Chapitre 2 [nouvelle version]

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Lior Rosenbach

Je descends les escaliers en titubant, une gueule de bois encore tenace et le nez qui me démange. Je le gratte, c'est presque devenu machinal, comme pour vérifier qu'il n'y reste pas de poudre blanche. La soirée de la veille a été difficile et je ne sais même pas comment j'arrive à faire avancer mon cadavre jusqu'à la cuisine. Je me laisse tomber sur une chaise au hasard et regarde la table remplie de nourriture. Je n'ai pas faim et encore moins l'envie d'aller au lycée. Je déteste les débuts de semaine, principalement parce que mes week-ends se résument à des nuits blanches interminables.

— Tu prends quoi, Lior ?

Mona, la gouvernante de la maison, me sort de mon demi-coma. Je la regarde avant de lui donner un semblant de réponse.

— Un grand verre d'eau.

Elle soupire, sachant pertinemment ce que ça signifie

— Nuit difficile ? lance Ethan.

Je me retourne vers mon cousin, assis en face de moi. Ethan est un gars costaud, un beau brun à la tête carrée, à la mâchoire puissante et aux cheveux en brosse. Mon antithèse, en quelque sorte. Je ressemble à un chaton inoffensif en comparaison. Une métaphore assez juste sachant que je me cache derrière lui dès qu'il y a un problème.

Ethan a un an de plus que moi, mais il a redoublé l'année dernière donc on est ensemble au lycée. Je hoche la tête pour répondre à l'affirmative à sa question. Enfin, vu la gueule que je tire, il n'attendait pas spécialement de réponse.

— Tu aurais pu m'inviter, enchaine-t-il.

— J'étais avec Neil.

— Salut les gars ! J'espère que vous avez déjà vos masques pour le week-end prochain ?

Ethan et moi relevons la tête vers la tornade blonde pailletée qui vient de pénétrer dans la pièce. Lili ne marche pas, elle sautille, tout le temps, et c'est totalement insupportable. Elle se jette sur Mona, plante un baiser sur sa joue et s'installe à côté de moi.

— Je persiste à dire que c'est une idée stupide, commente Ethan.

— Ce sont mes seize ans, rétorque-t-elle. Vous êtes obligés de faire ce que je veux.

Ça me gonfle déjà d'entendre parler de cette soirée, parce que ça veut dire un week-end sans coke et avec mes parents. Je me rassure en constatant qu'Ethan tire la même tronche que moi. J'en conclus qu'il n'est pas plus emballé par l'anniversaire de notre cousine. Et puis, une soirée masquée, merci mais on n'a plus dix ans.

— Ça va être drôle, réplique Lili en mordant dans une brioche.

Cette fille respire tellement la joie de vivre que c'en est presque consternant. Je ne sais pas comment elle fait pour être aussi heureuse. Sincèrement, je ne vois pas ce qui peut encore la faire sourire. De nous tous, je crois bien que c'est son côté de la famille qui a le plus souffert du conflit avec les Hamilton.

— « Drôle » si l'on était à un goûter d'anniversaire, Lili.

J'ignore pourquoi je me suis donné la peine de participer à la conversation, mais je l'ai fait et je le regrette déjà. Elle se retourne vers moi en fronçant des sourcils d'un air mauvais. Le contraste est saisissant, les paillettes étalées de ses paupières jusqu'à ses tempes détonnant avec son expression maussade. Je ne sais pas pourquoi elle s'entête à se tartiner ses trucs sur la figure. Au début, elle en mettait juste une fine trace au-dessus des yeux, mais notre lycée de bourgeois a désapprouvé ce look. Donc, en fait, je sais pertinemment pourquoi elle le fait. Elle veut les faire chier. Ce matin, elle arbore des paillettes vert pomme.

LOVERS (Sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant