Chapitre 4 - Anna

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- On y va les filles ? je demande à Maria, Lisa et June qui sont en train de discuter de leur prochaine série Netflix à regarder.
- C'est la pause là, donc on peut rester jusqu'à la fin.
Maria semble déterminée à rester pour bavarder avec ces deux-là. Je ne suis pas vraiment d'humeur à parler séries lorsque dans ma tête je me demande qu'une seule chose : est-ce que je vais chez Jay ou non.
- Si vous voulez rester, ok, mais mon bus vient plus tôt aujourd'hui. J'y vais. À demain les filles.
Je leur fais un signe de la main et m'éloigne, mais j'entends June leur dire :
- Le bus vient plus tôt ? C'est quoi cette excuse ? On sait bien que c'est impossible.
Maria et Lisa semble rire et lui dire de laisser tomber mais je suis trop loin pour entendre leur réponse.
J'envoie un rapide message à Maria pour la prévenir que je dois lui dire quelque chose d'important ce soir, si elle a le temps pour qu'on se téléphone.
Elle ne répond pas tout de suite, j'imagine qu'elle est trop occupée à organiser sa soirée Netflix.
Il faut malgré tout que je la mette au courant pour James, après toutes les questions qu'elle m'a posé sur lui hier soir, je lui dois bien ça. De plus, je lui fais confiance donc je sais qu'elle ne le répétera pas à tout le monde. C'est ma meilleure amie, cela fait déjà quelques années que nous partageons tout, qu'elle se confie à moi et que je fais pareil.

***

Sur le chemin, je regrette de ne pas avoir eu le temps de demander à Jay son numéro de téléphone, je n'ai, en réalité, aucune idée de s'il sera chez lui ou pas. Je me pose beaucoup de questions à son sujet, j'espère simplement qu'il va bien. Je suppose qu'il était sûrement un peu malade s'il n'est pas venu aujourd'hui.
Je n'écoute pas de musique, je préfère sortir mon carnet et un stylo. Écrire. Voilà ce qui me calme lorsque je suis stressée. Je n'écris pas à propos du moment présent, non il ne s'agit pas d'un journal intime. J'écris sur des sujets qui me sont importants ou sur un sujet qui me passe par la tête. Parfois, j'écris à propos de choses du quotidien ou à propos de la vie des personnes que je croise.
Je regarde autour de moi, j'aperçois une femme au fond du bus qui a l'air préoccupée. Alors je me mets à m'imaginer sa vie et j'écris. Je m'imagine ce qu'elle a fait avant de monter dans ce bus, sa destination et ce qu'elle fait dans la vie, combien d'enfants elle peut avoir ou non, si elle a un mari, une femme. Les idées me viennent spontané    ment et j'écris tout simplement. Mon stylo suit la trajectoire de mon poignet et la feuille est d'un coup remplie d'encre noire.
J'aime inventer des histoires, j'aime penser que la vie des autres peut être meilleure que la mienne ou bien pire, peut-être même que cette femme est malheureuse, ou bien elle peut également être tout à fait heureuse et bien dans sa peau.
Ce que j'aime dans cet exercice c'est qu'il nous permet de laisser libre cours à notre imagination jusqu'à l'épuisement, une chose peut en découler d'une autre et ainsi de suite. La clé est qu'il ne faut jamais s'arrêter et ne jamais penser à autre chose que le présent, à ce qu'on écrit.

Je remarque quand même que l'on arrive à ma destination, je range alors mon carnet dans mon sac et fourre mon stylo dans ma poche, et en sors le papier de Jay par la même occasion.
Je tourne au bout de la rue à droite, comme indiqué et je tombe sur une magnifique bâtisse haute d'au moins deux étages. L'avant de la maison est splendide, les arbres surplombent la maison sur la gauche et un chemin de petits cailloux mène jusqu'à la porte d'entrée. Je vois tout de même le bouton de la sonnette avant de pénétrer dans la propriété et j'appuie. J'attends.
La porte d'entrée s'ouvre au loin, lentement, et je vois James qui met seulement le haut de son corps au dehors de la porte.

- Entre, crie-t-il du pas de la porte.
- Salut !
Je me dirige vers lui et il me laisse entrer. Je sens instantanément la chaleur de la maison me réchauffer. Je veux prendre mon sac pour sortir juste ce qu'il faut avant de m'en aller, mais Jay m'arrête.
- Non, attends enlève ta veste.
Surprise, je me laisse porter et enlève ma veste.
- Tu vas bien ? je demande pour m'en assurer.
- Oui, ça va aller... il me répond plutôt évasif.
- D'accord.
Je n'en suis pas convaincue, mais je préfère ne pas le bousculer avec trop de questions d'un coup. Après tout, il ne me doit rien, il s'agit de sa vie privée, il n'est pas obligé de me dire quoi que ce soit.
Je sors alors une pochette avec ce que j'ai pris pour lui.
- Merci beaucoup, c'est vraiment gentil d'être venue.
- C'est normal ! Si ma mère savait elle aurait limite exigée que je sois connectée à FaceTime pendant les cours pour que tu ne loupes rien ! je rigole en pensant détendre son sourire crispé.
Il me regarde d'un air éberlué, je crois que ce n'était peut-être pas une bonne idée, les blagues.
- Bon, merci en tout cas.
- Je t'en prie.
Il prend la pochette et en regarde le contenu.
- Est-ce que je peux te demander te partir... Je suis vraiment fatigué, je regarderai ça plus tard, merci encore Anna.
Quand on m'appelle par mon prénom, ça n'augure rien de bon. Enfin je dis ça, mais je viens de le décréter. Pour la simple raison que putain il me met dehors ! J'en reviens pas, il me demande de venir chez lui et il me met à la porte au bout de même pas cinq minutes ! J'hallucine.
Je suis tellement abasourdie par sa soudaine demande que je prends ma veste et mon sac par pur réflexe.
- Euh... Ouais, pas de problème, je te laisse.
Il m'accompagne jusqu'à la porte, ce qui veut dire qu'il fait à peine quatre pas jusqu'à elle.
- A demain Jay, passe une bonne soirée, je tente en sortant sur le perron.

On n'oublie pas [Publié en auto-édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant