Chapitre 2 - Un vent nouveau

20 1 0
                                    


A la lumière des torches du village, les écailles de Canaan brillaient d'un éclat encore plus intense. Elles semblaient constellées de paillettes irisées, donnant cet aspect de métal précieux à la naga. Il l'interrogea :
- Que faisais-tu dans la forêt alors que le soleil est couché ? Il y a des loups dans ces bois, il faut faire attention.
- Je ... j'ai vendu toutes mes plantes aujourd'hui, je cherchais à en cueillir de nouvelles pour demain, répondit-elle embarrassée.
- C'est donc toi la "magicienne" dont ils m'ont parlé ! Les membres de mon clan n'ont plus vu d'alchimiste depuis si longtemps que même nos anciens n'étaient encore que des œufs en ce temps ! Dit-il en riant.
Une magicienne ? Mais Anaëlle n'était pas une magicienne ! Elle comprenait maintenant mieux comment les nagas pouvaient passer à côté d'autant de richesses, pourtant juste sous leur nez. Ils n'avaient simplement pas les connaissances nécessaires pour s'en rendre compte. Elle retourna enfin en sécurité dans la tente qu'elle partageait avec son employeur et mit de nombreuses heures à s'endormir, compte-tenu de la journée mouvementée qu'elle venait de passer.

Elle se réveilla aux aurores, avant même le chant des premiers oiseaux. Elle n'avait pas dormi bien profondément, et les ronflements des marchands des tentes alentours n'avaient pas aidé. Mais cela n'était pas un problème car elle avait trouvé, la veille au soir, des plantes aux vertus excitantes, parfaites pour compenser une mauvaise nuit de sommeil. De plus, se lever si tôt lui donnerait l'occasion de transformer une partie de sa récolte en décoctions et baumes qui seraient bien plus efficaces que des plantes non préparées.

Alors qu'elle écossait avec attention une plante à petites fleurs rouges, un visage familier se présenta devant elle. Sans qu'elle ne contrôle sa voix et ses mots, elle lui jeta un joyeux :
- Oh, Canaan c'est toi !
Elle porta ses mains à sa bouche, gênée d'avoir employé un ton si familier avec lui.
- Et toi, tu ne m'as toujours pas dit ton prénom, répondit-il en souriant de façon bienveillante.
- Je m'appelle Anaëlle. Je suis désolée pour hier ; d'avoir été si froide, lui déclara-t-elle en baissant les yeux d'un air contrit.
- Il n'y a pas de quoi, vraiment, dit-il en se penchant vers elle. Alors ce sont là les plantes que tu as trouvées hier, elle étaient toutes aussi proches du village ? s'étonna-t-il.
- Oui, vos bois sont d'une richesse incroyable !
Le serpent se redressa l'air pensif. Il souhaita une bonne journée à Anaëlle et retourna à ses occupations de chef.

Les nagas dorées, et en particulier celle du clan de Ssriatéth, étaient des individus qui partageaient la plupart de leurs possessions. Chaque bâtiment, contrairement aux apparences n'était pas une habitation mais un lieu dédié à une activité ou une fonction. Une infirmerie, un séchoir à viande, un grenier pour les cueillettes et bien d'autres. Les nagas vivaient toutes ensembles dans le grand bâtiment de pierre au centre du village. Leur absence de fourrure et leur incapacité à se vêtir les forçaient à dormir toutes agglutinées les unes aux autres pour supporter le froid de la nuit. La journée, ces créatures au sang chaud supportaient la fraîcheur de l'air grâce au fait de s'activer à leurs tâches quotidiennes.

Les serpents de Ssriatéth n'avaient en réalité qu'un seul type de possessions qui leur était propre, les bijoux. Ceci expliquait largement le succès du stand d'Anaëlle et du bijoutier. Les nagas accordaient une grande importance à ces accessoires, sans vraiment qu'eux même n'aient d'explication. Ils trouvaient simplement cela beau, et d'une certaine façon intime et personnel. C'était leur façon d'exprimer leur individualité, mais aussi leur appartenance au groupe. Tous les membres du clan, en effet, avait un anneau d'argent. Le porter n'était pas une obligation, mais tous en possédaient un qu'on pouvait voir parfois à une corne si elle était assez longue pour cela, sinon à un doigt, un poignet ou encore sur la pointe de la queue.

Un autre signe d'appartenance était les bijoux que les couples partageaient. Les nagas dorées formaient des couples monogames pour la vie. Lorsqu'ils décidaient de s'unir à jamais, ils symbolisaient cela, auprès des autres membres du clan, par l'échange d'un bijou identique pour les deux membres du couple. Cela pouvait être n'importe quoi, tant que c'était le même pour les deux serpents, qu'il s'agisse d'un bracelet en or massif finement ouvragé et orné de joyaux ou d'un simple pendentif de bois sur une cordelette. Pour les nagas il ne s'agissait pas d'un mariage mais d'une union. La notion de mariage impliquait généralement pour les autres espèces la notion de fidélité, ce que les nagas ne comprenaient pas, étant libertines et pansexuelles.

L'or de SsriatéthOù les histoires vivent. Découvrez maintenant