Chapitre 45

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Mes iris foncés étaient posés sur Jungkook depuis plusieurs heures. La nuit avait été fortement mouvementée pour nous deux. J'avais habituellement le sommeil très lourd, cependant, Jungkook avait facilement réussi à me tirer des bras de Morphée. À vrai dire, il n'avait cessé de faire des gestes brusques au moindre de mes mouvements.

Au cours de cette nuit-là, je n'avais pu le toucher sans qu'il ne se mette à bouger dans tous les sens, comme s'il se débattait. Le connaissant, mon petit ami aurait souhaité que je le sorte de son sommeil rien que pour ne pas me faire mal, néanmoins, je n'avais pu me résoudre à le faire, alors je me contentais de le contempler, assise aux pieds du lit.

C'était sûrement la crainte qui me poussa à ne pas agir, laissant Jeon s'approprier l'intégralité du matelas tandis que je me contentais du confort de la moquette et que mes avant-bras étaient désagréablement en appui contre le rebord du lit, pourtant, je ne pus lui en vouloir. J'étais forcément celle qui avait éveillé à nouveau ce genre de comportement chez lui, alors je me devais de le supporter sans plainte.

En fait, je pensais même que mon inconfort n'était rien comparé à ce qu'il devait se passer au même moment dans sa tête. Ses nuits à lui devaient sans doute n'être faites que de cauchemars. L'Afghanistan ? La Syrie, peut-être ? Je ne pouvais oser imaginer ce qu'il vivait alors que je le regardais calmement.

À force de voir la sueur rendre ses beaux cheveux noirs humides, j'en vins même à me demander s'il n'était pas sur un champ de mines, dépaysés par le son violent des explosifs pendant que moi, je n'entendais que ce silence apaisant qui nous entourait. Le voir aussi paniqué dans ses propres rêves me fit souffrir. Savoir que tout ça lui était réellement arrivé me fit souffrir. Entendre ces petits bruissements de terreur quitter ses lèvres me fit souffrir.

Dans un sens, nous vivions tout deux notre pire cauchemar, cependant, lorsqu'il se mit à crier je ne pus le supporter. L'aube débutait à peine lorsque je n'eus plus le moindre instinct de suivie, m'empressant de contourner mon lit pour atteindre Jungkook et ce, même si j'étais consciente des risques que j'en courrais.

Sincèrement, je n'avais plus une seule seconde réfléchi à la possibilité que celui que j'aimais puisse me tuer en deux temps trois mouvements. Je ne voulais que le sortir de ce monde en ruine dans lequel il se croyait être et ce fut pour cela que je pris son visage entre mes mains, cependant, Jungkook attrapa fermement mes bras, me projetant contre le matelas et passant au-dessus de moi avec une agressivité qui ne lui ressemblait pas.

- Jung-... Jungkook ! Lâche-...

Ses mains me semblèrent aussi féroces que la mâchoire d'un lion lorsqu'elles se resserrèrent autour de mon cou, néanmoins, cela me fit bien moins mal que de voir ces yeux que j'aimais tant sans la moindre once d'humanité. Il m'étouffait et il était si fort que je ne pus me débattre jusqu'à l'instant où sa prise devint si forte que j'eus l'impression qu'il allait me briser la nuque.

Cette douleur dans ma colonne vertébrale était atroce lorsque je trouvai le courage d'essayer de me sortir d'affaire. Encore quelques minutes et je serais morte aux mains de cet homme que j'aimais plus que tout, néanmoins, il s'arrêta net dès l'instant où le pied en verre de la lampe de chevet que je tenais dans ma main droite entra en contact avec son crâne.

Mes oreilles sifflèrent le temps de ces quelques secondes où je restai en apnée et puis, dès que j'inspirai à nouveau, ma gorge, mes poumons et ma tête me firent souffrir. Tout mon corps souffrait, crispé à la fois par la peur et par la brutalité de mon petit ami, pourtant, le pire vint lorsque je commençai à tousser sans relâche, quelques traces de sang tâchant mes doigts et les draps.

Oui, il m'avait fait mal comme jamais je ne lui en aurais cru capable, cependant, cela ne m'empêcha pas de me tourner, certes difficilement, vers lui, posant aussitôt mon oreille contre son torse pâle afin que les battements de son cœur viennent me rassurer. Un soupir de soulagement passa mes lèvres, puis avec nonchalance, je glissai l'une de mes mains dans ses cheveux, cherchant une possible blessure sans finalement en trouver une.

- Tu as largement mérité la jolie bosse que tu auras au réveil, mon amour, murmurai-je avant de laisser de quelques chastes baisers sur son torse athlétique. Tu as bien failli me tuer... Idiot va...

Pendant plusieurs dizaines minutes, je marmonnai de petits insultes à l'égard de mon cher et tendre amoureux en écoutant attentivement les battements de son cœur et puis, lorsque le soleil se leva, je me mis à piétiner le parquet chaud jusqu'à ma salle de bain. Je pris rapidement une douche froide, puis un petit hoquettement quitta ma gorge lorsque dans le miroir qui se trouvait au-dessus du lavabo, je vis les hématomes qui s'étaient dessinés autour de mon cou.

- Oh le connard... chuchotai-je en touchant faiblement les marques violacées qui encombraient ma peau. Il ne m'a pas loupé.

Étrangement, je me mis à rire en silence, constatant de Jungkook et moi ne formions pas un couple très commun, en fait, nous étions même un peu cocasse selon moi. Notre petit accrochage, au bout de quelques heures, devint pour moi un sujet de rigolade, néanmoins, pour lui, jamais cela n'aurait été quelque chose sur laquelle il était possible de rire, alors ce fut pour cela que je décidai de porter un col roulé en plein été. Je voulais le protéger. Je me disais que moins il verrait les dégâts qu'il avait fait, moins il culpabiliserait.

- Ché... Chérie... Murmura le noiraud en frottant machinalement ses yeux. J'ai mal à la tête.

- Lève-toi maintenant. Tu as assez dormi, mon ange, lâchai-je en enfilant mes chaussures à talons. Il y a de l'ibuprofen et de l'eau pour toi sur la table de chevet. Bois vite et va te doucher. La réunion de famille commence dans dix minutes.

Jungkook grogna en se redressant sur ses coudes, ses yeux d'une douceur absolus se posant sur moi pour me faire instantanément sourire.

- Un col roulé en été, DeLayne ? Vraiment ? Ironisa-t-il avant de se laisser retomber sur le lit afin de s'étirer comme à son habitude. Ton lit est bien plus confortable que le mien. J'ai dormi comme un bébé !

Ce fut à cet instant-là que je compris que Jungkook ne se rappelait pas le moins de monde de ce qu'il m'avait fait un peu plus tôt. Il ne se souvenait pas de cette agressivité avec laquelle il s'en était pris à moi et sans mentir, cela me soulagea. Je m'étais dis qu'au moins l'un de nous aurait la conscience tranquille, mais je ne savais pas encore ce que tout ça impliquait réellement.

𝐌𝐚𝐧𝐢𝐚𝐜 - 𝐉𝐄𝐎𝐍 𝐉𝐔𝐍𝐆𝐊𝐎𝐎𝐊 [𝐭𝐞𝐫𝐦𝐢𝐧𝐞́] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant