Aurora T1 : Les Perles de Vie / Watty 2020

Chapitre 24 - La prophétie des Imlayas (Partie 1)

Flore se plaça au centre de la salle carrée du Conseil, où les Imlayas s'alignaient le long de trois murs, et fixa l'estrade en bois, accolée au quatrième, sur laquelle trônait le siège de la gardienne. Il resterait vide durant son jugement. La douleur étreignit son cœur : elle, qui avait compté sur l'ouverture d'esprit de Lorina, faisait face à un Tsioli conservateur.

Je dois parvenir à les convaincre, s'intima-t-elle, les poings serrés.

D'instinct, la princesse chercha du réconfort auprès de ses amis, debout au premier rang. Mais ils évitèrent son regard, la rejetant dans sa solitude. Elle refusa néanmoins de céder au désespoir et redressa la tête lorsque les maîtres entrèrent en file indienne, puis se positionnèrent devant elle, au pied de l'estrade.

La voix de ténor de Tsioli brisa le silence solennel :

— Kiriahni, Lorina t'avait prévenu : la vie chez les Imlayas vous est interdite. Tu as abusé de notre confiance, nous as menti, ainsi qu'à tes amis. La sentence t'est connue. Demain, ta mémoire de ton séjour parmi nous sera effacée et nous te ramènerons à la clairière. D'où tu devras rentrer dans ton doryaum sans aide.

— J'ai réussi mon épreuve, je suis une des vôtres ! scanda-t-elle. À ce titre, je vous demande de m'écouter avant de prendre une décision radicale.

— Tu te trompes, arrogante kiriahni ! Le Conseil n'a pas encore validé les résultats des novices. Tu n'es donc pas une des nôtres, et ne le seras jamais !

Plusieurs Imlayas approuvèrent bruyamment tandis que Flore se mordait la langue. Elle avait manqué de tact ; même si entre elle et Tsioli, elle doutait sur la personne la plus orgueilleuse. Ses yeux croisèrent ceux d'Akeno, à la droite du maître des sports, et elle s'étonna d'y lire un reproche. Pour son attitude ? Ou pour lui avoir caché sa véritable identité ? Difficile à déterminer.

Je dois parvenir à les convaincre, se répéta-t-elle.

L'avenir des Auroréens en dépendait. Sa vie aussi. Les guérisseurs de la tribu avaient peut-être découvert un moyen d'effacer en partie la mémoire avec une plante, inconnue aux kiriahnis, mais leur absence d'expérience avec les capacités psychiques ne lui disait rien qu'y vaille.

La princesse posa un genou au sol et, tête baissée en signe de soumission, elle supplia :

— Ne voulez-vous pas savoir pourquoi je vis parmi vous ?

— Pour nous tuer comme la prophétie le prédit ! s'écria quelqu'un dans l'assemblée.

— Pourquoi aurais-je sauvé le novice, Yeldo, et le maître d'armes, Akeno ? Pourquoi aurais-je sauvé les Imlayas lors de la tempête sur le lac, en l'arrêtant avec mes pouvoirs ? Si je souhaitais exterminer la tribu, il me suffisait de retourner chez les miens dès la découverte de votre village.

Des murmures parcoururent l'assistance, atterrée par sa révélation sur son rôle pendant l'orage. Certains clamaient le mensonge, d'autres hésitaient. Avant que Tsioli puisse s'exprimer, la voix de Linlin s'éleva :

— Je crois la kiriahni. Elle était avec moi sur le lac, et j'ai vécu le sauvetage à la frontière des montagnes infernales. Quel danger y a-t-il à l'écouter ?

Les yeux convergèrent vers le tourbillon, qui sortit des rangs et s'approcha de la princesse, un sourire sur ses lèvres.

— La tribu prône la justice, poursuivit-elle. Si je ne savais quoi penser quand l'identité de Flore a été dévoilée, son aveu vient de me persuader. Non seulement elle n'a fait de mal à personne, mais elle a même apporté des changements bénéfiques. Je vous supplie de lui donner la parole.