur grognon, alors que je retirais mes chaussures.
- Vos habits se trouvent au premier étage, bonne nuit mon très cher Esteban ! Déclarais-je toute souriante, en me dirigeant par la suite dans la salle de bain.
Tiens. La bête arrêta enfin de beugler. Quel bonheur ! Mon sourire s'élargissait davantage, en réalisant que j'avais bel et bien gagné ce petit jeu.
Babysitteur : zéro.
Ruby : un.
**
Après avoir pris une bonne douche, j'étais revenue m'installer dans mon lit. Étrangement les bruits n'étaient plus revenus et j'étais quand même curieuse de savoir ce qu'il faisait. Enfin pas trop non plus, il ne faut pas exagérer... Pensant encore à cet homme contre mon gré, je décidais d'attraper mon ordinateur et de rechercher quelques informations sur lui.
Je rentrais immédiatement son nom dans la barre de recherche et quelques minutes plus tard, je réalisais... à mon tour que je m'étais faire berner. Et très bien, je pouvais l'avouer. Oh le menteur. Oh le joueur.
"Je gère des papiers par ci par là." Avait-il dit simplement, en haussant les épaules
Dis donc... Il s'est bien moqué de moi, le fourbe. Babysitteur oui, c'est ça oui.
Esteban Monero : Prince d'Espagne ; il est très connu pour ses nombreuses stratégies et ses nombreuses affaires toujours concluantes. Très aimé, le peuple d'Espagne lui voue un profond respect...
Ah quand même. Je commençais rapidement à me documenter plus à son sujet, mais... ma souris glissa étrangement vers certaines images. Hum, je vois. J'attrapais un paquet de chips qui traînait par là, laissant glisser les photos. Je décidais plus tard de changer de plateforme, arrivant soudainement sur un site uniquement consacré à cette famille royale d'Espagne.
Je m'arrêtais subitement de manger. Mon cœur se serrait et l'appétit me quittait soudainement. Mon Dieu... est-ce une blague. Mais quel est-ce cet article qui date déjà de dix-sept ans...
" Le roi Alfonso Monero, roi d'Espagne a été arrêté la nuit dernière, aux alentours des deux heures du matin. En effet la police aurait débarqué chez lui après avoir reçu un appel paniqué de sa femme Adelia Monero. Toute la vérité a finalement éclaté au grand jour. Derrière ces regards tendres, ces nombreux sourires... se cachait en réalité un roi tyrannique. Ses sombres facettes ont finalement vu le jour.
Le rapport de sa femme a dévoilé au peuple que derrière cette apparence, cet homme aurait durant de longues années battu sa femme et son fils unique, Esteban Monero..."
Je continuais de lire cet article, complètement choquée. Mon cœur s'accélérait sans cesse, tandis que je ressentais une certaine tristesse m'envahir. Mon Dieu. Comment est-ce possible. Cet homme a battu sa femme. Il a battu son enfant. Esteban...
Sa mère et lui ont vécu des choses horribles... Comment cet homme a-t-il pu faire cela...
Je refermais presque brutalement mon ordinateur, le cœur remué de plusieurs émotions qui me donnaient presque une nausée. Je fermais les yeux un court instant, respirant péniblement, encore sous le choc de cet article. C'est terrible, il n'y a aucun mot pour décrire cela. Je laissais échapper un soupir, en me frottant le visage avec mes mains.
Je n'ai même plus les mots pour décrire cela. Cet homme a osé battre son fils. Battre sa femme. Battre sa famille. Et le pire dans tout cela, c'est que cette chose terrible a duré pendant de longues années.
Je décidais d'aller me coucher, beaucoup trop chamboulée par ce que je venais d'apprendre.
La curiosité est un vilain défaut, Ruby...