- Alors raconte-moi tout princesse. Que t'est-il arrivé ce soir-là ?
Cally et Cléo s'étaient installés juste en face de moi. Lui me fixait, je n'avais jamais vraiment fait attention, mais il avait de magnifiques yeux bleus, très clair, qui contrastait avec le contour de ses iris noirs. De mon côté je m'étais recroquevillée sur un coin de table me collant au maximum contre le mur, le drap blanc toujours serré contre moi. Je les observais tour à tour. Ils n'avaient pas l'air de vouloir lâcher l'affaire. J'avais l'impression d'être prise au piège.
- J-je... enfin j'étais en train de marcher pour rentrer chez moi, commençais-je fébrilement, quand j'ai entendu un bruit qui venait des bois...
- Pourquoi tu rentrais chez toi à pied ? demanda Cally.
- Queen venait de me virer de la fête, à cause de toi au passage. Quand je suis sortie j'ai essayé d'appeler Cléo pour qu'elle me ramène mais je tombais sur sa messagerie à chaque fois, alors je suis partie à pied. C'était stupide je sais...
- T'étais où ? demanda-t-il à Cléo presque en grognant.
Il la regardait vraiment méchamment. La seule fois où je l'avais vu énervé à ce point c'était lorsque j'avais prononcé le nom de Jules. Cléo qui d'habitude avait toujours l'air d'avoir le dessus sur lui, semblait à ce moment-là complétement tétanisée. Si elle avait pu se cacher dans un trou de souris elle l'aurait fait.
- Ce n'est pas de sa faute, répliquai-je, après tout ce n'est pas elle qui m'a viré en m'ordonnant de ne plus m'approcher de toi.
J'avais beau en vouloir à Cléo, je savais on fond de moi qu'elle n'y était pour rien. Ce n'était pas de sa faute, pas la peine de l'accabler. Elle avait déjà l'air de culpabiliser. Cependant Cally ne semblait pas se préoccuper de ce que je venais de dire, il continuait de fixer Cléo et son humeur semblait se détériorer de seconde en seconde.
- J'étais partie sur la terrasse, dit-elle tristement, je parlais avec un garçon. Si j'avais su ce qu'il se passait je serais tout de suite allée aider Cally ! elle se tourna vers moi. Je suis tellement désolée Cassiopée !
- T'inquiète je m'en remettrai...
Tout du moins c'est ce que j'espérais. J'avais essayé de lui sourire mais je ne pense pas avoir été convaincante. Elle avait baissé les yeux et n'avais plus rien ajouté. Pendant ce temps Cally essayait de reprendre contenance. Je pense qu'il avait réussi à se calmer un peu car quand il s'adressa à moi sa voix était déjà beaucoup plus douce.
- Que s'est-il passé ensuite ?
- Le bruit c'était juste un lapin, mais quand je me suis retournée pour continuer mon chemin il... il était devant moi.
Ma voix tremblait, rien que le fait de repenser à cette chose me faisait perdre tous mes moyens. Cependant il fallait que je continue. Plus vite je leur raconterai tout, plus vite ils me laisseraient tranquille. Il fallait que je sois forte.
- Je me suis enfuie dans la forêt, mais je me suis pris les pieds dans des racines et je suis tombée. C'est à ce moment-là qu'il m'a rattrapé et m'a donné un coup de patte qui m'a envoyé balader contre un arbre. Ensuite il m'a mordu et j'ai perdu connaissance. Voilà c'est tout. La suite tu la connais de toute façon vu que tu étais là... dis-je à Cally.
- Décris-moi le loup.
- Euh... il était brun foncé et il avait des yeux noir, vraiment effrayant. Et je crois... je crois qu'il avait une sorte de lune blanche sur le haut de la tête.
Callypsow se leva d'un bond, cette fois-ci il grognait vraiment. Ses yeux avaient virés au rouge et je pouvais voir ses dents s'allonger.
- Je vais la tuer !
C'est tout ce qu'il dit. A peine 10 secondes après, il avait ouvert la porte de la salle dans un grand fracas. Je m'étais levée et le suivait dans le couloir quand il se transforma en loup. La bête avait le poil hérissé et grognait contre tout ce qui bougeait. On aurait dit qu'il était complètement enragé. Il s'arrêta devant un casier dont il arracha la porte pour humer l'intérieur. A peine eu-t-il fini qu'il courut vers la sortie. Je n'avais pas envie qu'il parte, je voulais qu'il reste à mes côtés pour me protéger. Mais au vu de sa réaction j'en déduisis qu'il connaissait le loup qui m'avait mordu, et je le plaignais sincèrement, il allait passer un sale moment ! Je me tournais vers la classe que je venais de quitter. Cléo se tenait dans l'entrebâillement de la porte, le visage toujours aussi triste.
- Tu viens de décrire la louve de Queen... dit-elle tristement. Il va la tuer tu sais.
- Juste par ce qu'elle s'en est prise à moi ? demandai-je surprise.
- Tu comptes beaucoup pour lui. Plus que ce que je n'aurais imaginé.
Je ne répondis rien. Ce qu'elle venait de me dire m'avait troublé. Il allait la tuer. Pour moi. J'aurais dû me sentir mal, il allait commettre un meurtre, c'était une chose horrible, mais Queen, elle n'avait pas hésité un seul instant à foutre ma vie en l'air ! Je sentais la chose en moi jubiler, et pour une fois j'étais bien d'accord avec elle, que Queen aille en enfer.
- Viens Cassiopée, dit Cléo, il faut que nous mettions les choses au clair. Je suppose que tu as des tonnes de question, dit-elle dans un sourire timide. Et tiens va enfiler ça.
Elle me tendit des vêtements que je m'empressais d'aller enfiler dans les toilettes. Je me sentais déjà nettement mieux. Je suivis Cléo à l'extérieur du lycée, l'air frais me fit un bien fou, j'avais l'impression de pouvoir de nouveau respirer après une apnée de presque une heure. Nous nous installâmes dans un petit coin d'herbe face au bois.
- Alors par quoi veux-tu que l'on commence ?
- Eh bien, comment tu as su que je m'étais fait mordre ? demandai-je
- J'ai senti ta louve. Dit-elle simplement.
- Toi aussi tu en es une ? c'est ça ?
- Oui. Si tu n'étais pas en conflit avec la tienne elle te l'aurait dit !
- Tu t'es fait mordre quand ?
- Je ne me suis pas fait mordre Cassiopée, je suis née comme ça.
Je la regardais perplexe. Je ne comprenais pas grand-chose il fallait qu'elle m'explique. Voyant mon désarroi elle reprit la parole.
- Je pense que se sera plus simple si on commence par le commencement tu ne crois pas ?
- Oui ! explique moi tout, j'ai tout mon temps.
- Bon... tu sais que les loups vivent en meute ? commença-t-elle. Et bien les habitants de Glasby sont tous des membres de la meute.
- TOUS ?! ça veut dire quoi ça ?
- Que tes parents et ton frère sont les uniques humains vivants dans cette ville, nous sommes tous des loups garous Cassy.
Je n'en croyais pas mes oreilles. Nous vivions au milieu de ces choses depuis le début ! Ma tête me faisait souffrir, une énorme migraine m'assaillait.
- Comment est-ce possible ? ça n'existe pas pour de vrai Cléo ! dis-je excédée.
- Tu sais de nombreuses choses auxquelles tu n'as jamais cru existent réellement Cassy. Elle s'arrêta songeuse. Comment t'expliquer... si je te disais que les dieux existent ?
- Je te dirais que tu es folle.
- Et pourtant... tu vois il existe diffèrent type de Dieu, leur communauté est composée de plusieurs clans qui occupent chacun une fonction particulière. Le clan le plus puissant de l'époque, les Solas, ont voulu créer des êtres vivants à leur image, ce qui a conduit à la création de la race humaine. Quelques siècles plus tard, un autre clan, celui des Mayor, a voulu lui aussi jouer aux apprentis sorciers. Ils ont décidé de créer une race ressemblant trait pour trait aux Hommes, cependant ils ont voulu leur donner l'une de leur caractéristique. Tout comme eux la nouvelle race à la particularité de pouvoir se transformer en loup et est doté d'une force physique plus importante que les humains.
- Des dieux ? tu y crois sérieusement Cléo ? demandai-je
- Au début pas du tout, avoua-t-elle, quand on me racontait ces légendes je riais au nez des anciens ! mais c'était avant que tout dérape... Une meute est constituée de deux alphas, un mâle et une femelle, de betas, des gammas et généralement d'un oméga.
Oui ça je savais les alphas sont ceux qui dirigeaient la meute, les bêtas, eux, sont les « bras droits » des dominants, les gammas sont le plus gros de la meute, des dominés, et l'oméga lui n'est autre que le souffre-douleur. Je ne comprenais pas ou Cléo voulait en venir.
- Mes parents formaient le couple d'alphas. Ils étaient les dominants, les loups les plus puissants de notre meute. Mon père dirigeait l'ensemble de la ville comme son père avant lui. Mais contrairement à mon grand-père, mon très cher paternel n'était intéressé que par le pouvoir. Il a mis la meute en danger à de très nombreuses reprises, ce qui a coûté la vie à de nombreux loups... y compris celle de mon frère. Alors j'ai pris la décision la plus censée, j'ai défié mon père... Les cicatrices sur mon dos, ce n'est pas à cause d'un chien comme je te l'ai dit... c'est mon propre père qui me les a faite en essayant de me tuer.
J'étais complètement choquée par ce qu'elle venait de m'avouer. Elle avait eu un frère, et son père avait essayé de la tuer ! Je l'observais le visage livide. Je n'osais même pas imaginer ce qu'elle avait dû endurer. Toute la rancune que j'avais envers elle s'était envolée, à cet instant. Je voulais la prendre dans mes bras pour la réconforter. Elle était de loin la fille la plus courageuse que je connaisse.
- Je l'ai tué Cassiopée. J'ai tué mon propre père pour sauver la meute. Il était devenu un tyran et pourtant il n'y a pas un jour qui passe sans que je me maudisse de l'avoir fait. Je l'aimais malgré tout.
Sur ces derniers mots elle fondit en larme. Mon cœur se serra dans ma poitrine, c'était absolument insupportable de la voir ainsi. Je m'approchais d'elle et la serrais aussi fort que je le pouvais dans mes bras. A mon grand étonnement elle se laissa faire. Nous restâmes un long moment ainsi. Ces larmes semblaient avoir cessées de couler, je l'entendais renifler. Elle finit par se redresser repoussant gentiment mon étreinte.
- Tu n'es pas obligée de continuer si tu le souhaite, lui dis-je ayant remarqué qu'elle cherchait de nouveau ses mots.
- Non ça va, il faut que tu saches. Elle se racla la gorge. C'est moi qui avait triomphé face à l'alpha alors en toute logique c'est moi qui devait reprendre le flambeau, mais je ne me sentais pas de taille. Mon père avait laissé un tel désordre derrière lui... alors j'ai cherché quelqu'un de plus apte à sauver la meute mais personne n'a voulu de ce fardeau. J'étais désespérée alors j'ai décidé d'écouter les anciens... j'ai prié les Dieux pour qu'ils nous viennent en aide. Elle ricana. C'est pour te dire à quel stade j'en étais arrivée ! Je leur ai demandé de nous aider, après tout nous sommes l'une des plus grosse meute du monde ! Ce n'est pas rien !
- Et alors ? que s'est-il passé ?
- Sur le moment absolument rien, j'avais l'impression d'être complètement stupide. Mais 3 jours après il est arrivé. Ils nous avaient envoyé l'un des leur pour nous protéger et nous aider à régler tous nos petits soucis jusqu'à ce que je sois apte à prendre la relève.
- Vraiment ? demandai-je perplexe. Et ils-t-on envoyé qui ? superman ?
- Non idiote ! ils nous ont envoyé l'arrière-petit-fils de celle qui nous a créé. Dieu des enfers et de la guerre, j'ai nommé Callypsow Mayor. Dit-elle d'un ton ironique
- ...