— si tu roules avec ça je te connais plus, s'insurge deen à ma droite.
je souris malgré moi devant la ford ka verte pomme. c'est vrai que c'est de loin la voiture la plus claquée que je n'ai jamais vue.
mais le garagiste me la fait à très bon prix. il me reste un petit peu de cash de la vieille que j'ai tenté de mettre de côté, mais si je peux ne pas tout dépenser pourquoi pas...
— on peut faire un tour ? je demande en prenant déjà place.
— bien sûr, voilà les clés. répond le poivre et sel en tendant le jeu métallique au papi.
deen secoue la tête et monte à son tour.
— t'es sérieuse kamiya ?
— mets ta ceinture, dis-je en démarrant.
ll me faut un temps avant de m'habituer à l'embrayage étonnamment haut, puis nous partons.
— même la r19 était mieux wesh, t'es dans l'abus.
— t'as déjà vu une bagnole à 600 balles deen ?
— nan, parce que j'ai jamais vu de bagnole aussi cheum que ça, téma l'odeur en plus, ça pue !
— j'achèterai un sapin.
il soupire et je passe la troisième.
j'ai pas conduit depuis des millénaires à part la fois avec ken et doum's. j'ai l'impression d'avoir à nouveau vingt ans, j'adore cette sensation.
— je mets mon véto.
— oh, t'es con je souffle doucement, c'est qu'une voiture.
— même wesh, qui va te prendre au sérieux avec ça ? déjà que t'es une meuf, t'es pas trop trop cheum, et en plus t'as une caisse comme ça ? mais toi on va pas te rater sur la route.
— j'emmerde vos idées machistes, moi. et puis je t'ai pas emmené pour t'entendre piailler dans mon oreille. tu vérifies sous le capot et toutes ces conneries et si c'est ok, je la prends !
il lève les yeux au ciel mais ne rétorque rien.
c'est triste à dire mais en tant que fille j'ai pas forcément cherché à chasser les idées reçues sur nos compétences en mécanique. j'ai d'autres chats à fouetter, disons. on s'arrête sur un parking public et désert et on échange de place. deen teste l'embrayage, le moteur, les niveaux et j'en passe, je le regarde faire en posant des questions parfois inutiles.
— elle m'a l'air pas mal... conclut-il en fermant le capot. j'ai pas trouvé de vice.
— super.
— t'es vraiment sûre de toi ? je pourrais plus t'adresser la parole en public, il faut que tu en aies conscience.
je rigole et on reprend la route.
— c'est temporaire, j'ai besoin d'aller d'un point a à un point b. excusez-moi de ne pas choisir de merco les frères !
il ne répond pas.
— et puis... je kiffe sa couleur, moi. j'ajoute, ravie.
— très bien madame.
mon téléphone que j'ai posé dans le vide poche sonne et annonce un message, puis un autre, et un autre. intriguée, je jette un coup d'oeil furtif à l'écran. j'ai l'impression que c'est ken.
dans la précipitation, j'attrape le cellulaire pour le verrouiller avant que deen ne capte.
— wesh, attention !
